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N° et Date de la Séance N° 33 du 16 novembre 2001 Lieu Aula du Palais de Rumine Présidence de Monsieur Jean-François Leuba Vote de présence du matin Le résultat n'est pas inscrit dans le bulletin Vote de présence de l'après-midi 159
Déroulement des débats
Décisions prises .......................................................................................2
Accueil et communication d’ordre général ........................................................8
Rapport de vérification des titres d’éligibilité et assermentation des nouveaux constituants ........................................................................................................................8
Mise en discussion des articles de l’avant-projet................................................9
Titre I «Dispositions générales» ........................................................................9
Article 6 – Buts et principes .............................................................................9
Article 7 – Principes juridiques fondamentaux ................................................ 15
Titre II «Droits fondamentaux»....................................................................... 15
Articles 27 à 30 (suite et fin de la discussion engagée le 9 novembre 2001) .... 15
Article 31 – Droit de pétition.......................................................................... 28
Article 32 – Libertés politiques ...................................................................... 31
Article 33 – Naturalisation et droit de cité ...................................................... 31
Article 34 – Minimum vital et logement d’urgence et
Article 35 – Protection de la santé et de la dignité ........................................... 35
Article 36 - Maternité..................................................................................... 39
Article 9 – Dignité humaine ............................................................................ 44
Article 37 – Éducation et enseignement........................................................... 45
Article 38 – Aide à la formation initiale............................................................ 60
Article 39 – Aide aux victimes ........................................................................ 63
Article 40 – Champ d’application des droits fondamentaux.............................. 64
Article 41 – Restriction des droits fondamentaux ............................................. 76
Titre III Tâches et responsabilité de l’État et des communes............................. 77Les décisions prises lors de la séance figurent dans le détail à la page suivante.
Décisions prises
Article 6 – Buts et principes
Motion d'ordre Desarzens visant à revenir sur l'article 6. Sur 153 votes exprimés, la motion est rejetés par 82 voix contre 65, avec 6 abstentions.
Proposition de la commission de rédaction sur la formulation épicène ("chacune et chacun"). Sur 155 votes exprimés, la proposition est rejetée par 74 voix contre 73, avec 8 abstentions.
La variante 2 est préférée à la vari ante 1 par 77 voix contre 72, avec 4 abstentions, sur 153 votes exprimés.Article 6 – Buts et principes: adopté par 134 voix contre 7, avec 13 abstentions.
1 L'État a pour buts:
a) le bien commun et la cohésion cantonale;
b) l'intégration harmonieuse de chacun au corps social;
c) la préservation des bases physiques de la vie et la conservation durable des ressources naturelles;
d) la sauvegarde des intérêts des générations futures.
2 Dans ses activités, l'État:
a) protège la dignité, les droits et les libertés des personnes;
b) garantit l'ordre public;
c) fait prévaloir la justice et la paix, et soutient les efforts de prévention des conflits;
d) reconnaît les familles comme éléments de base de la société.
e) veille à une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des autorités.Article 7 – Principes juridiques fondamentaux
Article 7 – Principes juridiques fondamentaux: sur 150 suffrages exprimés, adopté par 149 voix sans opposition, avec 1 abstention.
1 Le droit est le fondement et la limite de l'activité étatique.
2 Cette activité est exempte d'arbitraire, répond à un intérêt public et est proportionnée au but visé. Elle s'exerce conformément aux règles de la bonne foi et de manière transparente.
3 Toute activité étatique respecte le droit supérieur.Articles 27 à 30 (suite et fin de la discussion engagée le 9 novembre 2001)
Article 29, formulation épicène, "toute personne impliquée dans une procédure pénale a le droit d'être défendue si cela est nécessaire". 154 suffrages exprimés, proposition acceptée par 105 voix contre 47, avec 2 abstentions.
Article 30, dernier alinéa, opposition version à version Dépraz. Sur 158 suffrages exprimés, la version Dépraz est choisie par 102 voix contre 54, avec 2 abstentions.
L'amendement Bühlmann Kulling opposé à l'amendement Conod. Sur 158 suffrages exprimés, l'amendement Conod l'emporte, par 74 voix contre 63, avec 21 abstentions.
L'amendement Conod opposé au texte des articles 27 à 30. Sur 158 suffrages exprimés, vous avez accepté l'amendement Conod l’emporte par 80 contre 74, avec 4 abstentions.
Contre-épreuve à l’appel nominal qui confirme le premier vote: l'amendement Conod est accepté par 79 voix contre 73, avec 5 abstentions.
Amendement Bovay qui propose (ajout de texte). Accepté par 85 voix contre 69, avec 4 abstentions, sur 158 suffrages exprimés.Article 27 – Garanties générales de procédure: 104 suffrages exprimés, adopté par 82 OUI, 17 NON et 5 abstentions.
1 Nul ne peut être poursuivi ou arrêté que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle prescrit. Tout individu arrêté doit être entendu par le magistrat compétent dans les 24 heures qui suivent son arrestation.
2 Pour le surplus, les garanties procédurales et en cas de privation de liberté selon la Constitution fédérale sont reconnues.
3 Toute personne détenue dans une procédure pénale a le droit d'être défendue.
4 Toute personne privée de sa liberté a le droit de faire informer les tiers qui doivent être avisés.
5 Toute personne ayant subi un préjudice en raison d'une privation de liberté injustifiée a le droit d'obtenir pleine réparation.Article 31 – Droit de pétition
Amendement Libéral Jordan (reprendre l’art. 33 de la Constitution fédérale). Sur 152 suffrages exprimés, l’amendement est rejeté par 120 voix contre 28, avec 4 abstentions.
Article 31 – Droit de pétition: sur 150 suffrages exprimés, adopté par 136 voix contre 5, avec 9 abstentions
1 Toute personne a le droit, sans encourir de préjudice, d'adresser une pétition aux autorités et de récolter des signatures à cet effet.
2 Les autorités sont tenues d'examiner les pétitions qui leur sont adressées. Les autorités législatives et exécutives sont tenues d'y répondre.Article 32 – Libertés politiques
Article 32 – Libertés politiques: sur 152 suffrages, adopté par 151 voix sans opposition, avec 1 abstention.
Toute personne est libre d'exercer ses droits politiques sans encourir de préjudice.Article 33 – Naturalisation et droit de cité
Proposition de la commission de rédaction: renvoi à un groupe de travail. Sur 152 suffrages, le renvoi est accepté par 103 voix contre 45, avec 4 abstentions.
Proposition de M. Bovet: renvoi à un groupe composé proportionnellement aux forces des groupes politiques. Sur 152 suffrages exprimés, la proposition est repoussée par 80 voix contre 60, avec 12 abstentions.Article 34 – Minimum vital et logement d’urgence et
Article 35 – Protection de la santé et de la dignitéAmendement Gonthier (retour à la formulation mise en consultation). Sur 150 suffrages exprimés, repoussé par 93 voix contre 48, avec 9 abstentions.
Amendement Girod-Baumgartner (regroupement des articles 34 et 35). 151 suffrages exprimés, adopté par 79 voix contre 68, avec 4 abstentions.
Amendement Aubert (transfert des al. 2 et 4 de l'art. 35 à l'art. 70 "santé). Sur 148 suffrages, accepté par 81 voix contre 55, avec 2 abstentions.Article 34 (couvre également l’art. 35) – Minimum vital et logement d’urgence: sur 151 suffrages, adopté par 120, contre 20, et 11 abstentions.
Toute personne dans le besoin a droit à un logement d'urgence approprié, aux soins médicaux essentiels et aux moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.Article 36 - Maternité
Amendement Bielman opposé à l’amendement Jomini. Sur 149 votes exprimés, l’amendement Bielman est accepté par 93 voix contre 47, avec 9 abstentions.
Amendement Bielman opposé a texte de la commission de rédaction. Sur 150 suffrages exprimés, l’amendement Bielman l’emporte par 133 voix contre 14, avec 3 abstentions.
Amendement Bielman opposé à la proposition de suppression du groupe Radical. Sur 151 suffrages exprimés, l’amendement Bielman l’emporte par 77 voix contre 70, avec 4 abstentions.Article 36 – Maternité: sur 151 suffrages, accepté par 81 voix contre 61, avec 9 abstentions.
Toute femme dans le besoin a droit à la sécurité matérielle un trimestre avant et un trimestre après l'accouchement.Article 9 – Dignité humaine
Proposition de rouvrir la discussion à l’article 9 pour introduire le texte "toute personne a le droit de mourir dans la dignité". Sur 117 suffrages exprimés, proposition acceptée par 108 voix, contre 5 et 4 abstentions.
Amendement Girod-Baumgartner d’ajout à l’article 9. Accepté par 114 voix contre 5, avec 10 abstentions.Article 9 – Dignité humaine: sur 129 suffrages exprimés, accepté par 117 OUI contre 4 NON, avec 8 abstentions.
1 La dignité humaine est respectée et protégée.
2 Toute personne a le droit de mourir dans la dignité.Article 37 – Éducation et enseignement
Amendement Bovet Ghiringhelli d’introduire un article 36 bis avec le texte “Chacun est libre d'enseigner en se conformant aux lois sur cette matière.” Nombre de votes 147; refusé par 82 voix contre 57, avec 8 abstentions.
Alinéa 1, amendement Ostermann, biffer les mots "dans les écoles publiques". 157 votants, refusé par 117 voix contre 35, avec 5 abstentions.
Alinéa 2, amendement Libéral, supprimer l’alinéa. Nombre de suffrages exprimés: 158, amendement repoussé par 93 voix contre 61 et 4 abstentions.
Alinéa 3, amendement Ostermann, ajouter les mots "aux familles". Votes exprimés: 156, amendement repoussé par 78 voix contre 63, avec 15 abstentions.
Alinéa 3, amendement Libéral, supprimer l’alinéa. Nombre de suffrages exprimés: 155, amendement repoussé par 92 voix contre 55, avec 8 abstentions.
Alinéa 2, amendement Cohen-Dumani, supprimer le mot "éducation". Repoussé par 95 voix contre 58, avec 5 abstentions. Il y avait 158 votants.
Alinéa 3, amendement Amstein, “Le droit à un enseignement privé est reconnu” à la place de l'alinéa 3 de la commission de rédaction. Repoussé par 107 voix contre 38, avec 13 abstentions. Il y avait 158 votants.Article 37 - Éducation et enseignement: adopté par 122 OUI contre 28 NON et 7 abstentions.
1 Chaque enfant a droit à un enseignement de base suffisant et, dans les écoles publiques, gratuit.
2 Il a droit à une éducation et à un enseignement favorisant l'épanouissement de ses potentialités et son intégration sociale.
3 La liberté de choix de l'enseignement est reconnue.Article 38 – Aide à la formation initiale
Amendement Farron, suppression du mot "initiale", ajout de "professionnelle de base reconnue", opposé à l’amendement Nordmann, suppression du mot "initiale". Sur 152 votants, par 110 voix contre 35 et 7 abstentions, l'amendement
Farron est accepté.
Amendement Farron opposé au texte de la commission. Sur 152 votants, 81 se sont prononcés pour l'amendement Farron, contre 61 pour le texte de la commission. Il y a 10 abstentions.
Amendement Labouchère, suppression de l’article. Le nombre de votants est 151.
L'amendement Labouchère est repoussé par 78 voix contre 67, avec 6 abstentions.Article 38 – Aide à la formation initiale: sur 151 votants, adopté par 81 voix contre 66 avec 4 abstentions.
Toute personne dépourvue des ressources personnelles ou familiales nécessaires à une formation professionnelle de base reconnue a droit à une aide de l'État.Article 39 – Aide aux victimes
Amendement Conod, suppression de l'article 39. Le nombre des votants est 132.
L'amendement est accepté par 71 voix contre 57, avec 4 abstentions.Article 40 – Champ d’application des droits fondamentaux
Amendement Baehler Bech, introduction d’un article 39 bis, avec le texte “ Les associations et fondations reconnues par la loi ont qualité pour recourir dans un but d'intérêt public.” 148 personnes ont pris part au vote. La proposition est rejetée par 81 voix contre 66, avec 1 abstention.
Lettre a), amendement Haldy, suppression de cette lettre. 146 votes exprimés, l'amendement est admis par 74 voix contre 71 et 1 abstention.
Lettre b), amendement Nordmann “ b) par les personnes morales conformément à leurs buts statutaires idéal, lorsqu'elles s'en prennent à une norme abstraite”, opposé au texte de la commission. 146 votants, l'amendement est repoussé par 79 voix contre 60, avec 7 abstentions.
Lettre b), amendement Haldy, suppression de cette lettre au texte de la commission. 146 votes exprimés, 73 OUI, 73 NON. Il appartient au président de trancher, ce qui est un honneur que j'aurai pour la première fois. Je tranche pour l'amendement Haldy. Donc 74 contre 73, l'amendement Haldy est adopté [brouhaha]. et 0 abstention.
Contre-épreuve: nombre de votes exprimés: 147, l'amendement Haldy est accepté par 74 voix contre 72, avec 1 abstention.Article 41 – Restriction des droits fondamentaux
Article 41 – Restriction des droits fondamentaux: 143 votes exprimés; approuvé à l'unanimité.
1 Toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. Les restrictions graves doivent être prévues par une loi. Les cas de danger sérieux, direct et imminent sont réservés.
2 Toute restriction doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui. 3 Elle doit être proportionnée au but visé. 4 L'essence des droits fondamentaux est inviolable.Article 42 – Service public et délégation de compétences
Proposition du groupe des Verts d'interrompre les débats à cet article. Sur 143 suffrages exprimés, la proposition est acceptée par 83, contre 43 avec 17 abstentions.
La séance est ouverte à 9 h. 30
Sont présents:
Mmes et MM. Abbet Raphaël, Amstein Claudine, Athanasiadès Jean, Aubert Josiane, Baehler Bech Anne, Balissat Jean, Bavaud Adrien, Benjamin Samy, Berger Cécile, Bielman Anne, Blanc Éric, Boillat Jean-Pierre, Bolinger Anne-Marie, Bory Marc-André, Bory Weber Dominique, Bouvier Denis, Bovay Judith, Bovet Daniel, Bovon-Dumoulin Martine, Bovy Samuel, Braissant Rénald François, Brélaz Daniel, Bron Jacques Henri, Bühler Michel, Buffat Michel, Bühlmann Gérard, Bühlmann Willy, Burnier-Pelet Thérèse, Burri Marcel, Carnevale Éliane, Chapuis Allegra, Charotton Georges, Chatelain André, Cherix François, Chevalley Isabelle, Cohen-Dumani Marcel, Conod Philippe, Cork-Levet Françoise, Cornu Claire-Lise, Cornu Pierre-Alain, Cossy Samuel-Henri, Crisinel François, Cruchon Raoul, de Luze Charles-Henri, de Souza-Kohlbrenner Regula, Delay Élisabeth, Dépraz Alex, Desarzens Laurent, Desmeules Michel, Dessauges Pascal, Dufour Denyse, Dufour Etienne, Farron Pierre, Favre Raymonde, Freymond-Bouquet Monique, Galeazzi Rebecca, Ghiringhelli Charles-Pascal, Gindroz André, Girod Christine, Glauser Alice, Gonthier Alain, Gonvers Olivier, Gorgé Marcel, Goy-Seydoux Louis, Grin Nicole, Gross Nicole, Guignard François, Guy Joël, Haldy Jacques, Henchoz Pierre, Henchoz-Cottier Martine, Henry Philippe, Hermanjat Pierre, Holenweg Rouyet Anne, Humair Louis, Hunkeler Pierre, Jaeger Odile, Jaggi Yvette, Jaillet Gérard, Jaton Nathalie, Jemelin Mireille, Jomini Viviane, Jordan Kulling Andreane, Jufer Nicole, Kaeser Danièle, Keller Pierre, Kulling Jean-Pierre, Labouchère Catherine, Le Roy Jean, Lecoultre Richard, Lehmann Pierre, Leuba Jean-François, Linder Sandra, Loi Zedda Fabien, Luisier Christelle, Lyon Anne-Catherine, Mages Roland, Maillefer Denis-Olivier, Mamboury Catherine, Mamin Henri, Marion Gilbert, Martin Bernard, Martin Jean, Martin Marie-Antoinette, Mayor Philippe, Millioud Jean-Pierre, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Moret Isabelle, Nicod François, Nicolier Yvan, Nordmann Philippe, Nordmann Roger, Oguey Annie, Ormond Anne, Ostermann Roland, Payot François, Pellaton Berthold, Perdrix René, Pernet Jacques, Perrin Jeanne-Marie, Piguet Jean-Michel, Pillonel Cédric, Piot Christine, Pittet François, Pittet Jacqueline, Pradervand Jean-Claude, Rapaz Olivier, Recordon Luc, Renaud Dominique, Reymond Antoine, Richard Claire, Rochat-Malherbe Paul, Roulet Catherine, Roulet-Grin Pierrette, Ruey-Ray Élisabeth, Salamin Michel Lauréane, Saugy-Anhorn Nathalie, Schmid Charles, Schneiter Robert, Schwab Claude, Streit Adrien, Thévoz Francis, Tille Albert, Troillet Roland, Vallotton Jacques, Vincent Martial, Vittoz Marc, Volluz Françoise, Voruz Éric, Voutat-Berney Éveline, Weill-Lévy Anne, Wellauer Pierre-Olivier, Wettstein Irène, Winteregg Michel, Wiser Henri, Yersin-Zeugin Ruth, Zisyadis Josef, Zuercher Magali, Zwahlen Jacques (160).
Sont absents:
Mmes et MM. Berney Michel, Bovet Fred-Henri, Chollet Jean-Luc, Colelough Philippe, Cuendet Maria-Chrystina, Fague Sébastien, Garelli Stéphane, Guignard François, Haefliger Sylviane, Lasserre Colette, Margot François, Martin Laurence, Martin Marie-Hélène, Masson Stéphane, Ziegler Geneviève (15).
Se sont excusés:
Mmes et MM. Burnet Olivier, de Haller Jean-Claude, Gallaz Christophe, Rodel Marilyne, Wehrli Laurent (5).
Nouveaux constituants
MM. Dubois et Keshavjee ont annoncé leur démission. Ils ont été remplacé par M. Marc Vittoz et Mme Françoise Cork-Levet qui accepté la formule de prestation commune.
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Contrôle des présences
Le résultat du matin n'est pas inscrit dans le bulletin
L'après-midi 159 constituants
Accueil et communication d’ordre général
F Jean-François LEUBA
Mesdames et Messieurs, vous avez décidé qu'il n'y aurait pas d'open end; par conséquent, nous ne travaillerons pas après 17:30, mais nous commençons à 9:30 précises, s'il vous plaît. Mesdames et Messieurs, je déclare ouverte cette 33e séance de l'Assemblée constituante. Est-ce que je peux demander aux personnes qui sont au fond de la salle de faire un peu moins de bruit, de manière qu'au moins les personnes qui sont à côté de moi m'entendent? Je vous souhaite la bienvenue à cette séance. Vous avez reçu l'ordre du jour. Cet ordre du jour comporte, comme premier point, "Accueil et communications d'ordre général". Il me paraît que j'ai déjà fait l'accueil et je n'ai pas de communications.
Rapport de vérification des titres d’éligibilité et assermentation des nouveaux constituants
F Jean-François LEUBA
Je donne la parole à M. Fague, pour lire le rapport du comité sur les titres d'éligibilité.
F Sébastien FAGUE
Le comité s'est réuni pour la vérification des titres d'éligibilité. Par lettre du 12 septembre 2001, M. Jean-Paul Dubois, constituant domicilié à Nyon, a annoncé sa démission de l'Assemblée constituante. M. Marc Vittoz a été élu dans l'arrondissement de Nyon sur la liste Libérale et Indépendante. Le Conseil d'État nous a transmis l'extrait du procès-verbal du bureau électoral de l'arrondissement de Nyon. Aucun recours n'ayant été déposé contre cette élection, le comité de l'Assemblée constituante vous propose de valider l'élection de M. Marc Vittoz. D'autre part, par lettre du 23 octobre 2001, M. Shafique Keshavjee, constituant domicilié à Jongny, a annoncé sa démission de l'Assemblée constituante, avec effet immédiat. Mme Françoise Cork-Levet a été élue dans l'arrondissement de Vevey sur la liste Verts et Indépendant, en remplacement de M. Shafique Keshavjee. Le Conseil d'État nous a transmis l'extrait du procès-verbal du bureau électoral de l'arrondissement de Vevey. Aucun recours n'ayant été déposé contre cette élection, le comité de l'Assemblée constituante vous propose de valider l'élection de Mme Françoise Cork-Levet. Pour le comité, votre rapporteur.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Fague de la lecture du rapport. Le rapport conclut à la régularité de l'élection de Mme Cork-Levet et de M. Vittoz. Y a-t-il quelqu'un qui entend soulever une objection à cette conclusion? Ce n'est pas le cas. Je prie dès lors Mme Cork-Levet et M. Vittoz de bien vouloir venir devant la salle. Je prie l'Assemblée de se lever. Madame et Monsieur les constituants, vous voici maintenant conviés à exprimer votre détermination face à l'œuvre exaltante qui vous attend. Chacun le fera dans la pleine liberté de ses convictions, devant Dieu ou selon les valeurs qui l'inspirent. Une brève formule de prestation commune vous sera lue, à laquelle chacune et chacun répondra, à l'appel de son nom, par un oui: "Chargé(e) par les citoyens vaudois de participer à l'élaboration d'une charte qui fasse de leur État l'expression d'une volonté commune, je m'engage à porter haut, dans cette Assemblée, les valeurs propres à favoriser l'épanouissement des personnes, au gré de leur libertés fondamentales et de leurs responsabilités à l'égard d'autrui, au sein d'une communauté secourable aux plus faibles et ouverte au monde". Mme Françoise Cork-Levet?
F Françoise CORK-LEVET et Marc VITTOZ
Oui.
F Jean-François LEUBA
Je prends acte de votre acceptation. Je vous souhaite un fructueux travail au sein de cette Assemblée et vous prie de regagner les places que vos amis vous ont sûrement réservées [applaudissements]. Selon l'usage, nous allons avoir une brève présentation de nos deux nouveaux collègues. Je prie le président du groupe Les Verts de bien vouloir procéder à cette présentation pour Mme Cork-Levet. Est-ce que M. Ostermann…? M. Ostermann renonce ou il passe la mission à quelqu'un d'autre? Ah, il renonce. Mme Amstein, pour M. Vittoz.
F Claudine AMSTEIN
M. Vittoz, qui nous rejoint ce matin, habite en Terre Sainte, et ceci, depuis 1971. La volonté que nous avons d'ouverture sur les autres cantons qui nous entourent et sur le monde montre déjà que, en ayant un nouveau collègue de Terre Sainte, nous avons cette ouverture sur l'ensemble du Canton. J'aimerais surtout insister sur le fait que M. Vittoz travaille dans la communication: il est conseiller en communication d'entreprises et en relations publiques depuis 30 ans. Dans ses activités, il développe surtout l'écoute et les relations humaines, pour essayer de trouver le meilleur moyen de les communiquer. Vous voyez comme c'est très précieux, pour les activités que nous menons, pour essayer de trouver des solutions qui répondent à ce que la population souhaite de notre Constitution. Pour terminer sur une petite note plus personnelle, M. Vittoz est un musicien amateur en jazz de New Orleans. Je vous encourage à lui souhaiter un bon accueil et à le rencontrer dans les travées et les couloirs. Merci.
Mise en discussion des articles de l’avant-projet
Titre I «Dispositions générales»
Article 6 – Buts et principes
F Anne-Catherine LYON
Je me propose de traiter ensemble les articles 6 et 7, pour vous indiquer le cheminement suivi par la commission de rédaction. Nous avions reçu la mission de nous pencher sur un réaménagement formel, notamment sur les propositions développées par le groupe Les Verts. A l'issue de nos travaux, nous vous faisons deux types de propositions. Concernant l'article 6, nous avons adopté l'idée d'une variante: soit vous choisissez la variante 1, qui est identique au texte que nous proposions lors de nos débats, ou alors la variante 2, qui reprend exactement le même contenu, dans une présentation différente. La présentation de la matière à la variante 2 tente de mettre en évidence quels sont les buts, d'une part, et d'autre part, les principes, étant entendu qu'il n'est pas possible d'aller plus loin dans la séparation et, par exemple, de créer un autre article, puisque les buts et les principes sont souvent extrêmement proches. Pour résumer la situation concernant l'article 6, c'est presque une question d'esthétique que de savoir si l'on préfère la variante 1 ou la variante 2. En ce qui concerne l'article 7, notre commission a décidé à l'unanimité de ne pas proposer une nouvelle présentation. En revanche, afin de clarifier au maximum la matière dont il s'agit, nous vous proposons un nouvel intitulé, "Principe de l'activité de l'État régit par le droit". Dès lors que j'ai la parole, je m'exprime aussi sur un amendement relatif à la formulation épicène. A l'article 6, quelle que soit la variante retenue, nous rencontrons le terme "chacun", et la commission de rédaction vous propose une variante: soit on garde le terme "chacun", le masculin englobant le féminin, ou alors vous choisissez l'autre variante, qui est de mettre "chacune et chacun", à savoir de doubler le terme pour avoir le masculin et le féminin qui sont clairement représentés. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Lyon. Nous avons ici un amendement, mais qui pose un petit problème, parce qu’il s'agit en réalité de revenir sur un vote qui est déjà intervenu. Je considère dès lors que c'est une motion d'ordre, par laquelle on demande de revenir sur un vote auquel nous avons procédé le 2 novembre. On est bien d'accord, M. Desarzens? C'est comme cela qu'il faut bien voir votre proposition? Alors, je vous rappelle que, le 2 novembre, vous avez écarté la référence à la culture… je retrouve le résultat… vous l'avez écartée par 68 voix contre 65. M. Desarzens souhaite revenir sur ce vote. Alors, je passe la parole à M. Desarzens pour qu'il développe exclusivement la motion d'ordre, pas le fond du problème.
F Laurent DESARZENS
Je vous remercie de bien vouloir accepter que le groupe Agora puisse intervenir une nouvelle fois sur ce problème de la culture. Au nom du groupe Agora, je présente cette motion d'ordre pour rajouter un alinéa à cet article 6, alinéa qui dit: "Il défend la culture dans sa diversité" ou, cela dépendra de la rédaction de cet article, "La défense de la culture dans sa diversité". Donc, vous voudrez bien nous excuser de revenir, d'une manière un peu cavalière, sur cet alinéa de l'article 6 concernant la culture. Mais en le comparant avec l'article 55 et en jugeant vendredi 2 novembre qu'il y avait double emploi, notre Assemblée a certainement été un peu vite en besogne. En effet, l'article 55 parle des artistes, des acteurs de la vie culturelle, et invite l'État a soutenir la création et à conduire une politique culturelle digne de ce nom. Mais ici, dans cet alinéa qui a été chassé, la culture dont il est question, c'est quand même autre chose, c'est celle des Vaudois, celle de la manière d'être et de vivre, de parler, de concevoir ses institutions, c'est celle des convictions religieuses, des traditions locales, des spécialités culinaires, tous ces éléments et tant d'autres font partie d'une culture. Rappelez-vous le long débat que nous avons déjà eu à ce sujet. On a dit vendredi dernier que l'on ne savait pas scientifiquement comment définir une "race humaine", mais définir une "culture", oui. Une population de mille ou deux mille personnes, isolée dans la forêt amazonienne, qui parle sa propre langue, chasse, pêche, construit ses maisons, enseigne à ses enfants, organise sa hiérarchie et peut-être son système judiciaire, possède par définition sa propre culture. Sans tous ces éléments qui servent à l'unifier, cette société ne pourrait tout simplement pas survivre. Même s'il ne s'agit que d'une poignée de personnes réunies en société, nous avons à faire à une culture. Les particularités culturelles de ce Canton apparaîtront à chaque page de cette nouvelle Constitution. Il serait tout de même nécessaire d'en faire mention, une fois, dans le menu principal, car c'est assurément un élément de nature programmatoire. Il est donc juste que le peuple vaudois demande à l'État de défendre sa culture et non pas de l'encourager. Nous n'adressons pas ce message à d'autres, nous nous l’adressons à nous-mêmes, car il s'agit de nos buts. C'est peut-être l'apparition de ce verbe "encourager", à l'article 6 des "Buts et principes", qui nous a induits en erreur, puisqu'on le retrouve en effet à l'article 55. Je vous demande donc, au nom du groupe Agora, de réintroduire "notre culture" dans cet article 6, qui est à défendre ici, dans l'énoncé des "Buts", alors que la culture des musiciens, des acteurs, des plasticiens et autres cinéastes sera quant à elle à encourager et à soutenir – là, c'est tout à fait juste – dans le chapitre des "Tâches de l’État", à l'article 55. Je vous remercie de votre attention.
F Jean-François LEUBA
M. Desarzens, on ne s'est pas très bien compris. J'attendais que vous expliquiez pour quel motif le vote qui est intervenu le 2 novembre n'était pas valable. C'est ça, le but de la motion d'ordre. Vous décidez de revenir sur un vote antérieur. Alors, il faut expliquer pourquoi le vote antérieur n'était pas valable. Maintenant, je dois poser la question à l'Assemblée de savoir si on peut revoter là-dessus. C'est ça la question.
F Laurent DESARZENS
Le vote antérieur est valable. Mais, étant donné que l'article 6 n'est pas encore accepté, j'ai pensé utile de reparler de ce problème, parce que j'ai pensé qu'il y avait une erreur de fond. C'est-à-dire qu’on est venu parler ici à la tribune en disant qu’on a deux fois "encourager"; mais pour moi, c'est simplement qu'il s'agit de la "culture" du peuple vaudois. On a fait une confusion avec la culture de l'article 55.
F Jean-François LEUBA
C'est le fond, M. Desarzens. Le problème, c'est qu'il y a eu un vote qui est intervenu. Si ce vote n'est pas régulier, il faut dire en quoi il n'est pas régulier. Sinon, je ne vois pas très bien comment on peut à chaque fois revenir en disant que l'Assemblée s'est trompée, qu’elle aurait dû faire autrement. C'est ça la question. Mais on ne va pas poursuivre ce dialogue. On va suivre la procédure de motion d'ordre et demander à l'Assemblée si elle veut revenir sur ce vote. C'est ça la question.
F Laurent DESARZENS
Alors, il y a deux possibilités: ou bien on peut effectivement demander à l'Assemblée si elle est d'accord de revenir sur cette question, ou alors me dire si j'ai la possibilité de revenir en troisième lecture avec ça. Je ne peux pas? Alors, peut-être qu'il y a des gens, ici, dans cette salle, qui estiment que ce n'est pas une erreur de fond d'avoir comparé ces deux cultures: c'est simplement ça le problème. Je pense que la présentation n'était pas suffisante, l'attaque de cet alinéa, à mon avis, était fausse. Ce n'est pas le vote en soi qui était faux, c'est la manière de le présenter. Donc, j'estime simplement qu'il y a deux formes de culture. Ici on est quand même dans nos principes, dans nos buts, c'est notre culture à nous, la culture du peuple vaudois. A l'article 55, c'est les acteurs de la culture, les artistes, etc.; il me semble qu'il y a une simple confusion. Si on peut demander à l'Assemblée si elle veut bien revenir, ça serait très gentil de votre part. Mais vous connaissez mieux la procédure que moi: j'attends, Monsieur le président, que vous me donniez un petit coup de main dans ce cas-là.
F Jean-François LEUBA
Je ne sais pas si je suis gentil, mais j'essaie d'appliquer la procédure. Alors, est-ce que la motion d'ordre de M. Desarzens est appuyée? Manifestement, elle est appuyée. Alors, la question qui est posée est tout à fait claire: est-ce que l'Assemblée souhaite revenir sur le vote qu'elle a fait le 2 novembre? Ensuite, si l'Assemblée accepte, j'ouvre la discussion. Si l'Assemblée refuse, le problème est réglé. C'est clair pour tout le monde? Alors, discussion sur la motion d'ordre.
F Christelle LUISIER
Je comprends le souci de M. Desarzens. Mais, finalement, je n'arrive pas aux mêmes conclusions que lui. Je n'interviendrai pas sur le fond. Je crois que, sur le fond, une décision a été prise. Nous avons décidé de considérer cet alinéa, non pas comme un but de l’État, égal par exemple au bien commun ou à la cohésion sociale, mais bien comme une tâche de l'État. Je crois que ce point a été tranché, selon la volonté de l'Assemblée, le 2 novembre dernier. Maintenant, quant à la motion d'ordre, nous avons toujours dit que nous voulions une deuxième lecture qui soit souple, avec la possibilité de revenir sur les articles déjà votés, et ce, pour assurer la cohérence de notre texte. Donc, si on se rend compte, à l'article 45, qu'il faut revenir sur l'article 8, parce qu'il y a des éléments qui font que l'on doit assurer la cohérence du projet constitutionnel, et bien, à ce moment-là, il est justifié de revenir sur un vote qui a été effectué au sein de l'Assemblée. Toutefois, je rappelle que, s'agissant de l'article en question, le contenu été décidé le 2 novembre, et ce, de manière tout à fait correcte; la procédure a été suivie de manière correcte. Il n'y a pas d'éléments nouveaux qui nous permettraient de revenir sur le vote de fond qui a été fait lors de la séance du 2 novembre. Donc, pour moi, il est absolument inadmissible de revenir sur ce texte, parce que, à chaque fois que l'on perd sur un vote, on pourrait revenir à pour dire que l'on n'est pas content avec le résultat du vote et alors remettre en question à chaque fois les décisions de l'Assemblée. Et puis, je rassure M. Desarzens: puisqu'il y a une contradiction entre le vote de première lecture et le vote de deuxième lecture, il y aura une possibilité de revenir en troisième lecture sur ce point qui concerne la culture. Merci.
F Claudine AMSTEIN
J'appuie entièrement ce qui vient d'être dit par Mme Luisier. Si nous poursuivons dans cette optique de revenir sur chaque article, je peux d'ores et déjà vous dire qu’on déposera aussi des motions d’ordre pour les points sur lesquels on a perdus dans ces articles 6 et 7. Alors, on peut chaque fois dire qu'on n'a pas bien argumenté, mais on ne peut s'en prendre qu’à soi-même si on n'a pas su bien défendre son amendement et que l'Assemblée ne nous a pas suivis. Si la motion d'ordre est appuyée, directement après, nous redéposerons aussi des motions d'ordre pour revenir sur ce qui a été décidé la dernière fois et je crains qu'on n'avance pas beaucoup avec ce système-là. Je vous encourage donc à refuser cette motion d'ordre.
F Denis BOUVIER
Après ce qui vient d'être dit, je ferai remarquer tout de même que, le 2 novembre, nous n'avons pas eu devant nous cet article affiché à l'écran. Cela peut vous faire rire, mais je dois dire qu'on a été pris de court, parfois, pas nécessairement sur ce point, mais on a laissé passer le paragraphe 5, "Il veille à ce qu'au sein des autorités, les femmes et les hommes soient représentés de manière équilibrée". Je dois vous dire que j'ai été surpris par le fait que cet article a passé à la trappe des droits justiciables et qu'il se retrouve maintenant dans les "Buts et principes". Je ne vous dis pas que c'est une raison péremptoire pour revenir sur notre vote, mais j'aimerais quand même attirer votre attention sur cet aspect des choses. Je vous remercie.
F Luc RECORDON
Je ne serais peut-être pas intervenu, mais j'ai été un peu choqué par l'intervention de Mme Amstein qui, au fond, nous disait qu'elle s'apprêtait à jouer la disposition réglementaire de mauvaise foi, accusant implicitement M. Desarzens de l'avoir jouée lui aussi de mauvaise foi, c'est-à-dire de chaque fois essayer de revenir en faisant – passez-moi l'expression – "gna, gna, gna" parce qu'on a perdu, et qu'on cherche par tous les moyens à regagner. Ce n'est pas ça qu'il nous a expliqué. Il nous a expliqué que, pour lui, il y avait un problème de compréhension et qu'on avait voté sur de mauvaises bases. Alors, on est d'accord ou on n'est pas d'accord. Mais cette question ne devrait pas donner lieu à différents ergotages. En réalité, ce débat ne devrait pas avoir lieu parce que, comme me le faisait remarquer opportunément le citoyen Pillonel en aparté, l'article 41 alinéa 2 de notre règlement dit qu'on peut parfaitement revenir sur un vote, à mon avis, uniquement pour des raisons d'incompréhension ou d'erreur formelle, mais que l'assemblée se prononce sans débat. Je vous renvoie à la lecture de cet article 41 alinéa 2 du règlement, regrettant que Monsieur le président se soit laissé perturber, après une première décision opportune de nous faire voter sans débat.
F Jean-François LEUBA
Alors, M. Recordon, je suis désolé de vous donner tort: l'article 41 vise une autre hypothèse, celle où un article a été adopté et où on veut revenir sur un article adopté. L'article 6 n'est pas adopté en votation finale; on revient simplement sur un vote, ce qui n'est pas du tout la même chose. Alors, il faut interpréter correctement l'article 41. J'aimerais bien, quand même, que cette discussion sur cette motion d'ordre ne dure pas éternellement. Vous aurez l'occasion de vous exprimer ensuite sur le fond, si la motion d'ordre est admise. Alors, il faudrait quand même être aussi rapide que possible. M. Renaud.
F Dominique RENAUD
Je reviens pour appuyer la proposition de M. Recordon. Il me semble que l'article 41 s'applique parfaitement à la proposition de M. Desarzens et que cela nous aurait évité un débat. Il n'est pas dit que l'article sur lequel on revient a été adopté, il est simplement dit qu'on revient sur la discussion. Je crois que, dans l'esprit de ceux qui ont fait le règlement à l'époque, c'était justement la possibilité de pouvoir revenir en tout temps sur des propositions, et que cela puisse se faire avec une procédure allégée qui ne passe pas par une motion d'ordre.
F Laurent DESARZENS
Mme Amstein, j'aimerais sincèrement m'excuser auprès de vous, je ne pensais pas que ça allait attirer une telle réaction de votre part. J'ai cru, naïvement, que ce titre I ne méritait pas de bagarre, et que c'était peut-être le titre qui concernait tout le monde. Donc, sincèrement, à mon avis, c'était important de parler de la culture de nous tous, et après, à partir du titre II, c'est bien clair qu'il peut y avoir des tendances de partis, gauche, droite, etc.
F Jean-François LEUBA
Bien, je crois que je peux considérer la discussion sur la motion d'ordre comme liquidée. Plus personne ne demande la parole? Nous pouvons donc passer au vote. Motion d'ordre Desarzens visant à revenir sur l'article 6. Sur 153 votes exprimés, la motion est rejetée par 82 voix contre 65, avec 6 abstentions. Dès lors, nous ne rouvrons pas la discussion sur le fond, même si M. Desarzens nous a bien expliqué pourquoi il aurait voulu revenir sur cet article. J'aimerais maintenant que l'on se prononce sur la formulation épicène, telle que la présidente de la commission vous l'a soumise. Il y a deux solutions: ou bien on laisse le texte tel qu'il a été rédigé dans les deux variantes que vous avez, avec le mot "chacun", ou bien, dans les deux variantes, on dit "chacune et chacun". La discussion est ouverte sur cette question. Qui souhaite s'exprimer? La discussion ne paraît pas utilisée. Nous allons donc pouvoir passer au vote. Proposition de la commission de rédaction sur la formulation épicène ("chacune et chacun"). Sur 155 votes exprimés, la proposition est rejetée par 74 voix contre 73, avec 8 abstentions. Vous avez maintenant à choisir entre les versions 1 et 2 de la commission de rédaction. La présidente de la commission de rédaction vous a dit que c'était une question esthétique. J'ouvre néanmoins la discussion sur les questions esthétiques. Quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer entre la version 1 et la version 2? Cela ne paraît pas être le cas. Je considère que la discussion est close. La variante 2 est préférée à la variante 1 par 77 voix contre 72, avec 4 abstentions, sur 153 votes exprimés. Article 6 – Buts et principes: adopté par 134 voix contre 7, avec 13 abstentions. 1 L'État a pour buts: a) le bien commun et la cohésion cantonale; b) l'intégration harmonieuse de chacun au corps social; c) la préservation des bases physiques de la vie et la conservation durable des ressources naturelles; d) la sauvegarde des intérêts des générations futures. 2 Dans ses activités, l'État: a) protège la dignité, les droits et les libertés des personnes; b) garantit l'ordre public; c) fait prévaloir la justice et la paix, et soutient les efforts de prévention des conflits; d) reconnaît les familles comme éléments de base de la société. e) veille à une représentation équilibrée des femmes et des hommes au sein des autorités.
Article 7 – Principes juridiques fondamentaux
F Anne-Catherine LYON
Je reprends la parole uniquement pour vous indiquer que la différence avec l'ancien article 7, c'est l'intitulé, qui cherche à préciser encore davantage de quoi traite cet article. Mais, quant à l’article lui-même, il n’a aucune modification ni de forme, ni de fond.
F Jean-François LEUBA
Je constate qu'il n'y a pas d'amendement en ce qui concerne cet article 7. La discussion est néanmoins ouverte. Quelqu'un souhaite-t-il s'exprimer? Mme Amstein.
F Claudine AMSTEIN
Avec cet article 7 se pose un problème de répétition, puisque nous avons la notion de transparence, que nous retrouverons plus tard, et nous aurons donc à traiter de ce point ultérieurement. Et puis, la question de l’arbitraire est également redondante. Je vous incite donc à noter que nous avons deux notions qui reviennent à deux chapitres différents et qu'il faudra retraiter ça pour éviter qu'il y ait des problèmes de compréhension.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Amstein. La discussion est toujours ouverte. La discussion n'est plus utilisée. Nous allons donc voter sur cet article 7. Article 7 – Principes juridiques fondamentaux: sur 150 suffrages exprimés, adopté par 149 voix sans opposition, avec 1 abstention. 1 Le droit est le fondement et la limite de l'activité étatique. 2 Cette activité est exempte d'arbitraire, répond à un intérêt public et est proportionnée au but visé. Elle s'exerce conformément aux règles de la bonne foi et de manière transparente. 3 Toute activité étatique respecte le droit supérieur.
Titre II «Droits fondamentaux»
Articles 27 à 30 (suite et fin de la discussion engagée le 9 novembre 2001)
F Jean-François LEUBA
Nous avons un problème aux articles 27 à 30, si j'ai bien vu, il y a deux questions. Est-ce que la présidente de la commission de rédaction veut s'exprimer maintenant? Il y a en tout cas la modification, pour avoir une formulation épicène à l'article 29.
F Anne-Catherine LYON
C’est une question de formulation épicène, en effet. Nous avons le choix, à cet article 29, soit de conserver le terme "défenseur", comme englobant le féminin aussi, ou alors, de modifier la rédaction, pour que nous ne soyons pas devant cette difficulté, en mettant "a le droit d'être défendu". Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Lyon. J'ouvre la discussion. La discussion ne paraît pas être utilisée. Nous allons donc passer au vote entre la version "a droit à un défenseur", il s'agit de l'alinéa 3, et la version "toute personne a le droit d'être défendue", qui est la solution épicène pour ce problème. Article 29, formulation épicène, "toute personne impliquée dans une procédure pénale a le droit d'être défendue si cela est nécessaire". 154 suffrages exprimés, proposition acceptée par 105 voix contre 47, avec 2 abstentions. Nous continuons à épurer les articles 27 à 30, avant de prendre la motion Bühlmann Il y a un problème à l'article 30. Dans l'enthousiasme de la fin de votre dernière séance, vous avez adopté deux amendements qui sont quasiment semblables, à un mot près: c'est l'amendement Conod et l'amendement Dépraz. Je pars de l'idée que personne ne va soutenir qu'on doit mettre les deux dans la Constitution. C'est clair qu'il faut choisir entre l'un ou l'autre. L'objet sur lequel j'aimerais vous faire trancher maintenant, c'est de savoir si vous adoptez la version Conod, qui dit "une détention illégale ou injustifiée", ou la version Dépraz, qui parle simplement "d'une privation de liberté injustifiée". Voilà la différence, telle qu'elle apparaît, entre ces deux amendements, qui me paraissent s'exclure l'un et l'autre. J'ouvre la discussion. Je ne sais pas si la présidente de la commission de rédaction a quelque chose à dire? Non. La discussion est ouverte. M. Conod ou M. Dépraz souhaitent-ils d'abord s'exprimer? Non, M. Philippe Nordmann.
F Philippe NORDMANN
C'est vraiment parce que personne ne s'est dévoué que j'ai bien voulu intervenir ici. Quelle est la meilleure de ces deux versions? Version Conod ou version Dépraz? Le titre l'indique, "Garantie en cas de privation de liberté". On avait vu la dernière fois que "privation de liberté" est une notion plus large, qui va au-delà de la simple détention – simple entre guillemets, pour celui qui est détenu, ce n'est pas simple – au sens pénal. Donc, c'est bien le terme de "privation de liberté" qui doit l'emporter ici. En ce qui concerne les notions "illégale" ou "injustifiée", je ne vois pas ce que cela rajouterait; là aussi, la version Dépraz est meilleure, puisqu'elle parle simplement de "privation de liberté injustifiée". Si c'est illégal, c'est a fortiori injustifié. Donc, entre les deux textes, il n'y a pas de grandes différences de fond. Mais pour être en accord avec le sens général de l'article 30, il faudrait choisir la version Dépraz.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Philippe Nordmann. La discussion continue. Elle n'est plus utilisée. Nous allons voter, en opposant la version Conod à la version Dépraz. Article 30, dernier alinéa, opposition version à version Dépraz. Sur 158 suffrages exprimés, la version Dépraz est choisie par 102 voix contre 54, avec 2 abs-tentions. Mesdames et Messieurs les constituants, nous avons un petit problème, parce que nous avons, déposé sur le pupitre, un amendement non signé. Par conséquent, il m'est difficile de savoir de qui émane cet amendement. C'est de M. Conod? Alors, "modification de mon amendement, remplace l'amendement Radical dans sa totalité". C'est M. Conod, alors? Bien. Alors, je vais d'abord faire développer l'amendement de M. Bühlmann, qui propose de remplacer les articles 27, 28, 29 et 30 par une disposition qu'il va nous exposer. M. Bühlmann
F Philippe NORDMANN
Je reviens sur la discussion que nous n'avons pas pu avoir, faute de temps, vendredi passé, à savoir ma proposition de remplacer les articles 27 à 30 par la disposition suivante: ["les garanties procédurales en cas de privation de liberté, selon la Constitution fédérale, sont reconnues, la loi définit les modalités"]. Et j'y ai ajouté une disposition transitoire, qui précise: "Aussi longtemps qu'une loi ne le définit pas, toute personne privée de liberté a le droit d'être présentée devant une autorité judiciaire dans les vingt-quatre heures". Il y a, chers collègues, des débats entre gauche et droite. Il y a des débats entre ville campagne. A mon avis, celui-ci est plutôt un débat entre juristes et non-juristes. Faisant partie de la deuxième catégorie, je n'ai jamais, depuis le début de l'étude de l'article 3.30, puis de ceux de l'avant-projet, été convaincu par l'inscription dans la Constitution de ce qui reste, pour moi, un code de procédure pénale illisible pour le commun des mortels. La discussion de vendredi dernier n'a fait que renforcer ma conviction, et ce, pour les trois raisons suivantes. Premièrement, nous devons nous attacher – je crois que nous sommes là tous d'accord – à rédiger un texte solide, ne donnant pas matière à interprétation, concis et lisible pour le citoyen. Là où nous reprenons des dispositions de la Constitution fédérale, nous devons nous y tenir, pour éviter toute difficulté d'interprétation de nos dispositions par rapport au texte fédéral. Or, la Constitution fédérale traite de ces garanties dans ses articles 29 à 32. Par ailleurs, un code de procédure pénale fédérale est en cours d'élaboration et nul doute qu'il sera adopté, rendant nos articles en porte-à-faux avec ces futures dispositions, voire carrément caduques selon les dispositions qui seront prises au niveau fédéral. Vaud dispose par ailleurs, bien sûr, de son propre code de procédure pénale. Nul besoin donc de mettre encore dans la Constitution le détail de ces dispositions, la référence au texte précité étant, à nos yeux, suffisante. Notons encore, dans ce cadre, le déséquilibre de ces articles par rapport au reste du projet de notre Constitution. Secondement, me référant au vote que nous avons fait vendredi passé, si nombre de votes sont serrés, le résultat – parfois aléatoire au gré de majorités d'occasion – qui en découle est acceptable lorsqu'il s'agit d'options politiques. Mais pour moi, pour des textes juridiques à forte densité normative, comme ceux qui nous intéressent, ce n'est pas acceptable et je me réfère aux remarques que faisait le professeur Mahon à ce sujet, concernant l'ancien article 38, l'article 29, alinéa 4 notamment. Le flou qui a prévalu aux déplacements d'alinéas et de corrections me confirme dans l'opinion que, parfois, nous bricolons des textes pourtant importants et qui méritent un meilleur traitement. Permettez-moi donc de préciser mon intervention de la semaine dernière. La Constitution fédérale a été élaborée et rédigée par des juristes spécialistes en droit constitutionnel, et ratifiée par les Chambres fédérales. Notre avant-projet, lui, l'a été par des commissions thématiques, dont l'enthousiasme et la volonté de bien faire de leurs membres ne saurait remplacer les connaissances et l'expertise nécessaires à la formulation précise et rigoureuse de textes à forte portée juridique. Comme Mme Luisier l'évoquait en première lecture, en prenant pour exemple le droit d'être entendu, nous ne sommes pas exhaustifs, et ce, malgré la description détaillée qui en a été faite, donnant ainsi la fausse image que le texte, pourtant déjà long et touffu, est complet. Mesdames, Messieurs, ayons la modestie et la sagesse de nous en tenir à la formulation fédérale. Et au moment où, pour mieux lutter contre la criminalité, la Suisse veut introduire un code de procédure pénale unifiée, on peut légitimement se poser la question de l'opportunité de conserver des particularités vaudoises. Sachant que cela tient à cœur à nombre d'entre nous, j'ai néanmoins lié à mon amendement la disposition transitoire préévoquée et qui reprend l'une des particularités vaudoises. J'en viens maintenant à ce qui, pour moi, est un autre motif déterminant de refus de ces articles, à savoir le maintien, dans notre projet, du droit absolu à un défenseur en cas de détention. Au moment où nous allons aborder les droits sociaux, puis les tâches de l'État et le droit de vote des étrangers, je voudrais ici clairement affirmer ma conviction que, si nous voulons, dans notre projet, tout garantir, tout protéger, préciser, définir et octroyer, alors nous courrons le risque majeur – et pour moi inéluctable – de voir notre projet refusé en votation populaire et le bénéfice des ouvertures, trop modeste pour certains, mais bien réel néanmoins, perdu pour de nombreuses années, car le Grand Conseil n'est pas prêt, en cas d'échec du projet, je vous l'assure, à se relancer, lui-même ou par le biais d'une nouvelle Assemblée constituante, dans la révision de notre charte fondamentale. Or, cette disposition est, pour ceux qui ont déposé l'amendement, maximaliste, excessive et inappropriée, elle va beaucoup trop loin. Sylviane Haefliger l'a dit la semaine dernière: les droits sont communiqués et rappelés au détenu. Et si je comprends bien la situation précaire dans laquelle se trouve un prévenu dans les premiers jours de sa détention, Jean-François Leuba l'a aussi rappelé, la Constitution doit faire une pesée d'intérêts entre ceux des individus et de la société. Cette disposition impliquerait – le rapport du groupe de travail interdépartemental du Conseil d'État le mentionne sans ambiguïté en page 103 – un accroissement important des prestations positives de l'État, un alourdissement des procédures et, partant, des coûts supplémentaires sans rapport avec le plus qu'il apporterait aux personnes incarcérées, à moins que nous n’admettions que, dans ce Canton, on ait nombre d'arrestations arbitraires, ce dont, personnellement, je doute fort. Voulons-nous vraiment faire bénéficier, de façon absolue, tout prévenu dans une affaire de stupéfiants, par exemple, comme il y en a beaucoup, d'un défenseur? Nombre d'entre nous dirons clairement non. C'est à la loi de régler les modalités de ce droit en fonction de la gravité des cas. Ici, le mieux est clairement l'ennemi du bien général. En conclusion, Mesdames, Messieurs, vous qui, comme moi, estimez que le détail de ces dispositions n'est pas indispensable, je vous encourage à suivre l'amendement déposé. Vous qui, comme moi, ou comme nous, refusez cette disposition maximaliste et excessive, vous avez, par cet amendement, l'occasion de la refuser. L'amendement Conod vous propose une version un peu différente, qui reprend plus que la mienne les dispositions vaudoises: vous jugerez vous-même. Merci en tout cas de votre soutien.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Bühlmann M. Conod a présenté un autre amendement, si j'ai bien compris. Je lui donne la parole.
F Philippe CONOD
J'ai amendé mon amendement, afin que celui-ci soit plus clair et vous montre clairement qu'il fallait rejeter le texte proposé par notre collègue, notamment rejeter les dispositions transitoires. J'ai juste ajouté à l'amendement, tel qu'il figure sur le document que vous avez reçu, la référence aux garanties procédurales de la Constitution fédérale. Je ne sais pas si Monsieur le président me permet maintenant de développer mon amendement modifié…
F Jean-François LEUBA
Naturellement, c'est pour cela que vous avez la parole.
F Philippe CONOD
Parfait. Alors je la garde un petit moment. Le contenu des articles 27 à 30, comme M. Bühlmann vous l'a dit, est complexe et technique. Or, on retrouve l'essentiel de ces dispositions dans la Constitution fédérale, aux articles 29 et suivants, articles détaillés je vous le rappelle, et dans la Convention européenne des droits de l'homme. On en retrouvera aussi une grande partie dans le prochain code de procédure pénale fédérale. Sur le principe, l'amendement Radical pourrait être suivi. Mais en réalité, je n'ai pas trouvé le terme exact, c'est un ectoplasme: nous voulons tous une Constitution réduite, ramassée. Or, à trop vouloir réduire le fond de sauce, il ne reste plus rien. L'amendement modifié, tel que je vous le propose, contient l'essentiel. Il réintroduit une garantie fondamentale qui figure dans le texte de la Constitution et non pas dans les dispositions transitoires. L'obligation faite à la police de présenter à un juge, dans les vingt-quatre heures, la personne détenue est l'essentiel de tout droit touchant la liberté personnelle, c'est l'habeas corpus dont nous parlait notre collègue Recordon la dernière fois. Or, cette disposition n'existe pas dans la Constitution fédérale, elle n'existe pas dans la CEDH. Elle touche l'essence même des droits individuels. La présentation au juge oblige le magistrat à se déterminer de suite sur le maintien ou non de la détention et ouvre les voies de recours à la personne détenue. Au surplus, autant maintenir, dans le texte de la Constitution, un principe aussi important que de le faire figurer dans les dispositions transitoires. Avec le texte ramassé, tel que je vous le propose ici, vous avez tous les grands principes que nous avons développés dans les articles précédents plus, expressément, le maintien de cette disposition des vingt-quatre heures, introduite déjà il y a plus d'une centaine d'années dans notre Constitution fédérale. Je vous remercie.
F François CHERIX
Permettez-moi d'intervenir sur l'amendement Bühlmann Kulling, qui vise à la suppression des articles 27 à 30, au profit d'une disposition minimum renvoyant à la Constitution fédérale. Sans même entrer sur la question strictement juridique du problème, je trouve cette démarche de renvoi fondamentalement erronée, et ceci, pour les principales raisons suivantes. En fait, de quoi s'agit-il? Dans ces quatre articles, il s'agit très clairement de garanties données aux citoyennes et aux citoyens, il s'agit dans ces quatre articles de liberté individuelle, il s'agit dans ces quatre articles de protection des individus. Or, nous le savons tous, le rôle d'une Constitution est précisément d'offrir de telles garanties de manière claire, précise et accessible aux citoyennes et citoyens. Nous savons également qu’une Constitution n'est pas que la charte fondamentale s'appliquant à l'État, elle est aussi une protection des libertés des personnes situées en amont des lois et des règlements. Alors, par conséquent, pour le groupe Forum, une formulation explicite de telles dispositions s'impose de manière évidente dans notre projet. Il faut d'ailleurs noter que toutes les constitutions contiennent de tels articles, toujours rédigés in extenso, en particulier la fameuse Constitution neuchâteloise, qui est souvent – à juste titre d'ailleurs – citée en exemple à ce pupitre pour sa concision. Et bien, cette fameuse Constitution neuchâteloise contient de tels articles, formulés de manière explicite dans les dispositions 28 à 31. Je sais l'attachement légitime et historique de nos collègues Libéraux et Radicaux pour la protection des individus face à l'État. Je veux donc être persuadé que, tous ensemble, nous refuserons l'amendement Bühlmann Kulling. Merci de votre attention.
F Philippe NORDMANN
Il m'incombe de faire quelques remarques de type un peu plus juridique au sujet de l'amendement Bühlmann Kulling. J'en avais noté une douzaine, mais je serai très bref et je les numéroterai. Premier argument, il y a une erreur stylistique, tout d'abord, dans ce projet, parce qu'une garantie ne peut être reconnue, une garantie peut être donnée ou fournie, et un droit peut être garanti. Que signifie en réalité, deuxième argument, la motion Bühlmann Kulling? Cela signifie simplement de dire qu’une garantie est garantie. Par conséquent, c'est une simple tautologie. Troisième argument, il y a une erreur, me semble-t-il, sur la hiérarchie des normes. Au fond, la Constitution est la base de la loi, elle n'a pas à renvoyer à la loi. Quatrième argument, il y a là aussi une confusion entre le droit cantonal et le droit fédéral, parce que, en droit cantonal, une loi peut toujours être adoptée, même sans autorisation constitutionnelle, puisque les cantons ont la souveraineté primaire, au contraire de la Confédération. Cinquième argument, la norme, telle que proposée par nos collègues Bühlmann et Kulling, est inefficace parce que, lorsque la Constitution ne garantit pas certains droits, le citoyen ne peut pas les obtenir. Bien entendu, la loi peut aller au-delà, mais si la loi ne contient pas ces garanties, il n'y a plus rien. Le sixième argument que j'avais noté, et qui a déjà été développé en partie par notre collègue François Cherix, dans le domaine des garanties pour le citoyen, là les Libéraux et les Radicaux doivent nous suivre sur ce point, c'est précisément dans ce domaine qu'il faut être précis et il a raison de dire que toutes les constitutions, fédérale et cantonales, sont relativement détaillées sur ce point. Septième argument, nous avions décidé au départ, et je m'étonne qu'on saisisse le prétexte de ces articles 27 à 30 pour s'en écarter, d'offrir au citoyen quelque chose de relativement complet, pour lui éviter d'avoir toujours à se référer à la Constitution fédérale. On l'a fait pour beaucoup d'articles, il y a bien sûr déjà des redondances avec la Constitution fédérale. Prenez la liberté de la presse ou la liberté de l'art, elles sont déjà dans la Constitution fédérale, mais sur ces points on n'a pas entendu l'argument que ce serait redondant. Alors, sur ce qui est le plus important, tout d'un coup, on voudrait simplement en référer à la Constitution fédérale. Gardons le caractère complet de la Constitution vaudoise. La clarté pour le citoyen? Que comprendrait-il d'un texte tel que celui de MM. Bühlmann et Kulling, disant que les garanties sont garanties? Comment peut-il réagir? Neuvième argument, le législateur n'a pas de directives avec le texte tel que celui de MM. Bühlmann et Kulling, il n'a pas de directives précises pour l'adoption des codes de procédure, alors que le texte initial lui donne ces directives. Enfin et surtout, il ne faut pas oublier que notre projet va beaucoup plus loin, sur certains points, que la Constitution fédérale, et nous ne sommes pas liés par les garanties données par la Constitution fédérale. S'il s'agit de faire un copier/coller, nous avons toujours dit que cela ne sert à rien. Partout où c'est possible, essayons d'améliorer ce qui peut l'être, de donner un certain nombre de garanties supplémentaires. Qu'est-ce que nous avons de plus que la Constitution fédérale? Et bien, par exemple, quelque chose de très important, à l'article 27, que "chacun a le droit de consulter le dossier de sa cause". Autre exemple, "chacun a le droit de recevoir une décision motivée avec indication des voies de recours". Vous pouvez chercher dans la Constitution fédérale, vous ne trouverez pas cela. Donc, nous avons effectivement adopté des textes qui vont un peu plus loin. Parmi les garanties pénales, nous avons dit que la personne doit être informée des charges qui pèsent sur elle dans une langue qu'elle comprend. Aujourd'hui, c'est très important: ça ne figure pas dans la Constitution fédérale. Le droit à un défenseur ne figure pas dans la Constitution fédérale de cette manière-là. Le droit d'obtenir une réparation en cas de procédure injustifiée ne figure pas non plus dans la Constitution fédérale. Parmi les garanties en cas de privation de liberté, le droit d'informer des tiers qui doivent être avisés, par exemple l'employeur, ne figure pas dans la Constitution fédérale. Voilà un certain nombre d'exemples qui montrent que les textes que nous avons élaborés à grand peine et avec de grandes discussions, nous nous sommes donnés de la peine, chers collègues, pourquoi voudrait-on aujourd'hui, par cette motion réductrice, les faire disparaître? Quant au texte que vous avez sous les yeux, n’est-il pas évident que les Vaudois vont appliquer la Constitution fédérale? Faut-il le dire? Est-ce que vous trouvez que c'est nécessaire de dire, dans notre Constitution, que nous respectons Constitution fédérale et que nous l’appliquons? Cela me paraît complètement inutile. Enfin, j'ai été un peu long et je m'en excuse, je parlerai juste en deux mots de l'amendement Conod. Regardez le titre de cet amendement: "Garanties générales de procédure". En réalité, ce que propose M. Conod, c'est uniquement de parler de la détention. Ce ne sont pas évidemment des garanties générales de procédure. C'est tellement réducteur que l'on n’est même plus couvert par le titre général de l'article. Donc, pour toutes ces raisons et par respect pour le travail que nous avons déjà effectué, je vous propose de nous en tenir à nos textes et de rejeter à la fois la motion Bühlmann Kulling et la mention Conod.
F Judith BOVAY
J'ai déposé tout à l'heure un amendement conditionnel à l'amendement Bühlmann Kulling. Si la …
F Jean-François LEUBA
Si vous permettez, il me semble que, pour l'économie du débat, il faut d'abord savoir si l'amendement Bühlmann passe. S’il ne passe pas, votre amendement tombe, puisqu'il est conditionnel.
F Judith BOVAY
Non, je crois qu'il faut le mentionner avant, pour clarifier…
F Jean-François LEUBA
Alors, allez-y.
F Judith BOVAY
Je remercie le coprésident de me donner la parole. J'ai déposé un amendement conditionnel à l'amendement Bühlmann Kulling. J'espère qu'on peut le voir. Je vous le lis. Il reprend trois alinéas, qui complètent l'amendement Bühlmann Kulling. Premier alinéa: "Toute personne détenue dans une procédure pénale a le droit absolu d'être entendue". Deux: "Toute personne privée de sa liberté a le droit de faire informer les tiers qui doivent être avisés". Trois: "Toute personne ayant subi un préjudice en raison d'une privation de liberté injustifiée a le droit d'obtenir pleine réparation". Le groupe Forum a déposé cet amendement conditionnel, parce que l'amendement Bühlmann Kulling vise à condenser le texte de notre avant-projet de Constitution. Notre avant-projet comporte des points qui vont au-delà des garanties fédérales. Pour ne pas perdre ces éléments que vous avez retenus dans la version de l'avant-projet, le groupe Forum vous propose de reprendre ces éléments et de rajouter les trois alinéas que je vous ai lus à l’instant. M. Bühlmann, lui-même, reprend une des particularités que nous avons votées, par une disposition transitoire. Je vous propose de ne pas retenir la disposition transitoire, pour les raisons que M. Conod avait évoquées tout à l'heure, mais de préférer notre amendement conditionnel, qui reprend non pas une mais toutes les particularités que nous avions retenues. Si l'amendement de MM. Bühlmann Kulling devait passer, ce que je regrette, au moins je vous prie d'accepter l'amendement conditionnel pour compléter l'article proposé. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Bovay. Il est 10 h.30, je dois faire procéder au contrôle des présences. Je suis désolé pour ceux qui s'étaient préparés à intervenir. Nous allons donc procéder au contrôle des présences. Je vous rappelle qu'il faut voter OUI si vous êtes présent.
Le scrutin est ouvert.
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La parole est à M. Jean Martin.
F Jean MARTIN
Lors de notre dernière séance, je me suis vivement exprimé – peut-être trop vivement – à propos de certains éléments prévus aux articles 27 et suivants de notre projet. J'ai dit mes préoccupations à cet égard, que je maintiens, sans les commenter plus avant. Cela étant, si je m'exprime aujourd'hui pour vous recommander de soutenir l'amendement de nos collègues Kulling et Bühlmann, c'est aussi pour indiquer que, tout au long des travaux de la commission 3, des longs travaux sur cet objet de la commission 3, qui en a discuté et dont je faisais partie, je me suis senti mal à l'aise par rapport à l'importance quantitative de ces dispositions. Dans une charte fondamentale qui aborde une multiplicité de domaines, nous avons cherché, de manière imparfaite sans doute, à faire des arbitrages raisonnables quant au degré de détail, quant à la prolixité ou, au contraire, la concision de ce que nous inscrivons dans notre projet. A l'évidence, nous avons à cet égard des appréciations divergentes, comme les avis de certains préopinants le montrent. Il reste que nous avons le droit clair, plein et entier de décider, de la longueur et de la lourdeur de ce que nous entendons inclure dans le projet qui sortira de ce débat. Je considère quant à moi que l'économie de notre projet et son architecture sont déséquilibrés par un texte long et détaillé sur des éléments qui sont déjà garantis par la Constitution fédérale, et que la loi cantonale, comme elle le fait déjà, aura toute compétence en vue de définir leurs modalités. Je vous encourage donc une fois de plus à soutenir l'amendement Kulling Bühlmann
F Jean-Pierre KÜLLING
J'avais cru au départ, comme peut-être aussi mon collègue Bühlmann, qu'il s'agissait d'un problème entre juristes et non-juristes, mais je ne le crois vraiment pas. Et je ne pense pas que ces garanties procédurales soient véritablement un jardin des juristes. D’ailleurs, les constitutions qui nous servent d'habitude de référence ont été écrites par des juristes éminents; elles sont assez sobres sur le sujet. Je vois plutôt, dans nos articles maximalistes, la manifestation d'un immense désir, presque intégriste, de traquer l'arbitraire et l'injustice dans la justice, sans se soucier des effets pervers que cela pourrait avoir. Le seul véritable dénominateur commun à toutes les constitutions auxquelles nous nous référons d'habitude est ce principe de l'habeas corpus, qui veut dire littéralement "que tu aies ton corps" et qui correspond à une célèbre loi votée en 1679 par le parlement anglais. Selon celle-ci, tout individu arrêté a le droit de passer devant le juge pour qu'il statue sur la validité de son état. Le délai dans lequel ce passage devant le juge doit être effectué est variable. La fédérale dit "aussitôt", la bernoise dit "dans le plus bref délai", la jurassienne dit, comme notre projet, "vingt-quatre heures", la neuchâteloise "trois jours". Qui est au bénéfice de ce droit? Pour la Constitution fédérale, il s'agit d'une personne mise en détention préventive; pour la bernoise, d'une personne soupçonnée d'un délit; pour la jurassienne, d'une personne arrêtée; pour la neuchâteloise, un individu arrêté. Effectivement, comme on l'a dit tout à l'heure, notre projet va beaucoup plus loin que tous les autres. C'est le seul qui prévoit, par exemple, une information à des tiers, en cas de privation de liberté, c'est le seul qui prévoit un droit absolu à un défenseur en cas de détention, la Constitution bernoise étant plus nuancée. Et c'est absolument le seul à assimiler des personnes privées de liberté à des fins d'assistance – je vous en parlais la dernière fois – à des détenus, en ce qui concerne la présentation au juge. En conclusion, ces quatre articles forment un corps étranger, une sorte d'enclave de rang plutôt législatif, à part la mention de l'habeas corpus. Le projet officiel, rédigé par le Professeur Grisel, fait référence à la Constitution fédérale et à la Convention européenne des droits de l'homme. Je ne suis pas juriste moi- même, mais je pense que ça doit être certaine ment u ne possibilité, quoiqu'en dise M. Nordmann. En outre, je vous invite à ne pas souscrire, à côté de ces problèmes de forme, aux éléments de fond, qui sont des propositions maximalistes contenues dans ces articles. La liberté individuelle est protégée par la Constitution fédérale, sans parler de la Convention européenne des droits de l'homme, et nous pouvons donc, sans dommage, pour un principe fondamental auquel nous sommes tous extrêmement attachés, citer le droit supérieur et ainsi alléger notre texte. Je précise que les deux [co-motionnaires] se rallieront à celui des deux textes – c'est-à-dire le texte de M. Bühlmann ou le texte de M. Conod – qui obtiendra le plus de suffrages dans l'Assemblée. Je vous remercie.
F Alain GONTHIER
Si l'on considère qu'une des tâches essentielles d'une Constitution est avant tout de défendre le citoyen contre le pouvoir de l'État, qui me semble être une doctrine classique du libéralisme non moins classique, ces articles sont le cœur d'une constitution. L' habeas corpus, dont ces articles sont la traduction moderne, est en quelque sorte la mère de toutes les constitutions. L'option que nous avons prise d'avoir une constitution pédagogique, qui permette au citoyen de savoir exhaustivement quels sont ses droits constitutionnels, impose que ces articles soient dans notre texte. Reste le problème de leur contenu. Et là, on voit clairement quelle est l'intention de ceux qui veulent amender notre texte. Ces articles, nous les avons votés. Les formulations qu’on dit excessives ont recueilli une majorité au vote de cette Assemblée l'autre jour. Donc, l'intention de ces amendements n'est pas d'alléger notre texte, mais de revenir, par un artifice de procédure, sur des articles déjà votés et qu'on veut supprimer parce qu'on n'est pas d'accord avec leur contenu. Vous avez refusé, à tort à mon avis, parce qu'il y avait d'autres justifications, de revenir sur un vote déjà opéré par cette Assemblée tout à l'heure; vous refuserez à nouveau, cette fois-ci à juste titre, de revenir sur des votes déjà exprimés au sujet de ces quatre articles.
F Roger NORDMANN
J'ai dans la main la Constitution neuchâteloise, rédigée par le Libéral Jean-François Aubert. Et bien, dans cette Constitution neuchâteloise, il y a exactement quatre articles sur les garanties procédurales et ils sont plus longs que les nôtres. A mon avis, ce n'est pas un hasard si les Neuchâtelois ont fait ce choix. C'est fondamentalement la protection de l'individu contre la force étatique. Je ne comprends absolument pas la position de certains Libéraux, qui consisterait à vouloir renier ces garanties protégeant l'individu contre l'État. Cela me paraît fondamental, c'est quand même la liberté qui est en jeu. Je vous invite donc à vous tenir au texte de la commission de rédaction. Je vous remercie.
F Christelle LUISIER
J'aimerais revenir brièvement sur les interventions de nos collègues Cherix, Nordmann et Gonthier. Le rôle d'une constitution, qu'elle soit fédérale ou cantonale, est effectivement de protéger les citoyens contre l'État, de protéger les libertés des personnes. Je crois que, sur ce constat, nous sommes tous d'accord. Maintenant, notre amendement va exactement dans ce sens; simplement, nous en restons au principe, sans vouloir entrer dans les détails d'une loi, d'un code de procédure. Si vous regardez notre projet, il y a énormément de droits qui sont essentiels pour sauvegarder la liberté des personnes. Reprenez la liberté d'établissement, la liberté de l'art, autant de droits qui sont absolument fondamentaux dans un État de droit. Or, pour chacun de ces droits, nous nous sommes contentés d'une rédaction tout à fait light, une rédaction de principe, sans entrer dans les détails de chacun de ces droits, car nous avons alors reconnu que c'est à la loi ou à la jurisprudence de les préciser. Donc, pour cet article-là, je ne vois pas pourquoi l'on ferait une différence, alors que pour d'autres articles, pour d'autres droits qui sont tout aussi essentiels, nous n'avons pas voulu entrer dans une rédaction détaillée, la rédaction d'une loi. Je reconnais volontiers que certains points qui sont présents dans les articles que nous avons votés ne se retrouvent pas dans la version Bühlmann; mais, là encore, je reste persuadée que c'est au code de procédure et non à la Constitution d'améliorer ces points très précis, non à notre charte fondamentale. Je donne simplement un exemple: si l'on est favorable à une modification du système concernant le moment à partir duquel une personne privée de liberté peut avoir un défenseur, il vaut mieux procéder par une modification technique de la loi, qui prévoira peut-être un délai de cinq ou dix jours… il vaut mieux procéder par une modification technique de la loi, qui permet d'avoir une solution nuancée, alors que la Constitution ne le permet pas. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Luisier. Je vous prie de ne pas utiliser les micros, de ne pas peser sur les touches, si j'ai bien compris, parce que ça coupe le micro de l'orateur, si on s'amuse de cette manière. Mais je vous rassure tout de suite: ici, nous avons le moyen de savoir qui c'est! Bien. Mesdames et Messieurs, il me semble que la parole n'est plus demandée. La discussion est close. Je vais donc passer au vote et je vous propose la manière de voter suivante. De toute évidence, les amendements Bühlmann Kulling d'un côté, et Conod de l'autre, sont exclusifs, c'est ou bien l'un ou bien l'autre. Dans un premier vote, nous opposerons l'amendement Bühlmann Kulling à l'amendement Conod. Puis ensuite, nous mettrons aux voix l'amendement qui aura gagné contre le texte des articles 27 à 30, tels qu'ils ont été adoptés précédemment. Ensuite, si l'amendement Kulling Bühlmann ou l'amendement Conod n'est pas accepté en vote final, nous devrons reprendre chacun des articles 27 à 30 pour les voter en vote final. L'amendement Bühlmann Kulling opposé à l'amendement Conod. Sur 158 suffrages exprimés, l'amendement Conod l'emporte, par 74 voix contre 63, avec 21 abstentions. Amendement Conod opposé au texte des articles 27 à 30. Sur 158 suffrages ex-primés, l'amendement Conod l’emporte par 80 contre 74, avec 4 abstentions. M. Nordmann, j'ai un amendement conditionnel, à moins que… C'est sur la procédure?
F Roger NORDMANN
Je demande que ce vote soit enregistré nominalement au procès-verbal, puisque je crois que c'est ça qui remplace la procédure d'appel nominal. S'il vous plaît.
F Jean-François LEUBA
Est-ce que la proposition de M. Roger Nordmann est appuyée? Largement. Alors, nous considérons qu'il s'agit d'un appel nominal et il sera enregistré comme appel nominal. Mais je souhaiterais que les demandes d'appel nominal soient signalées avant le vote et pas après, ce serait préférable. M. Ostermann a la parole.
F Roland OSTERMANN
Je n'interviens pas dans le cadre la procédure. Mais puisque nous venons d’accepter cet article, je ne peux m'empêcher de vous suggérer de le renvoyer à la commission de rédaction pour amélioration. Je sais que son auteur M. Conod en fait partie, mais je crois qu'il a eu une défaillance et que l'article qu'il nous a soumis dit exactement le contraire de ce qu'il souhaite: "Nul ne peut être poursuivi ou arrêté que dans les cas déterminés par la loi". Cela veut dire que, pour être poursuivi, il faut autre chose en plus de ce qui est déterminé par la loi. Je vous suggère donc de mettre non pas "nul" mais "quiconque", parce que la double négation torpille complètement l'énoncé. En écrivant "Quiconque ne peut être poursuivi… etc., nous aurons un article qui correspond au moins au sentiment d'une partie de l'Assemblée.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Ostermann. Celui-ci suggère que la commission de rédaction corrige s'il y a lieu; elle examinera s'il y a lieu de faire cette correction. M. Roger Nordmann demande une contre-épreuve à l'appel nominal du vote qui est intervenu tout à l'heure. Cette demande est-elle appuyée? Oui? Alors, nous faisons la contre-épreuve.
F Jean-François LEUBA
Il y a un amendement conditionnel: Mme Bovay a la parole. Elle considère qu'elle l'a déjà développé? Alors, il faut reprojeter l'amendement conditionnel sur l'écran. Mme Bovay, est-ce que ça remplace l'amendement Conod ou est-ce que ça le complète? Parce que ce n'est pas du tout la même chose. Ça complète l'amendement Conod? C'est donc un sous-amendement à l'amendement Conod. Mme Bovay dit que ça complète l'amendement Conod. Les auteurs des amendements sont responsables de ce qu'ils disent. Si Mme Bovay veut compléter l'amendement Conod par ce texte, elle a parfaitement le droit de proposer de compléter l'amendement Conod par ce texte, ça me paraît clair. La discussion est ouverte sur la proposition de Mme Bovay. M. Bühlmann
F Philippe NORDMANN
Si, à chaque fois que nous perdons dans un vote, nous voulons rouvrir la discussion, ça ne va pas [brouhaha]. En première lecture, on s’est fait plusieurs fois refuser [brouhaha]… Je regrette, l'amendement de Mme Bovay a été déposé sur mon amendement, il n'a pas été déposé sur l’autre. C'est un choix qu'a fait Mme Bovay. Elle aurait pu le déposer conditionnel au deux: elle ne l'a pas fait. Je suis navré. L'Assemblée décidera ce qu'elle veut. Mais il est clair – c’est au tableau – qu’elle l’a déposé sur mon amendement, qui a été refusé.
F Jean-François LEUBA
Bien, je souhaiterais pouvoir continuer à conduire les débats. Je considère que Mme Bovay a déposé un amendement qui complète l'amendement qui a gagné, c'est-à-dire l'amendement… Alors, Mme Bovay s'explique, s'il vous plaît.
F Judith BOVAY
Alors, je m'explique. L'amendement Conod est un sous-amendement de l'amendement Bühlmann Kulling. On est bien d'accord? Donc, le sous-amendement a été accepté. En l'occurrence, l'amendement conditionnel reste.
F Jean-François LEUBA
Mais personne ne discute, Mme Bovay, que cet amendement reste. Au départ, l'amendement Conod était un sous-amendement de l'amendement Bühlmann Kulling. Ensuite, M. Conod l’a modifié, il en a fait un autre amendement. Maintenant, tout cela a été voté, on ne revient pas là-dessus. Mais votre amendement, bien sûr, est en discussion maintenant. C'est ça qui est l'objet de la discussion. Nous pouvons voter votre amendement. Si une majorité souhaite ajouter votre texte au texte de M. Conod, et bien ce sera le texte de la Constitution. M. Recordon a la parole, il renonce… il faudrait prendre la parole quand je vous la passe.
F Luc RECORDON
C'est un vrai plaisir, Monsieur le président. Je tiens à dire que le texte que nous avons adopté, à l'appel nominal, finalement, est parfaitement vidé de son sens. Il est à mes yeux – c'est une opinion évidemment tout à fait subjective – lamentable, compte tenu des travaux préparatoires. Et le minimum minimorum, c'est d'en sauver quelques bribes, avec l'amendement proposé par Mme Bovay. Je crois que, sans cela, on peut tout aussi bien, sur ce genre de texte, rester à la maison. Nous avons fait tabula rasa ce matin et je pense qu'il nous reste une chance de reprendre nos esprits en acceptant – ce ne sera pas génial, mais ce sera déjà quelque chose – l'amendement de Mme Bovay.
F Jean-François LEUBA
Bien. J'aimerais rappeler qu'il ne sert à rien de critiquer la majorité: elle a raison dans un parlement, et les votes sont intervenus [rires]. M. Piguet.
F Jean-Michel PIGUET
J'aimerais abonder dans le sens de ce que vient de dire M. Recordon. Excusez-moi, Monsieur le président, je me permettrai tout de même de m'étonner que bon nombre de personnes dans cette salle, et notamment des juristes spécialisés en droit constitutionnel, osent dire ici à cette tribune que l'habeas corpus, qui est l’une des garanties les plus anciennes, les plus reconnues, les plus solidement ancrées dans l'ensemble des constitutions que l'habeas corpus n'est qu'un détail qui peut figurer dans une loi.
F Judith BOVAY
Comme je l’ai dit tout à l’heure, dans un premier temps, la proposition de M. Conod était un sous-amendement, mais il l’a modifiée en cours de route. En fonction de ça, mon amendement conditionnel, à mon avis, s’est aussi modifié en cours de route.
F Luc RECORDON
Je ne crois pas m’être tout à fait bien fait comprendre, en tout cas de notre coprésident. Je pense bien que, sur le plan politique, sur le plan du fond, il lui est assez désagréable que je critique le vote de tout à l’heure. En revanche, sur le plan procédural, qu’il me concède qu’il est fort utile de venir ici le critiquer, si j’essaie de le faire légèrement modifier, ce qui, au vu de la procédure appliquée par ledit coprésident, est ce que nous sommes en train de faire.
F Jean-François LEUBA
Bien. La parole est-elle encore demandée? Cela ne paraît pas être le cas. Nous allons donc voter. Il me semble que le vote est assez clair, pour tout le monde: nous votons OUI ou NON sur l’adjonction, à l’amendement que vous avez adopté tout à l’heure, du texte de Mme Bovay. Amendement Bovay qui propose (ajout de texte). Accepté par 85 voix contre 69, avec 4 abstentions, sur 158 suffrages exprimés. Mesdames et Messieurs, après ce marathon judiciaire, je pense qu’il faut introduire une pause. Je vous prie de regagner vos places à 11 h. 15 très précises.
F Jean-François LEUBA
Nous devons maintenant passer au vote sur l’article 27. Article 27 – Garanties générales de procédure: 104 suffrages exprimés, adopté par 82 OUI, 17 NON et 5 abstentions. 1 Nul ne peut être poursuivi ou arrêté que dans les cas déterminés par la loi et selon les formes qu'elle prescrit. Tout individu arrêté doit être entendu par le magistrat compétent dans les 24 heures qui suivent son arrestation. 2 Pour le surplus, les garanties procédurales et en cas de privation de liberté selon la Constitution fédérale sont reconnues. 3 Toute personne détenue dans une procédure pénale a le droit d'être défendue. 4 Toute personne privée de sa liberté a le droit de faire informer les tiers qui doivent être avisés. 5 Toute personne ayant subi un préjudice en raison d'une privation de liberté injustifiée a le droit d'obtenir pleine réparation.
Article 31 – Droit de pétition
Texte proposé par la commission de rédaction:
«1 Toute personne a le droit, sans encourir de préjudice, d'adresser une pétition aux autorités et de récolter des signatures à cet effet.
2 Les autorités sont tenues d'examiner les pétitions qui leur sont adressées. Les autorités législatives et exécutives sont tenues d'y répondre.»F Anne-Catherine LYON
Nous avons cherché à simplifier la teneur de l’article "Droit de pétition", sans en modifier le fond. Nous avons aussi cherché, à l’alinéa 2, à préciser quelles sont les autorités qui sont, le cas échéant, tenues de répondre. Nous avons apporté cette précision pour sortir l’autorité judiciaire de l’obligation de répondre. Celle-ci peut certes être saisie de pétition, car on ne peut pas empêcher une citoyenne ou un citoyen de le faire. Mais nous avons supprimé l’obligation, pour l’autorité judiciaire, de devoir répondre à de telles pétitions. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Nous avons ici un amendement de Mme Jordan. Mme Jordan a la parole.
F Andreane JORDAN
Le groupe Libéral et Indépendant propose à l’Assemblée de reprendre l’article 33 de la Constitution fédérale, en lieu et place du texte de la commission de rédaction. Dans le cadre de l’alinéa 1, la reprise de la Constitution fédérale n’implique en fait que des modifications de forme, l’idée étant de ne pas adopter une formulation autre que celle de la Constitution fédérale lorsque notre intention est de dire la même chose. J’ai déjà eu l’occasion de vous le dire la semaine dernière, je le répèterai brièvement: l’adoption d’un vocable différent pourrait créer un doute dans l’esprit du juge quant à savoir si la portée de notre disposition est identique à celle de la Constitution fédérale ou non. Le texte de la commission de rédaction crée ainsi une insécurité juridique inutile, raison pour laquelle il est judicieux d’adopter le texte de la Constitution fédérale. Cette préoccupation de forme est évidemment valable pour l’alinéa 2. Toutefois, dans ce cadre-là, la reprise du texte de la Constitution fédérale implique que l’on renonce à indiquer l’obligation qu’ont les autorités de répondre aux pétitions qui leur sont adressées. Le groupe Libéral est d’avis que cette mention n’est pas nécessaire, le devoir de prendre connaissance des pétitions impliquant [de fait] le devoir d’y répondre. Les autorités, notamment fédérales, le font déjà, sans qu’un texte constitutionnel ne le leur impose. Il y va de leur propre autorité, il s’agit d’une question de bon usage. Je crois qu’elles sont suffisamment aptes à savoir ce qu’elles doivent faire et comment. Nous vous proposons donc d’adopter l’article 33 de la Constitution et de soutenir notre amendement. Je vous remercie.
F Luc RECORDON
L’amendement, à son premier alinéa, me paraît relativement indifférent. En revanche, son second alinéa me paraît assez malheureux pour la raison suivante. Je crois que nous sommes tous conscients du fossé qui s’est creusé – et qui malheureusement se creuse toujours plus – entre les citoyens et les autorités dans notre pays. Je crois que c’est une chose délicate, c’est une chose grave. Le fait de prendre véritablement très au sérieux les pétitions et au moins de se donner l’obligation d’avoir à y répondre est un minimum que nous devons accorder à ceux qui n’exercent pas le pouvoir et pour qui nous pouvons être amenés, par exemple ici dans cette Assemblée constituante, ou dans un parlement ou ailleurs dans une autre autorité, à exercer la souveraineté en leur nom. Il ne faut jamais l’oublier. La moindre des choses, c’est que les citoyens qui ont délégué leur pouvoir à des autorités puissent s’adresser à ces autorités et recevoir une réponse. Même si, bien souvent, on le sait, cette réponse sera insatisfaisante, sera très brève. Mais je pense que c’est le minimum de correction. Simplement, l’obligation de prendre connaissance, sans avoir à répondre, c’est vraiment trop peu. Revenir à un texte aussi réducteur, ce serait glisser véritablement sur une pente assez défavorable dans les relations entre les autorités et les citoyens.
F Jean-Michel PIGUET
J’ai de la chance ce matin: c’est la deuxième fois que j’interviens après quelqu’un qui a dit pratiquement l’essentiel de ce que je voulais dire, ce qui me permet d’être plus court et de relever encore deux points. Je crois qu’il ne faut pas, ici, avoir peur des termes utilisés. L’article qui nous est proposé, que nous avons voté dans le projet, est d’une limpidité parfaite, et je ne vois pas l’once d’un risque d’interprétation qui pourrait poser problème, au seul motif que c’est rédigé de manière différente de l’article de la Constitution fédérale. Mais on a décidé une fois pour toutes, ici, qu’on ne recopiait pas la Constitution fédérale, qu’on essayait de faire notre propre texte. Je pense qu’il faut bravement continuer dans cette voie. Sur l’obligation de répondre, je pense que, au contraire, c’est effectivement essentiel, comme l’a dit M. Recordon, de prévoir cette obligation de répondre. Elle ne va pas tellement de soi. Elle va peut-être de soi, dans les administrations bien structurées, telle que l’Administration fédérale, qui a été citée. Mais je vous rappelle que cet article s’adresse à toutes les autorités, y compris aux plus petites communes où ces choses-là ne sont peut-être pas si évidente: il n’y a pas de juristes et peut-être qu’on est moins attentif à ce genre de droit. Je vous invite donc à voter l’article proposé dans notre projet.
F Anne BIELMAN
C’est une intervention en forme de boutade: je remercie Mme Jordan de m’avoir appris que, pour les autorités fédérales, le fait de prendre connaissance était équivalent au fait de répondre. Je pense que, dorénavant, je renverrai cet argument lorsque je recevrai ma feuille d’impôts: j’en prendrai avec plaisir connaissance [applaudissements].
F Alain GONTHIER
Une simple petite chose. Concernant l’alinéa 1, il a été dit que les modifications proposées étaient anodines; ça ne me semble pas vraiment être le cas. La deuxième partie de l’article mis en consultation me semble très importante. L’amendement transforme cet alinéa, grosso modo, en marteau sans manche. C’est bien joli de pouvoir écrire soi-même une lettre aux autorités. Si le droit de récolter des signatures pour cette pétition n’est pas garanti, que devient le droit de pétition? Ce n’est plus une pétition, c’est le droit d’adresser des observations respectueuses aux autorités, qui n’est guère contesté. Je crois que c’est d’autant plus important si l’on considère que la pétition est le seul droit "politique" actuellement reconnu à une série de gens, une partie de la population, particulièrement la population immigrée; on verra si on lui accorde plus de droits dans la suite du débat. Mais au stade actuel, c’est le seul droit qu’a cette partie de la population de s’exprimer. Lui garantir le droit de récolter des signatures me semble extrêmement important. Donc, je vous prierais de maintenir le texte de la commission de rédaction.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Gonthier. Il me semble qu’il n’y a plus d’intervenants qui soient assis au premier rang. Je pars de l’idée que la discussion peut être close; elle l’est. Amendement Libéral Jordan (reprendre l’art. 33 de la Constitution fédérale). Sur 152 suffrages exprimés, l’amendement est rejeté par 120 voix contre 28, avec 4 abstentions. Article 31 – Droit de pétition: sur 150 suffrages exprimés, adopté par 136 voix contre 5, avec 9 abstentions 1 Toute personne a le droit, sans encourir de préjudice, d'adresser une pétition aux autorités et de récolter des signatures à cet effet. 2 Les autorités sont tenues d'examiner les pétitions qui leur sont adressées. Les autorités législatives et exécutives sont tenues d'y répondre.
Article 32 – Libertés politiques
F Jean-François LEUBA
Madame la présidente de la commission de rédaction? Non, pas d’intervention? Je n’ai pas de proposition d’amendement pour cet article 32; la discussion est néanmoins ouverte. Elle n’est pas utilisée. Nous allons donc voter sur l’article 32, si ça ne va pas trop vite pour le secrétariat. Article 32 – Libertés politiques: sur 152 suffrages, adopté par 151 voix sans opposition, avec 1 abstention. Toute personne est libre d'exercer ses droits politiques sans encourir de préjudice.
Article 33 – Naturalisation et droit de cité
F Anne-Catherine LYON
La commission de rédaction se trouve devant une difficulté majeure, la première qu’elle rencontre, en ce sens qu’elle n’est pas en mesure de vous fournir un texte qui puisse servir de base à la deuxième lecture. En d’autres termes, nous ne pouvons pas fournir le texte qui serait, au sens de notre décision antérieure, la fin de la première lecture. En effet, lorsque l’on regarde l’article 33, surtout si on y ajoute l’article 164, on n’arrive plus à savoir de manière certaine et claire ce que nous avons voulu en tant qu’ Assemblée constituante, au moment où nous avons mené cette discussion. Il y a trop de contradictions dans la rédaction pour rerédiger, de manière claire, les intentions et la décision prise, en décembre dernier à l’aula de la maternité. Au sein de la commission de rédaction, nous avons discuté longuement sur l’interprétation à donner. La discussion a duré deux heures et à la sortie, nous n’étions pas plus fixé, car il y a trop d’interprétations possibles. Nous en sommes venus à la proposition suivante, qui est, non pas de conduire ici – ce qui était notre première idée – la discussion pour trancher sur des principes, puis rerédiger, parce que, expérience faite, à 180 personnes, ce sera encore pire. Notre proposition est de renvoyer ce débat à une commission ad hoc, composée d’un représentant – un spécialiste si l’on veut – de chacun des groupes politiques en confiant à cette commission ad hoc la tâche d’éclaircir, de reconstituer, maintenant, la volonté qui s’était exprimée à l’époque; pour donner à notre commission des indications claires, pour que nous puissions rerédiger l’article qui serait la fin de la première lecture. Ensuite, dans un deuxième temps, ce texte étant reconstitué, nous pourrons alors, tous ensemble, mener la deuxième lecture, voir si nous voulons changer nos intentions du départ ou non. Alors, je vous recommande et vous remercie de suivre cette proposition. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Lyon. Il y a une motion d’ordre de Mme Luisier. Elle renonce? Mme Luisier retire sa motion d’ordre. Bien. Alors, nous entrons dans la discussion, dans ces conditions. Il y a un amendement proposé par M. Haldy. On doit prendre votre proposition comme une motion d’ordre? Alors, j’ouvre la discussion sur la motion d’ordre. M. Haldy.
F Jacques HALDY
Je ne veux pas anticiper sur le développement de l’amendement que j’ai déposé mais, au fond, le débat m’y contraint d’une certaine manière. En effet, si, comme je l’ai proposé dans cet amendement, la procédure de naturalisation est renvoyée à la loi, notamment pour ce qui concerne les compétences, pour ce qui concerne les motifs de recours, il est clair que la mise au point d’un nouveau texte n’est, à ce moment-là, pas nécessaire, et que l’amendement tel qu’il est proposé permet, au fond, en toute cohérence, de renvoyer à la loi. Dès lors, je vous propose de conduire ce débat. Si cet amendement devait être finalement rejeté, il sera alors temps, éventuellement, de nommer une commission pour reformuler un nouveau texte. A vrai dire, je dois avouer que l’article qui a été adopté est si peu satisfaisant, à tous égards, que bien malin celui qui pourra dire quel est son sens et le transcrire. Je crois que le débat, dans cette petite commission, ne serait que le renouveau du débat de la commission de rédaction, sans que l’on puisse dire dans quel sens il faut aller. Je vous propose donc de continuer le débat sur cette disposition.
F Jean-François LEUBA
La discussion continue, mais exclusivement sur la motion d’ordre: on ne discute pas le fond.
F Jean-Michel PIGUET
Je n’interviens évidemment que sur la motion d’ordre. Je remercie M. Haldy de nous avoir fait une proposition, qui est digne d’intérêt. Je n’entre pas en matière maintenant. Mais je pense que si on entrait en matière maintenant sur cette proposition, le débat s’ensablerait et risquerait fort de partir dans toutes les directions, pour la simple raison que la philosophie qui est à la base de cette disposition n’est pas claire. Dans le fond, au sein du groupe Forum, nous avons beaucoup discuté de cet article. On est d’accord sur un point, M. Haldy et tout le monde aussi, je pense: c’est en tout cas que l’article que nous avons sous les yeux n’est pas une bonne base de travail, il n’est pas suffisamment clair et il est plein de contradictions. Mais au-delà de ça, il reflète une sorte de malentendu, peut-être au sein de cette Assemblée, sur les principes fondamentaux auxquels on entend se rallier. Est-ce qu’on veut que la naturalisation réponde à une démarche plutôt administrative, c’est-à-dire aboutisse à une décision comme toutes les autres décisions sont prises, préparée dans l’administration – c’est déjà le cas maintenant pour les naturalisations – mais prise au niveau de l’administration de l’exécutif, avec un droit de recours? Ou est-ce qu’on veut garder cet aspect de fait du prince, d’acte de souveraineté politique, avec les dérives que l’on a pu connaître dans notre pays à ce sujet… Je crois que, sur ces deux options, qui sont très importantes, il faut que nous nous déterminions et que nous sachions, au vu de nos précédents débats, ce que nous voulons, comme le propose la commission de rédaction. Sans quoi nous ne ferons pas aujourd’hui du bon travail, j’en suis convaincu. Je pense donc que la proposition de la commission de rédaction est la sagesse même. Je vous invite à la suivre.
F Luc RECORDON
Pour ma part, je vois deux arguments qui militent contre la proposition de M. Haldy. Tout d’abord, non seulement il y a de l’inclarté dans le texte qui a été voté au premier débat, mais la conséquence est que si l’on discute sur le texte de M. Haldy, qui est compréhensible, et qu’on ne sait pas à quoi il s’oppose véritablement, on aura un faux débat. En pratique, ça veut dire, alors même que nous sommes en deuxième débat, que nous n’aurons plus ensuite qu’à choisir, en troisième débat, entre un texte incompréhensible et l’amendement de M. Haldy, qui a de fortes chances de passer, parce qu’il est le seul des deux qui soit compréhensible. Donc, on fausse complètement le sens même de la procédure. Par ailleurs, si l’on cherche à éviter cela, et il est inévitable que l’on cherche à éviter cela si on entre sur le fond, alors on entrera précisément dans un débat de principe assez oiseux, incertain, sur la base de textes imprécis, ce que, avec pertinence, la commission de rédaction a voulu éviter et contre quoi elle nous a mis en garde. Raison pour laquelle il n’y a pas d’autre solution respectueuse de l’esprit de la procédure que d’accepter le renvoi du texte, ce qui va à peu près dans le même sens, d’ailleurs, que l’amendement radical qui avait été déposé et qui tendait à attendre au moins une semaine pour avoir le temps de clarifier les choses.
F Daniel BOVET
Je ne veux pas me prononcer sur l’utilité de renvoyer ou non cette question à une commission. Mais il me semble que s’il doit y avoir une commission, ça ne doit pas être une commission où chaque groupe serait représenté par un membre et dont la mission serait de dégager la volonté exprimée dans le premier débat. Parce que cette commission, avec ce mandat-là, ne serait qu’une deuxième commission de rédaction. Il me semble que s’il y a quelque chose à faire, c’est de nommer une commission politique, où les groupes seront représentés proportionnellement à leur importance, pour dégager une volonté politique. La proposition que je fais ici est un sous-amendement à la proposition de la commission de rédaction: s’il faut une commission, que ce soit une commission politique. Je ne me prononce pas sur le fait de savoir s’il en faut une ou non.
F Anne-Catherine LYON
Je crois que le souci exprimé par la commission de rédaction est de reconstituer cette volonté: plutôt qu’une commission politique, ce serait bientôt une commission archéologique [rires]. Nous pouvons certes modifier la composition ou trouver la meilleure manière d’arriver, non pas à un accord, mais à une reconstitution de cette volonté, pour pouvoir produire un texte qui soit clair. Ensuite, nous pourrons avoir le deuxième débat et débattre d’objets politiques. Mais nous avons en ce moment une grosse incertitude sur la restitution écrite des propos tenus lors du premier débat.
F Jacques HALDY
Je crois effectivement que cette incertitude existe. Je ne crois pas qu’une petite commission de représentants de groupes politiques pourra faire mieux que la commission de rédaction et lever cette incertitude, car les débats ont été très touffus et il est quasiment impossible – autrement la commission de rédaction aurait réussi à le faire – de dégager une volonté claire et logique. C’est d’ailleurs une étape à laquelle je ne suis pas formellement opposé, mais elle ne me paraît pas de nature à clarifier le débat, sinon que, peut-être, il y aura deux variantes qui seront proposées, chacune interprétant à sa manière les premiers débats. Et, dans ces circonstances-là, cette proposition, qui peut être séduisante sur le plan théorique, me paraîtrait pratiquement ne faire que reculer le débat que nous devrons avoir.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Haldy. M. Gonthier. Je vous rappelle que nous sommes toujours sur la motion d’ordre.
F Alain GONTHIER
Il me semble qu’un certain nombre de points, en ce qui concerne la volonté de la première lecture, ne sont pas si obscurs que ça. Mais ce qui me semble compliqué, c’est leur intégration dans un texte légal, qui soit possiblement cohérent avec les évolutions législatives fédérales. Le souci qu’on avait eu, dans la commission 3, était de s’accrocher au droit existant fédéral et de simplifier la procédure, de prévoir la procédure de recours et de prévoir qu’on ne puisse pas taxer les gens qui demandent la naturalisation. Grosso modo, c’était ça: on a essayé de trouver une formule qui s’accroche à l’état de la législation existante. Je crois que, dans ce sens-là, l’idée d’une commission qui pourrait – ou même, à mon avis, devrait – s’attacher un ou plusieurs experts, ce qui, justement, permettrait de résoudre ces problèmes de technique législative, serait une bonne solution, parce qu’on aurait un choix entre deux choses légalement ou constitutionnellement possibles, et pas entre un texte impossible, vu les évolutions qui sont en cours, et un texte possible mais plus réducteur que celui que nous avons voté en première lecture.
F Jean-François LEUBA
Bien. Est-ce que je peux considérer que tous ceux qui souhaitaient s’exprimer l’ont fait? Alors, je vais mettre au vote la proposition de la commission de rédaction. Cette proposition consiste à renvoyer à un groupe de travail l’article 33, pour tenter de rédiger un texte qui corresponde approximativement à la volonté manifestée par l’Assemblée! Si cette proposition est acceptée, je mettrai au vote la proposition de M. Bovet, que ce ne soit pas un groupe de travail avec un représentant de chaque groupe politique, mais qu’il soit plus ou moins proportionnel à la force des groupes politiques. Proposition de la commission de rédaction: renvoi à un groupe de travail. Sur 152 suffrages, le renvoi est accepté par 103 voix contre 45, avec 4 abstentions. M. Bovet a proposé, en divergence avec la commission de rédaction, un groupe de travail composé proportionnellement aux forces des groupes politiques de cette Assemblée. J’ouvre la discussion sur cette proposition. Elle n’est pas utilisée. Je la mets immédiatement au vote. Proposition de M. Bovet: renvoi à un groupe composé proportionnellement aux forces des groupes politiques. Sur 152 suffrages exprimés, la proposition est re-poussée par 80 voix contre 60, avec 12 abstentions. L’article 33 est provisoirement suspendu, jusqu’à ce que le groupe de travail, qui sera désigné par les groupes politiques, j’imagine, dans la composition que fixera le comité ou la présidence.
Article 34 – Minimum vital et logement d’urgence et
Article 35 – Protection de la santé et de la dignitéTexte proposé par la commission de rédaction:
Art. 34 – Minimum vital et logement d’urgence
1 Toute personne dans le besoin a le droit de recevoir les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.
2 Elle a droit à un logement d'urgence approprié.Art. 35 – Protection de la santé et de la dignité
1 Toute personne a droit aux soins médicaux essentiels et à recevoir l'assistance nécessaire devant la souffrance.
2 Elle a droit à la protection de la santé et aux informations nécessaires à celle-ci.
3 Elle a le droit de mourir dans la dignité.
4 Toute personne vulnérable, dépendante, handicapée ou en fin de vie a droit à une attention particulière.F Anne-Catherine LYON
La commission de rédaction a jugé utile et important de regrouper l’article "Minimum vital" et celui de "Logement d’urgence", pour indiquer par là que c’est un peu le kit de survie – si vous me passez l’expression – auquel chaque personne a droit; donc, regroupement des articles dans un premier temps. Puis, nous avons modifié quelque peu la formulation de l’alinéa 1, pour en faire disparaître, la notion de "minimum vital". Cette suppression a pour but d’éviter une confusion possible avec la notion du "minimum vital" se trouvant, par exemple, dans la Loi sur la poursuite pour dettes et la faillite. Mais nous avons conservé "minimum vital" dans l’intitulé, pour que tout un chacun comprenne l’intention de cet article. Merci.
F Jean-François LEUBA
Sur cet article, nous avons un amendement de M. Gonthier. M. Gonthier a la parole.
F Alain GONTHIER
Il me semble que la proposition de la commission de rédaction est la conséquence d’une mauvaise interprétation des articles adoptés en première lecture et de l’intention originelle de la commission 3. Il me semble que les droits qui sont couverts par ces deux articles ne sont pas les mêmes et que les bénéficiaires ne sont pas les mêmes non plus. Des discussions de la commission 3 et aussi du titre de l’article d’origine "Logement d’urgence", il ressort clairement que le logement dont il est question ici n’a pas grand chose à voir avec le minimum vital. Le public cible – si on peut appeler cela comme ça – du logement d’urgence n’est pas nécessairement quelqu’un qui est dans la misère, mais quelqu’un qui est frappé par une catastrophe, un incendie ou toute autre chose qui détruit le logement dans lequel il habite. A mon souvenir, il a été plusieurs fois dit, dans les discussions que nous avons eues dans la commission 3, que ça visait simplement à remplacer, dans l’urgence, un appartement, et qu’il n’y avait pas du tout l’idée, là derrière, de revenu. Alors, on peut discuter après ça de savoir si cette notion de "logement d’urgence" tous azimuts, s’adressant à toute personne frappée par la destruction de son logement, doit être de rang constitutionnel ou non: c’est une autre affaire. Mais il me semble en tout cas que ce regroupement-là n’est pas correct. Évidemment que si on le regroupe, la remarque que fait sauf erreur le professeur Mahon s’applique tout à fait, puisque, dans la notion de "minimum vital", ou dans la notion de "dignité humaine", le logement serait compris, et le deuxième alinéa n’aurait dès lors plus grand sens. C’est le principal argument pour lequel je pense qu’il faut reséparer ces deux alinéas en deux articles, puisqu’ils ne traitent pas de la même chose. Maintenant, dans le premier alinéa, je ne comprends pas très bien. Il nous semblait, quand nous l’avons discuté en commission 3, que la notion de "minimum vital", au contraire, était quelque chose de relativement clair, qu’il y avait plusieurs notions chiffrées qui étaient établies. Évidemment, il y a une fourchette, il y a différents minimums vitaux selon les instances, selon les législations. Mais enfin, ça donne quand même une certaine fourchette, qui est chiffrée et relativement sûre, alors que la notion de "dans le besoin", si vous arrivez à m’expliquer que c’est plus clair que le minimum vital, je vous paie quelques sucettes!
F Christine GIROD-BAUMGARTNER
L’amendement que nous vous proposons vise à reprendre un à un les éléments définis comme droits fondamentaux qui figurent aux articles 34 et 35, afin de les regrouper en un seul article. En effet, à la lecture du rapport du professeur Mahon, il nous est clairement apparu que, à plusieurs reprises, le texte proposé mélangeait deux notions juridiques distinctes, à savoir, premièrement, les droits fondamentaux et, deuxièmement, les buts sociaux. Au début de nos travaux, l’Assemblée constituante n’a pas voulu créer un chapitre intitulé "Droits sociaux", ou éventuellement "Buts sociaux". Il nous faut maintenant clarifier la situation, en ne maintenant dans les "Droits fondamentaux" que les droits justiciables et donc, par définition, les droits qui sont suffisamment précis pour leur donner un caractère justiciable et, d’autre part, dans les "Tâches de l’État", les tâches qui ne sont pas justiciables. Par ailleurs, il ne s’agit pas uniquement d’une classification. Sachez qu’un droit rédigé clairement a plus de poids – puisqu’il vise un but précis, avec une application stricte – qu’un texte dans lequel sont mélangés les buts et les droits, duquel le juge seul devrait tirer une interprétation. C’est pourquoi, par souci de clarté, et afin d’éviter de donner de faux espoirs aux citoyens lecteurs de notre Constitution, le groupe Radical vous propose de classer les éléments par catégories, en un seul article intitulé "Minimum vital et logement d’urgence". Nous vous proposons une formulation simple et précise, qui réunit trois éléments, trois prestations minimales d’assistance: le droit au logement d’urgence, les soins médicaux essentiels et les moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine. Les éléments qui concernent la protection de la santé et l’attention particulière à toute personne vulnérable, dépendante, handicapée ou en fin de vie, sont des notions non justiciables. C’est pourquoi ils apparaissent déjà dans le chapitre que nous traiterons, les "Tâches de l’État", aux articles 65 et 70 de l’avant-projet. Reste maintenant le sixième élément contenu dans ces articles, qui est la délicate mais néanmoins très importante question du droit de mourir dans la dignité. Le groupe Radical vous propose de faire un petit saut en arrière et de placer ce droit dans l’article 9, intitulé "Dignité humaine", comme alinéa 2. Cet ajout s’entend comme un droit contenu dans les limites du droit fédéral. En aucun cas ne vise-t-il l’euthanasie active; il entend éviter un acharnement thérapeutique. Nous comptons par ailleurs sur l’appui de la commission de rédaction pour adapter les textes, si cela devait être nécessaire. J’ai encore déposé deux amendements conditionnels. Est-ce que je peux développer mes amendements conditionnels maintenant?
F Jean-François LEUBA
Pour la clarté de la discussion, on tranchera votre amendement principal et on prendra les amendements conditionnels ensuite.
F Éliane CARNEVALE
Je ne vais pas vous répéter les propos de notre collègue Mme Girod-Baumgartner concernant les conclusions du professeur Mahon sur les droits et les buts: elles sont claires et suffisamment convaincantes pour que nous les prenions en compte dans notre deuxième lecture. Parmi les droits sociaux qui sont réellement des droits fondamentaux, il faut relever que les deux articles qui nous intéressent sont du même ordre: l’article 34 concerne le minimum vital et le logement d’urgence, l’article 35 concerne la santé. Nous proposons donc de condenser tous ces éléments en un seul article, comme le font d’ailleurs les Constitutions fédérale, neuchâteloise – article 13 – et bernoise. Cette manière de faire donne d’avantage de cohérence et surtout de force à cet article. Premièrement, tout ce qui est justiciable se retrouve dans ce texte. Deuxièmement, cette formulation va plus loin que celle de la Constitution fédérale, puisqu’elle précise en quoi consiste l’aide et l’assistance. Troisièmement, les mots "dans le besoin" sont plus sociaux et moins misérabilistes que quiconque est dans une situation de détresse. Quatrièmement, les autres éléments de l’article 35 ne sont à l’évidence pas des droits fondamentaux et doivent être transférés dans les "Tâches de l’État". L’article, tel que nous vous le proposons, réunit parfaitement les éléments garantissant les besoins humains élémentaires, pour assurer une existence décente. Évitons des situations inadmissibles, telles que la mendicité, ou tout état de dénuement insupportable, indigne de la condition humaine. Notre article est clair, précis et efficace. Merci de le soutenir.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Carnevale. La discussion continue. Elle ne paraît plus être utilisée. Je vous propose la méthode suivante de votation. Tout d’abord, j’opposerai le texte de l’amendement Gonthier au texte de la commission de rédaction et, ensuite, le texte qui aura gagné au texte de l’amendement Girod. Est-ce que quelqu’un n’est pas d’accord avec cette proposition? Mme Aubert, je n’ai pas du tout oublié votre amendement. Mais comme il est conditionnel, il faut que l’amendement Girod soit accepté pour que votre amendement prenne sa valeur, autrement, il n’a pas de valeur. Vous pourrez juger tout à fait librement. Une fois que l’amendement Aubert aura été développé, on votera sur lui à ce moment-là. Amendement Gonthier (retour à la formulation mise en consultation). Sur 150 suffrages exprimés, repoussé par 93 voix contre 48, avec 9 abstentions. Amendement Girod-Baumgartner (regroupement des articles 34 et 35). 151 suffrages exprimés, adopté par 79 voix contre 68, avec 4 abstentions. Alors, dans ces conditions, Mme Aubert a la parole pour le développement de son amendement conditionnel.
F Josiane AUBERT
Cet amendement conditionnel du groupe Forum vous propose le transfert des alinéas 2 et 4 de l’article 35 à l’article 70 des "Tâches de l’État". La rédaction condensée des articles 34 et 35 proposée par les Radicaux est intéressante, car elle retient les droits directement justiciables. Les alinéas 2 et 4, soit la protection de la santé, les informations y relatives et l’attention particulière à donner à toute personne vulnérable, dépendante, handicapée ou en fin de vie, sont des notions certes importantes, mais qui trouveront parfaitement leur place dans les "Tâches de l’État", à l’article 70, "Santé". Par le transfert de l’alinéa 2, "droit de mourir dans la dignité", à l’article 9, et le glissement des alinéas 2 et 4 de l’article 35 à l’article 70, il devient tout à fait concevable d’avoir l’article proposé par les Libéraux pour l’article 35. Au nom du groupe Forum, je vous invite donc à accepter l’amendement conditionnel du transfert des alinéas 2 et 4 à l’article 70, "Santé". Merci de votre attention.
F Alain GONTHIER
J’avoue ma perplexité parce que, première chose, par le jeu du regroupement et du déplacement d’articles, nous avons réservé la garantie des soins médicaux essentiels aux personnes dans le besoin, alors qu’on peut fort bien imaginer qu’il y ait d’autres raisons que l’impécuniosité pour refuser à quelqu’un des soins essentiels, par exemple une limite d’âge. Toute personne au-delà de 75 ans, vu l’inflation des coûts de la santé, on lui refuse un certain nombre de soins essentiels, parce que, plus vite elle aura débarrassé le plancher, mieux ça sera, qu’elle soit impécunieuse ou pas. Et je pense que c’est une garantie, qui était comprise dans l’article d’origine, que toute personne reçoive la garantie des soins essentiels; nous l’avons remplacé par une garantie pour une petite catégorie de la population, et je pense que c’est un recul grave que nous venons de faire dans notre Constitution. Le deuxième problème que je vois, c’est que cette soustraction d’un alinéa de l’article 35 l’a gravement affaibli et que ce qu’il en reste est peu justiciable. Cependant, il me semblait que nous avions eu, en première lecture, un grand débat sur les informations nécessaires à la santé, que ce droit n’était pas négligeable, qu’il est effectif par rapport à un certain nombre de rapports entre le médecin et le patient, et que j’ai le souci qu’on le supprime dès lors qu’il n’est plus étayé dans un article justiciable. Je n’ai pas de proposition d’amendement, mais il me semble que tout ce que nous voulons en faire est un peu brouillon et représente un grave recul par rapport aux garanties que donnait le premier texte qui a été mis en consultation.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Gonthier. La discussion sur l’amendement Aubert est encore ouverte. Elle n’est pas utilisée, la discussion est close. Nous allons voter sur l’amendement Aubert. Je dois probablement quand même apporter une précision, me semble-t-il. Nous rouvrirons la discussion au moment où on sera à l’article 70, naturellement. C’est donc une intention de transférer; la commission de rédaction en tiendra sans doute compte pour sa propre rédaction, mais je crois que ce n’est pas un vote définitif en ce qui concerne l’article 70, je crois que cela me paraît clair. Au bénéfice de cette remarque, nous allons procéder au vote. Amendement Aubert (transfert des al. 2 et 4 de l'art. 35 à l'art. 70 "santé). Sur 148 suffrages, accepté par 81 voix contre 55, avec 2 abstentions. Je ne fais pas voter sur l’article 34 tel qu’il a été pour le moment voté, parce que nous devons quand même examiner l’article 35. J’ouvre la discussion sur l’article 35, bien que je n’aie pas d’amendement. La discussion n’est pas utilisée. Alors, je vous fait voter sur le nouvel article, qui s’appelle provisoirement 34, mais qui couvre 34 et 35. Article 34 (couvre également l’art. 35) – Minimum vital et logement d’urgence: sur 151 suffrages, adopté par 120, contre 20, et 11 abstentions. Toute personne dans le besoin a droit à un logement d'urgence approprié, aux soins médicaux essentiels et aux moyens indispensables pour mener une existence conforme à la dignité humaine.
Article 36 - Maternité
F Jean-François LEUBA
Madame la présidente de la commission de rédaction, pas de remarques? A l’article 36, nous avons un amendement Forum Dufour. Je passe la parole à Mme Dufour.
F Denyse DUFOUR
Lors des discussions avec la commission 3, cet article avait été adopté par la majorité de la commission 2, tel qu’il vous est présenté. Avant cette approbation, j’avais déjà souligné qu’il était très généreux pour les femmes – c’est moi qui l’avais souligné – si on le prenait à la lettre. En effet, toute femme ayant eu un enfant se trouve, sa vie durant, avant ou après un accouchement. Quant aux autres femmes, elles seraient protégées jusqu’à leur ménopause, et encore… Par cet amendement, je désire préciser les idées de la commission 2 et probablement celles de la commission 3. Cet article est à dissocier d’une assurance maternité, qu’elle soit fédérale ou cantonale, car nous savons tous que cette assurance maternité ne sera valable que pour les femmes salariées. L’échec du précédent projet fédéral est probablement dû au fait que les Démocrates-Chrétiens avaient voulu l’étendre à toutes les femmes. On ne peut leur en vouloir, puisque le peuple vaudois avait largement voté cette assurance maternité pour toutes les femmes. Le nouveau projet ne tient pas compte des femmes non-salariées, et ce sont précisément ces femmes dans le besoin que vise cet article. En conséquence, j’ai recentré la protection sur une courte distance, avec un délai se rapprochant des droits d’une femme salariée qui bénéficierait d’une assurance maternité. Les médecins de cette Assemblée et les femmes ayant eu un enfant connaissent les conseils de nutrition qui sont nécessaires pour mener à bien une grossesse. Après la naissance, que la femme allaite ou non, il est nécessaire de continuer à avoir une alimentation riche en protéines, vitamines et sels minéraux, afin de préserver la santé future. J’ai parlé des médecins et des mères. Les pères sont également concernés. Ils étaient alors de futurs pères, ils ne s’en souviennent probablement pas. J’ai vérifié auprès de mon mari. Il est vrai que notre fille ayant 38 ans, c’est très lointain. La seule chose dont il se souvienne, c’est que je mangeais beaucoup de fruits, trop mûrs et à jeter, qu’il ramenait des entrepôts de la Coop où il travaillait pendant les vacances. Nous étions alors un couple d’étudiants fauchés! Le droit fondamental à recevoir plus que le minimum vital, durant une courte période, est nécessaire si l’on veut avoir une mère en bonne santé et un bébé bénéficiant d’un bon départ dans la vie. Je vous demande donc de confirmer votre vote de première lecture avec la précision que je vous propose. Je vous signale que je demanderai un vote nominatif pour cette question importante de la maternité. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Dufour. Nous avons un amendement Radical Luisier. Mme Luisier a la parole.
F Christelle LUISIER
J’espère pouvoir vous convaincre que l’article 36, tel qu’on l’a voté en première lecture, que l’on soit sensible ou indifférent à la cause des femmes, pour ou contre une assurance maternité, est simplement mauvais, et qu’il n’a pas sa place dans notre projet de Constitution. Le débat politique sur l’introduction d’une assurance maternité doit avoir lieu, de même que le débat sur les allocations familiales pour toutes les femmes ou pour les femmes simplement salariées, mais ce n’est pas dans le chapitre sur les droits que la discussion doit être initiée. Nous aurons tout le loisir d’en parler lorsque nous aborderons le chapitre sur les tâches de l’État. Aujourd’hui, l’article que nous avons sous les yeux est un article qui, typiquement, peut être compris comme un but social, comme une déclaration de principe, mais qui n’est en tout cas pas un droit fondamental justiciable, directement invocable devant le juge. Et là, je cite le rapport Mahon, qui est tout à fait parlant à cet égard, puisqu’il nous dit que "le contenu de l’article est flou, qu’il n’apparaît pas suffisamment clair pour permettre son application directe par le juge. En particulier, les notions de ‘sécurité matérielle’ et l’expression ‘avant et après l’accouchement’ paraissent vagues pour une application directe". Or, je disais déjà lors de notre dernière séance, que l’ensemble des groupes politiques ici présents s’est toujours prononcé en faveur d’un catalogue de droits justiciables, afin que le citoyen puisse, à la lecture de la nouvelle Constitution, être sûr de la portée des articles qui y figurent. Par ailleurs, je vous renvoie aussi au rapport du professeur Mahon quant au problème récurent d’articulation entre droits et tâches. En gardant les deux sortes d’articles, on ne sait pas si l’article 36 est indépendant de l’article sur l’assurance maternité ou si ce droit n’est garanti que dans les limites de la législation sur cette assurance. Ce flou doit donc absolument être levé. Par ailleurs, je ne peux que constater que la proposition de Mme Dufour maintient les défauts de l’article voté dans l’avant-projet. Les notions floues de sécurité matérielle subsistent et les problèmes d’articulation droits/tâches ne sont pas du tout résolus. La norme ainsi élaborée pose donc les mêmes problèmes de justiciabilité que l’article de l’avant-projet. Pour toutes ces raisons, je vous invite donc vivement à être raisonnables, à ne pas maintenir cet article mal ficelé dans notre projet, et à discuter de la protection de la famille dans le cadre des tâches de l’État.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Luisier. Mme Jomini a déposé un sous-amendement à l’amendement Dufour; elle le développe maintenant.
F Viviane JOMINI
Le groupe Forum souhaiterait sous-amender l’article de Denyse Dufour car, comme chacune et chacun le sait, les femmes étant toujours imprévisibles, il est difficile de connaître plusieurs mois à l’avance une date d’accouchement. Par contre, la date du terme prévu de la naissance, elle, peut être fixée précisément par le médecin. Cette nouvelle formulation, qui ne change rien sur le fond, tend à prévenir des difficultés d’interprétation de l’article proposé. Merci.
F Irène WETTSTEIN
Le "minimum vital", terme retenu dans le titre de l’article 34, n’est pas suffisant en cas de maternité. C’est-à-dire qu’avec le minimum vital, une mère célibataire, enceinte, sans revenu, n’arrive pas à boucler son budget. Elle n’y arrive pas plus après la naissance de l’enfant. Je vais vous faire une démonstration chiffrée. D’après les Lignes directrices établies par la Conférence des préposés aux poursuites et faillites de Suisse, au 24 novembre 2000, pour le calcul du minimum vital, le montant de base mensuel, pour une personne vivant seule, est de 1’100 francs. A cela s’ajoutent le loyer et les primes d’assurance maladie. Une future mère dispose donc de 1’100 francs par mois, soit 36 francs par jour, pour se nourrir -et il a été dit que les besoins nutritionnels sont particuliers -pour s’habiller -et les besoins en habillement sont également particuliers -pour veiller aux soins de la santé; se chauffer, le gaz, etc., et j’en passe. Mais alors, où trouver l’argent pour aménager la chambre du petit bébé? Et la poussette, comment la payer? Et la layette du bébé? Enfin, bébé est là. Maman a droit, toujours d’après les préposés des OPF, à 250 francs par mois pour l’enfant. Comment s’en sortir? Le lait en poudre – désolé, maman n’arrive pas à allaiter, peut-être est-ce le stress dû aux soucis financiers – lui coûte 100 francs par mois. Les couches-culottes, changées à raison de six fois par jour, 90 francs par mois. Il lui reste donc, sur les 250 francs, 60 francs, soit 2 francs par jour, pour habiller le bébé. Un body coûte déjà 10 francs. Et zut, bébé grandit vite, il faut changer les habits! Et pour le soigner, et pour le nettoyer également, tout cela avec 2 francs par jour... Manque de pot, bébé est né à la veille de l’hiver, il faut encore acheter un sac de couchage chaud pour la poussette. Non, maman ne peut pas s’en sortir. D’ailleurs, d’après l’étude de la Commission fédérale de coordination pour les questions familiales, le coût mensuel d’un enfant est estimé à 1’500 francs, étude que j’ai là. Chers Constituants, vous qui êtes mamans, papas, grands-mamans, grands-papas, vous savez ô combien un enfant vous est cher, mais vous savez aussi ô combien il coûte cher! Le minimum vital n’est pas suffisant en fin de grossesse et après l’accouchement. Il faut plus, pas beaucoup plus, mais il faut suffisamment pour garantir un entretien digne à une mère et un enfant. Ceci est représenté par le terme "sécurité financière" que l’on trouve dans l’amendement. Je vous invite donc à voter l’amendement Dufour ou, subsidiairement, celui de Jomini. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Wettstein. Je signale que Mme Dufour a retiré son amendement au profit de celui de Mme Jomini. Je crois avoir dit ce que vous m’avez dit... Vous avez la parole, mais il faut avoir le micro aussi!
F Dominique BORY
Loin de moi l’idée de m’opposer à ce que toute femme puisse vivre sa grossesse, son accouchement, ainsi que la période qui suit, dans des conditions matérielles optimales. Cette tranche de vie, si elle comporte de nombreuses joies, a aussi des côtés moins sympathiques. Pouvoir compter sur des ressources financières et matérielles suffisantes peut résoudre bien des problèmes. Cependant, je pense que l’intitulé et le contenu de cet article sont trop flous pour figurer dans le chapitre des "Droits fondamentaux". En effet, la portée exacte de cet article est problématique, toute femme est, durant toute sa vie, avant et après un accouchement. D’autre part, que signifie "sécurité matérielle"? S’agit-il d’argent, de logement, de soins? Je vous rappelle que nous venons d’adopter un article garantissant à toute personne les besoins humains élémentaires pour assurer une existence décente. Le fait de pouvoir mener à bien sa grossesse et son accouchement est inclus dans ces droits. Et les droits ne s’arrêtent pas au moment de la naissance; les mois qui suivent peuvent aussi poser problème. L’article et les amendements que nous venons d’adopter vont donc bien dans ce sens. Mais revenons à l’article concerné. L’amendement du groupe Forum, soit celui de Mme Dufour, soit celui de Mme Jomini, semblerait régler une partie du flou dont j’ai parlé. Encore une fois, il existe déjà des lois et des aides pour les personnes en difficulté, quelles qu’elles soient, et la maternité y est incluse. Cessons dont d’allonger cette Constitution par des articles de déclarations de principe ou d’ouvertures qui, soit dit au passage, s’ouvriraient sur un vide juridique puisque, d’après l’avis du professeur Mahon, ce droit ne serait pas justiciable. Concentrons-nous sur l’essentiel, c’est-à-dire la création d’une assurance maternité, en donnant à l’État la tâche de poser les jalons de cette assurance maternité. C’est pourquoi je vous invite à soutenir l’amendement Radical en refusant l’amendement Forum ainsi que l’article 36 dans son entier. Merci.
F Anne BIELMAN
Je crois que, dans l’esprit des rédacteurs de la commission 3, cet article 36, "Maternité", visait une catégorie spécifique de femmes, celles qui n’avaient aucune sécurité matérielle: les femmes seules, sans soutien familial, les femmes sans travail, parfois dans la rue. Cela concerne donc une extrême minorité de femmes et non pas toutes les femmes comme semble l’indiquer, dans sa rédaction actuelle, l’article 36. Pour clarifier les choses et éviter une confusion entre cet article 36 et l’article 69 concernant l’assurance maternité, confusion qui a d’ailleurs été relevée par le professeur Mahon, Vie Associative dépose un amendement et propose la rédaction suivante pour l’article 36: "Toute femme dans le besoin a droit à la sécurité matérielle un trimestre avant et un trimestre après l’accouchement". Nous serions donc là dans une situation d’urgence, qui apparenterait les femmes enceintes sans revenu matériel aucun à une catégorie particulièrement démunie d’individus ayant droit au minimum vital et à un logement approprié.
F Roger NORDMANN
J’aimerais dire que la première des imprécisions relevées par Mme Luisier est en fait clarifiée par l’amendement Forum, quatre mois avant et quatre mois après le terme prévu. Ça résout notamment la question des éventuelles naissances prématurées puisque, à ce moment-là, il y aurait trois mois avant et cinq mois après, ce qui est de toute façon une période difficile. Ce premier élément est donc clarifié. Le deuxième élément est la notion de "sécurité matérielle", qui est peut-être encore plus clarifiée par l’amendement Bielman. Mais, dans tous les cas, il y a une sécurité nécessaire qui dépasse le minimum vital, face au logement, face à une gérance, face à toutes sortes d’incertitudes, face aux poursuites qu’il pourrait éventuellement y avoir, et je pense qu’il y a différents cas que nous n’imaginons pas toujours aujourd’hui où c’est utile. Je pense que la maternité est suffisamment importante pour qu’on lui donne une protection durable et qu’on vote cet article, qui protégera dans certains cas, même si l’essentiel des cas sera résolu par l’article sur les tâches, sur le régime. Mais je pense que c’est suffisamment important pour que la protection soit solide, et je ne comprends pas que l’on puisse s’opposer à cet article. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
M. Ostermann intervient encore. Je ne veux pas empêcher quelqu’un d’autre d’intervenir, mais si quelqu’un d’autre intervient, alors ce sera cet après-midi, parce que je crois qu’il faut quand même arrêter une fois ce débat, autrement j’ai peur que ce soit 13 h. 30 quand on l’interrompra. M. Ostermann a la parole.
F Roland OSTERMANN
Je ne voudrais pas que ce débat donne l’impression qu’il ne concerne que les femmes. Comme une femme est venue à cette tribune dire qu’elle voulait supprimer cet article, permettez à un homme de venir dire qu’il aimerait que cet article amendé subsiste. Tout d’abord, on l’a dit, il ne concerne pas toutes les femmes, il ne concerne que celles qui, effectivement, sont démunies en ces circonstances. C’est là que l’homme est en cause: si une femme se trouve dans des conditions difficiles à ce moment-là, c’est qu’elle n’est pas dans une famille harmonieuse et qu’il y a effectivement un grave manquement du côté masculin. Il est dès lors normal que la société vienne à son secours, dans une période où elle est particulièrement démunie et où elle ne peut pas, par sa simple action, réussir à remonter le courant. Il me semble que c’est alors faire preuve de solidarité masculine que de soutenir cet article dans un débat, qui encore une fois ne concerne que des femmes en détresse, une détresse très souvent imputable à un homme.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Ostermann. J’aimerais savoir qui souhaite encore intervenir. Je vous prie de vous annoncer si quelqu’un souhaite encore intervenir. S’il n’y a plus personne, nous passons au vote. Si quelqu’un souhaite encore intervenir, nous renvoyons le débat à cet après-midi. Il semble que la discussion ne soit plus utilisée. Nous pouvons donc passer au vote. Alors, je vous propose la méthode de vote suivante. Tout d’abord, nous allons opposer l’amendement de Vie Associative Bielman à l’amendement Jomini. Alors, vous avez l’amendement Jomini et l’amendement Bielman sur le tableau. Ceux qui sont favorables à l’amendement Bielman votent OUI, ceux qui sont favorables à l’amendement Jomini votent NON. M. Nordmann…
F Roger NORDMANN
Je demande la dissociation, puisque, en haut, il y a le terme prévu pour l’accouchement, puis il y a après l’accouchement, en bas. S’il vous plaît.
F Jean-François LEUBA
Non, cela n’est pas possible: vous ne pouvez pas diviser une phrase en deux. Vous votez ou l’un ou l’autre, ou alors il faut déposer encore un sous-amendement pour corriger l’amendement. Mais on ne peut pas saucissonner un amendement. Alors, je répète: ceux qui sont favorables à l’amendement Bielman votent OUI, ceux qui sont favorables à l’amendement Jomini votent NON. Le scrutin est ouvert.
Amendement Bielman opposé à l’amendement Jomini.
Sur 149 votes exprimés, l’amendement Bielman est accepté par 93 voix contre 47, avec 9 abstentions.Amendement Bielman opposé a texte de la commission de rédaction.
Sur 150 suffrages exprimés, l’amendement Bielman l’emporte par 133 voix contre 14, avec 3 abstentions.Amendement Bielman opposé à la proposition de suppression du groupe Radical.
Sur 151 suffrages exprimés, l’amendement Bielman l’emporte par 77 voix contre 70, avec 4 abstentions.Vote à l’appel nominal sur l’amendement Radical:
Ont voté Oui:
Mmes et MM. Abbet, Amstein, Berger, Bory Weber, Bovet, Bovy, Braissant, Bron, Buffat, Bühlmann Gérard, Bühlmann Willy, Carnevale, Charotton, Cohen-Dumani, Perdrix René, Cornu Pierre-Alain, Cossy, Cruchon, de Luze, Delay, Desmeules, Dessauges, Dufour, Favre, Freymond-Bouquet, Ghiringhelli, Gindroz, Girod, Glauser e, Grin, Gross, Guignard, Haldy, Henchoz, Henchoz-Cottier, Jaillet, Jaton, Jordan Kulling, Kaeser, Kulling, Labouchère, Loi Zedda, Luisier, Mages, Mamin, Margot, Marion, Martin, Mayor, Millioud, Nicod, Nicolier, Oguey, Ormond, Payot, Pernet, Piot, Pittet, Pradervand, Reymond, Richard, Rochat-Malherbe, Roulet-Grin, Ruey-Ray, Schneiter, Streit, Vincent, Vittoz, Voutat-Berney, Yersin-Zeugin (70).
Ont voté Non:
Mmes et MM. Athanasiadès, Aubert, Baehler Bech, Balissat, Bavaud, Benjamin, Bielman, Blanc, Bolinger, Bory, Bouvier, Bovay, Bovon-Dumoulin, Brélaz, Bühler, Burnier-Pelet, Burri, Chapuis, Cherix, Conod, Jaggi Yvette, Cork-Levet, Cornu Claire, Crisinel, de Souza-Kohlbrenner, Dépraz, Desarzens, Dufour, Farron, Galeazzi, Gonvers, Gorgé, Goy-Seydoux, Guy, Hermanjat, Holenweg Rouyet, Humair, Hunkeler, Jemelin, Jomini, Jufer, Le Roy, Lecoultre, Lehmann, Linder, Lyon, Maillefer, Mamboury, Martin Jean, Martin Marie-Antoinette, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Nordmann Roger, Ostermann, Perrin, Piguet, Pillonel, Pittet, Rapaz, Recordon Luc, Renaud, Roulet, Salamin Michel, Saugy-Anhorn, Schmid, Schwab, Thévoz, Tille, Troillet, Vallotton, Volluz, Weill-Lévy, Wettstein, Winteregg, Wiser, Zürcher, Zwahlen (77).
Se sont abstenus: Mme et MM. Boillat, Chevalley, Gonthier, Henry (4).
Article 36 – Maternité
sur 151 suffrages, accepté par 81 voix contre 61, avec 9 abstentions.
Toute femme dans le besoin a droit à la sécurité matérielle un trimestre avant et un trimestre après l'accouchement.Mesdames et Messieurs, nous suspendons nos débats, que nous reprendrons à 14 heures.
[pause]
Article 9 – Dignité humaine
F Jean-François LEUBA
Ce matin, j’ai omis de vous faire voter sur une proposition de Mme Girod-Baumgartner. Celle-ci consistait, à l’article 34, à renvoyer le dernier alinéa à l’article 9 et d’en faire un nouvel alinéa de celui-ci. Alors là, pour la plus grande joie de M. Recordon, nous appliquons cette fois l’article 41, qui dit que l’Assemblée, sans débat, vote, si elle est d’accord avec le renvoi de ce dernier alinéa. C’est celui qui dit que "toute personne a le droit de mourir dans la dignité", à l’article 9. Mesdames et Messieurs, c’est sans débat, à moins qu’il y ait une question de procédure. Mesdames et Messieurs, un constituant vient d’attirer mon attention sur le fait que la question exacte que je vous pose maintenant est de savoir si vous êtes d’accord de rouvrir la discussion à l’article 9 pour pouvoir inclure, le cas échéant, la phrase "toute personne a le droit de mourir dans la dignité". Proposition de rouvrir la discussion à l’article 9 pour introduire le texte "toute personne a le droit de mourir dans la dignité". Sur 117 suffrages exprimés, proposition acceptée par 108 voix, contre 5 et 4 abstentions. Dans ces conditions, la discussion est rouverte à l’article 9 et Mme Girod-Baumgartner propose d’introduire la phrase "toute personne a le droit de mourir dans la dignité" à l’article 9. Est-ce que Mme Girod veut motiver cette proposition? Elle paraît claire. La discussion est ouverte. Elle n’est pas utilisée. Je vous fais donc voter sur cette adjonction à l’article 9. Un tout petit peu de silence permettrait peut-être – même si l’acoustique n’est pas très bonne dans cette salle – de comprendre jusque dans les derniers rangs. Amendement Girod-Baumgartner d’ajout à l’article 9 (voir ci-dessous). Accepté par 114 voix contre 5, avec 10 abstentions. Je suis obligé de vous faire revoter formellement sur l’article 9 ainsi complété. Article 9 – Dignité humaine: sur 129 suffrages exprimés, accepté par 117 OUI contre 4 NON, avec 8 abstentions. 1 La dignité humaine est respectée et protégée. 2 Toute personne a le droit de mourir dans la dignité.
Article 37 – Éducation et enseignement
Texte proposé par la commission de rédaction:
«1 Chaque enfant a droit à un enseignement de base suffisant et, dans les écoles publiques, gratuit.
2 Il a droit à une éducation et à un enseignement favorisant l'épanouissement de ses potentialités et son intégration sociale.
3 La liberté de choix de l'enseignement est reconnue.»F Anne-Catherine LYON
A cet article 37, la commission de rédaction a jugé nécessaire d’ajouter un alinéa premier, qui pose exactement le cadre et qui permet de mieux comprendre comment il faut comprendre les alinéas 2 et 3. Nous avons en quelque sorte dupliqué ou transporté, de l’article 48 bis, alinéa 1, cette notion qui est un droit fondamental. Pour le reste, c’est inchangé. Merci.
F Jean-François LEUBA
Merci à Mme Lyon. Je constate d’abord que c’est un sujet séparé: il y a un amendement Bovet Ghiringhelli, qui propose l’introduction d’un article 36 bis. La parole est à M. Bovet.
F Daniel BOVET
Je vous relis l’article que vous voyez affiché à l’écran: "Chacun est libre d’enseigner, en se conformant aux lois sur cette matière". Cet article est vénérable. C’est l’article 11 de la Constitution de 1845, l’article 13 de la Constitution de 1861 et l’article 16 de la Constitution de 1885, la nôtre. Depuis 156 ans, cet article exclut le monopole étatique de l’enseignement. Il permet à quiconque d’ouvrir une école privée et aux parents de donner à leurs enfants un enseignement domestique. Celui qui est l’auteur de cet article n’est autre que Henri Druey. A ce nom, je pense qu’il n’y a pas un mot à ajouter pour convaincre tout le groupe Radical. On m’a fait remarquer fort judicieusement que cette disposition n’avait pas sa place dans l’article 37, qui définit les droits de l’enfant. Or, la liberté d’enseigner est plutôt un droit de l’adulte. La solution est bien simple: faisons-en un article séparé, ce qu’il est depuis sa naissance, et donnons-lui provisoirement le numéro 36 bis, étant bien entendu qu’il a plus d’affinités avec l’article 37 qu’avec l’article 36. C’est pourquoi, d’ailleurs, nous en discutons maintenant. On a objecté, à la réinscription de cet article dans notre éventuelle et future Constitution, le fait qu’il était un corollaire de la liberté du commerce et de l’industrie ou encore de la liberté d’opinion et d’information. A cela, il faut répondre que l’enseignement n’est, fondamentalement, ni un commerce, ni une industrie: c’est plus qu’un simple commerce et plus qu’une simple industrie. Et puis, enseigner est autre chose qu’informer ou émettre une opinion. Par la deuxième partie de l’article (“en se conformant” etc.), il me paraît clair que l’intention de nos prédécesseurs était de mettre des limites d’ordre moral à la liberté d’enseigner, parce qu’enseigner est un acte moral qui implique une responsabilité morale. C’est encore pourquoi on ne peut assimiler l’enseignement ni à une industrie, ni au commerce. Il y a peut-être une chose qu’il faut préciser. Il s’agit là d’une liberté, liberté d’adulte ou du moins de personne capable d’exercer l’enseignement, et cet article-là n’a qu’une relation indirecte avec l’article 37, qui devra le suivre et qui consacrera peut-être la liberté de choisir son enseignement. Ici, il s’agit de la liberté d’offrir des enseignements diversifiés, par le droit d’ouvrir des écoles qui ne soient pas uniquement des écoles officielles ou d’État. Ainsi, par cette liberté-là, on diversifie le choix des enseignements. Ensuite, éventuellement, par l’article 37 qui va suivre, vous consacrerez le droit de choisir l’enseignement qui est offert au public. Je remarque encore que l’adjonction de cet article a été demandée dans plusieurs des réponses reçues lors de la procédure de consultation.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Bovet. Je vous propose, puisqu’il s’agit d’une proposition qui est séparée du problème "Éducation et enseignement", de traiter pour elle-même cette disposition. Je passe la parole à M. Ghiringhelli.
F Charles-Pascal GHIRINGHELLI
J’aimerais rassurer notre collègue Bovet qu’il n’est pas forcément nécessaire et suffisant d’évoquer Henri Druey pour rallier les Radicaux. Il y a d’autres personnes éprises de liberté. Nous avons eu le souci, dans le cadre de la rédaction de cette Constitution, de nous assurer d’abord que les citoyens vaudois aient au minimum les libertés que confère la Constitution fédérale – on ne peut, bien sûr, pas y déroger –, voire peut-être, lorsque cela était possible, les étendre. Or, il est effectivement sage, maintenant, de corriger ce qui, à mes yeux et aux yeux de beaucoup, apparaît un simple oubli. Aux yeux des parents, il serait curieux qu’une constitution ne contienne pas cet élément qu’est la liberté d’enseignement, qui doit être consacrée. Je vous invite donc à le soutenir massivement.
F Jean-Michel PIGUET
J’interviens donc sur l’amendement Bovet Ghiringhelli pour remercier ces auteurs très chaleureusement. En effet, grâce à leur esprit inventif et créatif, ils nous offrent un champ d’investigation et de création tout à fait insoupçonné, dont je me réjouis. C’est pour cela que, à la suite de leur proposition, je médite – mais ce sera pour une prochaine séance – de vous proposer des articles 37 ter, 37 quater, 37 quinquies et ainsi de suite, au gré des bonnes idées qui pourront venir. Il faut effectivement rappeler qu’il y a un certain nombre de tâches que l’État assume seul, parce qu’il bénéficie d’un monopole, ou alors il peut concéder ces tâches à des tiers. Et puis, il y a toute une série de tâches qu’il n’accomplit pas du tout, les laissant au domaine privé. Entre deux, il y a une autre catégorie de tâches qui sont en quelque sorte partagées, l’État s’occupant notamment de l’enseignement public, tout en laissant la place à l’initiative privée de s’occuper aussi d’enseignement, qui est alors privé, comme nous le savons bien. Cela étant, il n’y a pas que l’enseignement qui est partagé, il y a aussi les transports, par exemple. Alors, je proposerais peut-être de réfléchir à un article 37 ter qui dirait que chacun est libre d’exploiter une entreprise de transports ou d’autocars, ce qui est déjà le cas, d’ailleurs, de même que l’on peut faire déjà de l’enseignement privé et avoir des écoles privées. Un article 37 quater pourrait nous dire, par exemple, que quiconque est libre d’ouvrir une clinique privée, tant il est vrai que si l’État s’occupe de santé publique et a ses propres hôpitaux, cela n’empêche pas, aussi, d’exploiter des cliniques privées, Donc, vous voyez que nous avons là un champ tout à fait nouveau qui s’ouvre devant nous, une investigation tout à fait passionnante, et je pense que l’on pourrait arriver à inventer une dizaine d’articles environ, octies, novies, etc., qui compléteraient judicieusement la proposition de MM. Ghiringhelli et Bovet que, pour toutes les raisons que je viens d’indiquer, je vous prie bien sûr de rejeter. Merci.
F Claude SCHWAB
Avec tout le respect que je dois à nos vénérables ancêtres et, justement, parce qu’ils avaient des raisons liées au contexte politique de l’époque de proposer l’article que veulent reprendre les auteurs de l’amendement, il me semble évident qu’il ne faut pas l’inscrire aujourd’hui, parce que cette phrase est ce que l’on appelle en termes savants une tautologie ou un truisme, et en langage populaire l’art d’enfoncer une porte ouverte. L’évidence d’un tel article est tellement béante qu’on ne saurait trouver d’arguments pour le démolir. Qui pourrait donc contester qu’il est permis de faire ce que la loi n’interdit pas? Cette découverte ou cette redécouverte peut apporter, certes, quelques fioritures esthétisantes et creuses à notre texte et permettre au lecteur de s’arrêter, soit pour reprendre son souffle devant un tel vide, soit pour se creuser la tête et se demander ce que les constituants ont cherché à cacher derrière ce monument creux. Mais, vous le savez, la nature a horreur du vide: une constitution se doit de limiter au mieux les articles qui ne veulent rien dire. Mais, je m’aperçois que je viens d’user de votre patience pour vous démontrer ce que vous aviez déjà compris: cet article est inutile, même s’il a été repris en 1885, à une époque où Edmond Rostand chauffait sa plume, qui lui a permis d’écrire que "c’est bien plus beau lorsque c’est inutile". Je crois que cette Constitution ne devrait pas être uniquement un musée.
F Francis THEVOZ
J’ai un avis totalement opposé à l’ironie muséologique de M. Schwab. "Chacun est libre d’enseigner", c’est bien ce qui est écrit. Cette liberté d’enseignement, pour moi, est justement la pierre de base, le cadre, mais qui doit y être, parce que ce n’est pas évident, dans ce Canton, maintenant, où des enseignements se donnent dans différents cadres religieux, catholique, musulman, etc. Il me paraît au contraire très important qu’on mette cette liberté de base sous cette forme-là, sous une forme large, sous forme d’un cadre. Cela n’implique aucun sous-entendu autre que chacun est libre d’enseigner, etc. Et je ne vois pas quel état d’esprit il faut avoir pour se rebeller contre cette chose. Ce n’est pas une évidence que chacun est libre d’enseigner dans ce Canton. Ce n’est pas une évidence du tout, et nous vivons justement une époque, et je peux vous donner le nom de la rue et l’adresse d’un groupe peut-être menacé, où certaines personnes qui désirent que leurs enfants soient éduqués dans une direction religieuse x, y ou z, il y en a au moins trois, puissent le faire. J’estime que c’est essentiel que cette liberté d’enseigner soit mentionnée sous cette forme-là, qui n’implique aucun des vieux fantômes qui ont divisé ce Canton dans le passé. Et que M. Bovet aille chercher Druey pour redéfinir cela, cela ne m’intéresse pas. C’est la chose en soi, aujourd’hui et maintenant, qui me paraît essentielle de poser dans la Constitution.
F Laurent REBEAUD
M. Bovet sait que je partage ses idées sur l’intérêt d’avoir une diversité de l’offre de l’enseignement et sur l’intérêt qu’il y a pour les familles à avoir une offre pédagogique diversifiée, de manière à ce que les enfants puissent, lorsqu’ils ne sont pas à l’aise avec l’école publique, avoir un certain choix et que ce choix soit reconnu et si possible soutenu par l’État. Cependant, je ne vais pas voter sa proposition, parce que je ne vois pas très bien ce que désignent les termes "cette matière". Je crois, comme l’a dit notre collègue Schwab, qu’il enfonce des portes ouvertes. Et puis, de mettre dans un article de la Constitution que les lois doivent être respectées nous entraînerait à devoir répéter dans tous les autres articles que les lois doivent être respectées. Par conséquent, sous cette forme-là en tout cas, je ne peux pas le soutenir et je voterai contre, à mon regret.
F Fabien LOI ZEDDA
Je remercie Laurent Rebeaud de son honnêteté; il est venu dire en partie ce que je souhaitais aussi vous apporter. Je m’interroge sur certains articles ou déclarations que j’ai lus ce matin dans deux très grands quotidiens – à moins que ce ne soit le retour d’un débat que nous avons sereinement discuté, sereinement tranché en premier débat: le “bon scolaire”. Je vous invite à repousser, avec beaucoup de Radicaux, cet amendement.
F Charles-Pascal GHIRINGHELLI
Finalement, ce qui semble être une évidence ne l’est pas pour tout le monde, et il serait curieux que, dans le catalogue de nos libertés, certains – qui craignent peut-être d’autres débats sereinement discutés, effectivement – ne voient pas là une simple affirmation d’une des pierres angulaires de l’État. Une affirmation qui reconnaît que diversité il doit forcément y avoir, et c’est dans ce foisonnement-là qu’une société peut s’assurer d’un certain avenir, précisément serein. Je suis heureux que certains, à visage découvert, viennent renoncer à une liberté dont on a joui pendant 150 ans. Je pense notamment à des parents qui, parce qu’ils avaient cette opportunité-là, voulaient partir pour un tour du monde, rendaient tout à fait patent le fait qu’ils allaient s’inquiéter de la manière d’enseigner à leurs enfants, pour qu’à leur retour ils puissent suivre le programme scolaire conforme à leur âge, que certains ont peut-être souhaité inscrire leurs enfants dans d’autres écoles et que cette liberté-là leur est toujours reconnue. Une constitution est précisément là pour éviter les déviances de l’État. Nous pouvons peut-être être satisfaits de la situation actuelle, mais nous ne savons pas dans quel sens certains totalitarismes peuvent s’infiltrer insidieusement, qu’il soient de droite ou de gauche. Ce qui est certain, à mon avis, c’est que si nous ne sommes pas foncièrement attachés à cette liberté, c’est peut-être tout l’édifice qui peut souffrir à terme, car l’on sait ce que certains États, à force d’abuser notamment de cette faculté d’assurer un enseignement, mais sans cautèle de liberté assurée à chaque citoyen, finissent par faire de chacun de ces élèves. Nous sommes très loin de tout cela, mais on n’oublie pas qu’une constitution est faite pour cinquante ou cent ans et que, précisément pour prévenir d’éventuelles déviances, il s’agit d’inscrire cette liberté profondément dans notre Constitution. Je demande d’ores et déjà, Monsieur le président, à ce que nous procédions à un vote nominal.
F Francis THEVOZ
M. Loi Zedda, excusez-moi, mais le [bon] scolaire, moi, cela ne m’intéresse pas. Ce qui m’intéresse, c’est de voir que maintenant à Lausanne, il y a diverses écoles, sous diverses religions, qui enseignent, et qu’on peut très bien arriver, si on n’a pas un cadre constitutionnel, à une forme d’enseignement "hors de l’État, pas de salut": ce type d’enseignement, non. La matière… quelqu’un a demandé quelle matière? "Éducation et enseignement", nous sommes dans la matière de l’éducation et de l’enseignement. Les transports et la santé n’ont rien à voir ici. Nous sommes dans un problème assez important dans notre société, qui est devenue beaucoup plus composite, variée dans ses croyances, dans ses fois, etc. Et je crois que ce vieux cadre, qui remonte à Druey, mais ça m’est bien égal, il est important de le poser comme principe, pas pour menacer l’enseignement officiel et le département, etc., pas du tout, pas pour impliquer un [bon] scolaire. Simplement, nous sommes dans une société diversifiée où nous ne sommes pas vaccinés contre une certaine tyrannie de "on enseigne comme cela et pas autrement". Moi, je crois que ce cadre large, souple, qui donne de l’espace à tout le monde, est vraiment maintenant nécessaire, parce que nous pourrions aller, dans les années qui viennent, au devant de quelques conflits que je vois déjà pointer dans cette ville, et cet article les prévient. Aussi, je vous prie de l’accepter.
F Jean-François LEUBA
Il me semble qu’il n’y a pas d’autres orateurs inscrits, si j’ose dire. Ah, M. Gonthier! J’allais clore la discussion, vous êtes tombé à la dernière seconde.
F Alain GONTHIER
J’ai une petite question aux auteurs de la proposition. Dans la mesure où tout ce que nous mettons dans ce chapitre est directement invocable en justice, est-ce qu’un professeur, salarié de l’enseignement public, ne pourrait pas faire appel à cette disposition pour enseigner ce qu’il veut à sa classe, indépendamment des instructions, puisque le détail de son programme n’est pas marqué dans la loi, obligatoirement, le détail de l’histoire qu’il enseigne n’est pas mentionné? Alors, on se demande bien s’il ne pourrait pas passer par-dessus le règlement et par-dessus la loi, au nom de la disposition constitutionnelle.
F Jean-François LEUBA
Bien, en souhaitant que l’on ne tourne pas dans un dialogue Gonthier Bovet, je donne la parole à M. Bovet.
F Daniel BOVET
C’est très bien que M. Gonthier soulève cette question, parce que le compte-rendu de nos débats précisera l’intention des législateurs que nous sommes. Il s’agit bien de la liberté d’enseigner. Je le reconnais, peut-être qu’il faudrait encore quelques phrases pour le préciser, mais enfin, je crois que l’histoire –l’histoire de cet article – prouve bien qu’il s’agit de la liberté d’ouvrir un établissement d’enseignement ou bien d’enseigner ou de faire enseigner à ses enfants. Il ne s’agit pas de la liberté d’enseignement et de recherche, dont nous parlerons plus tard. C’est bel et bien une liberté administrative et non pas le droit de raconter ce que l’on veut dans son enseignement.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Bovet. J’ai l’impression que la discussion est épuisée et que l’on peut passer au vote. C’est le cas: la discussion est close.
Amendement Bovet Ghiringhelli d’introduire un article 36 bis avec le texte “Chacun est libre d'enseigner en se conformant aux lois sur cette matière.” Nombre de votes 147; refusé par 82 voix contre 57, avec 8 abstentions. Vote à l’appel nominal sur l’amendement Bovet-Ghiringhelli:
Ont voté Oui:
Mmes et MM. Amstein, Athanasiadès, Balissat, Berger, Bielman, Bovet, Bovy, Buffat, Burnet, Charotton, Chatelain, Chevalley, Conod, Cornu Claire-Lise, Cornu Pierre-Alain, Cruchon, Cuendet, de Souza-Kohlbrenner, Delay, Desmeules, Dufour, Ghiringhelli, Gindroz, Gonvers, Grin, Henchoz, Henry, Jaillet, Jaton, Jordan Kulling, Kaeser, Kulling, Labouchère, Linder, Luisier, Mages, Marion, Martin, Millioud, Moret, Nicolier, Ormond, Ostermann, Payot, Pernet, Piot, Pittet, Rapaz, Reymond, Rochat-Malherbe, Roulet-Grin, Ruey-Ray, Schneiter, Streit, Thévoz, Vittoz, Voutaz-Berney (57).
Ont voté Non:
Mmes et MM. Abbet, Aubert, Baehler Bech, Bavaud, Benjamin, Boillat, Bory, Bory Weber, Bouvier, Bovay, Bovet, Braissant, Brélaz, Bühler, Bühlmann Gérard, Burri, Chapuis, Cherix, Chollet, Coprésident 1, Coprésident 2, Cork-Levet, Crisinel, Dépraz, Desarzens, Dessauges, Dufour, Farron, Freymond-Bouquet, Gallaz, Girod, Glauser, Gonthier, Gorgé, Goy-Seydoux, Guignard, Guy, Haldy, Henchoz-Cottier, Hermanjat, Holenweg Rouyet, Humair, Hunkeler, Jemelin, Jomini, Jufer, Le Roy, Lecoultre, Lehmann, Loi Zedda, Lyon, Maillefer, Mamboury, Martin Marie-Antoinette, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Nicod, Nordmann Philippe, Nordmann Roger, Oguey, Perrin, Piguet, Pillonel, Pittet, Pradervand, Rebeaud, Recordon, Richard, Roulet, Salamin Michel, Saugy-Anhorn, Schmid, Schwab, Tille, Troillet, Vallotton, Volluz, Wettstein, Winteregg, Wiser, Ziegler, Zuercher (82).
Se sont abstenus:
Mmes et MM. Bolinger Anne-Marie, Bovon-Dumoulin Martine, Burnier-Pelet Thérèse, Carnevale Éliane, Galeazzi Rebecca, Renaud Dominique, Vincent Martial, Yersin-Zeugin Ruth (8).
La présidente de la commission de rédaction s’est déjà exprimée, je crois, de telle sorte que je peux passer la parole aux auteurs des amendements, tout d’abord MM. Bovet et Ghiringhelli. Qui est-ce qui s’exprime? M. Ghiringhelli.
F Charles-Pascal GHIRINGHELLI
Je salue les efforts de la commission de rédaction qui, effectivement, souhaite se rapprocher de la rédaction de la Constitution fédérale. Néanmoins, le strict respect de cette disposition demande que nous prenions les termes tels qu’ils sont inscrits dans notre charte fondamentale fédérale, à savoir le droit à un enseignement de base suffisant, gratuit et garanti, plutôt que ce qui a été proposé, qui ne recouvre pas stricto sensu les mots de la Constitution fédérale. Plus d’un orateur, à cette tribune, a déjà pu dire combien il était parfois délicat de ne pas tout à fait recouvrir les mêmes termes de la Constitution fédérale, lorsque l’on voulait dire la même chose. Je crois qu’il faut avoir la sagesse de s’y conformer, dans la mesure où, actuellement, je ne crois pas que ce droit fédéral sous lequel nous sommes astreints est – de mon point de vue et je crois de beaucoup – contesté. En conséquence, je vous propose d’apporter encore une petite amélioration supplémentaire, si tant est possible, à la proposition de la commission de rédaction, en se conformant stricto sensu au texte de la Constitution fédérale, avec l’amendement tel qu’il est proposé.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Ghiringhelli. Nous avons un amendement Amstein. Mme Amstein a la parole.
F Claudine AMSTEIN
Cet article a donné lieu à un long commentaire du professeur Mahon, dans son rapport. Pourquoi? Parce qu’il y avait un certain nombre d’éléments qui n’étaient pas clairs, notamment en ce qui concerne le dernier alinéa que nous avions adopté. Le travail qu’a fait la commission de rédaction est tout à fait bon et nous permet de préciser notre avis. Mais il pose problème sur les alinéas 2 et 3. Et il pose un autre problème de fond, pour nous, en ce qui concerne le titre. Le titre parle d’éducation et d’enseignement. Nous sommes dans les droits fondamentaux. Comment peut-on invoquer un droit à l’éducation directement vis-à-vis de l’État? Nous considérons donc que, dans les "Droits fondamentaux", nous ne devons parler que d’enseignement, l’éducation étant en priorité du domaine des parents. Pour le premier alinéa, nous reprenons la disposition de la commission de rédaction, au motif suivant. Il est vrai, le texte de la commission de rédaction ne reprend pas totalement le texte de la Constitution fédérale. Simplement, il faut savoir dans quel contexte nous inscrivons cet article. Si nous ne précisons pas la gratuité, cela peut avoir des conséquences selon les articles ou alinéas qui seront adoptés ultérieurement, et nous pourrions réintroduire, contrairement à ce qui a été dit avant, par la petite porte, ce que nous n’avons pas voulu. Ce n’est donc pas à cet alinéa-là que cela a de l’importance, mais c’est par la suite que ça pourrait en avoir. Ensuite, nous proposons de supprimer le deuxième alinéa. Ce deuxième alinéa est, au fait, du programme scolaire. Il s’agit de savoir ce qu’il y a dans l’enseignement de base. Ce qui est important, c’est que, dans les "Droits fondamentaux", l’enfant ait droit à un enseignement de base, mais cet enseignement de base doit être défini dans les programmes scolaires et dans les "Tâches de l’État". Quant au troisième alinéa, il a posé un certain nombre de problèmes d’interprétation. Ce qui est important, c’est en tout cas comme cela que nous l’avons compris, c’est qu’on voulait donner un droit à un enseignement de base suffisant, liberté de choisir entre l’enseignement public ou l’enseignement privé. Si on maintient l’alinéa tel quel, cette proposition n’est pas claire, à notre avis. Par contre, si on reprend le texte et que le premier alinéa dit que "chaque enfant a droit à un enseignement de base suffisant, dans des écoles publiques gratuites", cela veut dire que, a contrario, il peut y avoir un enseignement de base suffisant dans une école privée. Si toutefois cette interprétation ne vous paraissait pas suffisante, nous avons déposé un amendement conditionnel, pour bien prouver que c’était dans ce sens-là que nous l’entendions et que si vous ne le comprenez pas comme ça, alors, écrivons-le. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Amstein. J’ai encore un amendement du groupe Les Verts, défendu par M. Ostermann. Je lui passe la parole.
F Roland OSTERMANN
Il ne m’aurait pas déplu, qu’en préambule, Monsieur le président signale que cet amendement a été fourni dans les délais mais, qu’il a simplement été mal classé par le secrétariat; je m’en excuse pour lui. La commission de rédaction nous propose un nouvel alinéa 1 pour cet article. Elle y mélange deux choses: un droit, celui à enseignement de base, et une modalité, qui est en fait une tâche de l’État, à savoir la mise en place d’une école gratuite. Nous vous proposons d’en rester à l’énoncé de droits, puisque nous sommes dans un chapitre qui leur est consacré. L’alinéa 1 doit en contenir deux: le droit à un enseignement de base suffisant et le droit à la gratuité. C’est exactement ce que prévoit un article de la Constitution fédérale. Nous l’avons adapté au style choisi par la commission de rédaction, qui précise qui bénéficie d’un droit, lorsque ce dernier est particulier. De la gratuité découle ensuite une tâche de l’État, celle d’instaurer une école publique gratuite ou – là où, par hypothèse, elle y renoncerait – à prendre en charge les écolages d’une école privée où il renverrait les enfants. Mais cette tâche doit être inscrite dans le chapitre idoine et c’est ce que prévoit l’article 48. A l’alinéa 3, et sur la suggestion de la Société pédagogique vaudoise, nous vous proposons de nous dire à qui la liberté de choix de l’enseignement est reconnue. Elle l’est à la famille, dont l’enfant est membre à part entière. Elle ne l’est pas aux maîtres!. Quelques remarques sémantiques, maintenant. Il est clair que l’enseignement, qualifié de base, recouvre les enseignements primaire et secondaire I actuels, ceux qui seront déclarés obligatoires à l’article 48. Mais il faut résister à la tentation de parler de scolarité obligatoire, comme le fait l’expert Mahon, puisque la scolarité n’est pas obligatoire. Seul l’enseignement l’est. Il peut donc être donné à domicile. Le caractère suffisant que doit avoir l’enseignement doit aussi, évidemment, pouvoir être revendiqué par les "bons élèves", (termes qu’il ne faut pas opposer à ceux de "mauvais élèves", politiquement incorrects, mais à "élèves mal comprenants chroniques”…. L’enseignement doit également être suffisant dans des domaines spécifiques correspondant aux aptitudes particulières de certains enfants. Quant à la liberté de choix de l’enseignement, elle n’entraîne pas la gratuité de celui qui est choisi. L’alinéa 1 dit simplement qu’on doit pouvoir accéder à un enseignement gratuit. Je pose maintenant à la commission de rédaction une question qui est peut-être captieuse. Elle évoque ici le droit à l’enseignement. Mais dans l’article 48, elle parle d’instruction. Y a-t-il une différence? Si oui, laquelle? Si non, pourquoi ne pas unifier le langage? Dans l’alinéa 2, on distingue éducation et enseignement. Selon l’article 48, l’éducation est de la compétence première des parents. Mais le fait que l’enfant a droit à une éducation, telle que l’article 37 la décrit, implique que l’État devra intervenir en cas de carence parentale. Sera-ce par des éducateurs ou par des enseignants, en dépit de la dichotomie faite entre éducation et enseignement, à l’alinéa 2? De toute façon, bon courage, car il arrive bien souvent que les parents qui négligent leur devoir soient aussi les plus prompts à se prévaloir de leurs droits. Ces interprétations peuvent-elles être considérées comme authentiques, c’est-à-dire propres à éclairer l’application de cet article 37? C’est une question. Un mot encore, pour conclure. Nous avons reçu, il y a quelque temps, l’article 37, avec l’indication qu’il contenait un ajout issu de l’article 48 bis. Lundi, lors de notre réunion de groupe, nous n’avions aucune idée de ce qu’il adviendrait de cet article 48 bis. C’est une façon "feuilletonesque" de travailler, que, pour l’instant, nous nous contentons de déplorer. Mais vous ne perdez rien pour attendre!
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Ostermann. Je me fais, d’ailleurs, un plaisir de confirmer qu’il avait déposé son amendement en temps utile et qu’il a été "schubladisiert", si je puis m’exprimer ainsi, quelque part au secrétariat. La discussion est maintenant ouverte. M. Jean Martin.
F Jean MARTIN
Je suis conscient, pour l’avoir suivi depuis longtemps, du grand combat historique entre gauche et droite, pour simplifier, à propos du couple éducation/enseignement, grand combat qui prend, malheureusement, presque toujours des aspects dogmatiques ou idéologiques. Vous en connaissez les termes sous leur forme caricaturale. L’enseignement, c’est l’État qui en est responsable. Quant à l’éducation, l’État pas touche, domaine strictement réservé de la famille. Je nous propose de dépasser ce grand combat historique. A vrai dire, je n’ai guère l’espoir de l’enterrer mais, néanmoins, aujourd’hui, de le dépasser. C’est ainsi que je suis défavorable à l’éradication du mot "éducation" dans l’article que nous discutons. Je considère que nous pouvons et devons, aujourd’hui, inscrire un droit à l’éducation. Ce qui m’en convainc, c’est que, à l’évidence, des déclarations incantatoires sur la responsabilité des parents – je parle de ceux qui n’assument pas leur responsabilité – ne sont guère plus efficaces que les incitations à voter prodiguées aux abstentionnistes. La violence et l’incivilité – pour employer des mots à la mode – vont croissant, nous le savons tous. Notre excellent collègue, le Préfet de la Vallée de Joux, me glissait ce matin que la France réintroduit des cours de savoir-vivre. Je ne vous propose pas de mettre ce genre de détails dans notre Constitution. Mais il reste que, dans une société où l’individualisme étroit et l’égocentrisme sont les valeurs montantes, je suis convaincu que nous devons dire que chaque enfant a droit à une éducation, la loi et la vie quotidienne ayant tout le loisir de préciser les prééminences respectives en la matière. C’est dire que, pour ma part, je ne vois pas de mérite déterminant aux amendements qui nous sont proposés et je vous propose de vous rallier à la formulation de la commission de rédaction.
F Pierre HERMANJAT
C’est au sujet du premier alinéa que je vais m’adresser à vous. Au sujet de la précision "dans les écoles publiques gratuites et garanties", la Constitution fédérale, effectivement, ne nous donne pas de mention de gratuité dans les écoles publiques, puisque la Confédération ne s’occupe pas de l’enseignement de base. Cette tâche est attribuée aux cantons. Donc, il me semble que, dans un canton, il nous faut donner cette précision que, dans les écoles publiques, il est gratuit. Si on ne la donne pas, on ouvre la porte à la gratuité dans toutes les écoles qui enseignent une formation de base. Merci.
F Charles-Pascal GHIRINGHELLI
Tout citoyen peut invoquer un droit s’il est inscrit dans la Constitution, qu’elle soit fédérale ou cantonale. Ce qui vient d’être dit est faux, à mon avis, dans le sens où l’État doit effectivement fournir un enseignement gratuit, c’est sa responsabilité. Du moment qu’il le fournit, il remplit précisément cette tâche; on n’est pas au chapitre des tâches, on est au chapitre des droits. Je suis également venu à cette tribune pour dire que je suis sensible au souci de M. Ostermann en ce qui concerne le premier alinéa, de rejoindre le texte de la Constitution fédérale. Je pense, Monsieur le président, que vous allez ensuite faire voter tout d’abord le sous-titre, et puis ensuite les alinéas, les uns après les autres. En conséquence, nous nous proposons de retirer notre amendement au profit de celui de M. Ostermann, qui est de la même veine, soit le respect de la Constitution fédérale, pour qu’il devienne un amendement Ostermann Bovet Ghiringhelli.
F Denis BOUVIER
Je viens évidemment m’exprimer pour le maintien de la mention des écoles publiques, pour que cet enseignement soit gratuit dans ces écoles-là. Je sens bien sûr, au travers de certaines interventions, des attaques voilées contre l’école publique et j’aimerais m’exprimer sur ce point de l’école publique, l’école de la république autrement dit. Cette école publique est en totale adéquation avec les projets des articles constitutionnels qui la concernent, ce qui ne lui interdit pas, d’ailleurs, de s’adapter toujours, pour répondre, pour compenser, pour corriger, au-delà des circonstances, les conditions plus offensives et nuisibles voulues par certains effrénés du laisser-faire et du laisser-aller, qui ne cessent d’entraver sa nécessaire évolution. Notre école publique, ouverte à toutes et à tous, est en effet neutre, politiquement et confessionnellement. Elle respecte la liberté de pensée, de conscience et de croyance. Elle favorise l'épanouissement des potentialités de l'enfant, de l'adolescent, de l'étudiant, et leur intégration sociale. Elle est une école de qualité, même si sa dimension ne peut lui éviter quelques rares défauts ou quelques rares défaillances, dont elle n'a d'ailleurs pas le monopole. Elle s'insère – cette école publique – dans un dispositif qui laisse place à d'autres écoles. Certaines de ces autres écoles peuvent être reconnues d'utilité publique, d'autres ont d'autres vocations. Elles satisfont sans doute un certain choix particulier, mais sans devoir ni pouvoir respecter les principes constitutionnels imposés à l'école publique. L'école publique, dans le respect de la Constitution, offre seule tout le champ des possibles, mais cet avantage a un prix, c'est celui de la gratuité. Certains prétendent défendre la justice sociale en voulant ouvrir l'école privée à d'autres milieux que ceux qui dominent l'économie. C'est un argument qui peut prendre à son piège ceux qui ne réalisent pas ce qu'est la véritable égalité des chances que tente de mettre en oeuvre l'école publique et, redisons-le, pour le libre épanouissement des potentialités de l'enfant. L'école privée n'est compétitive ni au plan des équipements, ni à celui des salaires. C'est son affaire, c'est le cas de le dire. En cas de subventionnent, rien ne laisse entrevoir que l'État puisse enfreindre la sacro-sainte liberté économique, ne serait-ce que pour garantir des conditions salariales satisfaisantes et que les écoles-entreprises libèrent leur fonction pédagogique de l'emprise du marché. Subventionner l'école privée, c'est subventionner l'économie privée en ponctionnant nécessairement la richesse collective. Imaginons que l'État puisse intervenir, pour nous rassurer. Cela reviendrait alors à absorber le privé dans le public, cette fameuse et fumeuse école publique libre. Mais seraient alors créées, au nom de la liberté de choix, des poches d'enseignement qui ne seraient pas en mesure – et surtout, qui n'auraient pas la volonté – de respecter les principes constitutionnels de neutralité confessionnelle et politique offerts à tous les enfants. Car c'est à eux qu'il faut d'abord songer et qu'il faut protéger de ces “burgs” idéologiques ou confessionnels possibles que certains veulent assurer du concours des finances de l'État, sous le prétexte d'étendre la liberté de choix. L'État, il est vrai, n'a pas la vocation de tout faire. Je me réjouis que l'Université Populaire, par exemple, puisse contribuer hautement à la réalisation de certains objectifs constitutionnels évoqués plus haut. D'autre part, je cite l'article en question, "L' État peut soutenir des établissements privés qui offrent des possibilités de formation complémentaires aux siennes et dont l'utilité est reconnue". Nous l'avons inscrit dans notre projet. Ce n'est pas une clause de style, mais la reconnaissance de l'initiative individuelle qui concourt – avec l'école publique et non contre elle – à l'épanouissement du potentiel humain pour le bien social, comme le rappelle la notion d'utilité publique. Je vous invite ainsi à soutenir les textes proposés par la commission de rédaction. Merci.
F Denyse DUFOUR
Le terme "éducation", qui est contesté par Mme Amstein, souligne que l'éducation n'est que l'affaire des parents. Le groupe Libéral prend le terme "éducation" dans l'un de ses sens les plus restreints. Si vous regardez une définition, vous voyez: "éducation, c'est l'action d'éduquer, de former, d'instruire". La société antique n'a pas connu les distinctions qui se sont établies au cours de l'évolution des sociétés. Chez les anciens, les parents, les grands-parents, les prêtres transmettaient les traditions, les usages, et les bonnes manières dont parlait M. Martin. A la suite de la Révolution, les idées sont plus codifiées et Rousseau, dans l'Émile, formule une éducation différente. Montesquieu, quant à lui, écrivait déjà: "Nous recevons trois éducations différentes ou contraires: celle de nos pères, celle de nos maîtres, celle du monde". La rapidité du développement économique et social transforme les conditions de vie à un rythme tel que l'éducation doit aussi prévoir l'adaptation des individus au monde qui les entourera. Le terme "éducation", pris dans son sens large, se justifie donc pleinement dans notre Constitution. Je vous invite donc à conserver l'alinéa 2 tel que l'a prévu la commission de rédaction. Merci.
F Claude SCHWAB
J'aimerais tout d'abord intervenir à propos de l'alinéa 1, pour rectifier ce qui me semble avoir été une erreur chez deux de mes préopinants: la notion de gratuité dans les écoles publiques ne tombe ni du ciel, ni de l'amateurisme d'une commission, mais bel et bien aussi de la Constitution fédérale. C'est l'article 62; le travail qui avait été fait pour l'article 48 est simplement un regroupement de l'article 19, sauf erreur, et de l'article 62 de la Constitution Fédérale. Dans ce cadre-là, nous sommes strictement sur le plan du respect de la Constitution fédérale. Évidemment, les puristes pourront dire qu'une partie n'est pas tout à fait de l'ordre des droits, mais plutôt des tâches de l'État. Il n'empêche que, sur ce point-là, nous n'avons pas innové. En revanche, je suis beaucoup plus inquiet en voyant la proposition généralisante qui a été faite par notre collègue Ostermann, qui avec la proposition de l'alinéa 3 généralise cette gratuité pour tout enseignement. Je crois que nous ne l'avons pas voulue en premier débat, je crois que l'affaire n'est pas mûre et que si nous adoptions par aventure les alinéas 1 et 3, ça veut dire que, sans nous en apercevoir, nous aurions radicalement changé les conditions de scolarité dans notre pays. En ce qui concerne l'alinéa 2, je suis – comme mon collègue et ami Martin – assez fatigué par cette dissociation tout à fait abstraite de l'éducation et de l'instruction. Chacun sait qu'en éduquant un enfant, on lui apprend à comprendre, que des parents lui apprennent une langue. Chacun sait aussi qu'il est impossible d'enseigner sans éduquer, peut-être aujourd'hui plus encore qu'en 1885. Ce qui veut dire que, si on refuse cette dissociation, on introduit effectivement un droit, un droit de l'enfant. Sans pour autant brandir le spectre des tentations tentaculaires de l'État, il faut reconnaître qu'il y a des situations où des enfants ne reçoivent ni éducation, ni enseignement qui leur permettraient de grandir. En ce qui concerne l'enseignement, les constitutions fédérale et cantonales inscrivent une obligation et je remarque que c'est un des rares devoirs formels dans la Constitution, avec, évidemment, celui de payer des impôts. Mais en ce qui concerne les carences éducatives, s'il faut reconnaître aux familles pleine responsabilité dans ce domaine, il faut aussi se donner une base constitutionnelle pour intervenir. Quand un enfant est menacé parce qu'il ne reçoit pas une éducation minimale, la société ne saurait se retrancher derrière des droits individuels pour laisser faire des abus de parentalité. C'est un droit fondamental qu'il faut inscrire, même si la mise en application est délicate, et du reste elle se fait déjà avec la tâche très délicate que l'on assigne, par exemple, au Service de Protection de la Jeunesse.
F Francis THEVOZ
C'est bien vrai qu'il n'y a ni gauche, ni droite. Je suis parfaitement M. Schwab sur l'alinéa 2. Il est absurde et à un moment donné spécieux – que vous l'écriviez ou non, rien ne changera – de séparer l'éducation et l'enseignement. L'enfant vole, la maîtresse lui dit, "Tu arrêtes de voler". Il est sale, on lui apprend la propreté, etc. Il y a toute une série de gestes chez le petit où vous êtes incapables de distinguer enseignement et éducation. L'alinéa 2, gardons-le comme il est, il va très bien. Par contre, là où je soutiendrai M. Ostermann… Je ne vois pas pourquoi M. Bouvier vient faire un grand discours sur école publique/école privée, ça n'a rien à voir. Il est clair que la garantie d'une éducation gratuite doit être posée – suffisante et gratuite, ça c'est clair. Ensuite, il est bien clair aussi que ça ne peut pas être un piège de diables qui sont en train de préparer l'arrivée des écoles privées, parce qu'il n'y a par définition que quand le public finance que ça peut être gratuit. On ne menace donc en rien, dans cet alinéa 1 amendé par M. Ostermann, les écoles publiques. C'est pour moi bizarre que ce discours vienne là. Alors alinéa 1 amendé par M. Ostermann, très bien; alinéa 2, comme il est. Alinéa 3, je ne vois pas non plus ce que ça met en danger, donc alinéa 3 amendé par M. Ostermann, je vous propose de voter ces trois alinéas comme cela.
F Claudine AMSTEIN
Je crois qu'en fait, sur les termes d'éducation et d'enseignement, nous nous rapprochons dans le sens que, dans un certain nombre de cas, il est difficile de savoir si c'est éducation ou enseignement. Je le comprends lorsque nous sommes dans les "Tâches de l'État" et dans la détermination de quelles sont les tâches de l'État. Nous sommes ici, non pas dans les "Tâches de l'État", mais dans un droit fondamental. Et la présentation qui a été faite tout à l'heure montrait que cette éducation était l'objet d'un phénomène très large qui va des parents à la famille en général, à la société en général. Dans ces conditions, comment peut-on avoir vis-à-vis de l'État un droit à l'éducation? Quelle éducation l'État va-t-il donner si on s'adresse à lui pour obtenir cette éducation? C'est pour cette raison que je propose de supprimer ce terme dans cette disposition, parce que nous sommes dans les "Droits fondamentaux" et non pas dans les "Tâches de l'État". Les exemples qui ont été donnés par M. Thévoz sont des exemples qui se situent dans ce que fait l'école au quotidien, donc dans ses tâches au quotidien.
F Jean-François LEUBA
Merci, Mme Amstein. Il m'apparaît que la discussion a été de bon niveau, mais longue. Je pense que l'Assemblée est à peu près prête à voter. Cela me paraît le cas. La discussion est close. Je vous propose de voter alinéa par alinéa. Alinéa 1, amendement Ostermann, biffer les mots "dans les écoles publiques". 157 votants, refusé par 117 voix contre 35, avec 5 abstentions. Je crois que pour l'alinéa 1, on a réglé les problèmes. Pour l'alinéa 2... Attendez, peut-être faudrait-il que nous donnions connaissance des amendements conditionnels. On m'a fait remarquer ce matin qu'il n'était peut-être pas très opportun que vous votiez sur un amendement sans savoir quel était l'amendement conditionnel qui venait derrière, mais je crois qu'on peut trouver une solution: je vous indique les amendements conditionnels, en revanche ils ne sont développés que si l'amendement principal est admis. Je crois que c'est la meilleure méthode, de manière à ce que chacun voie bien. Nous avons un amendement conditionnel Burnet, sauf erreur: au cas où l'amendement Libéral, qui tend à la suppression de l'alinéa 2, serait admis, M. Burnet propose "Il a droit à un enseignement favorisant..." etc. On a biffé le mot "éducation", c'est l'amendement Burnet. Cet amendement est donc conditionnel, il n'est pas en discussion maintenant, simplement que vous sachiez que, si l'amendement Libéral était admis, cet amendement viendrait derrière. Alinéa 2, amendement Libéral, supprimer l’alinéa. Nombre de suffrages exprimés: 158, amendement repoussé par 93 voix contre 61 et 4 abstentions. Dès lors entre en question l'amendement Burnet et je passe la parole à M. Burnet. Non, c'est tout à fait exact, il n'est pas supprimé, par conséquent l'amendement Burnet tombe automatiquement. Nous en venons au troisième alinéa. Alinéa 3, amendement Ostermann, ajouter les mots "aux familles". Votes exprimés: 156, amendement repoussé par 78 voix contre 63, avec 15 abstentions. Alinéa 3, amendement Libéral, supprimer l’alinéa. Nombre de suffrages exprimés: 155, amendement repoussé par 92 voix contre 55, avec 8 abstentions.
F Olivier BURNET
Je crois qu'il y a peut-être eu une petite incompréhension. Il me semble que l'amendement qu'on a baptisé de mon nom – je ne veux pas me parer des plumes du paon, c'est en fait un amendement Cohen-Dumani mais que je reprends très volontiers – a sa raison d'être dans la mesure où l'amendement Amstein a été rejeté. Par conséquent, je crois que je dois développer maintenant, si vous m'y autorisez, mon argumentation sur l'amendement en question.
F Jean-François LEUBA
C'est clair, mais ce qui n'était pas clair, c'était le papier parce qu'on disait "amendement conditionnel à l'amendement Libéral concernant la suppression de…", alors moi j'ai considéré qu'il était conditionnel à l'admission de l'amendement Libéral. Si c'est le contraire, allez-y.
F Olivier BURNET
Merci. Je plaide non-coupable puisque je ne suis pas l'auteur du petit papier et que j'interviens au pied levé en remplacement de son auteur. Ce que je voulais dire, c'est que j'interviens donc – soyons clairs – pour défendre l'amendement conditionnel de Marcel Cohen-Dumani, qu'on a baptisé Burnet; j'en suis ravi, j'en assume la paternité. Cet amendement n'a pas pour but de soutenir que l'État doit se désintéresser de l'éducation; ce serait une attitude totalement dépassée. Il faut tenir compte, bien évidemment, de l'évolution de notre société. Mais rassurez-vous, Mesdames, Messieurs, l'article 48 que nous verrons par la suite, et plus particulièrement son alinéa 5 a la teneur suivante, que je cite: "L'école assure, en collaboration avec les parents, l'instruction des enfants. Elle seconde les parents dans leur tâche éducative". Il n'y a là rien de dogmatique, il n'y a pas de combat gauche/droite, comme certains l'ont relevé tout à l'heure. J'aimerais rassurer MM. Martin et Thévoz, l'article 48, alinéa 5 que j'appuie, démontre que cette dichotomie que certains croient voir est au contraire dépassée. Cette disposition, sur laquelle nous voterons ultérieurement – c'est-à-dire l'article 48, alinéa 5 – a en outre l'avantage de fixer un certain nombre de priorités. L'éducation n'est pas un droit, et encore moins un droit justiciable, comme la santé n'est pas un droit non plus. Je crois qu'on peut faire un parallèle: il n’existe pas un droit à la santé, on le sait, mais un droit aux soins. Il n’existe pas un droit à l'éducation non plus. Il faut donc renoncer à ancrer un droit à l'éducation, ce serait un droit totalement illusoire. En revanche, il faut conserver, bien sûr, le droit à l'enseignement, qui lui se justifie pleinement. La modification proposée implique, vous l'aurez compris, la modification du titre de l'article, qui deviendrait uniquement "Enseignement". Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Burnet. Nous avons un amendement conditionnel Amstein concernant l'alinéa 3. Je donne la parole à Mme Amstein.
F Claudine AMSTEIN
En fait, j'avais déjà développé cet amendement conditionnel en présentant l'amendement principal, en disant que pour moi, dans l'alinéa 1 il était compris a contrario que les parents avaient le droit de choisir un autre enseignement que l'enseignement public, et si ce n'était pas clair par rapport au premier alinéa, je proposais de le préciser de cette manière à l'alinéa 3, parce que le texte de la commission de rédaction ne me paraît pas clair pour savoir quelle est exactement la liberté de choix qui a été donnée.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Amstein. La discussion est ouverte sur ces deux amendements conditionnels. Est-ce que M. Rebeaud souhaite la parole? Oui? Alors M. Rebeaud a la parole.
F Laurent REBEAUD
J'ai l'impression que le texte qui a été voté en première lecture par notre Assemblée et qui a été relu et revisité par la commission de rédaction à la lumière des lectures des procès-verbaux, est parfaitement clair. Il va dans le sens de ce qu'a voulu préciser – mais c'était peut-être inutile – M. Ostermann en disant que ce droit était réservé aux familles. Cet amendement qui donne un droit à un enseignement privé, ça me plonge dans des abîmes de perplexité. Je me demande à quoi on engage l'État en donnant ce droit à toutes les familles du Canton. Il faudrait au moins, pouvoir en étudier les conséquences... Moi je ne peux pas l'accepter comme ça, parce que je ne vois pas les conséquences, mais sans faire des exégèses tordues, je peux m'imaginer qu'on pourrait tirer de ça le droit pour chaque famille du Canton de réclamer, dans son village ou à proximité, la disponibilité d'une école privée qui devrait être soutenue par l'État. Il me semble que vous êtes un peu trop étatistes, Mme Amstein et les Libéraux qui vous soutiennent en cette matière.
F Alain GONTHIER
Concernant la proposition de supprimer "éducation" de ce droit fondamental, il me semble qu'on est ici dans le droit fondamental de l'enfant, c'est ce qui est exprimé par l'article. L'enfant a droit à l'éducation, il a droit à l'enseignement. Si l'un ou l'autre n'est pas assuré à un enfant, la société – par l'intermédiaire de l'État – a le devoir d'intervenir. C'est ce qu'il fait par la mise sous tutelle, par l'intervention du SPJ et par différentes formes. On fonde donc l'intervention de l'État au cas où soit l'éducation, soit l'enseignement ne sont pas assurés à un enfant. Je pense qu'il faut cette fondation dans la Constitution pour aller contre la liberté individuelle des parents, pour que l'État ait la légitimité de pouvoir intervenir contre la liberté individuelle des parents de ne pas éduquer leur enfant, le cas échéant.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Gonthier. Il semblerait que la parole ne soit plus demandée, la discussion est donc close. Nous allons voter successivement l'amendement Cohen-Dumani Burnet d'une part, et l'amendement Amstein d'autre part. Alinéa 2, amendement Cohen-Dumani, supprimer le mot "éducation". Repoussé par 95 voix contre 58, avec 5 abstentions. Il y avait 158 votants. Alinéa 3, amendement Amstein, “Le droit à un enseignement privé est reconnu” à la place de l'alinéa 3 de la commission de rédaction. Repoussé par 107 voix contre 38, avec 13 abstentions. Il y avait 158 votants. J'ai l'impression que nous avons à peu près terminé avec les amendements concernant cet article 37, à moins que quelqu'un ne me signale une omission. Cela ne paraît pas le cas, par conséquent nous pouvons voter l'article 37, finalement dans le texte de la commission. Article 37 - Éducation et enseignement: adopté par 122 OUI contre 28 NON et 7 abstentions. 1 Chaque enfant a droit à un enseignement de base suffisant et, dans les écoles publiques, gratuit. 2 Il a droit à une éducation et à un enseignement favorisant l'épanouissement de ses potentialités et son intégration sociale. 3 La liberté de choix de l'enseignement est reconnue.
Article 38 – Aide à la formation initiale
F Jean-François LEUBA
Madame la présidente de la commission. Avant de vous donner la parole, je passe au contrôle de la présence puisqu'il y a une heure que nous siégeons. Mesdames et Messieurs, nous passons au vote de présence. Je vous rappelle qu'il s'agit de peser sur la touche OUI.
Il y a 159 présents.
Nous passons à l'article 38 et je donne la parole à Mme Lyon.
F Anne-Catherine LYON
La commission de rédaction n'a pas de proposition quant à la formulation de cet article, mais elle a deux souhaits qui sont énoncés dans le fil rouge: tout d'abord que la nature du lien entre cet article et l'article 52, "Aide à la formation et bourses" soit clarifiée, et d'autre part que les termes "formation initiale" soient, eux aussi, précisés. Le débat devrait permettre ces clarifications. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Lyon. J'ai un amendement Farron. M. Farron a la parole.
F Pierre FARRON
Je crois qu'il est bon de rappeler brièvement quelle est l'origine du texte soumis à notre discussion de maintenant. A l'origine, il y avait une proposition qui venait d'un ensemble d'associations regroupées dans le Carrefour des Associations de soutien aux demandeurs d'emploi. J'ai l'honneur de présider l'une d'entre elles, qui s'appelle "Église et monde du travail". Dans notre tâche d'accompagnement de personnes en difficulté par rapport à l'obtention d'un emploi, nous constatons qu'il y a dans la population un petit pourcentage d'adultes qui, bien que cela puisse paraître très surprenant dans un pays comme la Suisse, pour toutes sortes de raisons, n'ont pas suivi une scolarité complète et n'ont pas de formation professionnelle. Or aujourd'hui il devient extrêmement difficile pour une personne qui n'a pas de formation professionnelle de trouver un emploi. Les "petits boulots" comme on les appelait autrefois ont largement disparu. Il y a même chez nous – j'en ai rencontré pour ma part un certain nombre dans l'Association des familles du Quart-Monde de l'Ouest lausannois, cela peut paraître étonnant – des personnes illettrées. Les personnes qui ont ce déficit de formation se trouvent d'une part dans une situation personnelle dégradante, mais aussi, il faut le dire, leur situation conduit à des coûts extrêmement élevés pour les caisses publiques. Je crois que de se trouver dans un pays comme le nôtre avec, même si c'est un petit pourcentage de gens qui ne sont pas pleinement scolarisés et qui n'ont pas de formation professionnelle, ça pose une question éthique fondamentale et ça nous oblige, je crois, à être attentifs au fait que le premier rôle de la loi, peut-être sa fonction la plus essentielle, c'est de protéger les plus faibles dans la société. C'est pourquoi j'ai proposé l'amendement dont vous avez le texte à l'écran. Permettez-moi juste de dire, par rapport à des argumentations juridiques où l'on pourrait s'étonner de voir quelque chose mentionné dans les "Droits fondamentaux" et quelque chose aussi dans les "Tâches de l’État", même si ce n'est pas rédigé dans les mêmes termes, j'aimerais vous rappeler que ceci n'est pas unique: il y a quelques sujets fondamentaux, comme par exemple celui de l'article précédent, où on a à la fois quelque chose dans les droits et quelque chose dans les "Tâches de l’État". Quand ce sont des sujets tout à fait essentiels, cela se justifie. Il va sans dire que, si vous suiviez ma proposition qui a aussi reçu le soutien de Vie associative, il y aurait lieu de modifier le titre de l'article, mais cela, à vrai dire, je laisserai le soin à la commission de rédaction. Merci de votre attention.
F Jean-François LEUBA
Merci, M. Farron. Nous avons un amendement Roger Nordmann. M. Nordmann a la parole.
F Roger NORDMANN
Le professeur Mahon relevait que la signification de "formation initiale" n'était pas tout à fait claire: s'agissait-il de formation de base, de formation professionnelle de base ou d'école obligatoire? Mais en tout cas l'intention était assez claire: il s'agit d'éviter que le manque de moyens financiers empêche quelqu'un de suivre une formation. Pour ma part, je propose une clarification, en remplaçant la notion de "formation initiale" par celle de "formation". La teneur de l'article deviendrait: "Toute personne dépourvue de ressources personnelles ou familiales nécessaires à sa formation a le droit à une aide de l'État". La présidente de la commission de rédaction l'a relevé, cet article répond aux articles 51 et 52. Pour mémoire, le 51 c'est "Formation continue et formation des adultes", le 52, c'est "Aide à la formation et bourses". Concrètement, cet article 38 signifie que si une personne remplit les conditions prévues par la loi sur les bourses, l'État ne peut pas lui refuser cette aide à la formation, comme c'est le cas actuellement. Concrètement, il y a toujours la condition économique (est-ce que la personne manque de moyens?), la condition de compétence (est-ce que la personne est capable de suivre la formation envisagée?) et le critère de nécessité (cette formation ne doit pas être un luxe), mais si ces trois critères sont remplis, à mon avis la personne doit avoir droit à la formation, et actuellement ce n'est pas le cas. Certains viendront naturellement dire, "Cela risque de coûter cher". J'y objecte en premier lieu une notion de justice et d'équité dans l'accès à la formation, mais surtout j'y objecte un calcul étroitement économique: à mon avis, l'État et la collectivité au sens large ont intérêt à ce que la population soit bien formée, parce que les gens bien formés sont indépendants en termes économiques, il n'y a pas besoin de les soutenir, et puis ensuite parce que ce sont de bons contribuables. A mon avis, essayer d'économiser sur la formation ou d'empêcher l'accès à la formation parce que certaines personnes n'ont pas les moyens financiers, c'est un mauvais calcul, même en termes étroitement économiques et financiers. Je vous invite donc à accepter mon amendement et à voter cet article. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Mme Labouchère a la parole pour le développement de son amendement.
F Catherine LABOUCHERE
Le groupe Libéral et Indépendant est bien sûr acquis au principe de la formation dans ces cas, mais il nous apparaît que c'est une tâche de l'État et non un droit. Pourquoi? Si c'est un droit, il sera justiciable et donc directement invocable devant un juge, et c'est ce juge qui décidera si la personne doit recevoir cette aide. Il nous paraît bien préférable que ce soit l'État qui détermine, au moyen d'une loi, tous les cas où cette aide puisse être octroyée. C'est à l'État de s'impliquer et non à la justice. Si c'est un droit, aussi, toute personne qui arrive d'un autre canton ou de l'extérieur et qui juge en avoir besoin peut demander immédiatement cette aide dans le Canton de Vaud dès qu'elle s'y installe. Si c'est l'État qui le détermine, il en déterminera également les conditions. En conséquence, le groupe Libéral dit oui à la formation, pas dans ce chapitre des "Droits fondamentaux", mais au chapitre des "Tâches de l'État" et nous reprendrons la discussion quand nous reparlerons de l'article 53, qui s'appelle "Aide à la formation et bourses". Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Labouchère. La discussion générale est ouverte. M. Farron souhaite-t-il encore intervenir? Moi je ne vous pousse pas, mais si vous souhaitez intervenir, je vous donne maintenant la parole.
F Pierre FARRON
Brièvement, pour dire que le droit à une formation minimale – parce que c'est bien de cela qu'il s'agit –, c'est quand même quelque chose de tout à fait fondamental. Sans commune mesure avec l'exemple pris de quelqu'un qui déménagerait d'un autre canton et qui, si c'est une personne démunie, coûterait aussi aux caisses publiques. Ici, je crois que fondamentalement, il y a une question de dignité humaine, et j'aimerais vraiment vous encourager à voir cet article sous cet angle.
F Claude SCHWAB
J'aimerais juste intervenir sur un point, qui est justement celui de la justiciabilité. Je crois que là, on a un choix entre la justice et l'arbitraire, et qu'en inscrivant un droit, on permet d'éviter des formes d'arbitraire en cas de décision administrative discutable.
F Jean-François LEUBA
La discussion ne paraît plus vouloir être utilisée. Elle est close. Nous passons au vote. J'oppose tout d'abord l'amendement Farron à l'amendement Nordmann. Amendement Farron, suppression du mot "initiale", ajout de "professionnelle de base reconnue", opposé à amendement Nordmann, suppression du mot "initiale". Sur 152 votants, par 110 voix contre 35 et 7 abstentions, l'amendement Farron est accepté. Amendement Farron opposé au texte de la commission. Sur 152 votants, 81 se sont prononcés pour l'amendement Farron, 61 pour le texte de la commission. Il y a 10 abstentions. Amendement Labouchère, suppression de l’article. 15 votants. L'amendement est repoussé par 78 voix contre 67, avec 6 abstentions. Article 38 – Aide à la formation initiale: sur 151 votants, adopté par 81 voix contre 66 avec 4 abstentions. Toute personne dépourvue des ressources personnelles ou familiales nécessaires à une formation professionnelle de base reconnue a droit à une aide de l'État. Je vous remercie. Je crois qu'il est temps d'introduire une pause, mais je vous prie instamment, quelle que soit la longueur du service du café, de reprendre place à 15 h. 45 ici, pour que nous puissions essayer d'avancer dans la tâche d'aujourd'hui. La séance est suspendue.
[pause]
Article 39 – Aide aux victimes
F Anne-Catherine LYON
La commission de rédaction ne propose pas de modification à cet article. Cependant elle souhaite que l'Assemblée plénière précise la portée de cet article. Dès lors qu'il y a un amendement de suppression, la discussion va s'engager et les précisions nécessaires seront obtenues. Merci.
F Jean-François LEUBA
Nous avons effectivement un amendement Libéral Conod qui tend à la suppression.
F Philippe CONOD
Que l'on se comprenne bien, loin de moi l'idée de supprimer une aide aux victimes. Je rejoins les remarques de la commission de rédaction et j'en tire une certaine logique. L'article 39 a été expliqué par la commission 3 comme il suit: "La matière est certes actuellement réglée par le droit fédéral, mais le projet en fait un droit fondamental, et apporte ainsi une garantie en cas de modification ultérieure de ce droit" – donc en cas de modification du droit fédéral. C'est dans cette optique que cet article a été adopté. Vous pouvez vous reporter aux procès-verbaux de la séance où l'on a traité cet article, notamment à l'intervention de Mme Perrin. Or il nous faut rester crédibles. On met une disposition de la Constitution pour en avoir une le jour où le droit fédéral reviendrait en arrière. Avec cette pratique, nous pouvons refaire un Code civil vaudois. La disposition telle qu'elle est prévue ici n'a aucune portée autonome, ce que relève d'ailleurs expressément le professeur Mahon, et dans ces circonstances, je vous remercie de bien vouloir supprimer une disposition qui n'ajoute strictement rien aux dispositions prévues par le droit fédéral. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Conod. La discussion est ouverte sur cet amendement. Mme Perrin.
F Jeanne-Marie PERRIN
Notre groupe Forum s'oppose à l'amendement Conod de supprimer cet article. En effet, il s'agit de mettre dans notre Constitution, je le répète, un droit fondamental concernant l'aide aux victimes. Ce projet apporte une garantie en cas de modification du droit et je maintiens ce que j'ai déjà dit lors du débat sur les droits fondamentaux. La LAVI n'est qu'une loi qui peut subir des modifications. Pour répondre à la commission de rédaction, l'article que nous proposons et que vous avez adopté va au-delà de la loi. Il s'agit d'apporter une aide en cas d'infraction grave d'origine psychique et physique. Je rappelle que cet article est repris de la Constitution bernoise, article 29, alinéa 3. Je vous demande donc de ne pas accepter cet amendement et de garder l'article 39 tel que proposé par la commission de rédaction. Merci.
F Philippe CONOD
Très brièvement, il faudrait peut-être se poser la question de savoir quand la disposition bernoise a été adoptée, et si elle n'était pas là avant la loi fédérale.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Conod. Quelqu'un souhaite-t-il encore s'exprimer sur cette disposition? Cela ne paraît pas être le cas, dès lors la discussion est close. Vous avez à voter sur l'amendement Conod qui tend à la suppression de l'article 39 du projet. Amendement Conod, suppression de l'article 39. Le nombre des votants est 132. L'amendement est accepté par 71 voix contre 57, avec 4 abstentions.
Article 40 – Champ d’application des droits fondamentaux
F Jean-François LEUBA
Nous passons à l'article 40, "Droit associatif". Je donne tout d'abord la parole à Mme Lyon. Je précise que nous traiterons séparément tout d'abord l'article proposé par Vie associative, et ensuite nous parlerons de l'article 40 proprement dit et des problèmes qu'il pose. Mme Lyon a la parole.
F Anne-Catherine LYON
La commission de rédaction vient faire ici son mea culpa. En effet, lors de ses travaux, elle a eu une interprétation beaucoup trop restrictive de la volonté de l'Assemblée plénière. Le terme d'origine était à la lettre b): "par les personnes morales, conformément à leurs buts statutaires". Nous nous sommes trompés en mettant le termes "associations". Par conséquent, la commission de rédaction retire son propre amendement et demande à ce que le texte de fin de première lecture retrouve sa forme originelle. La lettre b) redevient donc "par les personnes morales, conformément à leurs buts statutaires". Merci.
F Anne BAEHLER BECH
Les associations que Vie associative représente ici ont été choquées de la disparition pure et simple de l'article consacré au droit associatif. C'est ainsi que, sur leur demande expresse, je me permets d'en demander maintenant la réintroduction. Au sein de cette Constituante, nous avons constaté et salué l'utilité des associations, leur apport à la société, et considéré aussi maintes fois leur importance et leur nécessité. Ces mêmes associations se sont ainsi senties pleinement reconnues et soutenues dans leurs actions. Aussi laissez-moi vous dire qu'elles n'ont pas compris le regard méfiant, voire hostile, que nous leur avons jeté lorsqu'il s'est agi de leur accorder qualité pour recourir. D'utiles, incontournables, nécessaires, les associations ont soudain été considérées comme quérulentes, manipulatrices et en tous les cas des empêcheuses de tourner en rond. Les associations, Mesdames et Messieurs, n'ont pas démérité, et rien ne justifie un tel regard. Il n'est à mon avis pas correct et cohérent de reconnaître d'un côté leurs compétences, et de l'autre, de les soupçonner des pires maux et de les juger incapables d'user avec discernement de ce droit de recours. Je vous demande ainsi de reconsidérer votre position et d'accorder aux associations un droit de recours, avec les cautèles proposées que vous avez sur l'écran. Je vous remercie de votre attention.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Baehler Bech. La discussion est ouverte. M. Haldy. Il s'agit donc uniquement de l'article 39 bis.
F Jacques HALDY
Au nom du groupe Libéral, je vous demande de rejeter cet amendement. En effet, il ne s'agit ni de la méfiance, ni de l'hostilité à l'égard des associations, qui jouent un rôle utile et nous en convenons parfaitement, mais nous considérons simplement que le droit actuel permet à ceux qui sont vraiment concernés – y compris les associations – de faire valoir leurs droits sans rajouter cette porte ouverte à des abus. En effet, je crois qu'il est nécessaire de rappeler que les associations, dans notre droit actuel, ont la possibilité de faire valoir leurs droits dans trois hypothèses. La première, comme le professeur Mahon l'indique, lorsqu'elles sont directement et elles-mêmes concernées; par exemple parce qu'elles sont propriétaires d'un bien immobilier, elles peuvent bien sûr faire valoir tous les droits liés à cette propriété. Deuxièmement, lorsque la loi les habilite spécialement à le faire. C'est le cas par exemple du WWF et de Pro Natura qui peuvent, en vertu de dispositions légales expresses, faire des recours, faire valoir leurs droits. Enfin, la jurisprudence du Tribunal fédéral, bien confirmée, comme l'indique à juste titre le professeur Mahon, permet aux associations de faire recours si trois conditions sont réunies: si le but statutaire le permet, si un nombre important de membres est directement concerné et si ces membres auraient eux-mêmes la qualité pour agir. Cela signifie clairement que, dans tous les cas où une association a des membres qui sont concernés par un projet, ils peuvent faire valoir leurs droits. Ce que voudrait en fait cet article, c'est permettre à des associations dont les membres ne sont pas concernés directement, ne sont pas touchés, de faire opposition ou de faire valoir des droits liés à un projet. Et cela, nous ne le voulons pas. En effet, si toutes les personnes concernées sont d'accord avec un projet, il n'y a pas de raison qu'une association créée pour les besoins de la cause puisse s'y opposer et faire valoir des droits qui n'en sont pas, puisque les personnes en cause ne sont pas concernées. Je vous remercie.
F Alex DÉPRAZ
Derrière ce concept juridique peut-être un peu complexe de "qualité pour recourir" se cache en réalité une idée simple, celle de garantir l'application de la loi. C'est bien ce qui est visé ici, c'est la possibilité qu'on veut donner aux associations de faire un recours qu'on appelle "de l'intérêt de la loi", c'est-à-dire effectivement que l'association n'est pas directement concernée, mais qu'elle défend statutairement le même but que la loi cherche à préserver. C'est cela que cet article cherche à introduire. Et qui mieux qu'une association dont le but statutaire est de défendre les intérêts de la loi et qui n'a pas d'intérêts directs, qui ne recourt pas par vengeance personnelle, qui est mieux placé qu'elle pour faire valoir l'intérêt public? En outre, il faut le signaler, ces associations sont souvent composées de spécialistes, de gens qui connaissent la problématique, et ces recours idéaux ont un taux de réussite beaucoup plus grand que les recours ordinaires où l'on se bat – assez souvent, il faut le dire – par vengeance personnelle et non pour l'intérêt public. Pourquoi puis-je dire qu'ils ont un taux de réussite plus élevé? Parce que, Mesdames et Messieurs les constituants, ce n'est pas une nouveauté. C'est notamment quelque chose qui a existé très longtemps dans le Canton de Vaud en matière de droit des constructions. C'était une jurisprudence constante de la commission de recours d'alors en matière de construction d'admettre le recours des associations dans l'intérêt de la loi lorsqu'elles étaient fondées depuis au moins cinq ans, et cela même si aucun des membres de cette association n'était directement touché par la décision. C'est donc une conception qui est beaucoup plus large que celle que vous a décrite M. Haldy tout à l'heure. Cette conception avait été en fait reprise par le Grand Conseil lors de l'adoption de la loi sur la juridiction et la procédure administrative. Ensuite la jurisprudence a restreint la qualité pour recourir, et nous désirons revenir sur ce point parce que, contrairement à ce que d'aucuns prétendent, ces recours ne surchargent pas les tribunaux. Au contraire, ils vont dissuader certaines personnes de faire des recours au profit de celui de l'association qui sera mieux fait. Pourquoi, Mesdames et Messieurs, pourquoi dénier la possibilité, par exemple, à une association de chasseurs d'intervenir dans une procédure qui concerne la protection de la faune? Pourquoi interdire à une association de carabiniers la possibilité de participer à une procédure qui concerne l'installation d'un stand de tir? Pourquoi interdire à l'ASLOCA ou à la Chambre vaudoise immobilière de se battre pour une application juste de la loi sur la démolition et la transformation d'immeubles? Je crois qu'étant donné que nous sommes attachés ici, dans cette Assemblée, au respect de la loi, il me paraît normal de donner aux associations la possibilité de faire recours pour assurer ce respect de la loi.
F Isabelle MORET
Il y a dans cet article quelque chose d'important à souligner. M. Haldy vous a rappelé tout à l'heure quelle est la première condition, actuellement, pour qu'une association ou une fondation puisse recourir: il faut qu'elle-même soit directement concernée ou que ses membres soient directement concernés; alors que dans l'article qui vous est proposé, l'association ou ses membres n'ont plus besoin d'être directement concernés, il suffit qu'ils agissent dans un but d'intérêt public. Autrement dit, des personnes qui ne seraient pas concernées par une situation mais qui font partie d'une association reconnue par la loi pourraient recourir sur tout et n'importe quoi qui ne les concerne personnellement pas. Je répète, il ne s'agit pas ici d'empêcher des associations ou des fondations de recourir dans les conditions telles qu'elles existent actuellement par la jurisprudence. Il est vrai, tel que l'a rappelé M. Dépraz, qu'elles recourent souvent à bon escient, avec une bonne chance de réussite. Il s'agit juste de permettre aux associations et aux fondations directement concernées ou dont les membres sont directement concernés de pouvoir recourir dans un cas qui les concerne, alors qu'autrement, en acceptant un tel article, je répète encore une fois, il suffit que l'association ou la fondation puisse recourir de par la loi, elle pourra agir dans un but d'intérêt public sur n'importe quel cas de recours, alors que la décision ne concerne ni ses membres, ni elle-même en particulier. Il s'agit là d'un élargissement beaucoup trop important des possibilités de recours et je vous invite donc à refuser cet article. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je remercie Mme Moret. La parole ne paraît plus être demandée. La discussion est close. Nous allons voter. Amendement Baehler Bech, introduction d’un article 39 bis, avec le texte “ Les associations et fondations reconnues par la loi ont qualité pour recourir dans un but d'intérêt public.” 148 personnes ont pris part au vote. La proposition est rejetée par 81 voix contre 66, avec 1 abstention. Nous pouvons dès lors passer vraiment à l'article 40. Mme Anne-Catherine Lyon s'est, je crois, exprimée sur cet article 40, je pense qu'elle renonce. Nous avons un certain nombre d'amendements, tout d'abord un amendement Philippe Nordmann. Je passe la parole à M. Nordmann.
F Philippe NORDMANN
Une clarification me paraît nécessaire au début de ce débat: on vient de voter sur une question qui concerne les associations et on entre à nouveau dans une question qui concerne les associations, simplement, soyez attentifs, ce n'est pas du tout la même. Tout à l'heure, il s'agissait du droit de recours général devant les tribunaux, notamment le Tribunal administratif. Maintenant il s'agit de l'invocation des droits fondamentaux, c'est-à-dire une question qui est vraiment beaucoup plus spécifique. Je propose un amendement à la lettre b) au sujet des personnes morales, le droit d'invoquer les droits fondamentaux par les personnes morales conformément à leur but statutaire idéal lorsqu'elles s'en prennent à une norme abstraite. Il s'agit de ce que le jargon suisse-alémanico-romand de ce pays appelle le "contrôle abstrait des normes". C'est un petit peu un barbarisme pour nous, il s'agit en gros de pouvoir recourir contre tout texte – qu'il soit communal ou cantonal – qui constituerait, en lui-même et indépendamment de son application, une violation des droits fondamentaux. Qu'il s'agisse du communal ou du cantonal, le législateur n'est pas parfait, il peut arriver qu'il se laisse aller à adopter des dispositions qui seraient contraires à la Constitution. Simplement, on ne s'en aperçoit peut-être pas tout de suite, sauf ceux qui sont très attentifs et ceux dont c'est la mission de veiller à l'intérêt des droits fondamentaux. On pourrait donner quelques exemples de telles possibilités de recours. Je prends des exemples réels, parce que c'est toujours plus convaincant d'avoir des exemples réels. Prenons d'abord un ordre que j'aime beaucoup, c'est l'Ordre des avocats vaudois. L'Ordre des avocats vaudois défend – on ne le sait peut-être pas suffisamment – les justiciables et les avocats, considérant qu'il n'y a pas d'opposition de principe entre les justiciables et les avocats. L'Ordre des avocats vaudois est une association de droit privé, qui pourrait être amenée à invoquer une violation d'un droit fondamental, notamment dans un code de procédure ou dans un tarif judiciaire. Et c'est arrivé, mes chers collègues, il y a eu un recours de l'Ordre des avocats au sujet d'un tarif judiciaire vaudois qui était très, très cher, qui reste très cher, mais le Tribunal fédéral a donné raison à cet Ordre des avocats en disant, oui vous défendez l'intérêt général, l'intérêt des justiciables, et effectivement ce tarif judiciaire doit être revu. Imaginons par exemple la LICRA, autre association contre le racisme et l'antisémitisme, à laquelle j'appartiens, qui voit sortir un acte communal qui pourrait être jugé raciste ou xénophobe. Bien entendu, une personne pourrait toujours ultérieurement être touchée et devoir recourir, mais on n'en sait rien. Il vaut mieux faire un contrôle abstrait des normes et pouvoir s'en prendre à ce texte. C'est arrivé dans le Pays d'En-Haut où, il n'y a pas très longtemps, une commune avait affiché au pilier communal un texte qui était discutable à cet égard, à propos de réfugiés. Vous avez un autre cas: le Groupe Action Prison a pour mission, par exemple, de défendre les droits des détenus. Imaginons un nouveau règlement – du Bois-Mermet par exemple – qui supprime la promenade ou qui l'abrège de façon contraire aux prescriptions édictées clairement par le Tribunal fédéral. Ce Groupe Action Prison est expérimenté, il a l'habitude, il voit tout de suite le problème et il recourt dans les trente jours dès que la norme est adoptée. Une association villageoise, par exemple, pourrait se plaindre, au nom de la liberté économique, d'un règlement communal qui rendrait trop restrictif, par exemple, l'usage du domaine public, d'une place mettons, à l'occasion d'une foire. Vous voyez que les exemples sont multiples, et pour revivifier le tissu associatif de ce Canton, nous proposons cette possibilité-là. La différence, au fond, entre mon amendement et le texte de base, c'est qu'on limite le texte de base. Pourquoi? Le professeur Mahon a expliqué que peut-être le texte de base était trop large, que – on l'a entendu tout à l'heure – de savants confrères ont expliqué quelles sont les conditions relativement rigoureuses qui s'imposent aux associations pour recourir. Il faut que les membres soient directement touchés. Alors nous disons, peut-être ces spécialistes ont-ils raison, mais alors maintenons ce qui est absolument essentiel, c'est ce contrôle du texte au moment où il sort, et donnons aux associations la possibilité, au moins cela, de contrôler abstraitement les normes. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Nordmann. Nous avons ensuite un amendement Haldy qui tend à la suppression de tout l'article. Je propose à M. Haldy de traiter son amendement, mais pas l'amendement conditionnel, simplement l'amendement sur les deux alinéas. M. Haldy a la parole.
F Jacques HALDY
En effet, ce sont deux sujets au fond assez différents dont je dois vous parler en proposant la suppression, au nom du groupe Libéral, de tout l'article. Il s'agit d'abord de la question de l'effet médiat, sur lequel nous avons déjà disserté pas mal lors de notre dernier débat, et sur lequel nous avons maintenant l'avis du professeur Mahon, à savoir la lettre a) de l'article. Si je vous demande de supprimer cette lettre a), c'est pour deux raisons. La première, c'est que le professeur Mahon a clairement dit que cet alinéa était tout à fait inutile, dès lors qu'il existait l'article 35 de la Constitution fédérale et qu'un élargissement de ce qui est prévu dans la disposition fédérale n'est, à son sens, pas possible. La deuxième raison, je l'ai déjà développée précédemment, c'est que les droits fondamentaux ont été édictés pour protéger l'individu contre l'État, en raison de la puissance publique de celui-ci. Ils n'ont pas été édictés pour protéger des individus contre d'autres individus. Par exemple, un candidat employé à un poste de travail ne peut pas invoquer le droit à l'égalité de traitement contre un potentiel employeur. C'est uniquement le droit privé qui régit la réglementation entre les privés. Par exemple, le Code des obligations prévoit des protections contre les licenciements abusifs, et ce n'est pas au droit public, aux droits fondamentaux d'intervenir dans ces relations. Certes, il peut y avoir des cas où une transposition est possible. L'article 35 de la Constitution fédérale le prévoit expressément, en disant bien que ce sont les autorités qui doivent veiller à une éventuelle transposition, à une éventuelle réalisation des droits fondamentaux dans les rapports entre privés. Et toute la spécificité de cet article tient au fait que ce sont "les autorités" qui veillent. D'ailleurs notre collègue Nordmann, lors de notre précédent débat, vendredi passé, a évoqué cet effet médiat à propos du droit à demander une rectification de données. Et il a bien précisé, il appartiendrait au juge de dire si ce droit pourrait aussi être invoqué à l'égard d'une personne privée. C'est donc bien une autorité, que ce soit le parlement, que ce soit le juge, mais il ne s'agit pas d'un droit qui peut être directement invoqué contre un particulier. Seul un parlement en légiférant, un tribunal en jugeant peut, éventuellement, si le droit s'y prête, appliquer le droit public au droit privé, si vous me permettez ce raccourci. C'est la raison pour laquelle je vous demande de supprimer la lettre a). Je développerai l'amendement conditionnel plus tard, en indiquant déjà simplement qu'il s'agit de la reprise textuelle du texte de la Constitution fédérale. Maintenant, s'agissant de la lettre b), la commission de rédaction a effectivement corrigé ce qui devait l'être, à savoir qu'il s'agit bien des personnes morales qui étaient indiquées, et contrairement à ce que vient de nous dire notre collègue Nordmann, les deux choses sont tout à fait liées par rapport à celles que nous venons de traiter, à savoir la question des associations. En effet, la lettre b), telle que vous l'avez, décrit seulement une évidence, à savoir qu'une personne morale peut faire valoir un droit fondamental lorsqu'elle est touchée. Je viens de l'expliquer, une association propriétaire d'un bien peut faire valoir tous les droits liés à sa propriété, c'est une évidence. Le professeur Mahon dit: "Est-ce que vous avez voulu introduire le droit associatif?". Nous ne l'avons pas voulu, par nos votes successifs, très clairement. Alors il ne faut pas revenir sur cette question par d'autres moyens, notamment par l'amendement déposé par notre collègue Nordmann En effet, s'il restreint la portée du droit associatif, il n'en reste pas moins que, comme il l'a lui-même indiqué, une association pourrait invoquer un droit fondamental sans être directement concernée, ou sans que ses membres soient directement concernés. Reprenons l'exemple qui lui est cher et qui me l'est aussi: l'Ordre des avocats. Il est parfaitement légitime que l'Ordre des avocats puisse s'opposer à un texte de loi qui concernerait les avocats. A l'heure actuelle, la jurisprudence lui permet parfaitement de le faire, puisque les membres de l'Ordre des avocats sont concernés par un texte de loi qui restreindrait, par exemple, les droits de la profession. En revanche, l'Ordre des avocats ne doit pas pouvoir contester une loi qui, par exemple, imposerait les propriétaires de chien au-delà d'un degré raisonnable. Seule l'association concernée, s'il en existe une, doit pouvoir faire valoir ces droits. Autrement on arrive exactement à ce qu'on a voulu éviter par notre vote précédent: l'action populaire où une association, avec des membres qui ne sont pas concernés, peut recourir pour faire valoir des droits qui ne les touchent pas. Je vous remercie dès lors de bien vouloir suivre notre amendement.
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Haldy. La discussion est ouverte. M. Nordmann. A moins que quelqu'un d'autre souhaite s'exprimer. Non, si vous le permettez, M. Nordmann, je donne d'abord la parole à ceux qui ne se sont pas exprimés. Je vous en prie, Madame.
F Françoise VOLLUZ
Pour les nombreuses associations que nous représentons, il est très important et même indispensable que cet article reste dans notre Constitution. En effet, dans leurs statuts, nombreuses sont les associations qui ont pour mission de faire avancer le droit dans le sens de leur vocation. De plus, si les membres de ces associations paient des cotisations, c'est bien pour défendre leurs idées et pour qu'on les défende eux-mêmes. Supprimer cet article, c'est couper les ailes aux associations, c'est nier leur existence. Je vous invite donc à soutenir l'article 40. Merci.
F Jean-François LEUBA
Je vous remercie, Madame. M. Nordmann, attendez, je vais voir si quelqu'un souhaite encore s'exprimer avant de vous repasser la parole. Non, alors allez-y.
F Philippe NORDMANN
Cette fois-ci, j'interviens sur le point de la lettre a). Je ne m'étais pas exprimé tout à l'heure puisqu'il s'agissait de défendre les amendements et que l'amendement portait sur la lettre b). Maintenant, à propos de la lettre a), c'est-à-dire le fameux effet horizontal. Plusieurs critiques juridiques ont été émises à ce propos, notamment par notre savant collègue, Monsieur le professeur Haldy, des critiques qui peuvent être, au fond, ramenées à deux, en substance. On nous dit tout d'abord: ce texte n'a aucune portée propre, donc aucune efficacité, et en pratique il n'est pas invocable par le citoyen. Et on nous dit surtout, ça c'était le point de vue du professeur Mahon: ce texte viole la force dérogatoire du droit fédéral; en d'autres termes, le droit civil fédéral l'emporte toujours sur toute règle cantonale, même constitutionnelle. Sur le premier point, la portée – l'utilité, pour dire les choses simplement – de cet article: combien de fois n'a-t-on pas constaté lors de nos débats que tel ou tel droit fondamental serait particulièrement utile s'il pouvait être couplé précisément avec l'effet horizontal? Je rappelle quelques brefs exemples. Liberté politique: un salarié serait sanctionné par son employeur uniquement parce qu'il signe une initiative ou une pétition – et M. Haldy, vous savez très bien qu'il y a une disposition de droit fédéral, mais uniquement de protection contre les licenciements, mais pas les autres sanctions, par exemple un refus de promotion. Liberté d'association: un locataire se voit mis à la porte, simplement et uniquement – ce serait par hypothèse dans la lettre de congé – parce qu'il a adhéré à ASLOCA Ce cas a été jugé par le Tribunal fédéral qui n'a rien pu faire. Dans une école privée, un candidat à des examens se plaint d'avoir été traité arbitrairement. Non-discrimination: un homosexuel – ou un obèse ou un trop maigre – se voit refuser une promotion professionnelle uniquement de ce fait. Liberté d'association: par exemple un commerçant serait exclu de son association professionnelle parce qu'il a adhéré à tel ou tel parti ou tel ou tel groupe. Et enfin, puisque nous avons adopté, à notre suggestion notamment, l'histoire du patrimoine génétique, on pourrait imaginer un assuré se voyant refuser une police d'assurance parce que l'assureur apprend qu'il a une prédisposition génétique à une certaine maladie, prenons par exemple la maladie de Parkinson, puisqu'on vient de découvrir qu'il existe un gène de cette maladie. Enfin prenons un exemple encore plus récent, mes chers collègues: cet après-midi même, nous avons parlé des droits de l'enfant vis-à-vis des parents qui assumeraient mal son éducation. Mais c'est un rapport horizontal! Les parents et l'enfant sont l'un et l'autre de simples particuliers. Selon le professeur Mahon, donc, le droit civil fédéral l'emporterait toujours. Or le droit civil fédéral ménage une large marge d'appréciation au juge, notamment par le biais de l'article 2 du Code civil qui interdit l'abus de droit dans l'ensemble de l'ordre judiciaire, dans l'ensemble du système des droits civils. Le juge peut interpréter ou appliquer le droit civil, il doit le faire de manière conforme et compatible avec les droits fondamentaux chaque fois que c'est possible. Il s'y efforce, et la présence dans une constitution d'un droit fondamental clair l'y aide. Par hypothèse, admettons que le professeur Mahon ait raison et que ce droit ne soit pas directement invocable, du moins sa présence dans notre Constitution entraînerait une invocation indirecte, mais tout de même efficace. Et puis le professeur Mahon semble avoir oublié l'article 5 du Code civil. Je le lis: "Les cantons ont la faculté d'établir ou d'abroger des règles de droit civil dans les matières où leur compétence législative a été maintenue". Vous voyez donc que, d'après cet article du Code civil, les cantons gardent une certaine compétence de droit civil. Et ces domaines sont loin d'être négligeables, puisque le professeur Denis Piotet leur a consacré un ouvrage de plus de 1000 pages. Pensons par exemple au contrat entre les patients et les hôpitaux, les établissements médico-sociaux publics; pensons aux usages cantonaux; pensons aux industries ou activités économiques et commerciales cantonales selon l'article 61 CO, etc. Dans tous ces domaines, mes chers collègues, l'effet horizontal est fondamental. Et puis finalement, même si le professeur Mahon devait avoir raison et qu'il soit d'emblée certain que cette règle ne servira jamais à rien – mais qui peut être aussi catégorique? Puisque nous faisons une Constitution pour cinquante ans, bien malin celui qui pourra dire quelle sera la jurisprudence dans trente ou quarante ans –, imaginons que ce soit inutile, serait-ce pour autant nuisible? Dans le doute, mes chers collègues, maintenons-la. Je dois dire que j'avais une certaine fierté en me disant, le Canton de Vaud, là aussi, va faire oeuvre de pionnier. Ce sera le premier qui aura introduit dans sa Constitution un effet horizontal pur. Dans le texte que vous avez sous les yeux, dans la mesure où ils s'y prêtent, les droits fondamentaux peuvent aussi être invoqués entre particuliers. Je me suis dit, on va être les meilleurs, on va être les premiers, comme pour le droit de vote des femmes. Et puis en regardant d'un petit peu plus près, j'ai vu que nous avons été précédés, dans ce texte précisément, par le canton de Soleure. Vous m'autoriserez une petite citation en allemand de ce texte, article 20, alinéa 3: "Soweit Sie ihrem Wesen nach dazu geeignet sind, verpflichten Grundrechte Privatpersonen untereinander". Traduction: "Dans la mesure où, de par leur nature, ils s'y prêtent, les droits fondamentaux lient les personnes privées entre elles". Le texte qui vous est proposé aujourd'hui est donc déjà inscrit dans la Constitution soleuroise, ce que le professeur Mahon n'a pas dit, et ce qui prévient chez nous toute crainte que nous n'obtenions pas, avec cette disposition, la garantie fédérale, puisque nos amis soleurois ont cette garantie fédérale. Au fond, nous ne sommes donc même pas les pionniers, nous reprenons quelque chose qui existe déjà. Encore deux mots peut-être au sujet du point b) puisque je n'ai fait que défendre mon amendement et que je ne suis pas intervenu dans la discussion elle-même au sujet du point b). Je l'ai anticipée largement pour dire l'importance qu'il y avait. Collègue Haldy, ce n'est pas la même chose, l'invocation des droits fondamentaux ou un droit de recours général. Car dans l'invocation des droits fondamentaux on ne peut invoquer que certaines dispositions précises, justiciables, qui figurent dans les droits fondamentaux. L'autre droit de recours est beaucoup plus large, il vise l'intérêt public. Ça a été mis au tableau. C'est beaucoup plus large, alors là je peux comprendre, même si je le déplore parce que j'ai voté pour ce texte. Tandis que, s'agissant uniquement des droits fondamentaux, là il me semble que, véritablement, c'est important. Je rappelle que, sur ce point, le professeur Mahon n'a émis aucune critique. Alors j'ai cherché la critique à l'endroit où je la cherche toujours, c'est-à-dire dans le petit livre jaune des Groupements patronaux vaudois et, bizarre, bizarre, il n'y avait aucune critique non plus sur cette lettre b) quant à sa praticabilité et son caractère juridiquement correct. Si même les Groupements patronaux vaudois n'y voient rien à redire, je crois que tout est dit. Je vous remercie.
F Olivier BURNET
Vous ne m'en tiendrez pas rigueur, je ne parlerai qu'en français, je ne ferai pas de citation, pas même en latin. Tout cela pour vous dire que le groupe Radical appuie l'amendement du groupe Libéral tel que cela a été présenté par M. Haldy. J'interviens cependant principalement pour la suppression de la lettre a), d'autres se chargeront – peut-être – de la lettre b). Mesdames, Messieurs, l'invocation de droits fondamentaux par des particuliers est l'exemple type d'une fausse bonne idée. En effet, il y a une apparence de bonne idée, tout à fait louable, à vouloir ancrer des droits fondamentaux non seulement à l'égard de l'État, mais aussi entre particuliers. C'est sans doute une idée généreuse, avec un semblant de logique. C'est le fameux effet horizontal qui a souvent agité les juristes et qui apparemment les agite encore. Pourtant, il me semble que M. Haldy – je devrais dire Monsieur le professeur – a parfaitement résumé la situation. Vous connaissez tous l'adage, autant de juristes, autant d'avis. Et bien non, il y a au moins deux juristes qui sont d'accord! Je souscris entièrement à tout ce qui a été dit par M. Haldy. Certains membres de la commission 3 ont cru déceler des exemples pour justifier cet effet horizontal. Le professeur Mahon a balayé ces exemples en démontrant ainsi l'inanité de cette disposition, notamment en raison de la primauté du droit fédéral. Plusieurs constituants, de tout bord politique, sont régulièrement intervenus à cette même tribune pour demander que la Constitution soit la plus concise possible, et surtout qu'elle soit compréhensible par les citoyens. Alors Mesdames et Messieurs, il faut décidément passer de la parole aux actes. Voilà l'exemple flagrant d'une disposition dont personne ne comprend la réelle portée et qui manifestement ne répond pas à un besoin. Supprimons donc cet article parfaitement inutile, en tout cas en ce qui concerne sa lettre a). Je vous remercie.
F Philippe CONOD
L'ancien procureur Willy Heim avait dit une fois: "Le privilège de l'avocat, c'est de dire n'importe quoi". Et bien, face à cette grande phrase, nous ne sommes pas tous égaux et j'aimerais reprendre mon confrère Nordmann quand il nous cite l'exemple du congé donné au locataire parce que celui-ci fait partie de l'Asloca. Aujourd'hui, avec le droit du bail tel qu'il existe, ce congé serait invalidé par les autorités.
F Nicolas MOREL
Merci. Vous avez entendu ici beaucoup d'avocats et de spécialistes du droit, permettez à un novice dans cette matière complexe de s'exprimer également. Effectivement, au-delà des arguments purement juridiques qui ont été longuement agités à cette tribune, on a affaire ici, finalement, en ce qui concerne la lettre b) en tout cas, à un débat de société. Il y a d'un côté ce qu'on pourrait appeler la sanctification de l'intérêt privé, l'intérêt individuel, je pourrais presque qualifier cette notion d'intérêt égoïste, et de l'autre côté, la prise en considération bien plus sérieuse de l'intérêt général. Alors au moment où on essaie d'intéresser le plus possible la population à être consciente de l'intérêt général, à aller par exemple participer aux votations, à ne pas faire partie des trop nombreux abstentionnistes, je pense que l'intérêt général mériterait d'être un petit peu valorisé. Dans ce sens-là, je vous propose de refuser l'amendement Haldy, qui va exactement en sens contraire.
F Isabelle MORET
Tout à l'heure, vous avez refusé l'article 39 bis et j'aimerais insister sur le fait que cet article 40 b), c'est la même idée que l'article 39 bis, certes restreinte aux droits fondamentaux, mais cela reste, à la base, la même idée. Si l'on reprend l'amendement Nordmann: 1)"Les personnes morales, conformément à leur but statutaire idéal", c'est-à-dire les associations et les fondations, comme à l'article 39 bis; 2) “elles s'en prennent à une norme abstraite”, c'est-à-dire qu'elles ont une possibilité de recours, comme à l'article 39 bis; et ici il y a une troisième condition "conformément à leur but statutaire". Mais je vous rappelle que tout au début de ce débat, notamment sur l'article 39 bis, M. Haldy vous a expliqué quelle était la jurisprudence du Tribunal fédéral actuellement pour les recours des associations. Il y a trois conditions et le but statutaire n'est que la troisième condition. J'insiste à nouveau: comme à l'article 39 bis, un des points essentiels, c'est que la première condition – à savoir que l'association soit directement concernée ou que ses membres soient directement concernés, à savoir le même argument que je vous ai invoqué pour l'article 39 bis – ne figure pas dans cette possibilité de l'article 40 b). Autrement dit, si vous avez refusé l'article 39 bis pour cette raison, vous devez donc être conséquents et refuser également cet article 40 b), pour la même raison. J'aimerais insister à nouveau sur le fait qu'en faisant cela vous ne niez pas l'existence des associations et des fondations, vous tenez simplement à ce que la jurisprudence du Tribunal fédéral continue à être appliquée comme maintenant, sans être élargie. Je vous remercie.
F Alain GONTHIER
En tant que strict non-juriste, je me bornerai à reproduire les opinions de juristes. Le rapport du professeur Mahon a été beaucoup invoqué, quasiment comme une condamnation des articles tels que rerédigés par la commission de rédaction. Il faut quand même préciser, si on le lit sérieusement, que le professeur Mahon est très prudent, juste relever qu'il dit que "les droits civil et pénal relèvent presque exclusivement du droit fédéral. Cette disposition" – concernant l'alinéa 1 toujours – "n'aurait dans ce contexte guère d'effets", donc elle en aurait, a contrario, quelques-uns. "Elle ne peut probablement pas" – et là il est extrêmement prudent – "en tous les cas avoir les effets que semble lui attribuer le rapport de la commission 3. Il n'est donc probablement pas exact d'affirmer, comme le fait ce rapport, qu'avec cette disposition le Canton de Vaud franchirait un petit pas de plus que la Constitution fédérale". Le professeur Mahon ne condamne pas cet article. Il dit qu'il est probablement inutile. Mais il reste une chance qu'il soit utile. Concernant le deuxième alinéa, le professeur Mahon dit: "Toutefois, il faut préciser que si l'intention de cet alinéa est d'étendre les possibilités des associations, ce qui relève d'un choix politique sur lequel le présent rapport n'a pas à s'exprimer, cet élargissement n'aurait sans doute d'effet que s'agissant des voies de recours au niveau cantonal et non du recours de droit public au Tribunal fédéral". C'est dire, si on reprend cette phrase, que cet alinéa, de l'avis du professeur Mahon, pourrait avoir des effets en droit cantonal en ce qui concerne les recours au Tribunal cantonal. On ne peut donc pas nous dire que cet alinéa est inutile et qu'il ne sert à rien. De l'avis du professeur Mahon, il sert à quelque chose.
F Luc RECORDON
Ce que vient de dire M. Gonthier me paraît juridiquement exact. La lecture du texte du professeur Mahon montre qu'il ne faut pas interpréter ses propos de manière par trop sommaire. En effet, on ne sait pas exactement quelle extension pourrait être accordée à l'effet horizontal à ce stade. Il peut y avoir une assez grande ouverture, parce que le droit fédéral est susceptible d'évolution et il est loin d'être certain qu'à un moment ou à un autre il ne laissera pas plus de champ aux cantons dans ce domaine-là. Ce n'est évidemment pas une certitude, mais nous serions bêtes de nous priver de cette possibilité d'exploiter intégralement toute marge que nous laisserait le droit fédéral. En ce qui concerne la lettre b), pour ma part je dois dire que ce qui m'a le plus convaincu parmi les différentes propositions qui nous sont soumises, c'est l'amendement du groupe radical (Buhlmann), qui consiste au fond en un retour au texte initial. Je ne crois pas qu'il y ait de problème particulier. Je ne crois pas en particulier que Mme Moret ait raison de trop s'inquiéter de la jurisprudence du Tribunal fédéral, car elle ne saurait en rien nous empêcher de donner toute l'extension que nous voulons à la titularité des libertés fondamentales sur le plan vaudois, sur le plan cantonal. Nous pouvons l'accorder aussi largement que nous le voulons et, de ce point de vue-là, le texte que nous avons voté en première lecture n'a strictement rien à voir avec l'article 39 bis, qui était une titularité générale des droits de recours et non une titularité spécifique des libertés fondamentales. Raison pour laquelle je vous invite principalement à voter l'amendement du groupe radical (Buhlmann).
F Jean-François LEUBA
Je remercie M. Recordon, mais peut-être M. Recordon n'était-il pas là au moment où Mme Lyon a expliqué qu'il n'y avait plus.de modification. Le problème est réglé parce que la commission de rédaction est revenue au texte original. Mais votre démonstration était néanmoins intéressante [rires]. M. Buhlmann.
F Philippe NORDMANN
Merci d'avoir dit ce que je voulais préciser. Effectivement, c'est une motion d'ordre et pas un amendement. Le seul but était que nous revenions, pour le texte de première lecture, à celui que nous voulions. C'est donc fait et je vous en remercie [brouhaha].
F Jacques HALDY
Très brièvement, deux points: sur la lettre a), l'effet médiat, lorsqu'il y a une situation d'abus, le droit privé intervient. Notre collègue Conod l'a rappelé, il n'est pas possible pour un bailleur de donner un congé en raison simplement de l'appartenance du locataire à une association de locataires. Le droit privé est là pour cela, pour réglementer précisément quels sont les rapports entre les justiciables. Ce n'est pas au droit public de le faire, le droit public est là pour protéger le citoyen contre la puissance de l'État, et c'est seulement lorsqu'il y a transposition possible que les autorités, conformément à l'amendement conditionnel qui a été déposé, doivent pouvoir intervenir et transposer. Ma préférence va bien sûr à la suppression du texte puisque la Constitution fédérale existe déjà, mais s'il faut vraiment reprendre un texte, reprenons le texte juste du droit fédéral. S'agissant de la lettre b), deux mots pour dire à M. Morel que ce ne sont pas les intérêts égoïstes qui sont défendus, c'est simplement ne pas charger inutilement des instances ou des tribunaux lorsque des associations ou des personnes ne sont pas concernées par un projet. Pour répondre à notre collègue Recordon, je crois que le professeur Mahon l'a dit clairement: le texte tel qu'il figure et qui a été repris ne signifie rien, car ou bien il dit une évidence (à savoir qu'une personne morale peut défendre ses intérêts juridiquement protégés), ou bien c'est les droits associatifs que nous n'avons pas voulus. Il ne faut donc pas laisser cette disposition. Je vous remercie.
F Jean-François LEUBA
J'ai l'impression que les arguments ont été largement échangés, mais si quelqu'un souhaitait encore s'exprimer, je n'aimerais pas l'en empêcher et qu'il rentre chez lui avec une intervention rentrée. Si ce n'est pas le cas, alors nous allons voter. J'ai demandé qu'on mette l'amendement conditionnel Haldy. Cet amendement ne serait discuté que si le texte de la commission reste en vigueur. Si le texte de la commission est liquidé, M. Haldy est satisfait et il ne dépose pas son amendement conditionnel; si au contraire le texte de la commission reste, alors on discutera l'amendement conditionnel. Je crois que c'est clair pour tout le monde. Je vous propose de voter alinéa par alinéa, ou plus exactement lettre par lettre puisqu'il y a deux lettres et, je crois que les orateurs sont tous d'accord, il y a deux problèmes différents entre la lettre a) et la lettre b). Lettre a), amendement Haldy, suppression de cette lettre. 146 votes exprimés, l'amendement est admis par 74 voix contre 71 et 1 abstention. Lettre b), amendement Nordmann “ b) par les personnes morales conformément à leurs buts statutaires idéal, lorsqu'elles s'en prennent à une norme abstraite”, opposé au texte de la commission. 146 votants, l'amendement est repoussé par 79 voix contre 60, avec 7 abstentions. Lettre b), amendement Haldy, suppression de cette lettre au texte de la commis-sion. 146 votes exprimés, 73 OUI, 73 NON. Il appartient au président de tran-cher: il le fait pour l'amendement Haldy. Donc 74 contre 73, l'amendement Haldy est adopté [brouhaha]. et 0 abstention.
F Philippe NORDMANN
Une tradition électronique s'est instaurée dès aujourd'hui, sauf erreur, qui consiste à faire que si quelqu'un demande l'enregistrement d'un vote nominal, on le sache à l'avance. Je reprends cette proposition aujourd'hui, c'est-à-dire que je demande que ce soit enregistré, ce qui impliquerait pratiquement qu'on revote puisqu'il faut le savoir à l'avance [brouhaha]. Alors il y a une motion [brouhaha]... Je fais une proposition sous forme de motion d'ordre qu'on décide, un s'il y aura ou non un vote nominal, et deux qu'on revote après avoir décidé cette question fondamentale. Deuxième point, mais qui n'a rien à voir, je reprends à mon compte l'amendement groupe Libéral Haldy qui n'était applicable que dans l'hypothèse où la suppression n'était pas acceptée. Cette suppression a été acceptée, mais cet amendement peut être maintenu aussi dans l'hypothèse inverse. Je le reprends à mon compte.
F Jean-François LEUBA
Bien, alors il faut... Mme Dufour.
F Denyse DUFOUR
[hors micro]
F Jean-François LEUBA
On peut demander une contre-épreuve, c'est tout à fait exact. Est-ce que vous voulez que la contre-épreuve soit à l'appel nominal, scrutin public? Cette demande est-elle appuyée? Oui, cette demande est appuyée. Il y aura donc une contre-épreuve au scrutin public. Nous recommençons le vote. S'il vous plaît, un tout petit peu de silence parce que je n'aimerais pas devoir faire un troisième vote, qui n'est d'ailleurs pas prévu par le règlement. Je rappelle que ceux qui approuvent l'amendement Haldy – suppression de la lettre b) – votent OUI, ceux qui refusent l'amendement Haldy votent NON. Le scrutin est ouvert.
Vote à l’appel nominal sur l’amendement Haldy:
Contre-épreuve à l’appel nominal: nombre de votes exprimés: 147, l'amendement Haldy est accepté par 74 voix contre 72, avec 1 abstention.
Ont voté Oui:
Mmes et MM. Abbet, Amstein, Balissat, Berger, Blanc, Bory Weber, Bovet Daniel, Bovet Fred-Henri, Bovy, Braissant, Bron, Buffat, Bühlmann Gérard, Burnet, Carnevale, Charotton, Chevalley, Cohen-Dumani, Conod, Coprésident 1, Cornu Claire-Lise, Cornu Pierre-Alain, Cossy, Cuendet, De Luze, Delay, Desmeules, Dufour, Fague, Freymond-Bouquet, Gindroz, Girod, Glauser, Gonvers, Grin, Gross, Guignard, Haldy, Henchoz, Henchoz-Cottier, Henry, Jaillet, Jaton, Jordan-Kulling, Kaeser, Kulling, Labouchère, Luisier, Mages, Margot, Marion, Martin Bernard, Milloud, Moret, Nicod, Nicolier, Oguey, Ormond, Payot, Pernet, Piot, Rapraz, Reymond, Richard, Rochat-Malherbe, Roulet-Grin, Ruey-Ray, Schneiter, Streit, Vincent, Vittoz, Voutat- Berney, Wellauer, Yersin-Zeugin (74)
Ont voté Non:
Mmes et MM. Aubert, Baehler Bech, Bavaud, Bielman, Boillat, Bolinger, Bory Marc-André, Bouvier, Bovay, Bovon-Dumoulin, Buehler, Burnier-Pelet, Burri, Chapuis, Chatelain, Cherix, Chollet, Coprésident 2, Cork-Levet, De Souza-Kohlbrenner, Dépraz, Desarzens, Dufour, Farron, Galeazzi, Gallaz, Gonthier, Gorgé, Goy-Seydoux, Guy, Hermanjat, Holenweg Rouyet, Humair, Hunkeler, Jemelin, Jomini, Jufer, Le Roy, Lecoultre, Lehmann, Linder, Lyon, Maillefer, Mamboury, Martin Jean, Martin Marie-Anroinette, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Nordmann Philippe, Nordmann Roger, Ostermann, Perrin, Piguet, Pillonel, Pittet, Pradervand, Rebeaud, Recordon, Renaud, Salamin Michel, Saugy-Anhorn, Schmid, Schwab, Tille, Vallotton, Volluz, Weill-Levy, Wettstein, Winteregg, Wiser, Ziegler, Zuercher (72)
S’est abstenu:
M. Athanasiades (1)
Vous avez privé le président d'avoir donné un vote historique, ma foi, tant pis, c'est comme ça! L'amendement Haldy est admis et la lettre b) est supprimée, de telle sorte que, si je comprends bien, l'ensemble de l'article est supprimé puisqu'il n'a plus de sens. Ça pose une question qui est un peu difficile: c'est un amendement conditionnel, peut-on reprendre un amendement conditionnel comme amendement principal? Qu'en pense la coprésidence? Il semble que mes collègues de la coprésidence estiment que l'amendement étant conditionnel, il ne peut pas être pris comme amendement principal, il aurait dû être déposé avant les votes. Il aurait fallu dire avant les votes que l'on redéposait cet amendement. Je crois que c'est la solution raisonnable, si on veut éviter qu'un amendement ne soit pas que conditionnel, il faut le déposer avant les votes en disant qu’on reprend à son compte l'amendement, comme vous l'avez dit. Dès lors l'article 40 disparaît de notre projet et nous pouvons passer à l'article 41.
Article 41 – Restriction des droits fondamentaux
F Jean-François LEUBA
Madame la présidente de la commission de rédaction. Madame la présidente renonce. Il n'y a pas de proposition d'amendement. La discussion est néanmoins ouverte sur l'article 41. Elle n'est manifestement pas utilisée. Je vous fais donc voter l'article 41. Article 41 – Restriction des droits fondamentaux: 143 votes exprimés; approuvé à l'unanimité. 1 Toute restriction d'un droit fondamental doit être fondée sur une base légale. Les restrictions graves doivent être prévues par une loi. Les cas de danger sé-rieux, direct et imminent sont réservés. 2 Toute restriction doit être justifiée par un intérêt public ou par la protection d'un droit fondamental d'autrui. 3 Elle doit être proportionnée au but visé. 4 L'essence des droits fondamentaux est inviolable.
Titre III Tâches et responsabilité de l’État et des communes
F Jean-François LEUBA
J'attire votre attention sur le fait que nous changeons de titre, nous passons aux "Tâches de l'État". A cet égard, il y a une motion d'ordre du groupe Les Verts qui sera développée par M. Ostermann. Cet amendement-là a été imprimé par le secrétariat.
F Roland OSTERMANN
Je dépose au nom des Verts une motion d'ordre demandant d'interrompre les travaux. N'y voyez surtout pas une quelconque trace de démagogie, mais la raison est que nous nous réunissons le lundi – un droit constitutionnel reconnu – et que, ce lundi, nous n'avions pas connaissance du contenu des articles 42 et 46 qui nous sont soumis aujourd’hui. Nous n'avons pas pu les examiner. Nous vous demandons d'interrompre les travaux ici. Je suis prêt à argumenter lorsque cette motion aura été soutenue.
F Jean-François LEUBA
Cette motion est-elle appuyée par vingt membres au moins? C'est le cas. Très bien. La discussion est ouverte sur la motion. M. Ostermann.
F Roland OSTERMANN
Nous avons pris la décision d'entamer un deuxième débat. Une telle procédure est toujours précédée d'un premier débat, à l'issue duquel le texte adopté est connu de tous dans son intégralité. Or tel n'est pas le cas ici. Nous recevons le texte du premier débat sous la forme d'un feuilleton. En soi, cela ne facilite déjà pas la vue d'ensemble, mais ce qui est grave, c'est que les épisodes nous sont livrés après certaines réunions de groupe, pourtant hebdomadaires. Nous nous réunissons le lundi. Recevoir mardi, voire mercredi pour certains constituants, les textes qui seront débattus le vendredi empêche donc toute analyse de groupe et le dépôt d'éventuels amendements. Cela empêche même toute réflexion individuelle pour les membres des groupes qui se réunissent plus tard. Le travail parlementaire consciencieux est rendu impossible. Cette motion d'ordre est donc une demande de restauration de l'ordre parlementaire, à défaut de quoi on pourrait craindre que les termes "méthode de travail" ne prennent un sens péjoratif lorsqu'ils sont associés au mot "Constituante". Je signale enfin qu'une proposition a été faite le 15 octobre pour que les amendements soient déposés au plus tard le lundi, et que ne soient ensuite plus acceptés que les sous-amendements. Elle a été répétée au comité. Cela touche, comme vous le voyez, aussi à l'organisation de nos débats. Cette proposition est-elle condamnée à être traitée à titre posthume en mars prochain?
F Jean-François LEUBA
Il m'est agréable de rassurer M. Ostermann: à la prochaine séance de comité, la proposition des Verts sera traitée. Et bien sûr, si l'Assemblée n'est pas d'accord avec la proposition du comité, elle pourra toujours prendre, par motion d'ordre, une décision contraire. Il n'en reste pas moins que la discussion continue sur la motion d'ordre Ostermann, s'agissant plus particulièrement des articles 42 à 47. Qui souhaite s'exprimer? Personne. Nous allons passer au vote.
Proposition du groupe des Verts d'interrompre les débats à cet article. Sur 143 suffrages exprimés, la proposition est acceptée par 83, contre 43 avec 17 abstentions. Mesdames et Messieurs, j'aimerais vous rappeler – avant que vous ne vous en alliez, la séance n'est pas levée, quel que soit le vote que vous ayez fait, la séance n'est pas levée – que vendredi prochain aura lieu dans cette salle, à l'issue de nos débats, nous espérons que ce sera à 17 h. 30, un forum radiophonique auquel participeront les présidents de groupe, et on souhaite qu'un certain nombre de constituants restent dans la salle, qui pourront intervenir dans le débat et dans la discussion. Je vous rappelle simplement cela pour que vous puissiez prendre vos dispositions. J'exprime, à la suite du dernier vote qui est intervenu, un vœu très pressant à la commission de rédaction, c'est que les textes qui doivent être discutés à la séance suivante soient disponibles dès le lundi à 12 h., de manière que nous n'ayons pas de reports, sinon nous allons être condamnés, un à réintroduire les "open end", et deux à ne pas, le cas échéant, terminer nos travaux pour fin mars ainsi que nous l'espérons. Mesdames et Messieurs, je tiens à vous remercier du travail que vous avez effectué aujourd'hui d'une manière générale dans le bon ordre, et à vous souhaiter un bon week-end.
Fin de la séance du 16 novembre 2001
Enregistrement et transcription Intercongress Genève
Mise en page Dominique Renaud
bu011116.htm 17.12.2001 Révision : 01 February 2003