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Constantine, le 1er août 2001

Mesdames et Messieurs, chères concitoyennes, chers concitoyens,

Nous célébrons aujourd'hui le premier 1er août du 21e siècle et les événements que nous commémorons se sont passés il y a bien longtemps, à la fin du 13e siècle. Ce n'est qu'à la fin du 19e siècle que la commémoration du serment du Grütli a été instituée en fête nationale suisse.

La Confédération suisse venait de se doter d'une constitution moderne en 1874, qui remplaçait la première constitution de 1848. Le Canton de Vaud avait procédé au même exercice en 1885 en promouvant sa cinquième constitution depuis 1803: il s'agissait alors de renforcer le sentiment national dans une Europe où le nationalisme était la règle, car l'état-nation est une invention du 19e siècle, qui régit aujourd'hui encore l'essentiel des relations internationales.

Le bilan que nous pouvons tirer du 20e siècle est terriblement contrasté: que de progrès dans tous les domaines, dans la science comme dans la guerre.

Pensons par exemple aux transports. Au début du 20e siècle le train avait 25 ans dans notre région. C'était déjà un progrès formidable: il amenait quelques centaines de voyageurs chaque jour dans notre région. Aujourd'hui ce sont plusieurs milliers de personnes qui traversent le district en vitesse grâce à l'autoroute pour aller très loin, très vite.

Le Canton de Vaud a eu cinq constitutions au 19e siècle. Zéro au 20e.

Mais souvenez-vous: en 1996 le Canton traversait une crise politique et gouvernementale grave pour certains, plus légère pour d'autres, difficile de l'avis de quasiment tout le monde. L'idée d'une révision complète de la Constitution s'est alors fait jour comme l'une des solutions pour sortir de manière constructive de ce mauvais pas. Les Vaudoises et les Vaudois ont choisi de procéder à une révision populaire et non pas une révision d'experts.

Élus en février 1999, les constituants ont oeuvré dans cette ligne. L'Assemblée constituante a su se démarquer des modes de fonctionnement connus dans notre canton. Le dialogue ouvert entre les constituants de différents horizons politiques, de gauche comme de droite, a été nourri et constant. La prise en considération d'un canton qui doit impérativement évoluer au cours des prochaines années, la volonté de le moderniser sans forcément céder aux modes, un travail approfondi, des débats disciplinés, et surtout une écoute attentive sont les principales caractéristiques du travail constructif de la Constituante. Tout cela n'est pas le lot usuel d'un parlement. 

L'été dernier déjà, le travail des six commissions thématiques avait été noté comme une bonne surprise sur le plan de la qualité. On peut ajouter maintenant qu'une année de travaux en assemblée plénière a permis d'élaborer un avant-projet dont le contenu a agréablement surpris au fil des séances:

voilà quelques exemples de nouveautés qui doivent marquer l'entrée des Vaudois dans le 21e siècle en les plaçant à la pointe des cantons suisses sur de nombreux plans.

J'aimerais m'arrêter sur un sujet qui me tient à cœur et qui vous concerne tous il me semble: C'est le problème de l'organisation territoriale et de la place que l'on entend accorder aux communes.

Il y a deux manières de considérer les communes: l'une c'est de les considérer comme des unités administratives de l'État, chargée d'offrir à leurs administrés les services de proximité. C'est la solution qu'a choisie très clairement l'Allemagne, pays qui dans les 40 années qui ont suivi la Second Guerre Mondiale a vu le nombre de ses communes diminuer drastiquement:  il y avait plus de trente mille communes à la fin de la guerre et environ 6000 au moment de la réunification, Pour être viable, une commune allemande doit compter au moins 30 à 50 mille habitants. C'est cette conception que promeut l'Europe quand elle parle du principe de la subsidiarité. Elle est celle du groupe "A propos" qui proposait un Canton de Vaud à cinquante communes.

L'autre commune, c'est celle qui est le fondement de notre société politique et qui permet au citoyen de participer très concrètement à la vie de la société. Elle est plus proche de nos habitudes et correspond à ce que nous vivons. Pourtant il faut admettre alors une grande diversité entre les communes: il y a de grandes communes et il y a de petites communes. Les grandes communes se retrouvent dans les zones urbaines, les petites communes correspondent à des localités isolées. 

Dans notre district, avec 13 communes qui correspondent aux localités de la région, nous avons une situation équilibrée qui ne se modifiera pas avec la fusion de Champmartin et de Cudrefin à la fin de l'année! Mais à Lausanne, la situation est toute autre et la Constituante a prévu la possibilité de créer une agglomération qui, pour répondre aux besoins actuels, devrait aller de Saint-Sulpice à Lutry.

Certes les temps changent et les communes sont appelée à collaborer de plus en plus. Elles n'ont pas attendu pour le faire et j'ai une petite fierté à avoir participé à la création de l'AESA, qui a montré dans le domaine de l'école ce que l'on pouvait faire au niveau du district. Mais dans notre région, la collaboration entre les communes ne peut pas s'arrêter aux frontières cantonales et l'adduction d'eau est un bon exemple de collaboration broyarde.

Ce qu'il y a de positif dans les petites communes, c'est qu'elles sont des écoles de civisme, car chacun est partie prenante, tous les citoyens peuvent participer et participent non seulement à la vie de la commune, mais également aux décisions qui sont prises et qui les concernent directement.

Dans les grandes communes, et dans les communes urbaines plus particulièrement, la participation n'est pas aussi facile et beaucoup de gens reste en dehors.

Pour illustrer cet aspect du civisme, permettez-moi d'évoquer ce que l'on pourrait considérer comme une fable, mais qui est épisode bien réel.

A l'instigation du Préfet d'Avenches, les communes du district ont harmonisé leur règlement de police en y introduisant une heure de rentrée uniforme pour les enfants — 22 heures, je crois — dans toutes les communes. Cette modification a été avalisées par les Conseils généraux et communaux.

Les média en ont rendu compte et ont parlé d'instauration d'un couvre-feu. Ils oubliaient deux choses:

Le règlement communal de police est une forme très concrète de civisme, principalement dans la manière dont il est accepté et appliqué par les citoyens de la commune, les parents veillant à ce que leurs enfants rentrent à temps ou soient accompagnés.

En France, un certain nombre de communes urbaines ont introduit cet été des dispositions semblables pour les enfants de moins de treize ans. Elles ont dû le faire sous forme de couvre-feu, car c'est la police qui l'applique, pas les parents, ni bien sûr d'autres adultes qui pourraient rencontrer des enfants au milieu de la nuit.

Je préfère le civisme à la Suisse à l'ordre public à la française.

Pour terminer, je voudrais vous remercier de m'avoir invité et vous rappeler que le projet de constitution est en consultation jusqu'au 15 septembre. Ensemble, nous forgeons notre avenir pour le 21e siècle. Notre contribution sera certes modeste dans un monde en pleine expansion, mais elle sera importante pour nous, car elle nous concerne directement en tant que citoyen de ce pays.

En avant pour le 21e siècle.

Dominique Renaud
Constituant, Avenches

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