Rapport UCV sur projet de nouvelle ConstitutionNicole Grin |
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Le 22 septembre prochain, les Vaudois se prononceront sur le projet de nouvelle Constitution élaboré par l'Assemblée constituante. Il s'agit d'un document complet que les citoyens devront accepter ou rejeter en bloc, une acceptation partielle étant exclue. C'est donc à une pesée d'intérêts que devront se livrer les électeurs, qui au terme d'une évaluation globale et en fonction de leurs propres convictions, détermineront si, finalement, ce projet leur convient ou si, au contraire, il doit être rejeté.
Respectueux des convictions politiques et personnelles de chacun, le comité de l'UCV a décidé de ne pas prendre position sur l'ensemble du projet. Il n'émettra donc aucune recommandation de vote. Toutefois, il a chargé la soussignée d'établir un rapport sur les dispositions qui concernent les communes, afin que, dans ce domaine, les autorités municipales soient informées du détail des propositions de l'Assemblée constituante.
Dans la Constitution actuellement en vigueur, les dispositions qui concernent les communes se situent aux articles suivants, dont la portée est brièvement résumée ci-après (pour le détail se référer au texte original, RSV, 1, 1).
Art. 21 et 80 | Existence des communes garantie, ainsi que celle des cercles et des districts. Lausanne reconnue chef-lieu du canton. Principe de la subordination des communes à l'Etat et de leur indépendance dans les limites de cette subordination. |
Art. 65 | Le conseil d'Etat est autorité suprême de surveillance sur les communes, qu'il peut mettre sous régie. Cet article définit notamment la procédure de mise sous régie des communes. |
Art. 81 - 82 | Compétences financières (gestion des biens communaux pour financer les dépenses imposées par la loi, possibilité de prélever des impôts). |
Art. 84 | Surveillance de l'Etat sur les communes en matière d'emprunts, d'acquisitions et d'aliénation d'immeubles. |
Art. 85 - 88 | Organisation et mode d'élection des autorités délibératives (conseil général ou communal) et exécutives (municipalité) des communes. |
Art. 89 | Compétences des conseils généraux et communaux : décisions sur les dépenses ordinaires et extraordinaires des communes, contrôle de la gestion et des comptes, octroi de la bourgeoisie. |
Art. 90 | Principe et conditions du référendum communal. |
Art. 91 | Conditions de participation aux votes des membres des municipalités à conseil général ou communal élu selon le système majoritaire. |
Art. 92 | Compétences des municipalités : police locale, administration des biens de la commune et de la caisse des pauvres, ainsi que toutes attributions supplémentaires conférées par la loi .... |
Art. 93 | Pouvoir spécifique du syndic. |
Art. 94 | "La loi règle ce qui concerne l'assistance des pauvres et l'éducation des enfants malheureux et abandonnés". Cet article à la formulation obsolète constitue la base de la loi sur la prévoyance et l'aide sociales et de la loi sur la protection de la jeunesse, d'où découlent des charges et des tâches importantes pour les communes. |
Enfin, il convient de citer l'article 17 : "L'Etat et les communes ont l'obligation de donner aux établissements d'instruction publique le degré de perfection dont ils sont susceptibles, eu égard aux besoins et aux ressources du pays ....".
Après avoir posé, au premier article et aux articles 39 - 41 les principes de l'existence des communes, de la mission de service public, de la diligence dans l'action et du devoir d'information à la population (transparence), la Constitution énumère les tâches et responsabilités qu'elles exercent, en collaboration avec l'Etat, dans les domaines tels que l'ordre public, la sécurité des personnes et des biens, l'enseignement public, la protection de l'environnement, la politique culturelle, l'aménagement du territoire, l'encouragement aux économies d'énergies, les transports publics, la protection et l'aide sociale, l'accueil préscolaire et parascolaire, les soins à domicile, le logement, l'intégration des étrangers et le soutien à des organismes d'intérêt régional. Ces domaines d'intervention font l'objet du Titre III "Tâches et responsabilités de l'Etat et des communes".
A ceux qui pensent que ces tâches vont entraîner des dépenses considérables, il faut signaler que l'article 161 stipule que "toute dépense doit reposer sur une base légale" et que le deuxième alinéa de l'art. 163 précise que "avant de présenter tout projet de loi ou décret entraînant des charges nouvelles, le Conseil d'Etat s'assure de leur financement et propose, le cas échéant, les mesures fiscales ou compensatoires nécessaires".
Précédemment, à l'art. 138, la Constitution affirme que : "Outre les tâches propres qu'elles accomplissent volontairement, les communes assument les tâches que la Constitution ou la loi leur attribuent". Ainsi, les modalités d'accomplissement de ces tâches assumées, en collaboration par l'Etat et les communes, telles qu'énumérées dans le Titre III, seront-elles définies dans les lois spécifiques, qui devront également déterminer leur financement.
La concrétisation de ces mesures est donc laissée au législateur, ce qui constitue, non seulement, une garantie démocratique, mais aussi un certain garde-fou.
Ce chapitre est le plus important pour les communes. De l'art. 137 à l'art. 157, il ancre dans la Constitution un certain nombre de principes fondamentaux tels que:
personnalité juridique des communes
garantie de leur existence et de leur territoire
principaux domaines d'autonomie:
gestion du domaine public et du patrimoine communal, administration de la commune, fixation, prélèvement et affectation des taxes et impôts communaux, aménagement local du territoire, ordre public, relations intercommunales.
Le principe de la surveillance de l'Etat est inscrit à l'art. 140, tout comme celui de la délégation de tâches par
l'Etat (art. 138).
Les articles 141 à 150 sont consacrés à l'organisation politique des communes, aux modalités d'élection et
aux compétences des corps délibérants (conseil communal ou général) et des municipalités.
L'art. 143 évoque les incompatibilités, notamment celle qui interdit d'être à la fois membre de l'autorité délibérante et de l'autorité exécutive d'une commune, ce que précise encore l'article 145 concernant la composition du Conseil général : "Tous les membres du corps électoral peuvent faire partie du Conseil général, sauf les membres de la municipalité".
A noter, dans les communes à Conseil communal, l'introduction du droit d'initiative, en plus du droit de référendum (art. 147). Il convient de préciser que ces droits n'ont pas à être prévus pour les communes à Conseil général, puisqu'ils existent de fait : toute personne peut, par voie de motion, s'opposer à un projet ou en proposer un.
L'article 151 précise que "l'Etat encourage et favorise les fusions de communes, que la loi prévoit les mesures incitatives et financières à cet effet, que le processus de fusion est facilité, l'Etat ne percevant aucune taxe ou émolument à ce titre. Enfin, l'Etat ne peut imposer la fusion; le consentement des corps électoraux de toutes les communes concernées étant nécessaire.
L'article 152 introduit, à des conditions que la loi devra préciser, le droit d'initiative communal en matière de fusion de communes.
Il faut signaler qu'en ce qui concerne les fusions de communes, le Conseil d'Etat souhaite aller de l'avant, dans le sens des dispositions prévues aux articles précités, quel que soit le sort global réservé au projet de nouvelle Constitution le 22 septembre prochain.
En plus des diverses formes de collaboration intercommunale déjà définies dans la loi sur les communes, et que le projet de nouvelle Constitution n'exclut pas, un nouvel outil est proposé, celui de la fédération de communes (art. 156). Celle-ci est une possibilité supplémentaire offerte, mais elle n'est ni obligatoire ni exclusive.
La nouveauté offerte par la fédération de communes est qu'elle est dotée d'une autorité délibérante, élue par les législatifs des communes membres et d'une autorité exécutive, elle-même élue par l'autorité délibérante précitée. La fédération gère les tâches que les communes lui délèguent; elle est financée par les contributions des communes membres.
Enfin, à l'article 157, la Constitution prévoit la possibilité, pour des communes urbaines contiguës et groupées autour d'une commune centre de former une agglomération. Une loi spécifique devra définir l'organisation, le financement et les structures de l'agglomération, qui devraient être semblables à celles qui régiront les fédérations.
Là encore, le législateur bénéficiera de toute la marge de manœuvre nécessaire. On le sait une loi sur les agglomérations est quasi-prête. Elaborée il y a déjà quelques années, elle a été mise en veilleuse, en attendant de connaître les dispositions de la nouvelle Constitution et le sort réservé à cette dernière.
La Constitution prévoit une diminution du nombre de districts ( 8 à 12 ) et donne un délai de dix ans au Conseil d'Etat, à partir de son entrée en vigueur, pour définir le découpage territorial et administratif du canton, en tenant compte des besoins de la population et des facilités de communication.
A dessein, l'Assemblée constituante n'a pas voulu être plus précise, ni sur le nombre de districts, ni sur leur découpage : en effet, il lui a paru que, pour un objet aussi sensible, il importait de se donner le temps de la réflexion (10 ans) et d'associer les représentants de tous les milieux concernés à ce travail d'envergure.
En plus, l'article 160 dispose que "par décision de son corps électoral, toute commune peut demander son rattachement à un autre district si elle en est limitrophe".
A l'article 167, il est spécifié que : "L'Etat et les communes perçoivent les contributions prévues par la loi, soit :
a / des impôts pour l'exécution de leurs tâches
b / des taxes et des émoluments liés à des prestations
c / des taxes d'incitation dont le produit est intégralement redistribué".
Enfin, l'article 168 pose les bases constitutionnelles de la péréquation financière intercommunale.
Comme on le voit, le projet de nouvelle Constitution confie, certes, un certain nombre de tâches aux communes. Mais il leur reconnaît aussi des compétences propres, qui les renforcent et les vivifient.
A l'évidence, les constituants ont voulu ancrer, dans la charte cantonale, le principe de communes fortes, responsables et vivantes.
Pully, juillet 2002/GN/mm
Rapport UCV sur projet de nouvelle Constitution