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Proposition de la commission, propositions de minorité, amendements et sous-amendements

Bulletin   de   séance

Procès-verbal de la séance du 1er décembre 2000


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N° et Date de la Séance N° 16 du 1er décembre 2000
Lieu CHUV, Auditoire de la Maternité
Présidence de Madame Yvette Jaggi

Déroulement des débats

Articles adoptés......................................................................................................... 2
Accueil et communication d’ordre général............................................................... 5
Vérification des titres d’éligibilité ............................................................................ 5
Mise en discussion des propositions des commissions thématiques......................... 7
Titre 4: Tâches publiques......................................................................................... 7
Article 2.3.24 —protection de la famille (Suite)........................................................ 7 
Article 3.5 —Protection de la maternité .................................................................. 28
Article 3.12 —Vie en commun................................................................................ 30
Article 2.3.25 — Jeunesse ......................................................................................... 31
Article 3.6 —Droit des enfants et des jeunes........................................................... 35
Article 2.3.26 —Intégration des étrangers (1ère partie).......................................... 35
Article 3.25 —Droit de cité ..................................................................................... 36
Article 2.3.26 —Intégration des étrangers (Suite) ................................................... 55
Article 2.3.27 — Aide humanitaire et au développement......................................... 60
Article 2.3.28 — Conseil de l’avenir ........................................................................ 62

A la fin du document figurent toutes les propositions, amendements et sous-amendements liés aux articles adoptés lors de la séance.

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Articles adoptés

Article 2.3.24 — protection de la famille (Suite)

Proposition Martin acceptée par 73 oui contre 68 non.
Amendement Jaeger refusé par 66 non contre 55 oui.
Adjonction Martin acceptée par 66 voix contre 65.
Amendement Jomini accepté par 77 Oui contre 70 non et 3 abstentions.
Proposition de la commission acceptée par 74 voix contre 70 et 2 abstentions.
Résultat de la votation à l’appel nominal: 77 oui pour la version de la commissions contre 78 non pour la version Martin et 3 abstentions.
Amendement Recordon accepté par 74 oui contre 69 non avec 12 abstentions.
Disposition transitoire complétant l’art. 2.3.24 al. 5
L’assurance maternité cantonale doit entrer en vigueur au plus tard 36 mois après l’entrée en vigueur de la Constitution.

Article 3.5 — Protection de la maternité

Amendement de minorité Amstein rejeté par 74 voix contre 56.

Article 3.5 — Protection de la maternité
Chaque femme a droit à la sécurité matérielle avant et après l’accouchement.

Article 3.12 — Vie en commun

Report de l’article 3.12 — Vie en commun

Article 2.3.25 — Jeunesse

Amendement Recordon rejeté par 74 non contre 56 oui.
Amendement Desarzens rejeté par 79 voix contre 45.

Article 2.3.25 — Jeunesse
Le Canton et les communes tiennent compte des besoins et des intérêts particuliers des enfants et des jeunes en favorisant leurs activités culturelles, sportives et de loisirs.

Article 3.6 — Droit des enfants et des jeunes

Article 2.3.26 — Intégration des étrangers (1ère partie)

Motion d’ordre Gérard Buhlmann appuyée par vingt personnes.
Changement de l’ordre du jour accepté à une évidente majorité.

Article 3.25 — Droit de cité

Sous-amendement libéral rejeté.
Amendement du Groupe radical rejeté par 82 voix contre 57.
Amendement du Groupe libéral rejeté par 79 voix contre 64.
Sous-amendement Wettstein Martin rejeté par 77 voix contre 62.
Sous-amendement Weill-Légy refusé par 74 voix contre 70.
Amendement Bühler rejeté par 75 voix contre 66.

Article 2.3.26 — Intégration des étrangers (Suite)

Sous-amendement du groupe radical accepté à une évidente majorité.
Amendement Boillat sous-amendé préféré la version de la commission par 106 voix contre 11.

Article 2.3.26 — Intégration des étrangers
L’État facilite l’accueil des étrangers. Le Canton et les communes favorisent leur intégration dans le respect réciproque des identités et des valeurs qui fondent l’État de droit.

Article 2.3.26 bis
Les procédures cantonale et communale de naturalisation sont rapides et gratuites.

Article 2.3.27 — Aide humanitaire et au développement

Amendement du groupe des Verts accepté par 71 voix contre 53.

Article 2.3.28 — Conseil de l’avenir

Amendement Martin accepté par 70 voix contre 40.
Amendement Nordmann adopté par 68 voix contre 36.
Amendement Gonthier refusé par 69 voix contre 25.
Version courte de l’amendement Bernard Martin adopté par 65 voix contre 62.
Adoption de la version courte de l’amendement anciennement Martin Bernard confirmée par 69 voix contre 59.
Version courte adoptée à l’appel nominal par 67 voix contre 59.

Article 2.3.28 — Conseil de l’avenir

Suppression de l’article 2.3.28

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La séance est ouverte à 10 heures

Sont présents: Mmes et MM. Amstein Claudine, Athanasiadès Jean, Aubert Josiane, Baehler Bech Anne, Bavaud Adrien, Benjamin Samy, Berney Michel, Bielman Anne, Blanc Marcel, Blanc Eric, Boillat Jean-Pierre, Bolinger Anne-Marie, Bory Marc-André, Bory-Weber Dominique, Bouvier Denis, Bovay Judith, Bovet Fred-Henri, Bovet Daniel, Bovon-Dumoulin Martine, Bovy Samuel, Braissant Rénald François, Brélaz Daniel, Bron Jacques-Henri, Buffat Michel, Bühler Michel, Buhlmann Gérard, Bühlmann Willy, Burnet Olivier, Burnier-Pelet Thérèse, Burri Marcel, Carnevale Eliane, Chapuis Allegra, Charotton Georges, Chatelain André, Cherix François, Chollet Jean-Luc, Cohen-Dumani Marcel, Colelough Philippe, Conod Philippe, Cornu Pierre-Alain, Cornu Claire-Lise, Cossy Samuel-Henri, Crisinel François, Cruchon Raoul, Cuendet Maria-Chrystina, De Haller Jean-Claude, De Luze Charles-Henri, De Mestral Laurent, De Souza-Kohlbrenner Regula, Delay Elisabeth, Dépraz Alex, Desarzens Laurent, Desmeules Michel, Dessauges Pascal, Dubois Jean-Paul, Dufour Etienne, Dufour Denyse, Fague Sébastien, Farron Pierre, Favre-Chabloz Raymonde, Freymond-Bouquet Monique, Galeazzi Rebecca, Garelli Stéphane, Ghiringhelli Charles-Pascal, Gindroz André, Girod-Baumgartner Christine, Goël Yves, Gonthier Alain, Gonvers Olivier, Gorgé Marcel, Goy-Seydoux Louis, Grin Nicole, Gross-Fonjallaz Nicole, Guignard Françoise, Haefliger Sylviane, Haldy Jacques, Henchoz Pierre, Henry Philippe, Hermanjat Pierre, Holenweg Rouyet Anne, Humair Louis, Hunkeler Pierre, Jaeger Odile, Jaggi Yvette, Jemelin Mireille, Jomini Viviane, Jordan Andreane, Jufer Nicole, Kaeser-Udry Danielle, Keller Pierre, Keshavjee Shafique, Kulling Jean-Pierre, Labouchère Catherine, Le Roy Jean, Léchaire Jean-Michel, Lehmann Pierre, Leuba Jean-François, Linder Sandra, Loi Zedda Fabien, Luisier Christelle, Lyon Anne-Catherine, Mages Roland, Maillefer Denis-Olivier, Mamboury Catherine, Mamin Henri, Marion Gilbert, Martin Marie-Hélène, Martin Bernard, Martin Jean, Martin Laurence, Martin Marie-Antoinette, Masson Stéphane, Mayor Philippe, Millioud Jean-Pierre, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Moret Isabelle, Nicod François, Nordmann Philippe, Oguey Annie, Ormond Anne, Ostermann Roland, Pellaton Berthold, Perdrix René, Pernet Jacques, Perrin Jeanne-Marie, Piguet Jean-Michel, Pillonel Cédric, Pittet Jacqueline, Pittet François, Pradervand Jean-Claude, Rapaz Olivier, Rebeaud Laurent, Recordon Luc, Renaud Dominique, Reymond Antoine, Richard Claire, Rochat-Malherbe Paul, Rodel Marilyne, Roulet Catherine, Roulet-Grin Pierrette, Ruey-Ray Elisabeth, Salamin Michel Lauréane, Saugy-Anhorn Nathalie, Schneiter Robert, Schwab Claude, Streit Adrien, Thévoz Francis, Troillet Roland, Vallotton Jacques, Volluz Françoise, Voutaz-Berney Eveline, Wehrli Laurent, Weill-Lévy Anne, Wellauer Pierre-Olivier, Wettstein-Martin Irène, Winteregg Michel, Wiser Henri, Ziegler Geneviève, Zuercher Magali, Zwahlen Jacques (161).

Sont absents:

Mmes et MM. Gallaz Christophe, Guy Joël, Henchoz-Cottier Martine, Jaillet Gérard, Lasserre Colette, Margot François, Nicolier Yvan, Nordmann Roger, Zisyadis Josef (9).

Se sont excusés:

Mmes et MM. Balissat jean, Berger Cécile, Payot François, Schmid Charles, Tille Albert, Voruz Eric, Yersin-Zeugin Ruth (7).

Nouveaux constituants

Mme Alice Glauser, (Renouveau Centre, Yverdon), et M. Martial Vincent (Parti radical D., Avenches), remplacent respectivement M. Georges Burdet et Mme Martine Cherbuin.

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Accueil et communication d’ordre général

F Yvette JAGGI

Je vous remercie de prendre place sans délai et de faire s’il vous plaît silence afin que nous puissions commencer nos travaux. Je demande à chacune et chacun de jeter un coup d’oeil à la pendule. Nous en avons une bien visible dans cette salle, on peut la regarder au début de la séance et aussi on peut suivre son avancement en cours de réunion. Nous siégeons aujourd’hui, Mesdames et Messieurs – poursuivant notre errance à travers les grands auditoires et les salles adéquates de la Ville de Lausanne et de la région — nous siégeons aujourd’hui au grand auditoire de la Maternité. À coup sûr, certaines et même aussi certains d’entre vous auront vu un signe intéressant pour l’un des sujets qui est à notre ordre du jour, et de manière générale pour les articles de la future Constitution qui prendront naissance dans cette séance.

Je vous signale, Mesdames et Messieurs, que nous ne sommes pas seuls, nous le savons d’ailleurs, nous ne sommes pas seuls en Suisse à commencer ou à poursuivre les travaux de révision de constitutions cantonales. Les constituants zurichois, au nombre de cent, ont tenu leur première séance le 13 septembre dernier et tiendront leur prochaine séance le 14 de ce mois. À cette occasion, et cela peut éventuellement vous intéresser, bien qu’ils soient cent et que ce chiffre ne soit pas divisible par 6, ils auront six commissions thématiques et ils auront un présidium composé de trois personnes. [brouhaha] Qui oserait parler de l’arrogance zurichoise? Tout de même, le sens de la hiérarchie reste supérieur chez eux, puisque ce sera bel et bien un présidium avec un président et deux vice-présidentes. Plus démocratiquement, vous connaissez la solution vaudoise.

Cela dit, permettez-moi de venir aux communications générales au début de cette séance. Tout d’abord, aux jeunes qui sont régulièrement présents et qui suivent nos travaux depuis les bancs qui tiennent lieu de tribune du public, se sont joints aujourd’hui les représentants de la commission cantonale consultative des immigrés, Mme Brigitte Gonzales-Ostosreida et M. Francisco Ruiz, ainsi que M. Janpoin et M. Alain Monod qui, évidemment, attendent avec une certaine impatience — que nous ne voulons pas augmenter par la lenteur de nos travaux — le traitement de tel ou tel article d’aujourd’hui.

Par ailleurs, je vous signale, au nom de sa présidente, Mme Lyon, que la commission de rédaction tiendra désormais une séance à l’occasion de chaque réunion plénière de notre Assemblée. La première, aujourd’hui, après le plénum, dès 17:30.

Cela dit, je passe au point 2 de l’ordre du jour: rapport de vérification des titres d’éligibilité: c’est M. Charles-Henri de Luze qui nous présente les deux nouveaux constituants d’aujourd’hui.

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Vérification des titres d’éligibilité

F Charles-Henri de LUZE

Le comité s’est réuni le vendredi 1er décembre 2000 pour la vérification des titres d’éligibilité.

Par lettre du 1er novembre 2000, M. Georges Burdet, constituant, domicilié à Ursins, a annoncé sa démission de l’Assemblée constituante, avec effet au 15 novembre 2000. M. Georges Burdet a été élu [de] l’arrondissement d’Yverdon sur la liste Renouveau Centre UDC, Vaud. Le Conseil d’État nous a transmis l’extrait du procès-verbal du bureau électoral de l’arrondissement d’Yverdon. Il ressort que le premier des viennent-ensuite de la liste Renouveau Centre UDC, Vaud, est Mme Alice Glauser, domiciliée à Champvent. Aucun recours n’ayant été déposé contre cette élection, le comité de l’Assemblée constituante vous propose de valider l’élection de Mme Alice Glauser.

Par lettre du 14 novembre 2000, Mme Martine Cherbuin, constituante, domiciliée à Avenches, a annoncé sa démission de l’Assemblée constituante avec effet immédiat. Mme Martine Cherbuin a été élue de l’arrondissement d’Avenches sur la liste parti Radical Démocratique. Le Conseil d’État nous a transmis l’extrait du procès-verbal du bureau électoral de l’arrondissement d’Avenches. Il en ressort que le premier des viennent-ensuite sur la liste du parti Radical Démocratique est M. Martial Vincent, domicilié à Vallamand. Aucun recours n’ayant été déposé contre cette élection, le comité de l’Assemblée constituante vous propose de valider l’élection de M. Martial Vincent.

Madame la présidente, j’ai terminé.

F Yvette JAGGI

Merci, Monsieur le rapporteur.

Je prie Mme Alice Glauser et M. Martial Vincent de se présenter devant l’Assemblée et le bureau tout à la fois. Mesdames et Messieurs les constituants, je vous prie de vous lever s’il vous plaît. Mme Glauser, M. Vincent vous voici maintenant conviés à exprimer votre détermination face à l’oeuvre exaltante qui vous attend. Vous le ferez dans la pleine liberté de vos convictions, devant Dieu ou selon les valeurs qui vous inspirent. Une brève formule de prestation va vous être lue à laquelle vous êtes invités à répondre «oui» à l’appel de votre nom. «Chargé par les citoyens vaudois de participer à l’élaboration d’une charte qui fasse de leur État l’expression d’une volonté commune, je m’engage à porter haut dans cette Assemblée les valeurs propres à favoriser l’épanouissement des personnes au gré de leur liberté fondamentale et de leurs responsabilités à l’égard d’autrui au sein d’une communauté secourable aux plus faibles et ouverte au monde».

Mme Glauser? [réponse affirmative]
M. Vincent? [réponse affirmative]

Nous prenons acte de ces promesses et vous renvoyons à vos places en silence, où vous rejoindrez vos collègues également silencieux. [rires, applaudissements]

Mesdames et Messieurs, je profite de ce très bref instant de silence pour vous signaler, je ne sais ce qu’il en est pour vous, mais pour nous, à cette basse table, la salle résonne à un point fou et les conversations que vous croyez discrètement latérales sont audibles jusqu’ici. Tenez-en donc compte.

Il convient encore que je vous signale le nom des scrutatrices et scrutateurs qui vont opérer sans doute à de nombreuses reprises aujourd’hui sous l’experte direction de Sébastien Fague. Travailleront donc pour le rang A, M. de Luze; B, M. Pradervand; C, M. Henry; D, Mme Baehler Bech; E, M. Desarzens; F, Mme Jomini; tandis que Mme Bovon se tient en réserve en cas de défaillance d’une des personnes citées.

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Mise en discussion des propositions des commissions thématiques

Titre 4: Tâches publiques

Article 2.3.24 — protection de la famille (Suite)

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, sans plus de préambule, nous passons au point 3 de notre ordre du jour, à savoir le traitement des articles. Nous reprenons la discussion à l’article 2.3.24, là où nous l’avons laissée, c’est-à-dire à la fin de l’alinéa 3 de cet article, alinéa à propos duquel je dois vous signaler qu’il y a une erreur dans la formule que vous avez sous les yeux, dans le dernier des alinéas de l’article 2.3.24, qui est inscrit en lettres grasses. La teneur de cet alinéa, telle qu’elle a été votée la dernière fois, est la suivante, je vous prie d’en prendre note, vous l’avez d’ailleurs à l’écran: «En collaboration avec le Canton, les communes et les partenaires privés organisent l’accueil préscolaire et parascolaire des enfants, financièrement accessible à tous». Cela dit, fait et noté, nous pouvons reprendre notre discussion à l’alinéa 4, le premier des alinéas non encore approuvés, ainsi que vous le signale votre programme de ce jour. Le président de la commission, M. Buhlmann, se tient à disposition pour l’entrée en matière.

F Gérard BUHLMANN

L’alinéa 4 n’a pas fait l’objet de proposition de modification. Je peux donc admettre qu’il recueillera l’assentiment de l’Assemblée. Je me tiens toutefois à disposition pour en parler si souhaité. C’est un article qui, je crois, s’impose dans une telle Constitution. L’alinéa 5, par contre, qui traite de la maternité, comme l’a rappelé notre présidente de séance tout à l’heure, lui, fait l’objet d’un certain nombre de propositions de modifications. Nous avons ici des recoupements très évidents avec l’article 3.5, qui lui est d’ailleurs mis en parallèle, puisque, à peu de chose près, l’alinéa 1 de l’article 3.5 équivaut à la proposition Jaeger, et l’alinéa 2 de l’article 3.5 équivaut à la proposition Martin. Je vous propose donc, comme c’est d’ailleurs dans l’ordre du jour, de commencer par l’article 2.3.24, et nous aurons vraisemblablement fait un bout du chemin dans le traitement du 3.5. Comme beaucoup d’entre vous, Mesdames et Messieurs, je me suis trouvé minorisé — ce n’était pas ce week-end mais il y a maintenant quelques mois – concernant le rejet de l’assurance maternité, que j’ai déploré. Et je crois que, dans cette Assemblée, vraisemblablement une très grande majorité, si ce n’est une quasi-unanimité, est favorable à ce que des mesures soient prises en faveur des mères lors de naissances. La question qui se pose est plutôt de savoir quel type de mesure voulons-nous prendre, que doit mettre dans sa Constitution le Canton de Vaud à l’aube du 21e siècle. Nous avons fait en gros deux propositions. L’une émanant de Mme Martin, qui parle d’une assurance maternité cantonale, et l’autre de Mme Jaeger, une proposition qui, au fil du temps, a pas mal évolué, qui n’est plus celle que vous avez dans le rapport de minorité, qui parle de la sécurité matérielle des mères lors de la naissance. J’aimerais, en préambule, préciser peut-être un ou deux points. Le premier: il faut savoir ce que l’on entend par assurance maternité. Si l’on entend un dispositif du même genre qu’une assurance maladie, cela voudrait dire que l’on aurait donc un principe de cotisations qui sert à financer des prestations, le principe de cette assurance étant que chacun cotise dans un but solidaire en espérant, pour la maternité, on espère y avoir recours, la maladie, on espère ne pas y avoir recours, chacun cotise dans le but de couvrir les primes. S’impose d’avoir une structure juridique indépendante, une structure avec un système de capitalisation, en tout cas de couverture des risques. C’est un système qui est complexe et je ne suis pas intimement convaincu qu’il sera très facile à réaliser. C’est un système qui a, par ailleurs — à mes yeux et aux yeux de la commission, puisqu’elle n’en a pas voulu, je reviendrai sur sa proposition tout à l’heure — comme défaut d’être un système qui s’ouvre à tout le monde. Il y a aujourd’hui des femmes, c’est peut-être minorité, très bien couvertes par diverses conventions collectives. Ce que vise la commission quand elle dit que les femmes bénéficient de la sécurité matérielle, c’est bien d’offrir cette sécurité à celles qui en ont besoin. Nous ne voulons pas d’un principe de l’arrosoir: nous voulons ici une aide ciblée. Se posent aussi bien entendu, si on parle d’une véritable assurance maternité, tout le problème du financement et le problème du coût. C’est d’ailleurs bien le financement qui a fait échouer le projet fédéral et non pas le principe même. Si on parle d’une véritable assurance maternité, le financement devrait logiquement être fait, et on voit que les Genevois tentent une percée dans ce domaine, de manière paritaire, entre employeurs et employés. Et là, j’aimerais rappeler, parce que paradoxalement nous n’avons jamais parlé de chiffres jusqu’à maintenant, nous votons en toute liberté et hors de tous soucis quotidiens, de préoccupations quotidiennes, des dispositions qui, pour certains, vont entraîner des charges nouvelles. Je n’ai jamais entendu quelqu’un dans cette tribune se poser la question de savoir combien cela coûtait, si on pouvait le financer. Je pense que le Grand Conseil, lui, quand il vote un objet, il se préoccupe et de son coût et de son financement. Je pense aussi que, dans la phase de consultation, l’État se chargera de chiffrer nos propositions et que, lors des débats ultérieurs, nous verrons bien ce que nous avons accouché, c’est le cas de le dire. Pour en revenir là, vouloir taxer paritairement employeurs et employés, si telle est l’intention de Mme Martin, comme le prévoit Genève… j’aimerais rappeler que Vaud est le 24e canton sur 26 en matière de chômage, il n’y a que Genève et le Tessin qui sont derrière nous, avec un taux de chômage de 2,7 pour une moyenne suisse de 1,7. Et je peux vous dire que je suis de ceux qui se battent pour garder des emplois dans ce Canton, pour éviter qu’ils soient transférés ailleurs, et cela n’est pas toujours facile. Ce n’est pas en instaurant des charges nouvelles, propres à notre Canton, que nous allons favoriser l’emploi dans ce dernier; et c’est bien une des dispositions que nous avons votées, il y a quelques séances. Si nous imaginons que c’est l’État qui paie ces primes, j’aimerais aussi vous rappeler d’autres chiffres, car je crois qu’il est important que nous les ayons à l’esprit. Si la commission de planification a donné à la commission 2, notamment, les tâches publiques et les finances, cela n’est pas un hasard, le but était bien que la même commission s’occupe de ces deux éléments. Cela n’était pas d’ailleurs de l’avis de chacun dans cette commission. Mais c’était sage, je crois. On ne peut pas décider des tâches publiques sans oublier ou sans se rappeler quelle est la situation du Canton de Vaud. Nous sommes 26 e sur 26, vous le savez tous, nous sommes loin derrière le 25e, ce qui est pire. Pour le budget 2001, je rappelle que le déficit budgétisé de 199 millions représente le tiers du déficit net des 25 autres cantons. Cela montre donc la situation dans laquelle nous nous trouvons. Nous avons aujourd’hui quelque 7 milliards de déficit. Cela représente 250 millions d’intérêts dont 1 million par jour ouvrable. Et ces 250 millions ne vont pas dans le social ou dans d’autres activités. Je crois qu’une fois ou l’autre, il fallait quand même, en tant que président de la commission 2, que je donne ces chiffres, que nous avons peut-être tendance, quelque part, à négliger. Forte de ces éléments, la commission 2 vous propose une version soft, disons-le comme cela, en disant que l’État «veille à ce que les femmes bénéficient de la sécurité matérielle avant et après l’accouchement». Le but est clair: soutenir ceux qui en ont besoin. La proposition de Mme Martin, elle, vous propose un système vraisemblablement différent, puisqu’elle veut instaurer une assurance maternité; et le groupe Forum, par la voix de M. Nordmann, propose que ce soit fait dans les 12 mois. Cela me semble absolument illusoire, compte tenu des éléments que j’ai évoqués tout à l’heure. Relevons que Genève, pour revenir à lui, n’a pas encore obtenu l’accord de l’OFAS pour que les prélèvements se fassent par ce biais-là et je me réjouis de voir quelle sera la décision de l’OFAS. Je ne suis pas convaincu que l’on voudra entrer dans ce jeu-là à Berne. La proposition Jaeger, au fur et à mesure quelle évolue, se rapproche beaucoup de celle de la commission. Il n’y a plus que le verbe qui la différencie, puisque Mme Jaeger nous propose que l’État «assure» la sécurité matérielle alors que la commission «veille» à ce qu’elles bénéficient de la sécurité matérielle. La proposition Jaeger est plus forte que celle de la commission: ce sera peut-être un compromis auquel vous voudrez vous rallier, je ne sais. Voilà, en préambule, ces quelques mots, Mesdames et Messieurs. Je me réserve de revenir à la suite des différentes interventions.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Buhlmann. Je constate que l’alinéa 4 de ce projet d’article 2.3.24 ne fait l’objet d’aucune proposition, ni amendement, ni demande de prise de parole. Il est donc réputé accepté dans le silence rétabli, merci. Et nous passons à l’alinéa 5, pour lequel nous avons en premier lieu une proposition de minorité de Mme Martin, qui la développe.

F Laurence MARTIN

La raison pour laquelle j’ai fait cette proposition de minorité, de nouveau, comme chaque fois, [c’est qu’elle] bénéficie du soutien d’une série importante d’associations qui se sont concertées et qui nous ont demandé de faire cette démarche. La naissance n’est ni une maladie, ni une tare sociale; elle doit être traitée comme ce qu’elle est la plupart du temps, une merveilleuse promesse d’avenir. Ce que veut Vie associative en ce domaine, c’est une politique familiale globale, cohérente et solidaire. Je ne sais pas si on aura la solidarité sur notre drapeau, mais on aimerait bien l’avoir dans les faits. Or, une telle politique ne peut se fonder en priorité sur une philosophie assistancielle et caritative, comme celle qu’induit l’article de la majorité de la commission. Et là, je devrais ajouter à toutes les considérations financières de notre président, considérations qui, à vrai dire, ne représentent en pas l’avis majoritaire de la commission, car elles n’y ont pas été discutées, j’ai envie d’ajouter que si l’assurance est ciblée, elle est payée par l’État, elle augmente son déficit. Alors que si l’assurance maternité est organisée sur un modèle similaire à celui que propose Genève, elle est payée par les employées et les employeurs et donc elle soulage l’État d’une partie de ce qu’il devrait donner. Dans les associations, nous estimons que l’âge avancé est couvert par une assurance solidaire, l’AVS, et nous déplorons que l’enfance soit toujours en train d’attendre une assurance du même type. Je ne veux pas trop allonger, mais je veux rappeler quand même ce que nous avons comme différences et comme inégalités dans le système actuel; une inégalité entre les mères salariées qui dépendent de la loi sur le travail et les mères indépendantes auxquelles les lois sur le travail ne s’appliquent pas; une inégalité entre les entreprises qui ont des assurances perte de gain et celles qui n’en ont pas; une différence entre les conventions de travail, quand il y en a (certaines couvrent dix semaines de congé maternité pour une mère, d’autres qui couvrent dix-sept semaines de congé maternité); une inégalité entre les femmes qui sont informées de leurs droits et qui touchent leur allocation maternité et celles qui ne la touchent pas cela, c’est une confirmation de Profa qui n’arrête pas d’avoir affaire à des femmes dans ce cas, mal informées. Et enfin, le problème qui a été largement évoqué cet été dans les médias: des chômeuses pour lesquelles la prestation prévue après l’accouchement ne peut parfois pas couvrir la durée de congé maternité et peut même, dans certains cas, être totalement épuisée avant l’accouchement. Reste, direz-vous, la fameuse question financière dont notre président a parlé tout à l’heure. Alors je tiens à remercier ici les patrons qui ont lancé les premiers l’assurance maternité, mais j’ai envie de dire que la maternité est un sujet trop important pour être laissé à la discrétion des seuls patrons. L’enjeu est loin d’être seulement financier, ne nous y trompons pas. Ce dont il s’agit, c’est d’instaurer un cadre qui permette aux enfants de naître dans la sécurité, et à une bonne relation de s’établir entre l’enfant et sa famille, bienfait dont il se ressentira pendant toute son existence. Pour conclure, j’ai envie de dire que l’actualité est intéressante à cet égard: vous avez vu que Genève, le premier, vient de prendre une décision cantonale. Pour notre compte, nous souhaitons que Vaud lui emboîte le pas, se montrant — et ce ne serait pas la première fois — un pionnier. Par ailleurs, vous avez vu aussi, au niveau fédéral que l’allègement de l’imposition des familles est repoussée. C’est ce qui se passe régulièrement avec les questions familiales et les questions d’enfants: quand il y a des difficultés financières, c’est là que l’on repousse les décisions.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Martin. [applaudissements] Mme Jaeger nous présente à la fois ce qui est sur nos documents, appelé d’une part un amendement, et d’autre part un sous-amendement, mais je crois qu’il s’agit plutôt d’un amendement corrigé. Enfin, Mme Jaeger, si vous voulez bien nous expliquer cette proposition.

F Odile JAEGER

Effectivement, j’ai retiré le premier paragraphe de ma proposition d’amendement de minorité et je vais m’en expliquer au cours de mon texte. Alors, faut-il introduire une assurance maternité dans la Constitution ou faut-il parler de mesures en faveur des femmes lors d’une naissance? Tel est l’enjeu de cet alinéa 5 de l’article 24. On en a longuement discuté dans la commission 2. Le débat a été très nourri et, finalement, la majorité de la commission n’a pas voulu d’une assurance maternité cantonale. Comme la majorité des femmes de ce Canton, j’ai été très déçue par la majorité du peuple, qui a de nouveau refusé cette assurance réclamée depuis plus de 50 ans. Faut-il néanmoins introduire une assurance maternité cantonale? Une motion en ce sens a été déposée au Grand Conseil: elle a été refusée très largement. Il est dangereux d’introduire cette assurance pour les seules Vaudoises, ce qui entraînerait un tourisme certain et une inégalité de droit pour les femmes non Vaudoises. Alors, certes, Genève semble s’acheminer vers une assurance maternité cantonale de 16 semaines, financée par 0,4% du revenu à charge égale pour les employeurs et pour les employés. Comme l’a dit M. Buhlmann, l’OFAS doit encore donner son aval, ce qui est loin d’être acquis. Et, d’après les bruits qui courent, on parle déjà d’un possible référendum. Autre problème: si cette assurance maternité à la genevoise devait entrer en vigueur, il y aurait quand même quelques problèmes. Une femme résidant dans le Canton de Vaud, mais travaillant à Genève, pourrait bénéficier de cette assurance maternité; je vous laisse imaginer les inégalités de traitement que cela engendrerait. La question du financement d’une assurance cantonale poserait effectivement de gros problèmes. Faut-il demander aux seules entreprises d’assurer cette lourde charge? On imagine mal celles-ci l’accepter, alors que les entreprises hors du Canton n’auraient pas à le faire. On voit mal également l’État financer seul un tel projet qui coûterait des millions. M. Buhlmann l’a dit tout à l’heure, mais je vous le rappelle quand même: on va discuter du budget de l’État la semaine prochaine — et c’est le plus mauvais de Suisse, à hauteur de 200 millions de déficit, je ne parle pas même du reste — je vois mal maintenant, un projet d’assurance maternité cantonal. Il serait voué à l’échec, je peux vous le dire. Au niveau fédéral, par contre, ça bouge. Le parlement refuse de baisser les bras et confirme sa volonté de combler cette grave lacune. De nombreuses propositions sont à l’étude et on peut espérer qu’une solution sera trouvée en 2008, lors de la votation populaire sur la Constitution vaudoise. Alors, aux dernières nouvelles, je peux vous dire que le Conseil national a accepté dernièrement une motion proposant un congé maternité de 14 semaines, les 8 premières financées par l’employeur et les 6 semaines suivantes en puisant dans le fonds des allocations perte de gain. On envisage également une révision du Code des Obligations, en vue de garantir le paiement des salaires durant les 8 semaines où la mère est interdite de travail. Maintenant, c’est le département de Mme Metzler, qui a repris en fait le dossier en main. Et, on s’achemine vers une solution non plus d’assurance maternité, mais vers une solution de congé maternité, qui ne concernerait que les femmes qui exercent une activité lucrative. C’est pour ça, en fait, que j’ai supprimé ma première phrase «en l’absence d’assurance maternité fédérale» parce que si l’on s’achemine vers un congé maternité, on ne peut plus parler vraiment d’assurance maternité. Alors, opposée à une assurance maternité cantonale qui poserait en fait plus de problèmes qu’elle n’offrirait d’avantages et qui serait peu raisonnable, je propose donc le texte qui demande à l’État d’assurer la sécurité matérielle des mères lors d’une naissance. Qu’est ce que cela veut dire? Aujourd’hui — et Mme Martin, je suis d’accord avec vous — il y a énormément de femmes qui bénéficient d’une sécurité matérielle très nette, avec des conventions collectives, et c’est vrai qu’il y a une inégalité de traitement, pour ces femmes, ces mères qui bénéficient de cette sécurité, et d’autres, pas du tout. C’est à toutes ces femmes que je pense aujourd’hui. Toutes celles qui échappent ou échapperaient à toute mesure d’aide; je pense tout spécialement aux femmes sans activité lucrative ou celles qui ne bénéficient d’aucune subvention dans leur profession. Ces femmes que je voudrais atteindre avec cet amendement que je propose, c’est une aide ciblée, en faveur de jeunes mères qui se retrouvent dans des difficultés matérielles graves lors d’une naissance. Et, je vous demande de l’appuyer et de ne pas voter en faveur d’une assurance maternité cantonale.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Jaeger. Je voudrais rappeler à cette Assemblée qu’il n’y a pas, selon notre règlement, de limitation des temps de parole, et que ça n’est pas un encouragement, vers la fin d’une intervention qui pourrait se prolonger un peu à votre goût, à reprendre les conversations. Puisque nous en sommes aux communications et à l’organisation, quatre membres de notre Assemblée ont déjà pris place à la salle d’attente des prochains orateurs. C’est dire que le système est déjà bien rôdé. J’ajoute peut-être que, sur une table que vous ne voyez pas, mais qui est ici devant, vous avez les formulaires pour le dépôt d’amendements de dernière heure. Cela dit, encore une information sur la suite que je vous propose pour le traitement de cet article, plus précisément de son alinéa 5, relatif à la protection des mères. Nous allons maintenant entendre le développement de l’amendement présenté au nom du groupe Forum par Mme Jomini, sur le congé parental. L’amendement du même groupe, présenté par M. Nordmann, tendant à l’inscription d’une disposition transitoire, aura évidemment son sens et sa nécessité en cas d’adoption d’un système d’assurance maternité cantonale. Mme Jomini.

F Viviane JOMINI

Cet amendement est en définitif un simple complément à la panoplie de mesures que contient l’article 2.3.24 en matière de protection de la famille. Dans ce projet de Constitution, nous avons choisi de définir ce vide social de l’État, de ne pas nous borner à une disposition générale sur l’encouragement de la structure familiale, comme par exemple dans la Constitution fédérale, mais de décrire plus précisément les objectifs, les domaines dans lesquels des mesures étatiques en faveur de la famille devraient être prises. L’encouragement du congé parental fait naturellement partie de ces mesures. On peut penser à diverses formes de congé. Par exemple, du travail à 80%, pour consacrer un jour de semaine à ses enfants. Une année sabbatique. Un congé paternité en cas d’adoption, etc. L’État, c’est-à-dire le Canton et les communes, s’il doit créer des structures d’accueil de la petite enfance ou assurer des prestations sociales en relation avec la maternité, doit également encourager les parents qui veulent disposer du temps nécessaire pour s’occuper eux-mêmes de leurs enfants. Le congé parental est donc une solution qui repose sur l’engagement et la responsabilité des parents. Cette solution peut, suivant les circonstances familiales, contribuer à décharger les structures étatiques d’aide à l’enfance. Avec la mention d’une mesure qui renforce le noyau familial, c’est le cas du congé parental, la Constitution cantonale tiendrait compte de façon adéquate et complète de la conception traditionnelle de la famille dans notre pays. C’est pourquoi je vous invite à voter cet amendement.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Jomini. Cela fait. Nous pouvons passer à la discussion relative à cet alinéa 5. Se sont d’ores et déjà inscrits de fait en venant s’asseoir ici, si j’ai bien vu, dans l’ordre: M. Brélaz, Mme Luisier, Mme Bovay et Mme Perrin. M. Brélaz a la parole.

F Daniel BRELAZ

Encore une fois, je n’avais pas prévu d’intervenir sur ce sujet. Mais les incohérences des raisonnements frappent tellement fortement mon âme de logicien et de mathématicien que je me sens appelé à la tribune, comme diront certains. En ce qui concerne tout d’abord, les interventions sur les cantons: Mme Jaeger, il est évident qu’il y a le principe de la primauté des cotisations et que le Vaudois ou même le Bernois qui travaille à Genève et qui paie des cotisations à Genève dans un système genevois de cotisations d’assurance cantonale touchera ensuite les prestations. Ou bien, alors, il faut que le canton de Genève fasse un article explicite excluant ces gens et les cotisations et les prestations. Et bien sûr, si l’on fait quelque chose de semblable dans le Canton de Vaud, on aura les mêmes problèmes et les mêmes solutions. Cela ferait même plaisir, en tout cas en théorie, à un certain nombre de fédéralistes. Maintenant, en ce qui concerne le fond du problème, c’est vrai qu’on peut jouer sur les mots. On est encore au débat 1, s’il s’avérait que quelque chose qui ne s’appelle pas tout à fait assurance maternité fédérale, mais qui a exactement les mêmes effets, était née d’ici le débat 2. On pourrait estimer que le mandat est rempli, si les effets sont absolument ceux qui sont souhaités. Mais alors, sur l’argument financier pour l’État, un petit peu de logique. Tout ce que vous nous proposez, spécialement dans la proposition de Mme Jaeger, mais aussi dans celle de la commission, c’est très clairement un système où, quel que soit ce que l’on fait, c’est l’État qui paiera, puisqu’il aide un certain nombre de cas spécifiques par la facture sociale ou par d’autres types de raisonnement. Ce qui fait que soit l’on ne fera quasiment rien, ce que tout le monde déclare ne pas vouloir faire, auquel cas, il n’y aura pas de charge pour l’État, bien sûr. Soit on fait quelque chose de raisonnablement élevé, et c’est quelques dizaines de millions de plus et sur la facture sociale et sur l’aggravation du budget de l’État. Alors si c’est ça que vous voulez, il faut le dire. Maintenant, si on va dans un système d’assurance avec paiement des cotisations, on se trouve évidemment dans une autre situation: celle de la votation fédérale, refusée par tous les Suisses alémaniques, comme cela a été regretté par M. Buhlmann, mais acceptée, si j’ai bien compris, aussi bien par lui-même que par les Romands. Ce qui signifie très clairement que l’on ne fait que transposer la volonté de 64% des Vaudois, si je m’en souviens bien. Alors, bien sûr, les Vaudois ne sont pas toujours intégralement représentés par leurs autorités. Mais, si l’on parle du peuple, cela ne devrait en tout cas pas trop fortement choquer. Maintenant le problème de la distorsion de concurrence, s’il vous plaît. On parle de 0,2, 0,3, 0,5% je ne sais pas de quels chiffres on va parler dans les faits, concurrence de salaire ou autre par rapport à ce qui existe entre les différents cantons de notre pays; il y a des facteurs infiniment plus lourds pour les employés et l’assurance maladie, qui a des écarts extrêmes par exemple entre Vaud et Valais, avec des déplacements de population dans les régions limites de l’est vaudois. Et puis, également pour les emprises au niveau de la fiscalité, le Canton de Vaud a fait des efforts dans cette direction, des effets massue qui n’ont rien à voir avec l’espèce de drapeau rouge qu’on agite ici comme on le ferait dans la meilleure des corridas. Alors, soit vous croyez à vos arguments et vous votez l’amendement de Mme Martin, soit vous croyez à autre chose et vous votez ce que vous voulez. [rires, applaudissements]

F Yvette JAGGI

Merci à M. Brélaz pour cette démonstration digne d’un mathématicien. La parole est à Mme Luisier.

F Christelle LUISIER

Moi aussi, je suis persuadée que 90% des personnes qui sont présentes dans cette salle — et moi y comprise — ont voté en faveur du projet d’assurance maternité fédérale au mois de juin 1999. Cette assurance est attendue par les femmes depuis plus de 40 ans. Et puis, après l’échec de cette votation, et bien j’espère aussi de tout coeur que le législateur fédéral présentera un nouveau projet dans les meilleurs délais. Pourtant, je suis persuadée — et là je ne rejoins peut-être pas M. Brélaz qui vient de s’exprimer — que l’instauration d’une assurance maternité cantonale est le bon moyen pour faire pression sur le législateur fédéral. Je ne suis pas non plus persuadée que les Vaudois réagiraient si favorablement à un projet d’assurance cantonale, tant il est vrai que cette proposition cantonale aurait des implications différentes de celles d’une assurance fédérale. On l’a dit: qu’en serait-il d’une assurance maternité financée par le Canton? Et bien là, nous l’avons déjà évoqué, les finances cantonales vont mal, très mal. C’est un doux euphémisme. Et ce n’est pas avec les initiatives qui ont été déposées ces derniers temps qu’elles vont s’améliorer. Personnellement, cela ne me dérange pas que nous soyons 26 e sur 26 en matière de finances publiques, que nous portions le bonnet d’âne en la matière. Ce qui me dérange, et ce qui dérange les Radicaux, c’est que ce problème des dettes de l’État est vu de manière de plus en plus abstraite. S’il y a déjà 200 millions de déficit budgétisés, quelques dizaines de millions en plus ou en moins, quelle différence? Le groupe Radical s’inscrit en faux par rapport à ce raisonnement et nous estimons que les dettes de l’État doivent être maîtrisées pour que l’argent des contribuables serve non pas à rembourser les intérêts de la dette mais bien à payer cette dette et à financer les prestations de l’État. Dans ce cadre, l’instauration d’une assurance maternité cantonale, financée par l’État, serait tout à fait irréaliste. Et Odile Jaeger l’a dit: elle serait certainement vouée à l’échec. Maintenant, on a parlé aussi du projet genevois; le groupe Radical pense là non plus que cela n’est pas la panacée. Odile Jaeger l’a aussi évoqué tout à l’heure. Si ce type de financement peut être envisageable au niveau fédéral, et là, je suis d’accord avec M. Brélaz, et bien la situation est différente s’il n’est pratiqué que pour un seul canton. Je vois mal comment les entreprises pourraient accepter d’être taxées encore plus, alors que leurs voisines ne le sont pas. M. Brélaz a minimisé les conséquences que cela pourrait avoir pour la concurrence. Je pense, personnellement que cela pourrait être un signe défavorable pour l’implantation de futures entreprises dans ce Canton. Je pense aussi que les petits indépendants tireraient encore plus la langue, alors que ce sont eux qui, finalement, garantissent les emplois dans ce Canton. Pour toutes ces raisons, le groupe Radical ne soutient pas l’amendement Martin. En revanche, il soutient l’amendement Jaeger, qui fait quand même un grand pas en faveur des femmes lors d’une naissance. Il donne un mandat clair au législateur, qui doit assurer la sécurité matérielle des femmes: c’est donc une version qui va plus loin que celle de la commission. Il concerne toutes les femmes; ça, c’est un point qui me semble très important. Si l’on avait une assurance maternité cantonale, cela ne concernerait certainement que les femmes salariées, alors que l’on vise toutes les femmes, à la fois les salariées et les femmes d’indépendants ou les indépendantes. Et puis, troisième point, cet amendement ne vise que les femmes qui en ont besoin, donc pas celles qui sont déjà, par exemple, au bénéfice d’une convention collective de travail. Certes, cela coûtera à l’État, M. Brélaz, mais certainement pas autant qu’une assurance maternité cantonale financée par l’État. Pour toutes ces raisons je vous enjoins à soutenir l’amendement Jaeger.

F Judith BOVAY

J’interviens à la place de Roger Nordmann, qui est absent, pour développer la proposition d’une disposition transitoire. Quelle est la situation actuelle des femmes lorsqu’elles donnent naissance à un enfant? Il existe la protection de la maternité, qui interdit aux employeurs de faire travailler les jeunes mères les 8 semaines qui suivent l’accouchement. Cette protection ne règle en aucune manière la question de la rémunération ou d’une assurance perte de gain durant cette période. La maternité est assimilée aux cas de maladies et l’assurance perte de gain qui en découle s’aligne à l’échelle bernoise. La chance d’être rétribuées durant cette période dépend donc de la qualité et de la durée du rapport de travail dont bénéficient les mères. Pour les mères en manque de revenu, elles peuvent bénéficier d’un minimum vital par l’aide sociale, ou d’une allocation de naissance, du fonds cantonal pour la famille, qui verse 200 francs par mois durant les 6 mois qui suivent l’accouchement, soit un total de 1'200 francs. Pour les chômeuses, en situation de maternité, elles peuvent faire appel au RMR, le Revenu Minimum de Réinsertion, qui fonctionne dans ces situations comme une sorte de perte de gain. Je vous rappelle que le RMR alloue 100 francs de plus que l’aide sociale. L’amendement de Mme Jaeger dit: «L’État assure la sécurité matérielle des mères lors d’une naissance», alors que l’on peut lire dans le commentaire de son propre rapport de minorité, «qu’entend-on par sécurité matérielle avant et après un accouchement?. Ce texte peu précis encouragerait toutes sortes d’interprétations. Que veut dire exactement «sécurité matérielle? » Alors que Mme Jaeger ne sait pas exactement ce que veut dire «sécurité matérielle», voilà qu’elle met ce même texte dans son amendement. Effectivement, son texte peu précis encourage toutes sortes d’interprétations. Il risque même de n’apporter rien de plus que ce que nous avons aujourd’hui: l’aide sociale ou 1'200 francs du fonds cantonal, comme mesure de charité pour les jeunes mères en manque de revenu. De plus, la formulation telle que présentée par Mme Jaeger exclut les situations d’adoptions. Il est bien plus intéressant de lire le texte du rapport de minorité Amstein et consorts de la commission 3. On peut y lire: «Nous sommes convaincus que les femmes suisses doivent pouvoir bénéficier d’une assurance maternité. Pour réussir ce projet, qui a connu déjà de nombreux échecs, il est nécessaire de mettre en place un instrument solide et efficace. Cette réussite n’est possible que si la création d’une assurance maternité est prévue dans les tâches de l’État». C’est la formulation de la proposition de minorité Martin, qui permet la mise en place d’un instrument solide et efficace par la création d’une assurance maternité. Je vous demande donc de soutenir l’amendement Martin, qui reprend le texte de la commission 3 et qui est un vrai progrès. Mais le Forum va un pas plus loin. Il vous demande d’accepter une disposition transitoire comme suit: «L’assurance maternité cantonale doit entrer en vigueur au plus tard 12 mois après l’entrée en vigueur de la Constitution». Vous connaissez tous l’histoire de l’assurance maternité au niveau fédéral. Ma mère avait 14 ans lorsque ce principe était inscrit au niveau fédéral. Elle n’en a pas vu la couleur; moi-même je n’en ai pas vu la couleur. Mais j’espère, et je compte sur vous, que mes trois filles bénéficieront au moins d’une assurance maternité vaudoise. C’est pourquoi je vous demande un soutien massif, comme l’ont fait les Vaudois lors des votations fédérales, à la proposition de minorité Martin et à la proposition d’une disposition transitoire du Forum. Mes filles comptent sur vous et moi aussi: je vous en remercie. [applaudissements]

F Jeanne-Marie PERRIN

Juste quelques points et quelques arguments. Pour toutes celles et ceux, Vaudoises et Vaudois, qui ont voté le 13 juin 1999 à 64% et qui ne comprendraient pas que l’on diffère encore, nous devons donner un signal clair: c’est un projet de société qui s’inscrit dans le droit fil des votations de ce dernier week-end, où se dessine un Canton de Vaud solidaire entre les générations. L’assurance maternité est l’un des éléments de base, un élément nécessaire d’une vraie politique de la famille, un élément qui s’ajoute aux décisions courageuses que nous avons prises en votation la semaine passée concernant la petite enfance. Je tiens à souligner que l’assurance maternité n’est pas une affaire de femmes. C’est un choix de société, un projet de partenariat entre les hommes et les femmes, avec une solidarité entre les générations. D’un côté, la situation dans le [secteur] public et chez certains privés voit un nombre important de femmes bénéficier d’un congé maternité. C’est bien, mais ce n’est pas un privilège. De l’autre côté, mais c’est insuffisant, c’est inégal et fragmentaire. L’inégalité, comme le disait Mme Martin, n’a rien à voir avec une véritable politique d’assurance maternité. Aujourd’hui, c’est l’occasion de fixer cette mission de l’État. C’est la preuve que c’est financièrement supportable, voire favorable pour les entreprises, quoiqu’en dise Mme Luisier. La Suisse est un pays riche. Nous siégeons dans l’aula de la maternité vaudoise. Serait-ce un signe prémonitoire pour donner aux générations futures un signal clair qui sera aussi en faveur de la protection de la famille, promesse d’avenir, comme le soulignait Mme Martin? Le groupe Forum soutient le rapport de minorité de Mme Martin, ainsi que l’ajout de la disposition transitoire du Forum et le congé parental de Mme Jomini. Nous nous réservons le droit de demander le vote nominal sur ce sujet sensible, afin que chacun et chacune prennent clairement ses responsabilités et donne ce signal que les Vaudoises et Vaudois attendent. [applaudissements]

F Laurent REBEAUD

Je suis un peu comme M. Brélaz. Je n’avais pas vraiment l’intention d’intervenir sur ce point, mais j’ai entendu Mme Jaeger, j’ai entendu M. Brélaz, j’ai entendu Mme Luisier et il me semble qu’il y a encore des choses qui ne sont pas claires. Raison pour laquelle, en déplorant que les explications parfaitement limpides du professeur Brélaz n’aient pas été comprises de tous, je vais repréciser un point, celui des finances publiques. La formulation que nous propose Mme Jaeger est parfaitement étatiste; cela ne m’étonne pas que même le parti Socialiste n’ait pas osé proposer cela. «Assure» qu’est-ce que cela veut dire? Cela veut dire que, dans toutes les situations où une femme qui accouche se trouve en difficulté matérielle, l’État la prend en charge. Et je n’ai pas besoin d’être Radical, ni Libéral, encore que je le sois parfois, pour deviner ce que cela va donner comme effet vicieux dans cette société. Cela va inciter des femmes qui, sachant que leur sécurité matérielle est de toute façon assurée par l’État, à renoncer aux efforts dont elles seraient peut-être capables pour assurer elles-mêmes cette sécurité matérielle. C’est en cela que la proposition de Mme Jaeger va exactement à l’encontre de ce qu’elle veut. S’agissant plus précisément des finances publiques, c’est ce que M. Brélaz a dit tout à l’heure, et je m’adresse là particulièrement à Mme Luisier parce que je ne comprends pas qu’elle ne comprenne pas: si l’État assure, cela veut dire que l’État paie; si l’État fait en sorte qu’il existe une assurance maternité, il n’est pas du tout obligé de payer. Vous avez répété trois fois «une assurance maternité prise en charge par l’État et financée par lui, nous n’en voulons pas». Mais ce n’est pas la proposition. Si je lis bien ce que dit Mme Martin, c’est qu’il y a une assurance maternité. Et rien n’oblige le Grand Conseil à mettre cette assurance maternité et ces cotisations aux frais de la collectivité. Selon toute vraisemblance, les frais d’une assurance maternité, comme toute assurance, doivent être pris en charge par les employeurs et par les employés, c’est-à-dire par les assurés. Alors, je ne peux pas voter à la place du parti Radical, mais je vous signale d’ores et déjà, et je crois que cette fois la démonstration est claire, tellement elle est simple, que s’ils votent leur propre amendement, ils votent contre leur conviction et contre leur ligne de conduite en matière de finances publiques. Je vous recommande donc, Messieurs et Mesdames les Radicaux, à défaut de mieux, de voter pour l’amendement de Mme Martin, pour toutes les bonnes raisons qui ont été évoquées tout à l’heure.

F Andreane JORDAN

En qualité de jeune femme et — je l’espère, en tout cas — de future jeune mère, j’avoue que l’idée d’une assurance maternité est alléchante. Cet élan d’enthousiasme ne me fait cependant pas oublier que l’idée d’une assurance maternité cantonale est née d’une réaction de mécontentement, d’une réaction émotionnelle et vive faisant suite au rejet par le peuple suisse, l’année dernière, de la loi sur l’assurance maternité au plan fédéral. Notre rôle, en qualité de constituants, n’est pas de tomber dans les travers de l’émotion, mais bien plutôt d’avoir une réflexion de fond posée et objective et, partant, d’oser reconnaître que ce qui paraît socialement nécessaire aujourd’hui, et qui fait encore défaut peut-être, ne doit pas forcément trouver sa place au sein de notre Constitution. Il faut savoir qu’inscrire, c’est aussi limiter. La question de base est de savoir ce que nous voulons par la disposition nouvelle, quel est le but réel recherché, et, en l’occurrence, la portée de l’aide que l’on veut assurer. Il me semble que ce que nous voulons, ce que veut la majorité de l’Assemblée constituante par l’introduction d’un alinéa 5 à l’article 2.3.24, c’est de permettre la réalisation d’une aide destinée aux femmes dont la sécurité matérielle ne serait plus assurée au moment ou en raison d’un accouchement, quelle que soit leur situation professionnelle, c’est-à-dire qu’elles aient ou non une activité lucrative. Vouloir atteindre ce but par l’inscription d’une disposition constitutionnelle est juste. Il serait par contre une erreur d’espérer le réaliser par le biais d’une assurance maternité cantonale et d’inscrire cette notion dans la Constitution cantonale, dont le résultat risque de ne pas être celui escompté et dont les défauts sont trop importants. Premièrement, la viabilité d’une assurance maternité cantonale — la raison d’être de l’article constitutionnel tel que proposé par Mme Martin – dépendra directement du vide législatif en la matière au niveau fédéral. La disposition de Mme Martin est en effet vouée à la caducité. Elle deviendra lettre morte si une assurance maternité est instituée à l’échelon suisse. À quoi bon inscrire une disposition dont la mort même est déjà annoncée? Il s’agit d’une question de bon sens. Deuxièmement, le concept de l’assurance maternité est trop restrictif par rapport à l’envergure que l’on souhaite donner à ce nouvel article, et c’est ce que tout le monde a dit ici et je vous le rappelle, «devant profiter à toutes les femmes dans le besoin lors d’une naissance». Une disposition plus large posant le principe général d’une aide, dont les conditions d’octroi seront définies par la loi, qui perdurera et déploiera ses effets, même après l’introduction de l’assurance maternité fédérale, permettra à l’État vaudois d’agir là où toute assurance maternité pourrait être sans effet, en particulier auprès des femmes sans activité lucrative. La disposition proposée par la commission n’empêchera qui plus est pas le législateur vaudois d’édicter une loi mettant en place une assurance maternité cantonale à l’égal de ce que fait actuellement le législateur Genevois. Pour les raisons qui précèdent, le groupe Libéral soutient le texte de la commission et je vous invite à soutenir également la disposition proposée par la commission. Elle a en effet le mérite de répondre au but que nous recherchons tous, soit de veiller à ce que chaque femme bénéficie avant et après un accouchement d’une sécurité matérielle dont elle ne disposerait pas ou dont elle serait privée. [applaudissements]

F Odile JAEGER

Brièvement, Madame la présidente. Alors, on nous parle du paiement de cotisation par les employeurs et les assurés avec une assurance maternité cantonale. Alors Mesdames et Messieurs, je ne crois pas que les Vaudois, actuellement, veulent de nouvelles augmentations de leurs charges financières, qui sont déjà très lourdes et peut-être les plus lourdes par rapport aux autres Suisses. Je vois mal également les employeurs vaudois payer une assurance maternité alors que dans les autres cantons ils n’auraient pas besoin de le faire. J’ai voté avec enthousiasme cette assurance maternité fédérale et je suis la première à regretter qu’elle ne soit pas appliquée. Par contre, c’est vrai que je demande qu’en son absence l’État assure une protection matérielle pour toutes celles qui sont oubliées. Ce n’est absolument pas dans mon idée, et peut-être que je me suis mal exprimée, il n’est pas question d’une assurance arrosoir pour toutes les femmes. Je l’ai bien dit: il y a énormément de femmes déjà maintenant qui bénéficient de conditions très favorables avec des conventions collectives. Ce ne serait pas elles qui seraient visées, c’est vraiment celles qui seraient dans le besoin, c’est la loi qui devrait fixer exactement à quel niveau ces femmes pourraient bénéficier d’une certaine sécurité matérielle.

F Roland OSTERMANN

Je ne vous dirai pas si j’avais ou non l’intention d’intervenir: vous vous en moquez éperdument et cela ne vous regarde pas! Agnès croyait que les enfants se faisaient par l'oreille; même si la pendule tourne, au grand dam de Madame la présidente, le sujet nous condamne donc à nous écouter encore un moment. On a laissé entendre que la perception d’une contribution de 0,4% pénaliserait les entreprises. Certes, celles qui n’assument actuellement aucune responsabilité sociale dans ce domaine devront apporter leur contribution. Cela me réjouit. Mais les autres entreprises, celles qui font déjà quelque chose en la matière, celles qui accordent un congé de maternité, ne seront-elles pas gagnantes? Elles seront libérées de certains coûts et de certaines charges. N’est-il pas? [applaudissements]

F Yvette JAGGI

Merci à M. Ostermann et à sa conclusion anglicisante. M. Dessauges.

F Pascal DESSAUGES

Le groupe Renouveau Centre, dans sa majorité, a soutenu le principe d’une assurance maternité fédérale. Par contre, vu la situation financière dans laquelle notre Canton se débat, il nous semble tout à fait irréaliste également de poser le principe d’une assurance maternité cantonale, et par-là de fixer un délai pour l’introduction d’un tel droit comme le souhaite M. Nordmann. Le groupe Renouveau Centre ne penche ni pour l’amendement Martin, ni pour l’amendement Jaeger. Il ne veut pas entrer dans une querelle de chiffres, mais il soutiendra en conséquence le texte proposé par la commission, à l’article 2.3.24 alinéa 5, qui s’avère tout à fait suffisant, laissant ainsi assez de souplesse aux autorités cantonales pour trouver des solutions acceptables pour toutes les femmes qui en ont le besoin. Je vous invite donc à en faire de même.

F Yvette JAGGI

Merci M. Dessauges. La discussion n’est plus demandée. Nous pouvons donc passer au vote sur cet alinéa 5 de l’article 2.3.2. Il est exclu, Mesdames et Messieurs, de procéder à une votation si cela ne peut se faire dans le silence. La clarté du débat et des options que vous prenez en dépendent. Je vous propose la procédure de votation suivante: dans un premier vote, nous sommes dans le cas où nous avons des conceptions qui ne peuvent pas s’opposer et qui pourraient à la limite se combiner ou se cumuler, nous votons donc d’abord sur la proposition de minorité Martin, puis sur la proposition Jaeger, à chaque fois oui ou non. Ensuite, nous parlons de l’adjonction à ces deux propositions, celle qui a obtenu le plus de voix et on voit si on lui ajoute l’amendement du groupe Forum défendu par Mme Jomini sur l’adjonction d’une phrase encourageant le congé parental. Ensuite, la version qui est issue de ces trois votations est opposée à la version de la commission. Les dispositions transitoires, évidemment, nous nous prononcerons à leur sujet seulement si l’idée d’une assurance maternité cantonale est approuvée. Nous nous prononçons d’abord sur la proposition de minorité de Martin Laurence, dont le texte devrait être très légèrement modifié, me semble-t-il, par des articles indéfinis plutôt que définis: «En l’absence d’une assurance maternité fédérale, l’État organise un dispositif d’assurance maternité cantonale». Celles et ceux qui approuvent cette idée le manifestent en levant la main. Scrutateurs s’il vous plaît. Celles et ceux qui rejettent cette proposition le manifestent en levant la main. Mesdames et Messieurs les constituants, par 73 OUI contre 68 NON, vous avez accepté la proposition Martin.

Proposition Martin acceptée par 73 oui contre 68 non.

F Yvette JAGGI

Attention, je vous rappelle que, maintenant, nous nous prononçons sur la proposition Jaeger, et que c’est celle qui aura la plus forte majorité qui l’emportera. Celles et ceux qui approuvent l’amendement Jaeger le manifestent en levant la main. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui s’opposent à l’amendement Jaeger le manifestent en levant la main. Mesdames et Messieurs les constituants, vous avez refusé l’amendement de Mme Jaeger par 55 OUI et 66 NON.

Amendement Jaeger refusé par 66 non contre 55 oui.

F Yvette JAGGI

Nous nous référons maintenant pour la suite du débat à la proposition de minorité Martin, à laquelle nous allons décider, le cas échéant, d’ajouter une phrase, «il encourage le congé parental». Celles et ceux qui sont partisans de cette adjonction le manifestent en levant la main. S’il vous plaît, un peu de silence. Celles et ceux qui s’opposent à cette adjonction le manifestent en levant la main. Mesdames et Messieurs les constituants, par 66 voix contre 65, vous avez accepté l’adjonction.

Adjonction Martin acceptée par 66 voix contre 65.

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, nous opposons la version Martin, ajoutée Jomini, à M. Rebeaud.

F Laurent REBEAUD

Il faut que l’on sache sur quoi l’on vote. J’avais cru comprendre que l’amendement Jomini s’ajoutait à l’article, quel qu’il soit, qu’il s’agisse de la proposition de Mme Martin ou qu’il s’agisse de la proposition de la commission. L’amendement Jomini est ajouté à l’un ou à l’autre, mais il n’est pas collé exclusivement à l’amendement Martin.

F Yvette JAGGI

Je fais mon mea culpa, Mesdames et Messieurs les constituants: effectivement, la logique est dans ce que vient de dire M. Rebeaud. Mon idée était d’opposer l’article tel qu’issu de nos débats à celui issu des travaux de la commission. Mais si vous souhaitez amender aussi celui de la commission, je vous propose que nous annulions le vote de tout à l’heure et que nous le fassions maintenant sur le principe d’un congé parental qui sera ajouté… cette phrase sera ajoutée à l’alinéa 5, quelle que soit la teneur de la première phrase de cet alinéa, que ce soit la teneur Martin ou la teneur commission. On est d’accord? M. Pernet.

F Jacques PERNET

Nous avons quelques doutes, ceux qui sont « parqués » en haut, sur la façon dont c’est compté. Et je trouve qu’il faudrait aussi faire compter les abstentions, de façon à pouvoir aussi avoir ce qu’on appelle en anglais un «cross control», c’est-à-dire pouvoir contrôler toutes les voix, afin qu’il y ait une certaine égalité dans le comptage. On a l’impression qu’il y a des comptages qui ne peuvent pas se faire, les « régions de comptage » étant définies de façon assez particulière cette fois-ci. Je vous remercie.

F Yvette JAGGI

Je veux bien faire compter les abstentions, bien que, en principe, ce décompte se fasse pour les votes sur l’ensemble, article par article. Mais, je veux bien le faire pour chaque votation, encore que là il y ait, disons, un taux de détermination très élevé sur les questions comme celles qui ont été posées. Mais enfin, tenons compte de tout cela. Mesdames et Messieurs les constituants, dans le silence rétabli, encore une intervention préalable au vote: Mme Salamin.

F Lauréane SALAMIN MICHEL

En fait, je suis un peu étonnée que vous vouliez faire revoter cette histoire, parce que, dans la réglementation, une fois que l’on vote quelque chose, ce n'est pas pour le lier à un article ou à un autre, c’est pour le lier à l’article principal.

F Yvette JAGGI

Écoutez, Mesdames et Messieurs, je crois que le plus simple, effectivement, pour mettre fin à toutes les spéculations sur les résultats si l’on avait voté comme ci comme ça ou autrement, nous recommençons le vote sur le congé parental, étant entendu que cette adjonction se fera à la fin de l’alinéa 5, quelle que soit la teneur de sa première phrase, encore une fois que ce soit hérité de la proposition minorité Martin ou de la version de la commission. D’accord? Celles et ceux, Mesdames, Messieurs les constituants, qui sont en faveur de l’adjonction d’une deuxième phrase à l’alinéa 5, «il encourage le congé parental», le manifestent en levant la main. Celles et ceux qui s’opposent à cette adjonction le manifestent en levant la main. Abstentions?

Mesdames et Messieurs les constituants, par 77 OUI contre 70 NON et avec 3 abstentions, vous avez ajouté «le congé parental». [applaudissements]

Amendement Jomini accepté par 77 Oui contre 70 non et 3 abstentions.

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, à ce bureau, nous avons compté plus de 3 abstentions. Alors, les personnes qui tout à l’heure se sont abstenues, pour que tout soit clair, les abstentions, s’il vous plaît. Mesdames et Messieurs les constituants, je suis désolée de répéter que le silence est nécessaire à la clarté non seulement du débat mais surtout des votations. Le travail des scrutateurs est rendu extrêmement difficile par le bruit d’ambiance et les transmissions n’ont pas pu se faire de manière correcte de sorte qu’il faut corriger: 3 nouveaux abstentionnistes se sont manifestés et ont été dûment décomptés, de sorte qu’ils ont donc passé à 6. Le résultat du vote s’en trouve inchangé. Nous opposons maintenant l’article qui correspond à la proposition de minorité Martin, ajoutée «congé parental», à l’article de la commission, ajoutée «congé parental». D’accord? Celles et ceux qui sont en faveur d’un alinéa 5, ayant la teneur suivante «En l’absence d’une assurance maternité fédérale, l’État organise un dispositif d’assurance maternité cantonale, il encourage le congé parental» le manifestent en levant la main. Celles et ceux qui sont partisans de la version commission ajoutée de «congé parental» le manifestent en levant la main. Abstentions?

Par 74 voix contre 70 et avec 2 abstentions, vous avez préféré la version de la commission, ajoutée Jomini. [applaudissements, brouhaha]

Proposition de la commission acceptée par 74 voix contre 70 et 2 abstentions.

F Yvette JAGGI

Un peu de silence, s’il vous plaît, Mesdames, Messieurs les constituants. Mme Perrin a la parole.

F Jeanne-Marie PERRIN

Comme nous l’avions annoncé, nous demandons, en vertu de l’article 44 de notre règlement, le vote nominal sur cette importante question. [applaudissements]

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, ce sera une grande épreuve pour les bavards: un vote à l’appel nominal se fait dans un silence aussi total que possible. Un vote à l’appel nominal se fait toujours par une réponse: OUI, NON, Abstention.

Assurance maternité cantonale

Appel nominal

Celles et ceux qui approuvent l’article version commission, ajoutée «congé parental», répondent par OUI, et les personnes qui répondent par NON prennent de ce fait position pour la version Martin, ajoutée «congé parental».

 D’accord? Tout est clair? Dans le silence revenu et maintenu, Madame la secrétaire procède à l’appel.

F Francine CRETTAZ

Ont voté OUI:

Mmes et MM. Amstein Claudine, Berney Michel, Blanc Marcel, Bory Marc-André, Bory-Weber Dominique, Bovet Daniel, Bovet Fred-Henri, Bovy Samuel, Braissant Rénald François, Bron Jacques-Henri, Buffat Michel Louis, Buhlmann Gérard, Bühlmann Willy, Burnet Olivier, Carnevale Eliane, Charotton Georges, Cohen-Dumani Marcel, Colelough Philippe, Conod Philippe, Cornu Claire-Lise, Cornu Pierre-Alain, Cossy Samuel-Henri, Cruchon Raoul, Cuendet Maria-Chrystina, de Haller Jean-Claude, de Luze Charles-Henri, de Mestral Laurent, Delay Elisabeth, Desmeules Michel, Dessauges Pascal, Dufour Etienne, Fague Sébastien, Favre-Chabloz Raymonde, Garelli Stéphane, Ghiringhelli Charles-Pascal, Gindroz André, Girod-Baumgartner Christine, Glauser Alice, Gonvers Olivier, Grin Nicole, Gross Nicole, Haefliger Sylviane, Haldy Jacques, Henchoz Pierre, Henry Philippe, Jaeger Odile, Jordan Andreane, Kaeser Danièle, Keller Pierre, Kulling Jean-Pierre, Labouchère Catherine, Léchaire Jean-Michel, Leuba Jean-François, Loi Zedda Fabien, Mamin Henri, Martin Bernard, Masson Stéphane, Mayor Philippe, Millioud Jean-Pierre, Moret Isabelle, Oguey Annie, Ormond Anne, Pernet Jacques, Pittet François, Pradervand Jean-Claude, Reymond Antoine, Richard Claire, Rochat-Malherbe Paul, Rodel Marilyne, Ruey-Ray Elisabeth, Schneiter Robert, Streit Adrien, Vincent Martial, Voutaz-Berney Eveline, Wehrli Laurent, Wellauer Pierre-Olivier (77).

Ont voté NON:

Mmes et MM. Athanasiadès Jean, Aubert Josiane, Baehler Bech Anne, Bavaud Adrien, Benjamin Samy, Blanc Eric, Boillat Jean-Pierre, Bolinger Anne-Marie, Bouvier Denis, Bovay Judith, Bovon-Dumoulin Martine, Brélaz Daniel, Bühler Michel, Burnier-Pelet Thérèse, Burri Marcel, Chapuis Allegra, Chatelain André, Cherix François, Chollet Jean-Luc, Crisinel François, Dépraz Alex, Desarzens Laurent, De Souza-Kohlbrenner Regula, Dufour Denyse, Farron Pierre, Freymond-Bouquet Monique, Galeazzi Rebecca, Goël Yves, Gonthier Alain, Gorgé Marcel, Goy-Seydoux Louis, Guignard Françoise, Hermanjat Pierre, Holenweg Rouyet Anne, Humair Louis, Hunkeler Pierre, Jemelin Mireille, Jomini Viviane, Jufer Nicole, Keshavjee Shafique, Lehmann Pierre, Le Roy Jean, Linder Sandra, Lyon Anne-Catherine, Maillefer Denis-Olivier, Mamboury Catherine, Martin Laurence, Martin Marie-Antoinette, Martin Marie-Hélène, Morel Charles-Louis, Morel Nicolas, Nicod François, Nordmann Philippe, Ostermann Roland, Pellaton Berthold, Perrin Jeanne-Marie, Piguet Jean-Michel, Pillonel Cédric, Pittet Jacqueline, Rapaz Olivier, Rebeaud Laurent, Recordon Luc, Renaud Dominique, Roulet Catherine, Salamin Michel Lauréane, Saugy-Anhorn Nathalie, Schwab Claude, Troillet Roland, Vallotton Jacques Christian, Volluz Françoise, Weill-Lévy Anne, Wettstein Martin Irène, Winteregg Michel, Wiser Henri, Ziegler Geneviève, Zuercher Magali, Zwahlen Jacques (77).

Se sont abstenus:

Mmes et MM. Bielman Anne, Jaggi Yvette, Martin Jean, Perdrix René (4).

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, le résultat de la votation à l’appel nominal donne 77 OUI, 77 NON et 4 abstentions. Je déduis une abstention et la transforme en NON. [applaudissements] Le résultat est donc 77 OUI, version de la commission, 78 NON, version Martin, et 3 abstentions. [brouhaha]

Résultat de la votation à l’appel nominal: 77 oui pour la version de la commissions contre 78 non pour la version Martin et 3 abstentions.

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, les absents ne votent pas, les retardataires non plus. M. Cohen-Dumani.

F Marcel COHEN-DUMANI

Je peux comprendre, dans un vote aussi serré, qu’une question s’est posée de la manière suivante: Madame la présidente, au moment de l’appel de votre nom, vous vous êtes abstenue. Alors, j’aimerais rappeler simplement l’article 23.

F Yvette JAGGI

Non, j’ai soustrait une abstention puisque je m’étais abstenue au moment du vote.

F Marcel COHEN-DUMANI

Alors, à ce moment-là, l’autre coprésident peut faire la même chose. Je suis désolé, il y a le vote du président — l’article 23 est très clair — permettez-moi de vous le lire parce que ce point a été longuement débattu dans le cadre de la commission du règlement, à savoir si l’on faisait voter le président ou non, s’il tranchait en cas d’égalité ou non. Je vous lis l’article 23, il est clair: «Le président de la commission prend part au vote en cas d’égalité de voix et la proposition est rejetée». [brouhaha] Dans nos débats, on a bien précisé, aussi bien dans la commission que dans le plénum, que le comportement du président est exactement le même. Le président doit voter, au moment où l’on appelle son nom et, au moment où l’on a appelé son nom, Madame la présidente de séance, a clairement dit «abstention» : c’est enregistré. Donc on pourra écouter l’enregistrement s’il y a un doute. Comme il y a eu égalité — la proposition rejetée — nous sommes devant un cas complexe que personne n’a prévu. Je propose de suspendre ceci et qu’on trouve une solution, mais on ne peut pas accepter le vote à 78 contre 77 et que Madame la présidente de séance retranche sa décision et la donne en faveur de l’un ou de l’autre. Dans ce cas-là, l’autre coprésident qui s’est [également] abstenu peut tenir le même langage… [discussion]

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, règlement en mains, le débat de procédure s’engage. M. Leuba, en sa qualité d’ancien premier citoyen du pays, prend la parole en premier.

F Jean-François LEUBA

L’article qui est invoqué par M. Cohen-Dumani est l’article 23 qui dit: «Le président de la commission prend part au vote en cas d’égalité des voix et la proposition est rejetée». Je n’ai pas participé aux travaux de la commission de rédaction mais il me paraît, quelle que soit l’interprétation qu’on donne, qu’on arrive au même résultat. Si on admet que cet article s’applique à la présidence, Mme Jaggi aurait dû prendre part au vote et cela aurait donné une majorité pour le NON. Si, en revanche, on admet ce qui me paraît clair, que l’article 23 ne s’applique que dans la commission — comme il est rédigé — dans cette hypothèse, Mme Jaggi a eu raison de ne pas prendre part au vote. C’est dans ce sens que j’ai compris son abstention et, dès lors, elle devait trancher en cas d’égalité, ce qu’elle a fait. À mon avis, la procédure qui est suivie est régulière mais même si on prenait l’autre interprétation, on arriverait au même résultat. Ce n’est pas mon vote, mes chers collègues, mais je crois qu’il faut être objectif et c’est cela qui est décisif. [applaudissements]

F Yvette JAGGI

Pour le débat de procédure, M. Renaud.

F Dominique RENAUD

Je suis intervenu dans le règlement d’une manière extrêmement ferme et plusieurs fois à cette tribune pour dire que je souhaitais que dans notre Assemblée on ait un speaker, c’est à dire qu’il se tienne le plus possible en dehors des débats. Lorsqu’il s’est agi de savoir comment on allait voter, le cas qui a été prévu a été débattu en commission et il a été prévu de manière tout à fait explicite, à savoir que le président ne participait pas au vote en général lorsqu’il s’agissait de vote à main levée et qu’en cas d’égalité il pouvait effectivement trancher, c’est à dire émettre son vote. Il n’y avait pas de primauté. Par contre, et nous avons été parfaitement clairs dans le règlement, quand nous l’avons discuté, le président participe à tous les appels nominaux. La manière dont il participe — je crois que le règlement le dit — le président participe aux votes nominaux et ensuite, lorsqu’il y a égalité, la proposition qui est mise au vote est rejetée. [applaudissements]

F Yvette JAGGI

Je demande à M. Renaud de citer l’article en question. [brouhaha] M. Ostermann, s’il vous plaît. M. Recordon, d’abord.

F Luc RECORDON

Cela a certes l’allure d’une récréation mais c’est tout de même assez important. Je crois qu’il est regrettable que nous fassions nos votes en nous branchant d’abord sur le formalisme. Ce qu’il faut obtenir, c’est la sincérité et la réalité des votes. L’interprétation de Monsieur le coprésident Leuba me semble sous cet angle imparable. Soit, Mme Jaggi a entendu se tenir à l’écart du vote parce qu’elle pouvait devoir trancher, ce qui est d’ailleurs arrivé, soit elle s’est trompée et elle devait voter et il est manifeste qu’elle aurait voté NON. Il n’y aucun doute sur le résultat matériel que le vote devait avoir sur le plan de la sincérité, à une voix près. On pourrait certes, face à cela, faire du formalisme mais alors, MM. Cohen-Dumani et Renaud, il faut faire du formalisme juste et M. Leuba vous a démontré que vous n’aviez pas une disposition réglementaire claire à l’appui de votre théorie. M. Renaud a été incapable de mettre en exergue la bonne disposition réglementaire. Je vous propose donc d’admettre le résultat matériel évident de ce vote, à une voix près, et de ne pas tomber dans le formalisme, c’est un juriste qui vous le demande. [applaudissements]

F Dominique RENAUD

M. Ostermann me cède la parole, j’aimerais m’excuser auprès de l’Assemblée, effectivement, l’article 10 est clair; la présidente ne participe pas au vote et elle ne participe que s’il est secret et tranche. Je lis «Le président de séance prend part aux élections ainsi qu’au vote au bulletin secret. Dans les autres votes, il ne donne sa voix qu’en cas d’égalité, pour déterminer la majorité. L’article 47 du présent règlement est réservé.»

Je crois que notre règlement est parfaitement clair. La présidente n’avait pas à voter dans le vote d’appel, par contre elle peut le trancher, à la fin.

F Yvette JAGGI

Je remercie M. Renaud de confirmer les avis de MM. Leuba et Recordon. Le vote est donc validé sur l’alinéa 5. Nous procédons au vote sur l’ensemble de l’article 2.3.24 dans la teneur qui apparaît sur l’écran. En ce qui concerne la disposition transitoire sur laquelle nous devons effectivement nous prononcer, vu le résultat de l’alinéa 5, nous le ferons après l’ensemble de l’article puisque c’est un article séparé. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent l’article 2.3.24, alinéa 1 à 5, dans la teneur issue de nos débats, le manifestent en levant la main. Celles et ceux qui rejettent cet article le manifestent en levant la main. Abstentions. Mesdames et Messieurs les constituants, par 83 OUI contre 69 NON avec 5 abstentions, vous avez approuvé l’article 2.3.2.

Article 2.3.24 — Protection de la famille
(83 OUI contre 69 NON avec 5 abstentions)

  1. Le Canton et les communes reconnaissent le rôle fondamental des familles dans leur diversité.

  2. L’État les soutient par un système d’allocations solidaire.

  3. En collaboration avec le Canton, les communes et les partenaires privés organisent l’accueil préscolaire et parascolaire des enfants, financièrement accessible à tous.

  4. L’État organise la protection de l’enfance et de la jeunesse ainsi que des personnes dépendantes.

  5. En l’absence d’une assurance maternité fédérale, l’État organise un dispositif d’assurance maternité cantonale. Il encourage le congé parental.

F Yvette JAGGI

Nous nous prononçons maintenant sur l’amendement Groupe Forum / Nordmann, pour une disposition transitoire relative aux délais de mise en place d’un dispositif d’assurance maternité cantonale, au plus tard douze mois après l’entrée en vigueur de la Constitution. La discussion n’est pas demandée. Nous passons donc directement au vote. Elle est demandée par M. Recordon.

F Luc RECORDON

Je tiens à dire que je comprends, à partir du moment où on a décidé d’avoir une assurance, qu’il faut dans ce domaine — vu les expériences faites douloureusement sur le plan fédéral — se fixer des objectifs en termes de calendrier. C’est une saine préoccupation. Cependant, je ne pense pas que ce soit réaliste de compter une année. La mise sur pied d’un objet de ce genre-là nécessite au minimum trois ans. Au lieu de se brancher sur un objectif illusoire qui ne pourrait pas être acceptable, simplement parce qu’il est beaucoup trop prétentieux et parce qu’il ne pourrait pas être tenu, je vous propose d’en venir à quelque chose de réaliste et je pense qu’il faut compter trois ans. Je formule l’amendement tendant à reporter le délai de douze mois à trois ans.

F Philippe NORDMANN

Nous avons toutes les raisons de penser que la Constitution sera adoptée par le peuple vaudois ce qui veut dire…[brouhaha] Je suis inquiet de ces brouhahas parce que cela signifie que certains de nos collègues qui ont peut-être été battus d’une voix tout à l’heure mèneraient campagne pour l’assassinat du bébé qu’ils auront contribué à concevoir. Je veux croire que ce ne serait pas le cas. Ce que je veux dire par là, Mesdames et Messieurs, est que le délai d’une année peut paraître bref si les préparatifs commencent seulement au moment où la Constitution entrera en vigueur, selon toute vraisemblance en 2003. Si, en revanche, on s’y mettait dès maintenant ou dès l’année prochaine pour préparer un dispositif qui n’est finalement pas très compliqué, le délai de trente-six mois, suggéré par notre collègue Recordon serait tout à fait réaliste. On ne va pas attendre, évidemment, l’entrée en vigueur de la Constitution pour commencer à plancher sur le mécanisme de l’assurance maternité. Cela se fera, au plus tard, en 2001, éventuellement peut-être en 2002 et ce sera prêt pour 2004, c’est à dire dans le respect parfait du délai de douze mois qui est à cet égard tout à fait raisonnable.

F Judith BOVAY

Le Forum se rallie à la proposition de M. Recordon, des trente-six mois, comme présenté.

F Yvette JAGGI

Nous passons d’abord au vote sur l’amendement Recordon. M. Pernet.

F Jacques PERNET

J’aimerais quand même répondre à M. Nordmann parce que je crois qu’il est bon de faire la démagogie mais il ne faut pas non plus faire un procès d’intention. Je voulais simplement répondre de cette façon à ce que M. Nordmann a dit tout à l’heure. Par contre, je soutiens l’amendement Recordon.

F Yvette JAGGI

Merci, sauf intervention complémentaire, nous passons donc au vote. Dans un premier temps, douze mois est retiré, nous passons directement au vote sur une disposition transitoire qui aurait la teneur suivante: «L’assurance maternité cantonale doit entrer en vigueur au plus tard trente-six mois après l’entrée en vigueur de la Constitution». Celles et ceux qui approuvent l’inscription d’une telle disposition transitoire dans le projet de Constitution le manifestent en levant la main. Avis contraires? On compte les abstentions, puisque cela a été demandé tout à l’heure. Abstentions. Mesdames et Messieurs les constituants, par 74 OUI contre 69 NON, avec 12 abstentions vous avez décidé l’inscription d’une disposition transitoire dans le sens proposé par l’amendement Recordon.

Amendement Recordon accepté par 74 oui contre 69 non avec 12 abstentions.

 

Disposition transitoire complétant l’art. 2.3.24 al. 5
(74 OUI contre 69 NON, avec 12 abstentions)
L’assurance maternité cantonale doit entrer en vigueur au plus tard 36 mois après l’entrée en vigueur de la Constitution.

F Yvette JAGGI

M. Cohen-Dumani? Sur ce vote?

F Marcel COHEN-DUMANI

Je suis désolé de revenir sur ce point parce certains font de cet article un point fondamental. Le vote a été partagé et il y a eu quand même des confusions. Madame la présidente, à un moment donné, à l’appel de son nom, avait clairement voté abstention. [brouhaha] Est-ce qu’on peut parler, ou bien, à chaque fois qu’on veut intervenir, on se fait remettre en place? Si c’est le cas, je me retire et je ne prends plus la parole. J’ai une proposition de motion d’ordre à faire pour que ce cas ne se reproduise plus et qui consiste à modifier l’article du règlement puisque cela nous a échappé, à Dominique Renaud et à moi-même qui avons participé à ceci, sur ce point bien précis; nous avons longuement débattu, mais je le reconnais, le règlement n’est pas clairement fait. Je viens donc avec une motion d’ordre pour demander de le clarifier pour qu’on n’ait plus ce problème. Si vous voulez sur ce point que je ne prenne pas la parole, alors il n’y a plus de démocratie et cela va être celui qui crie le plus dans cette salle. Je vous propose de modifier l’article 43 bis pour qu’on inscrive que lors d’un appel nominal, le président vote à l’appel de son nom. De cette manière on n’aura plus jamais ce type d’incidents. Si c’est départagé, c’est très bien. Dans le cas présent, on était dans ce cas-là et c’est ce que comprends de l’attitude de Madame la présidente, quand elle a vu que c’était départagé et qu’il fallait prendre une décision. Dans le cadre de la commission, nous avions dit que si le vote était équilibré, la proposition était rejetée. Dans le cas présent, on avait un vote d’une commission et un vote d’une modification. Dans cette hypothèse, c’était le vote de la commission qui prévalait.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Cohen-Dumani. Décidément la naissance de cet article est difficile. M. Brélaz.

F Daniel BRELAZ

Excusez-moi, vous préjugez d’un certain nombre de choses pour notre Assemblée où tout le monde n’a pas le bénéfice de la commission; dans tous les parlements – on a eu une certaine inventivité dans la Constituante mais dans tous les parlements du monde, quasiment, — le président ne vote pas et tranche en cas d’égalité. Dans les commissions du conseil national c’est mieux que de voter deux fois en cas d’égalité mais il n’y a que ces méthodes-là qui existent. Votre motion d’ordre, on peut la discuter mais voter cela à blanc, non.

F Alex DEPRAZ

J’ai l’avantage d’avoir participé aux travaux de la commission et le texte du règlement est parfaitement clair. Le cas a été prévu. On prévoit que le président de séance prend part aux élections ainsi qu’au vote à bulletin secret. Le vote à l’appel nominal n’est ni une élection, ni un vote à bulletin secret, donc à l’appel de son nom elle [la présidente] s’est abstenue. En revanche, dans les autres votes, le président ne donne sa voix qu’en cas d’égalité pour déterminer la majorité. Donc, en cas de vote à main levée ou à l’appel nominal, le président de séance vote, en cas d’égalité, et on se réfère à l’article 47 du présent règlement. Qu’est-ce que l’article 47? C’est le vote sur l’ensemble du projet où on a dit que dans ce cas-là, le président de séance participait au vote nominal, c’est parfaitement clair. Donc, lors d’un vote nominal, le président ne donne sa voix qu’en cas d’égalité pour déterminer la majorité, c’est ce qu’a fait la présidente de séance. On a parfaitement respecté le règlement.

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, le débat sur les formes continue, M. Masson, M. Cohen-Dumani

F Stéphane MASSON

Si j’ai bien compris, nous avons appliqué l’article 23 qui traitait des commissions à l’Assemblée plénière lorsqu’il s’est agi de résoudre notre problème. Il ressort du texte de notre règlement que notre volonté est, en cas d’égalité, que toute proposition soit rejetée. Je pense que nous avons voulu éviter qu’un président ne tranche. Il me semble donc que la décision que nous avons prise précédemment aurait dû aboutir à un rejet de la proposition face à l’article.

F Yvette JAGGI

Mesdames, Messieurs les constituants, si je puis me permettre de donner à mon tour un avis sur une question que je crois avoir résolue d’une manière correcte, à la suite de M. Dépraz, je redonne lecture de l’article qui est en cause dans le débat d’aujourd’hui; ce n’est ni le 23 ni le 47 mais bel et bien le 10 de notre règlement, page 4: «Le président de séance prend part aux élections ainsi qu’au vote à bulletin secret». Nous ne sommes ni dans ce cas, ni dans l’autre; dans les autres votes, comme tout à l’heure, il ne donne sa voix qu’en cas d’égalité pour déterminer la majorité. Qu’est-ce que j’ai fait d’autre? M. Cohen-Dumani veut prendre la parole? Il renonce, M. Farron.

F Pierre FARRON

Je propose pour avancer que le Comité nous soumette une proposition à la prochaine plénière. [brouhaha] Un instant, on a encore tout cela à faire, je souhaite que cela avance [applaudissements]…

F Yvette JAGGI

Je note, Mesdames et Messieurs les constituants, que lorsque notre secrétaire générale pose une question par bande dessinée interposée, la réponse est positive avec applaudissements. Avec une certaine démagogie et non sans regret, j’interromps ici nos débats de ce matin. Nous les reprenons à 13 heures trente dans un climat rasséréné et avec la volonté d’avancer si possible davantage qu’un seul alinéa par journée.

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Article 3.5 — Protection de la maternité

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs, nous voulons reprendre sans plus tarder nos débats que nous poursuivons en présence du GLAJ, Groupe de liaison des activités de jeunesse à qui nous donnons un spectacle fait de dignité et de silence. Nous avons l’unité de la matière par rapport à l’unique alinéa traité ce matin. Nous passons à l’examen de l’article 3.5, «Protection de la maternité». Monsieur le président de la commission.

F Pierre HERMANJAT

Nous avons voté ce matin des tâches de l’État concernant la maternité et le dernier alinéa que nous avons voté correspond en gros au 2 e alinéa que la commission 3 proposait à l’article 5. Je propose donc de retirer ce 2 e alinéa. Par contre, pour confirmer les votes de ce matin, je maintiens, bien entendu, au nom de la commission, le 1 er alinéa de la commission qui s’intitule «Protection de la maternité — Chaque femme a droit à la sécurité matérielle avant et après l’accouchement». Je vous recommande donc de voter cet article concernant le 1 er alinéa.

F Yvette JAGGI

Merci Monsieur le président. Est-ce que quelqu’un s’oppose à la proposition logique faite par le président de la commission qui retire le second alinéa de l’article 3.5, au vu des votes de ce matin? Quelqu’un demande-t-il la discussion sur cette suppression? Tel ne semble pas être le cas. Nous avons donc la situation suivante: la proposition de minorité que défendra Mme Amstein, l’amendement de Mme Dufour. J’admets que l’amendement Renouveau Centre que voulait défendre Mme Claire-Lise Cornu n’a plus lieu d’être défendu, après la proposition tacitement acceptée de suppression de l’alinéa 2. Sur cet alinéa 2, Mme Dufour avait un amendement. Elle prend position maintenant

F Denyse DUFOUR

Au vu de ce qui a été voté ce matin, je retire mon amendement à l’article 3.5, me réservant de le remettre en deuxième lecture si cela devenait nécessaire.

F Yvette JAGGI

Voilà qui est prudent. Merci, Mme Amstein, au nom de la minorité, défend sa proposition de suppression de l’article 3.5 en entier.

F Claudine AMSTEIN

Il n’y aura pas besoin de faire un long développement puisque le 2 e alinéa est supprimé, ce dont je me réjouis. Pour le 1 er alinéa, on retombe sur le débat de la différence entre les droits fondamentaux et les tâches de l’État. Pour ma part, je suis absolument convaincue que c’est l’État qui doit veiller à cela, que ce sont ses tâches, raison pour laquelle je souhaite supprimer cette disposition, en considérant que ce n’est pas en s’adressant au Tribunal fédéral que la personne va résoudre sa situation difficile. Les mois se vont s’écouler avant qu’elle n’arrive à pouvoir obtenir une indemnité. Cette disposition devrait figurer, à mon avis, dans les tâches de l’État et non pas dans les droits fondamentaux parce qu’on a parlé ce matin de promesses d’avenir et non pas de fausses promesses. De mettre cette disposition dans les droits fondamentaux, c’est faire de fausses promesses et non des actes concrets.

F Yvette JAGGI

Merci Mme Amstein, la discussion est ouverte sur ce qui reste présentement de l’article proposé par la commission, à savoir son alinéa 1. M. Brélaz.

F Daniel BRELAZ

Face au raisonnement qui vient d’être tenu, si l’État met un certain temps, comme on le dit dans le Canton de Vaud, pour faire la loi d’exécution de sa tâche d’État, cela fera évidemment une très grosse différence, Mme Amstein, parce que cela peut mettre, comme on le disait depuis cinquante et quelques années au niveau fédéral, un certain temps. Par contre, si c’est directement justiciable, certes la personne qui n’a pas obtenu gain de cause, par exemple un traitement financier à partir —,je l’imagine — de l’aide sociale vaudoise, ne va pas être satisfaite tout de suite; elle perdra deux à trois ans. Mais, comme vous le savez, cela fera ensuite jurisprudence et cela sauvera toutes les autres, au cas où la loi mettrait plus qu’un certain temps.

F Denis BOUVIER

Je suis tout de même surpris d’entendre, de séance en séance, des représentants de la commission 3 venir se faire hara-kiri à la tribune. Je rappellerai, sans vouloir donner un cours d’histoire, une toute petite partie du préambule de la déclaration des droits de l’homme. Il est donc énoncé dans le préambule même de la Déclaration des droits de 1789: «Afin que les actes du pouvoir législatif et ceux du pouvoir exécutif pouvant être à chaque instant comparés avec le but de toute institution politique, en soit plus respectés, afin que les réclamations des citoyens, fondés désormais sur des principes sains et incontestables tournent toujours au maintien de la constitution et au bonheur de tous». Il me semble qu’à force d’évacuer les droits fondamentaux, il ne restera plus rien du tout de ce chapitre et je me demande alors ce qu’est une constitution, comme le dit le texte que je viens de lire, qui fait abstraction des droits fondamentaux sous des prétextes qui ne me semblent pas tout à fait raisonnables. Lorsqu’on dit que le droit justiciable est inopérable on renonce à inscrire; tantôt on ne le dit pas mais on le pense, le droit est justement justiciable alors il devient dangereux de le reconnaître! Je m’interroge sur le fait, de la part de groupes politiques qui ne cessent de taper sur l’État et de se référer aux droits individuels, qu’à chaque fois qu’il est question de faire valoir un droit fondamental, ils y renoncent! Trop souvent en tout cas! Ceux-là mêmes qui attaquent l’État se réfèrent au rôle et aux tâches de ce même État pour défendre ces droits! Il y a là une incohérence; nous devons donner à notre Constitution un style, voire plus qu’un style — le style c’est l’homme — et j’espère que notre Constitution saura se référer à des textes fondamentaux, si ce n’est en les écrivant eux-mêmes, en les reprenant, du moins en ayant une certaine révérence à l’égard des droits universellement reconnus comme fondamentaux.

F Yvette JAGGI

Merci M. Bouvier. M. Gonthier renonce. Autre intervention à propos de cet article 3.5? Tel ne semble pas être le cas. Nous pouvons donc passer au vote sur l’ensemble de l’article réduit à son alinéa 1. Nous opposons donc la proposition de minorité Amstein «Suppression de l’article et du même coup de l’alinéa 1» à la proposition de la commission qui le laisse subsister. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants qui, suivant la proposition de minorité Amstein, veulent supprimer cet article, le manifestent en levant la main? Merci. Avis contraires, c’est à dire maintien de l’alinéa 1 unique de l’article 3.5? Mesdames et Messieurs les constituants, par 74 voix contre 56, vous avez rejeté l’amendement de minorité Amstein.

Amendement de minorité Amstein rejeté par 74 voix contre 56.

F Yvette JAGGI

L’article 3.5 est donc constitué de l’unique alinéa 1 qui est désormais non numéroté sur lequel je vous propose de voter maintenant, vote d’ensemble sur cet article. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants qui approuvent l’article 3.5 anciennement alinéa 1 le manifestent en levant la main? Avis contraires? Abstentions? Mesdames et Messieurs les constituants, par 79 voix contre 46 et avec deux abstentions vous avez approuvé l’article 3.5 Protection de la maternité».

Article 3.5 — Protection de la maternité
(79 voix contre 46 et avec 2 abstentions)
Chaque femme a droit à la sécurité matérielle avant et après l’accouchement.

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Article 3.12 — Vie en commun

F Yvette JAGGI

Notre ordre du jour prévoit que l’article suivant 3.12, «Vie en commun» devrait être traité seulement en son alinéa 3. Monsieur le président de la commission.

F Pierre HERMANJAT

Vous avez sous les yeux l’article 3.12, «Vie en commun», dont le 3 e alinéa parle du droit à la vie familiale qui correspond à toute la discussion que nous avons eue vendredi dernier et ce matin. Il est absolument inopportun de le saucissonner et de n’accepter que le 3e alinéa ou de le refuser, ce que je n’espère pas. Je propose qu’on débatte de l’article dans sa totalité et si nous ne le faisons pas maintenant, je propose de le reporter ultérieurement.

F Yvette JAGGI

Je vous propose effectivement, Mesdames et Messieurs, que nous ne divisions pas l’examen de cet article. Comme je l’imagine, les groupes se sont préparés exclusivement en vue d’une discussion sur l’alinéa 3, je crois effectivement qu’un report de l’entier du 3.12 est recommandable. Quelqu’un s’oppose-t-il à cette procédure? Cela ne semble pas être le cas.

Report de l’article 3.12 — Vie en commun

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Article 2.3.25 — Jeunesse

F Yvette JAGGI

Nous passons donc à l’article 2.3.25, «Jeunesse». Je donne la parole au président de la commission, M. Buhlmann.

F Gérard BUHLMANN

Merci. Après la famille, la jeunesse, un article qui semble nettement moins combattu que le précédent puisque nous n’avons que deux amendements qui visent en fait à le compléter. J’aimerais préciser que l’article, tel que la commission vous le propose, n’a fait l’objet effectivement d’aucune proposition de minorité, au sein de la commission 2, elle-même. Quelles sont les propositions qui nous sont faites? D’abord l’amendement Recordon qui émane en fait du GLAJ qui nous écoute maintenant. Cet amendement évolue avec le temps. Nous avions d’abord simplement la mention du mot «participative» et maintenant, nous avons l’adjonction d’une fin relativement précise et complète que vous avez sous les yeux. On pourrait se poser la question de ce que veut dire «non compétitive» — en ironisant on pourrait se demander si on doit toujours soutenir le football par exemple — mais je plaisante, rassurez-vous. La question qui se pose est de savoir une fois de plus, que voulons-nous mettre la loi, que voulons-nous mettre dans la Constitution? Régulièrement, on nous fait le reproche d’être beaucoup trop complet et là, on se trouve face à des dispositions qui sont à l’évidence extrêmement précises, qui relèvent de la loi si ce n’est d’un arrêté d’application. Donc, sans nous prononcer formellement contre cette dimension participative, je crois qu’il faut réellement laisser aux textes légaux le soin de définir les formes du soutien que le Canton et les communes donneront aux activités de la jeunesse. Ma remarque est exactement la même concernant l’amendement Desarzens qui le dit lui-même, dans son explication, «est légèrement insuffisant». La perfection n’est pas de ce bas monde, je crois que nous devons vraiment en rester à des grandes lignes. Nous nous égarons déjà passablement dans des détails et, pour la même raison, et sans contester le fond de l’amendement Desarzens qui, comme l’autre amendement, a tout son intérêt, je vous propose de ne pas inscrire ces dispositions bien spécifiques, dans notre Constituante. Concernant l’article 3.6 qui est mis en parallèle, il n’y a aux yeux de la commission 2 et au mien, en tout cas, aucune opposition. Ces articles sont tout à fait complémentaires. Je pense donc qu’on peut adopter et l’un et l’autre. Je vous remercie de votre attention.

F Yvette JAGGI

Merci, Monsieur le président de la commission. Nous avons deux amendements à cet article 2.3.25, signés respectivement par MM. Recordon et Desarzens. Je ne vois pas M. Recordon. M. Desarzens a donc la priorité.

F Laurent DESARZENS

Permettez-moi d’intervenir sur cet article afin de le compléter quelque peu. Je trouve, en général, qu’on ne compte pas suffisamment sur les richesses offertes par le monde associatif. Une attitude tenace laisse encore à croire que seule l’école détient le monopole de la connaissance. Ainsi, les horaires scolaires en Suisse restent très chargés. Lorsqu’un enfant termine l’école, entre 16:30 et 17:15, ce qui est très courant, et qu’il veut pratiquer un sport ou une activité culturelle, il se trouve en concurrence avec le monde des adultes. En conséquence, les milieux associatifs, censés les accueillir, se trouvent confrontés à un problème subit de surpopulation sur un très court laps de temps, en général en fin d’après-midi, début de soirée. La place manque, terrains de sport, salles de gymnastique, cours de dessin et de musique, etc. Le prix des cotisations demandé aux jeunes est souvent le même que celui proposé aux adultes puisqu’ils se trouvent, en même temps, aux mêmes endroits. Enfin, les jeunes doivent intercaler ces activités dans la plage horaire déjà réduite, réservée au travail scolaire à domicile. Les pays anglo-saxons l’ont compris depuis longtemps. Il faut croire aux possibilités éducatives offertes par les activités extrascolaires. Ces activités sont généralement saines pour l’esprit. Elles peuvent aider à un meilleur équilibre psychique. Le changement de milieu contribue aussi à donner une autre vision de la société. Mais pour cela, il faudrait que l’école collabore un peu plus, qu’elle laisse davantage de place. Par exemple, elle pourrait le faire en abordant une fois pour toutes le lancinant problème de l’horaire continu, encore en suspens, ici et dans bien d’autres cantons. En effet, que faire de ces pauses de midi interminables qui ne font que rompre le rythme? Elles pourraient aussi se faire, en reconnaissant autrement que du bout des lèvres, le rôle pédagogique joué par les milieux culturels et sportifs, en dehors de l’école. Je trouve que l’article proposé sous chiffre 2.3.25 est légèrement insuffisant car il ne fait que refléter ce qui existe déjà. De plus, sans mention particulière, il laisse supposer que c’est seulement le rôle de l’État de tenir compte des besoins et des intérêts particuliers des enfants et des jeunes. Dans ce cas, la réponse pourrait être, l’école s’en occupe déjà. Mais l’école ne peut pas tout faire. Elle aurait tout avantage, notamment dans le domaine de la culture, de compter avec les apports extérieurs. Un meilleur partage des rôles et du temps disponible entre l’État et la société permettrait un accès facilité vers les activités extrascolaires. Il en résulterait une offre élargie. De ce fait, il est à espérer une accessibilité facilitée pour les plus démunis, grâce à des tarifs devenant enfin abordables. Je vous propose donc de compléter cet article par ces quelques mots: «Ils (le canton et les communes) favorisent les activités culturelles, sportives et de loisirs en intégrant notamment les possibilités offertes par les milieux associatifs extrascolaires», ce qui donne dans son entier: «Le Canton et les communes tiennent compte des besoins et des intérêts particuliers des enfants et de jeunes» — ce qui est quand même plus que ce vous dites Monsieur le président — «Ils favorisent les activités culturelles, sportives et de loisirs en intégrant notamment les possibilités offertes par les milieux associatifs extrascolaires». Je vous remercie.

F Cédric PILLONEL

Tout en vous priant d’excuser l’absence momentanée du citoyen Recordon, je me ferai son interprète, un interprète du GLAJ avec lequel nous avons beaucoup discuté. Nous vous proposons de rajouter deux éléments à cet article 2.3.25 qui parle de la dimension participative et de la dimension non compétitive des activités culturelles, sportives et de loisirs. Pourquoi ces deux aspects sont-ils importants? Le premier aspect qui parle de la participation est tout à fait primordial. En effet, ces activités sportives et culturelles et ces activités de loisirs sont celles qui permettent le mieux aux jeunes de s’intégrer à la société. Je pense notamment aux jeunes étrangers qui, présents en Suisse, peuvent s’intégrer via les clubs de foot, par exemple. C’est un aspect très important qu’il ne faut pas laisser de côté et cet aspect doit être soutenu par l’État. Quant au deuxième aspect, l’aspect non compétitif, il est évident que tout sport entraîne une certaine compétition. Ce qui est nocif est la compétition à outrance. On a pu le voir avec les affaires de dopage que la compétition à outrance est dangereuse. C’est pourquoi nous proposons que l’État soutienne également les activités et la dimension non compétitive du sport. En effet, des sports très compétitifs n’ont pas forcément besoin d’être encouragés, ils le sont déjà bien assez par les grands groupes financiers, telles les banques qui sponsorisent de manière efficace les compétitions de ce genre. Nous vous recommandons, le citoyen Recordon, moi-même ainsi que le GLAJ d’accepter cet amendement Recordon. Je vous remercie.

F Claudine AMSTEIN

Nous voulons une Constitution concise mais nous constatons la tendance « qu’il vaut mieux dire deux fois les choses plutôt qu’une »; et l’amendement Desarzens va exactement dans cette direction. Dans l’article 2.3.24 que nous avons fini par adopter ce matin, nous avons eu une longue discussion pour savoir ce qui se passait dans les activités parascolaires. Suite à ce débat, nous avons introduit le principe selon lequel les partenaires privés participaient eux aussi aux activités parascolaires des enfants. En reprenant l’amendement Desarzens, nous répétons ce qui a été adopté dans l’article 2.3.24. Au nom du groupe Libéral, je vous demande donc de ne pas suivre cet amendement tout en retenant l’idée exprimée par la volonté de M. Desarzens mais en précisant que tout est déjà réglé dans le 2.3.24 qui a été adopté.

F Anne WEILL-LEVY

Quelques mots pour compléter ce qu’a dit mon collègue Pillonel. Dans la dimension participative, entre également le problème de la prévention dont je parlerai plus tard. En effet, on se rend compte qu’il n’y a pas que le sport, il y a également la culture, les loisirs, et, comme l’a dit, M. Desarzens, il convient que les milieux qui sont dans nos cantons et les associations soient soutenues en cela, afin que nous puissions avoir une prévention et une lutte contre la délinquance qui, malheureusement chez nous, est de mise. Je vous demande donc de soutenir l’amendement Recordon, tel que présenté, et qui n’est pas en contradiction avec l’amendement présenté par M. Desarzens.

F Laurent DESARZENS

Oui, rapidement pour vous dire, Mme Amstein, qu’il me semble que ce n’est pas tout à fait exact ce que vous dites parce que, en fait, dans l’article 2.3.24 on parle d’accueil. Ici, me semble-t-il, dans cet article, on est un peu plus actif que cela. Sinon, j’aimerais peut-être proposer à M. Pillonel une solution pour son texte, s’il est d’accord. On pourrait rajouter: «Une dimension participative et non compétitive de ces activités doit être respectée». Je ne sais pas ce qu’il en pense.

F Yvette JAGGI

Merci, M. Desarzens. D’autres interventions? Cela ne semble pas être le cas. Je vous propose que nous passions au vote sur ces deux amendements. Comme on l’a dit, à plusieurs reprises, ils peuvent fort bien se combiner. Cela ne sera pas d’une rédaction très élégante mais ce sera provisoire, le cas échéant. La commission de rédaction interviendra plus tard. Tout d’abord, je mets au vote l’amendement Recordon. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants qui approuvez cet amendement le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 74 voix contre 56, vous avez rejeté l’amendement Recordon.

Amendement Recordon rejeté par 74 non contre 56 oui.

F Yvette JAGGI

Avant de passer au vote suivant, je rappelle que pendant les opérations de vote, pendant les scrutins, seuls les scrutateurs sont debout et tout le monde prend place afin de faciliter tout simplement les décomptes. Cela dit, nous passons à l’amendement Desarzens. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants qui approuvez cet amendement le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 79 voix contre 45, vous avez rejeté également rejeté l’amendement Desarzens.

Amendement Desarzens rejeté par 79 voix contre 45.

F Yvette JAGGI

Je soumets donc à votre approbation l’article 2.3.25, tel que proposé par la commission. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants qui approuvent ce texte dans sa version commission le manifestent en levant la main. Avis contraires? Je n’ai vu personne lever la main. Personne ne s’oppose-t-il à l’article 2.3.25? Abstentions? Mesdames et Messieurs les constituants, par 134 voix contre 0, avec 4 abstentions, vous avez approuvé l’article 2. 3. 25 du projet de Constitution.

Article 2.3.25 — Jeunesse
134 voix contre 0, avec 4 abstentions
Le Canton et les communes tiennent compte des besoins et des intérêts particuliers des enfants et des jeunes en favorisant leurs activités culturelles, sportives et de loisirs.  

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Article 3.6 — Droit des enfants et des jeunes

F Yvette JAGGI

Nous passons maintenant à l’article 3.6 Droit des enfants et des jeunes. Monsieur le président de la commission Hermanjat.

F Pierre HERMANJAT

L’article 3.6 n’a pas eu d’amendement proposé jusqu’à maintenant. C’est un article qui a été discuté et accepté, sinon à l’unanimité, en tous les cas par une très grande majorité de la commission. C’est un article qui colle parfaitement à ceux qui existent dans la Constitution fédérale également dans toutes les récentes constitutions cantonales. Je vous recommande donc de l’accepter tel qu’il est présenté par la commission.

F Yvette JAGGI

Merci M. Hermanjat. La discussion est ouverte. Elle n’est pas demandée, elle est close. Nous passons au vote sur l’ensemble de cet article 3.6, alinéas 1 et 2. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants qui approuvez cet article dans la version commission le manifestent en levant la main. Avis contraires? Abstentions? Mesdames et Messieurs les constituants, par 137 voix contre 0, avec trois absentions, vous avez approuvé l’article 3.6 dans la version commission.

Article 3.6 — Droit des enfants et des jeunes
(137 voix contre 0, avec 3 absentions)
1. Les enfants et les jeunes ont droit à une protection particulière de leur intégrité et à l’encouragement de leur développement.
2. Ils exercent eux-mêmes leurs droits dans la mesure où ils en sont capables, sinon par l’intermédiaire d’une-e représentant-e. 

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Article 2.3.26 — Intégration des étrangers (1ère partie)

F Yvette JAGGI

Sans perdre le rythme, Mesdames et Messieurs, nous passons à l’article 2.3 26. Je donne la parole à M. Buhlmann, président de la commission 2.

F Gérard BUHLMANN

Volontiers. Comme je l’ai déjà fait à deux ou trois reprises, dans le cadre de ces discussions conjointes des articles des commissions 2 et 3, je vais vous proposer, par une motion d’ordre et ce d’entente avec mon collègue Hermanjat, d’inverser le traitement des articles, c’est à dire de commencer par le droit, soit l’article 2.3.25, avant de traiter des tâches de l’État, l’article 2.3.26, notamment parce qu’il y a deux amendements Bühler et que la logique veut qu’on traite d’abord l’amendement de l’article 2.3.25. Il me paraît donc logique de traiter dans ce cadre le droit en premier. Je vous propose par motion d’ordre de fonctionner dans ce sens.

F Yvette JAGGI

Merci Monsieur le président. Est-ce que votre motion d’ordre, en l’occurrence de commencer par le droit fondamental, est appuyée par vingt personnes? Merci, c’est évidemment le cas.

Motion d’ordre Gérard Buhlmann appuyée par vingt personnes.

Nous votons maintenant sur le fond de la question. Est-ce que vous approuvez le fait que nous commencions par l’article 2.3.25, plutôt que 2.3.26? Celles et ceux qui approuvent cet ordre dans notre discussion le manifestent en levant la main? C’est une évidente majorité, il en sera donc fait ainsi.

Changement de l’ordre du jour accepté à une évidente majorité. 

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Article 3.25 — Droit de cité

F Yvette JAGGI

La parole est à M. Hermanjat, président de la commission 3.

F Pierre HERMANJAT

Merci Madame la présidente, on fait un peu de gymnastique, cela fait dérouiller les genoux, cela fait du bien. Cet article est vraiment un article nouveau dans une constitution cantonale et c’est le seul article des droits fondamentaux qui ne s’exerce pas par les citoyens mais par les étrangers résidant dans notre Canton. Cet article comprend essentiellement deux nouveautés dans le processus de la naturalisation et le droit de cité. La première nouveauté se trouve à la fin du premier alinéa, dans le sens que nous prévoyons une instance de recours qui n’existe pas dans la procédure normale de naturalisation actuelle. Le 2 e alinéa est également une nouveauté dans le processus de la naturalisation, c’est à dire qu’il évite l’aller et retour dans les différentes instances communale, cantonale et fédérale. Ceci signifie qu’une fois que la commune a décidé d’octroyer la promesse de bourgeoisie à une personne ou une famille, celle-ci n’est pas remise en cause dans la commune. Elle part ensuite au canton qui, par le même processus, donne la promesse de bourgeoisie, et ensuite, la Confédération statue. Une fois que la Confédération a statué, il n’y a plus le retours, comme cela se fait actuellement. Donc, cela va parfaitement dans le sens de l’article 2.3.26 qui demande une naturalisation rapide. Différents amendements ont été apportés, ils sont malheureusement arrivés assez tard — je n’en ai pris connaissance qu’hier soir — et je n’ai pas eu le temps de les regarder dans le grand détail. Toutefois, l’amendement du groupe Libéral qui supprime le 2 e alinéa, je le trouve très dommageable du moment qu’on simplifie la procédure de naturalisation. Donc, je vous recommande de ne pas aller dans le sens du groupe Libéral. L’amendement Bühler inclut un alinéa supplémentaire. Là, je ne vois pas d’objection particulière à entrer dans cette disposition. Je laisse libre choix à chacun de voter cet amendement, selon sa conscience. L’amendement Weill-Lévy Recordon, je ne vois pas exactement où ils veulent en venir, à savoir s’il s’agit vraiment d’une amélioration ou non. J’attends d’avoir le développement de cet amendement avant de pouvoir éventuellement reprendre la parole ensuite. Quant à l’amendement du groupe Radical qui supprime au 1 er alinéa l’instance de recours, il me semble également à rejeter dans la logique de la proposition que la commission 3 vous fait. Je vous recommande donc d’accepter l’article tel que la commission 3 l’a proposé. Je vous remercie.

F Yvette JAGGI

Merci Monsieur le président de la commission 3. Nous avons une série d’amendements et même un sous-amendement Wettstein Martin, déposé en complément ou en modification de l’amendement Weill-Lévy Recordon. Nous prenons les choses dans l’ordre, tout d’abord, au nom du groupe Libéral, M. Haldy.

F Jacques HALDY

Pourquoi le groupe Libéral propose-t-il la suppression de l’alinéa 2 qui prévoit, comme l’a rappelé le président de la commission, qu’après la délivrance de l’autorisation fédérale, la naturalisation est acquise sur le plan cantonal et communal? L’intention avouée est tout à fait louable, c’est d’aller plus vite, d’avoir une meilleure sécurité juridique mais en fait, il s’agit d’une séquelle du syndrome Emmen; je crois cependant — et le groupe Libéral dans son intégralité également — que cela n’est pas nécessaire et que cela n’est pas seulement inutile mais gravement préjudiciable aux compétences des autorités politiques que de prévoir un tel système. Je vais tenter de vous convaincre. En premier lieu, le système qui est proposé me paraît contraire au droit fédéral. En effet, l’article 12 de la loi fédérale sur le droit de cité prévoit clairement qu’il y a d’abord une autorisation fédérale, qui est au fond une décision administrative d’aptitude du requérant à la naturalisation. On constate qu’il a les années de résidence en Suisse, qu’il ne compromet pas la sécurité publique et ensuite, la naturalisation doit avoir lieu, au niveau communal et cantonal. L’argument du droit fédéral n’est cependant pas pour moi l’argument déterminant car je crois véritablement que la solution qui nous est proposée n’est pas la bonne. Pourquoi en effet? Parce que la naturalisation est un acte politique qui doit émaner des autorités politiques c’est à dire, d’une part, le Conseil communal, dans la commune et, d’autre part, le Grand Conseil ou tout le moins le Conseil d’État, autorité politique au niveau cantonal. Alors certes, on me dira qu’il suffit que le préavis émane de l’autorité politique pour remédier à cette absence d’autorité qui déciderait. Je ne crois pas que c’est là la bonne solution. En effet, pour l’heure — vous le savez tous — l’aptitude à la naturalisation qui permet la délivrance de l'autorisation fédérale est au fond une enquête de police. On constate qu’il n’y a pas d’intérêts publics mis en danger et que les années de résidence sont là. Cela n’est pas le propre des autorités politiques de donner des préavis. En effet, elles doivent prendre des décisions et, en particulier, dans un domaine qui tient à l’intégration des étrangers qui demandent leur naturalisation, il est important que les prérogatives et compétences des autorités politiques soient pleines et entières, c’est à dire qu’elles puissent décider librement d’accorder ou de ne pas accorder la naturalisation. D’autre part, le système qui est proposé ne résout pas tous les problèmes, loin s’en faut. Quid en cas de préavis négatif? Est-ce que la procédure continuerait, ce qui serait absolument incroyable dans la mesure où on pourrait avoir une autorisation fédérale qui serait délivrée et qui entraînerait la naturalisation contre l’avis des autorités politiques qui se sont exprimées. Cela n’est pas du tout acceptable. Il n’est pas non plus acceptable que la procédure s’arrête, sans voie de recours quelconque, puisqu’un préavis n’étant pas une décision, il ne saurait bien sûr faire l’objet d’une voie de recours. Je crois, chers collègues qu’il faut s’en tenir au système qui est prévu par le droit fédéral: une autorisation fédérale qui prévoit l’aptitude du requérant à la naturalisation, puis ensuite, les autorités communales politiques, puis cantonales, également au niveau politique, doivent se prononcer, selon une procédure qui peut être tout à fait rapide et qui peut être gratuite également, là n’est pas le problème. Le problème est de respecter l’ordre et la compétence des autorités. Il ne s’agit pas là d’une complication excessive et il n’y a nulle crainte à avoir au niveau du syndrome d’Emmen, tel que je l’ai appelé, tout à l’heure, parce que nous y avons pensé. A la commission 6, par exemple, nous avons bien sûr prévu que certains actes du législatif communal soient exclus du droit de référendum, ce sera en particulier le cas de la naturalisation. Donc, nous ne risquons pas de nous trouver dans la situation d’Emmen, avec le droit actuel et avec le droit que nous proposons. Je vous demande donc, chers collègues, de supprimer cet alinéa qui est une fausse bonne solution. Puisque j’ai la parole et pour éviter de revenir, au nom du groupe Libéral, je me prononcerai également sur les amendements différents de ceux du groupe Libéral qui sont proposés. D’abord, à propos de l’amendement Radical. Il me paraît normal qu’il y ait une instance de recours contre la naturalisation pour des questions formelles, pour des vices de procédure. Si un règlement communal et cantonal prévoit que le requérant doit être entendu, eh bien, cette procédure doit être respectée, il doit y avoir une possibilité de recours pour le respect de ces règles de forme. D’ailleurs, c’est déjà le cas actuellement, il y a en tout cas une procédure de recours de droit public au Tribunal fédéral, indépendamment de la question du fond. Mais le texte qui nous est proposé est ambigu sur cette question puisqu’il prévoit une instance de recours sans dire s’il doit s’agir du fond ou de la forme. Or, nous ne voulons pas d’un recours sur le fond car nous ne voulons pas qu’une autorité judiciaire puisse décider à la place d’une autorité politique et, comme je l’ai déjà indiqué, la naturalisation est un acte politique qui doit être décidé par les autorités politiques. Dès lors, compte tenu de cette ambiguïté du texte, nous soutenons l’amendement Radical mais nous prévoyons un sous-amendement qui limite la deuxième phrase de l'alinéa 1 en prévoyant simplement «La loi règle la procédure et la durée de résidence exigée». La question des émoluments administratifs et du recours pour des moyens formels est en effet entièrement comprise dans la procédure. Ce sera la loi qui réglera quels seront les motifs de procédure — nous pensons aux motifs formels — et qui pourra dire s'il y a émoluments administratifs ou pas, pour éviter également une contradiction avec le texte que nous discuterons après, de la commission 2, et qui prévoit que la procédure doit être gratuite. Je me prononce encore rapidement sur les amendements Bühler et Weill-Lévy. D'abord sur l'amendement Bühler. En fait, il tend à introduire ce qu'on appelle en termes juridiques le jus soli ou quasiment. Celui qui est né dans le Canton de Vaud pourrait bénéficier de la naturalisation automatiquement, sans passer par les procédures cantonale et communale, mais uniquement par l'autorisation fédérale. Ce système n'est pas le nôtre. Il n'est pas acceptable parce qu'il va créer, s'il est adopté, une discrimination entre celui qui, par les circonstances de la vie, est arrivé à l'âge de trois ans en Suisse, qui y a fait toutes ses études et qui, lui, devrait subir une procédure complète de naturalisation, alors que celui qui est né dans le Canton de Vaud mais qui est reparti à l'âge de deux ans et qui revient des années plus tard serait, lui, complètement épargné. Vous voyez qu'il y a là une incongruité, une incohérence qui doit vous conduire à rejeter l'amendement Bühler. S'agissant de l'amendement Weill-Lévy, nous sommes également hostiles à cet amendement dans la mesure où il nous sert à une autre sauce l'alinéa 2 de l'article prévu par la commission, puisqu'il y aurait aussi une naturalisation automatique à partir de certaines conditions, en particulier de la délivrance de l'autorisation fédérale. Or, comme je l'ai déjà dit, il s'agit d'un acte politique qui doit être décidé par les autorités politiques et nous ne saurions donner un droit acquis à la naturalisation, ce qui n'implique pas du tout que l'on tombe dans les travers d'Emmen. Il s'agit simplement pour les autorités de prendre leurs prérogatives et de les appliquer. Je vous remercie.

F Michel BUHLER

Je constate qu'en matière de naturalisation, le groupe Libéral n'a de libéral que le nom. Pour des raisons de clarté, j'aimerais juste apporter une petite modification à mon amendement, et rajouter: «toute personne étrangère née en Suisse et résidant dans le Canton». «Si quelqu'un vient à Moudon, s'il jure d'observer les règlements et les lois de la ville, s'il y demeure sans interruption un an et un jour, si son ancien maître ne le réclame pas bien que sachant où il est, alors il devient bourgeois». Ce texte cité par Charles Gillard dans son ouvrage, «Moudon sous le régime savoyard» est extrait de la Charte de Moudon qui était la Constitution de cette ville sous le régime savoyard et qui date de l'an 1285. Bien qu'on me dise poète à mes heures, je ne serai pas naïf ou rêveur au point de proposer à notre Assemblée de se montrer aussi progressiste que nos lointains ancêtres du Moyen Age, en adoptant un article comparable pour notre Constitution du 21 e siècle. Je pense qu'il n'aurait aucune chance de trouver grâce à vos yeux. Dommage! Pour ce qui concerne la naturalisation, le groupe Agora estime que partout devrait s'appliquer le droit du sol, c'est-à-dire qu'un humain, quelle que soit l'origine de ses géniteurs, devrait avoir automatiquement la possibilité d'acquérir la nationalité du pays où il est né. Comment appliquer ce principe dans le Canton de Vaud? Nous sommes soumis à la Constitution fédérale, nous ne pouvons pas inscrire le droit du sol dans notre Constitution. Nous ne pouvons pas dire que toute personne née dans le Canton de Vaud a la nationalité suisse. Nous pouvons cependant tendre vers ce progrès. Pour obtenir sa naturalisation, tout étranger doit obtenir l'agrément de la commune et du Canton. Sa demande passe ensuite au niveau fédéral. Nous proposons de faciliter l'obtention de la nationalité suisse pour les personnes nées dans notre pays en simplifiant considérablement les démarches qu'elles sont appelées à faire, en rendant automatique pour elles l'accord de la commune et du Canton. Cela permettra à des jeunes gens se sentant au fond d'eux suisses et vaudois, n'ayant vécu quasiment que dans notre pays et ignorant presque tout de celui de leurs parents, de mettre la couleur de leur passeport en accord avec leurs sentiments et leurs aspirations. Notez que la formulation de l'article implique de la part de ces personnes — et très nettement — une démarche volontaire pour bénéficier de ces dispositions. Il faudra qu'elles demandent leur naturalisation. Les frontières en Europe sont en train de tomber, comme elles se sont estompées au fil du temps entre les cantons suisses, permettant à tous les citoyens de ce pays de jouir des mêmes droits civiques, elles finiront par disparaître un jour. Je vous demande, en votant ces amendements, de faire aujourd'hui et clairement le choix de l'avenir et de la fraternité. Je vous remercie de votre attention.

F Anne WEILL-LEVY

M. Haldy a tout à fait résumé la façon dont nous voyons les choses. Il s'en est écarté, ceci étant son option. Nous considérons que — sur la base du droit suisse qu'il convient quand même de rappeler, à savoir que la Constitution fédérale et la loi sur l'acquisition et la perte de la nationalité suisse fixent des conditions cadre, des conditions formelles, de résidence, notamment, et des conditions d'aptitude sur l'intégration à nos us et coutumes ainsi que sur le fait de ne pas mettre en péril la sécurité intérieure et extérieure du pays –, les cantons ont, à l'intérieur de ces normes cadre, toute latitude de faire. C'est ainsi qu'on voit qu'à Genève, il y a à peu près une voie de recours à chaque stade, ce qui signifie qu'ils ont eux-mêmes des décisions, et bien sûr que dans d'autres régions on donne la voix au peuple, comme cela a été vu. Notre vision est donc très claire. Une fois que l'enquête de police a été faite au stade cantonal, qu'elle est parvenue à Berne où elle est examinée en même temps que le sont les dossiers qui peuvent figurer à Berne, il n'y a plus d'autre raison qu'une raison purement subjective — donc arbitraire — de refuser la naturalisation à un candidat. Ceci est extrêmement important, car en effet, lorsque cette demande redescend pour repasser devant le politique dont parlait M. Haldy, ce politique va avoir une analyse totalement subjective des choses, à savoir si la personne plaît par ce qu'elle est, d'où elle vient, quelles sont ses idées. Ceci nous paraît totalement inacceptable. Qui dit préavis, dit avis, dit donc impossibilité de voie de recours. Pour qu'il y ait une voie de recours ouverte, il faut une décision. Dès lors, c'est pour cela que nous vous demandons de bien vouloir adopter l'amendement en vertu duquel, une fois l'autorisation fédérale accordée, le cas est simplement soumis au décret du Conseil d'État. Je vous remercie.

F Irène WETTSTEIN MARTIN

La Suisse a une des législations sur la naturalisation des plus restrictives qui soient au niveau international. Par an, 20'000 personnes sont naturalisées, soit 1,5% de la population étrangère. Par comparaison, les Pays-Bas naturalisent quatre fois plus. En outre, douze ans au minimum de résidence en Suisse sont exigés, contre cinq à dix pour la plupart des pays de l'OCDE. Ainsi, parallèlement à l'assouplissement de la loi fédérale, il y a la nécessité de simplifier également les procédures communale et cantonale. Un rappel tout d'abord: la base constitutionnelle de la naturalisation ordinaire se trouve à l'article 38 de la Constitution fédérale et dans la Loi fédérale. Celle-ci réglemente la procédure d'autorisation au niveau fédéral et fixe les conditions minimales pour la naturalisation par les cantons. C'est tout. Je répète les conditions minimales qui sont fixées par la Loi fédérale: obligation de résidence (douze ans), ne pas compromettre la sécurité intérieure et extérieure du pays, l'intégration dans la communauté suisse et l'accoutumance au mode de vie et aux usages suisses. La tâche de réglementer la procédure aux niveaux cantonal et communal appartient au Canton. La seule limite qu'ont les cantons, c'est le respect des conditions minimum — que je viens de citer — du droit fédéral. Alors tout est possible. Un Canton peut permettre l'octroi du droit de cité par un vote populaire, notamment communal, malheureusement comme à Emmen ou autrement prévoir un droit automatique à l'acquisition du droit de cité cantonal et communal. On nous l'a dit, l'article de la commission a deux grandes innovations, deux éléments fondamentaux effectivement: l'un à l'alinéa 2 — l'acquisition du droit de cité cantonal et communal automatique dès l'octroi de l'autorisation fédérale plus préavis préalable du Canton et de la commune — et, deuxième nouveauté, une instance de recours qui serait créée. Tout d'abord, en ce qui concerne l'octroi d'autorisations automatiques du droit de cité cantonal et communal, c'est un des éléments déterminants de la procédure de naturalisation. L'avantage, effectivement, elle rend cette procédure rapide et économique, ce qui est très loin d'être le cas actuellement. Les critères pour l'octroi des droits de cité sont également limités à ceux du droit fédéral, sous réserve d'une obligation de résidence minimum dans le Canton mais j'y reviendrai plus tard. En outre, l'octroi de la naturalisation résulte d'une décision d'un organe administratif, car en ne confiant plus aux organes législatifs la décision relative au droit de cité, on diminue fortement les risques de décision motivée par les considérations purement politiques ou émotionnelles. Au nom des décisions politiques, M. Haldy, beaucoup de mal et beaucoup d'arbitraire a été fait, notamment des décisions discriminatoires ont très souvent été prises. Tout est possible au nom de la politique. Je dirai même plus: au jour d'aujourd'hui, il n'est plus acceptable de permettre à des citoyens de juger de la couleur de peau de l'un ou de la religion de l'autre. Certes, le Canton et la commune ont droit à la parole, d'après le projet de la commission. Toutefois, il ne s'agit que d'un préavis. On met ainsi les droits de cité cantonal et communal à leur juste valeur. Honnêtement, le droit de cité communal est-il si important? Sur le plan juridique, il est quasi inintéressant et n'a aucune importance, si peu également dans mon coeur et je pense dans la plupart des vôtres. Vous avez sans doute des communes d'origine. Les avez-vous visitées? [brouhaha] J'y ai été aussi une fois, je viens de Baden, mais je dois dire que je n'y suis pas retournée. Droit de cité cantonal, ce droit de cité cantonal est également secondaire. Excusez-moi. L'intérêt de la démarche de naturalisation est de devenir suisse, mais non pas de devenir ressortissant de tel ou tel Canton. À l'heure où parmi les habitants du Canton de Vaud, nombreux sont ceux qui travaillent à Genève, nombreux sont ceux qui vont passer leurs vacances d'hiver en Valais, faire leurs achats en France, à l'heure de l'intégration à l'Europe, force est de constater que l'importance qu'on donne aux droits de cité cantonal et communal est disproportionnée. C'est bien tout l'intérêt de l'amendement Weill-Lévy Recordon, qui est de supprimer cette exigence d'un préavis cantonal et communal. D'ailleurs, l'abandon du préavis a également l'avantage de diminuer les risques d'avis qui seraient arbitraires car, je vous le rappelle, ces préavis pourraient être rendus par des autorités législatives, exécutives, mais aussi par un vote du peuple, puisque la commission n'est pas du tout restrictive à ce sujet. Par contre, la faiblesse de l'amendement Weill-Lévy Recordon, y compris de l'article de la commission, c'est qu'il maintient l'obligation de résidence dans le Canton. C'est un paradoxe par rapport à l'amendement Weill-Lévy puisqu'il est exigé trois ans de résidence dans les dix dernières années. Alors imaginez quelqu'un qui, pendant les dix dernières années, un an par-ci, un an par-là, en tout cas maximum trois ans est venu dans le Canton, mais pendant sept ans a résidé dans le Canton de Zurich, finalement cet étranger-là a plus d'attaches à l'autre bout de la Suisse qu'avec notre Canton et il pourra obtenir le droit de cité cantonal. L'amendement Bühler aussi, il y a le fruit du hasard dans cet amendement, parce que finalement, un enfant prématuré qui serait admis au CHUV ou un bébé qui allait naître, qui faisait du tourisme avec ses parents et qui naît ici dans le Canton finalement disposerait de cette naturalisation sans préavis. Je crois qu'il faut aller au bout du processus. À l'heure où les jeunes se disent suisses mais surtout européens, cessons cette épicerie! Allons au bout du processus et accordons le droit de cité cantonal et communal automatiquement, dès l'obtention de l'autorisation fédérale, sans préavis, sans obligation de résidence dans un Canton ou une commune. Mon amendement va dans ce sens. Je retiens encore votre attention par rapport à l'instance de recours, puisque nous avons un amendement qui tend à l'éliminer. L'expérience nous a appris que le processus de naturalisation n'est pas exempt d'arbitraire. Or il faut savoir que — malgré ce que pensent certains – le vote populaire n'est pas absolu et que l'étranger a droit au respect de ses droits fondamentaux. Ainsi donc, un vote populaire en matière de naturalisation qui créerait une inégalité de traitement entre les candidats en raison de leur origine ethnique, culturelle ou raciale peut être annulé par un tribunal. Le Tribunal fédéral l'a expressément admis. Il est donc indispensable de créer une possibilité de recours au niveau cantonal pour éviter les abus. Voilà tout l'intérêt de l'instance de recours. Je vous invite donc également à rejeter l'amendement du groupe Radical.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Wettstein Martin qui nous a très bien démontré qu'une question qu'on croyait rhétorique, mais glissée au milieu d'un long développement, permet de vérifier l'attention du public et de susciter des réactions. Au nom du groupe Radical, M. Burnet.

F Olivier BURNET

Mon ambition est également d'attirer votre attention et à titre préliminaire, je souhaite souligner tout d'abord que je suis favorable à diverses mesures tendant à faciliter la naturalisation. À ce point de vue, je partage le constat fait par Mme Wettstein, dans la première partie en tout cas de son intervention. Mais cette naturalisation ne doit toutefois pas s'exercer par une voie judiciaire. En effet, tout comme M. Haldy, je pense qu'il ne faut pas céder au syndrome consécutif à une décision prise par une certaine commune de Suisse allemande. Prévoir une instance de recours à l'encontre d'une décision prise par un organe législatif est, me semble-t-il, une entorse au système que nous connaissons. Selon le système actuel — faut-il vraiment modifier cette conception? –, le législatif est souverain. Il tranche définitivement et en dernier ressort. Mettre sur pied un système qui permette de recourir contre une décision prise par un organe législatif revient donc à remettre en cause la souveraineté d'un organe législatif. En d'autres termes, l'instauration d'un droit de recours contre une décision prise par des représentants du peuple me paraît contraire à notre système démocratique. Paradoxalement, un tel droit de recours serait accordé à des étrangers, alors qu'aucun Suisse ne bénéficie d'un tel droit, dans un autre contexte évidemment. Enfin, ne surestimons pas le pouvoir judiciaire. Les juges ne sont pas nécessairement plus sages que des citoyens élus démocratiquement, puisque ces élus sont, par définition, l'émanation de la volonté populaire. S'il vous plaît, pas d'américanisation! En résumé, je ne peux me rallier à cette défiance face au pouvoir législatif et ne peux adhérer à ce transfert de compétences vers le pouvoir judiciaire, raison pour laquelle je vous invite à supprimer les six derniers mots du chiffre 1 et donc à accepter mon amendement, c’est-à-dire celui du parti Radical. Enfin et très brièvement, j'aimerais dire que j'adhère aux propos de M. Haldy. Il est en effet inutile de prévoir une voie de recours en cas de vice de procédure, puisque le recours de droit public est de toute façon ouvert et qu’il répond précisément à ce besoin.

F Alain GONTHIER

Je voudrais intervenir sur deux points qui me semblent absolument essentiels, quelle que soit la formulation que nous choisirons en fin de compte, qui sont le droit de recours d'une part, et la procédure abrégée d'autre part. Je voudrais, en préalable, citer deux extraits d'un traité de droit — je ne suis pas un grand spécialiste de la chose, mais enfin, ça existe, on peut les lire –: Précis de droit Stämpfli, Berne 2000, c'est tout récent Point 1 sur la capacité du canton de disposer et de prévoir des dispositions nouvelles. «Cette compétence» — donc la compétence de naturalisation ordinaire — «est concurrente parce qu'elle s'exerce au niveau fédéral simultanément à celle dont bénéficie chaque canton dans le même domaine. Elle est de surcroît limitée au principe, dès lors que le droit fédéral se borne à poser certaines exigences de base que les cantons ont la faculté de compléter à leur niveau. À teneur de l'article 38, alinéa 2, Constitution fédérale, les cantons sont ainsi» — et c'est ça qui est important — «seuls compétents pour régler les détails de la naturalisation ordinaire des étrangers, dans le respect toutefois des principes posés par le droit fédéral». Et puis, juste une deuxième citation du même livre concernant le droit de recours: «Même si les conditions et la procédure de la naturalisation sont fixées par la législation cantonale, le respect de cette législation n'est pas garanti par les tribunaux car les candidats, malgré les atteintes considérables à leur liberté et au droit à l'intimité que peut impliquer l'enquête sur leur personnalité, ne disposent d'aucune voie de recours. C'est l'une des conséquences du fait que ni le droit fédéral, ni les droits cantonaux n'accordent aux étrangers un véritable droit subjectif à la naturalisation ordinaire». C'est exactement le débat que nous avons avec M. Haldy. Mais j'aimerais d'abord faire deux remarques. Accélérer les procédures, tout le monde est pour. Nous avons là une proposition, c'est la seule qui existe actuellement, et on vient nous la refuser. Alors c'est l'attitude, je suis pour — je suis contre mais je ne le dis pas –, je suis pour jusqu'au moment où je vois une solution et à ce moment-là, cette solution je la refuse sous des prétextes divers. Le point deux: ceux qui nous réclament une Constitution sobre et qui ne contient que des principes voudraient tout à coup que tous les détails soient mentionnés dans cet article constitutionnel, alors que la commission a eu la grande prudence de dire «la loi règle…» sur une série de choses, ce qui me semble, pour une fois, aller tout à fait dans le sens des demandes qui ont été faites, notamment tout à l'heure par Mme Amstein. Un peu plus sur le fond du problème: la logique de l'article proposé par la commission, c'est effectivement de traiter de la naturalisation sous l'angle d'un droit. Cette logique est opposée à celle de M. Haldy. Pour lui, comme il l'a dit, l'acte de naturalisation est un acte politique. Mais alors ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi M. Haldy ne va pas jusqu'au bout. Il a voté avec nous «le peuple est souverain» en en-tête de cette Constitution. Si le peuple est souverain, au nom de quoi est-ce qu'on se permettrait de lui retirer le droit de décider d'un acte politique en dernière instance? Soit c'est politique et les gens d'Emmen ont raison d'avoir une votation populaire sur la naturalisation, soit c'est un droit, un droit qui s'exerce selon des règles, selon des critères précis, juridiques, et on sort du politique et on entre dans le droit. La logique de la commission – comme je l'ai comprise en tout cas — est la suivante: la naturalisation doit être traitée comme un droit. Au niveau cantonal, ça se manifeste par le fait que déposer la demande de naturalisation fédérale est un droit. Les instances inférieures, la loi pourrait régler que ce soit des instances législatives — un Conseil communal — ou que ce soit des instances administratives ou juridiques ou autres, au fond peu importe. L'acte des instances inférieures est de déterminer si la demande déposée au niveau d'une commune peut être transmise plus haut, si elle est légitime à être transmise plus haut, si elle répond aux critères. L'instance de recours qui est prévue doit être capable de décider si — en cas de recours, par exemple, de la part du candidat dont on aurait refusé de transmettre la demande — les critères qui ont été formulés par la loi cantonale, par exemple, ont été respectés ou n'ont pas été respectés. S'ils ne sont pas respectés, cette décision peut être cassée. Je voudrais dire que, même s'il s'agit d'une décision législative d'un législatif communal, ce n'est pas un OVNI de dire qu'une décision d'un législatif communal, voire cantonal, peut être cassée par un juge, je m'excuse! Il y a de multiples lois fédérales, voire cantonales, qui font qu'un juge peut décider qu'une décision communale — sur un plan directeur, sur un plan de quartier, sur des choses de ce genre — peut être cassée. Ce n'est donc pas étrange de dire que, des fois, la loi peut être au-dessus d'une décision législative. J'en ai fini. [brouhaha]

F Marcel COHEN-DUMANI

Permettez-moi de venir dans un débat où, personnellement, je me sens fortement interpellé. Je crois que dans cette salle, il y a trois personnes qui ont vécu ce que c'est qu'une naturalisation, dont moi-même, alors j'aimerais peut-être vous expliquer, apporter un témoignage personnel, ça éclairera beaucoup le débat. Même si la loi a changé, je vous rappelle que mon épouse est municipale dans la ville de Lausanne et elle fait les naturalisations, d'accord? Alors je connais bien le sujet et c'est un sujet qu'on devrait également bien écouter et comprendre un petit peu ce que peuvent ressentir les étrangers. Je crois que le problème, il est là, parce que si dans un moment on parle, à l'article 2.3.26, «L'État facilite l'accueil des étrangers et favorise leur intégration», alors si par le premier acte qui consiste à les naturaliser, on met des barrières et des courses d'obstacles, comme j'ai vécu, je peux vous demander comment vous allez faire pour les intégrer? Dans le premier acte, qui consiste à les intégrer, c'est-à-dire leur accorder la citoyenneté. Là, il faut être un tout petit peu cohérent et penser à ça. Au moment où j'ai passé la naturalisation, je peux vous dire que j'ai lu les rapports de police. Je peux vous dire que le rapport de police, avant qu'il aille à Berne — puisque c'était à l'époque la gendarmerie, mais il y a toujours le rapport de police –, pratiquement toute l'histoire du requérant y figure. Donc au moment où ça part à Berne, la personne qui demande la naturalisation, tout son vécu — alors j'ai eu la chance d'être accueilli dans ce pays, mes parents en tant qu'émigrés politiques. J'y ai fait toute ma scolarité, donc je me considère — la preuve en est, c'est que j'ai été élu par le peuple lausannois — comme intégré puisqu'il m'a [élu] parmi les siens comme étant intégré, quand bien même je venais de l'étranger. Dans ce rapport de police, qu'est-ce que j'ai trouvé, à ma grande surprise? Seize ans avant ma demande de naturalisation, j'ai fait une infraction, j'ai joué au football dans un parc public, 5 francs d'amende par le préfet. Ça y figurait. Oui, vous y rigolez, mais ça y figurait! C'est juste pour attirer votre attention que tout le pedigree de celui qui passe le parcours figure dans le rapport de police quand Berne essaie de voir si le requérant répond aux conditions. Voilà. Ayant passé, disons, par tout ce cursus, j'aimerais juste vous demander de faire preuve d'un tout petit peu d'indulgence et de comprendre l'étranger qui vit dans ce pays. Il y en a plus de 19%, c'est le taux le plus élevé au monde et Mme Wettstein vous l'a rappelé tout à l'heure, ce sont nos procédures qui sont compliquées. Or vous avez le pouvoir, vous constituants, de modifier ceci. Votre premier acte consiste à dire que, dès que l'autorisation de Berne que le demandeur remplit les conditions, et bien c'est un droit, c'est ce qu'on vous demande dans l'article 3.25 que la commission vous a proposé, et à juste titre elle considère ceci comme un droit. Donc l'étranger qui a passé plus de douze ans ici, qui est intégré, dont le rapport de police démontre qu'il répond à toutes les conditions, comme les Suisses, et bien je considère, et j'aimerais qu'une très grande majorité d'entre vous m'appuient dans cette démarche en considérant ceci comme un droit. Parce que c'est déjà très difficile pour lui de faire cet effort, dès qu'il commence à le faire, mais s'il doit encore avoir la course d'obstacles de repasser devant le Conseil communal ou la délégation de la municipalité — mon épouse le fait trois fois par année, où elle reçoit justement les personnes, alors qu'elle a le rapport de police qui prouve tout, qui est intégré… alors moi j'aimerais juste m'adresser à ma famille politique. La famille politique du Centre Droit, qu'est-ce qu'elle préconise? Et bien, diminuer les coûts. Or que coûtent trois municipaux de la ville de Lausanne, je prends simplement la ville de Lausanne? Leur temps pour écouter et puis interviewer des personnes qui ont manifestement sur base des dossiers toutes les possibilités, plus la commission, qu'est-ce que ça coûte? Et bien voilà, ça coûte beaucoup d'argent et je crois qu'on peut se passer de cet exercice et accorder la naturalisation facilitée. C'est la raison pour laquelle j'aimerais vous demander de soutenir la proposition telle que présentée par Mme Weill-Lévy Recordon. Elle a le mérite d'être très claire. Elle introduit un mécanisme. Y figure la ville de Lausanne et pourquoi la ville de Lausanne? Au cas où un étranger demanderait à sa commune, dans laquelle il réside, pour sauvegarder, je dirais, les susceptibilités locales, si certaines communes ne souhaitaient pas accorder leur origine à certains, et bien que ça aille dans la ville de Lausanne. Il n'y a rien d'anormal dans cette procédure. Je vous rappelle que les Suisses de l'étranger ont le droit de vote. Leurs votes sont comptabilisés dans la ville de Lausanne. Et vous avez vu aux dernières élections qu'ils ont influencé dans un sens le résultat de la ville, parce qu'ils ont voté différemment de l'ensemble du Canton sur un des points. Tout ceci est comptabilisé dans la ville de Lausanne. La ville de Lausanne a un rôle de capitale. En matière de naturalisation, pour préserver les communes qui sont susceptibles qu'on ne leur impose pas un étranger qui est sans l'origine de sa commune, s'il y a pour une raison X un problème, il peut aller dans la ville de Lausanne. C'est la raison pour laquelle je vous demande de soutenir l'amendement Weill-Lévy. Je vous remercie. [applaudissements]

F Jacques HALDY

Puisque j'ai été pris à partie, notamment dans le procès d'intention que fait M. Gonthier, je veux quand même y répondre. En effet, on m'accuse au fond de ne pas vouloir faciliter la naturalisation. C'est tout à fait inexact, pour deux raisons. D'une part parce qu'il faut l'admettre et le dire haut et fort, le droit fédéral nous lie par rapport en particulier à la durée de résidence. Nous souhaitons — en tout cas une bonne majorité je pense, dans ce Canton souhaite — que les conditions fédérales soient assouplies, mais nous n'avons pas de prise là-dessus. D'autre part, on m'accuse de ne pas vouloir faciliter dans les procédures cette naturalisation, mais il y a une différence entre vouloir une procédure plus rapide, gratuite éventuellement, et puis supprimer la compétence des autorités politiques. C'est vrai, il est de bon ton de discréditer ces autorités politiques — dont nous faisons d'ailleurs partie — en disant, elles peuvent commettre des arbitraires. Tout le monde — et M. Burnet l'a dit – peut commettre des arbitraires. Mais pourquoi nous avons voulu que la naturalisation soit un acte politique? Parce qu'il s'agit d'apprécier l'intégration d'une personne à notre communauté, et cela, ce sont les élus qui peuvent le faire et qui doivent le faire, et non pas des juges. C'est en tout cas ma conviction profonde et je crois qu'il y a là véritablement un débat entre deux conceptions. Pour moi, ce doivent être les autorités politiques qui jugent et on nous dit — et on l'a dit lors du débat sur l'organisation territoriale –, nous voulons que ces autorités politiques, en particulier communales, aient des compétences. C'est l'occasion de montrer que nous le voulons vraiment. En effet, le projet de la commission prive en effet tout à fait la commune de compétences dans le domaine de la naturalisation, et le projet Weill-Lévy Recordon prive la commune de Lausanne de cette compétence, puisque au fond elle devrait «ramasser» — si vous me permettez l'expression — toutes les demandes qui ont été rejetées ailleurs. Alors le terme n'est peut-être pas adapté, mais c'est bien de cela qu'il s'agit, puisque la commune de Lausanne devrait forcément accepter comme naturalisées les personnes qui n'auraient pas obtenu la naturalisation d'autres communes de ce Canton. Nous voulons conserver la compétence des autorités politiques et je vous invite à suivre les amendements Libéraux et Radicaux.

F Georges CHAROTTON

C'est vrai qu'on est partis un peu dans l'émotionnel. Déjà ce matin, j'ai aussi parlé du fameux syndrome d'Emmen. Sortons de ce cas. Mme Wettstein a parlé de l'arbitraire. Combien y a-t-il eu, ces dernières années, de gens qui ont été refusés par un Conseil communal à leur demande de naturalisation? J'aimerais faire le calcul, je ne crois pas qu'ils ont été très nombreux. Certainement qu'une fois ou l'autre il y a une décision arbitraire. Alors plaçons-nous aujourd'hui dans un contexte qui est celui de quelque chose qui se passe tranquillement chez nous. Moi, je vous l'avoue, je m'appelle Georges Charotton, je suis né le 4.12.1939 et je suis originaire de Mont-la-Ville, c'est dans le Canton de Vaud, ça figure sur mon passeport et je crois qu'il est normal qu'on ait une certaine relation avec un endroit sur lequel on base une origine. Cette origine, elle figure dans la loi fédérale. Il faut l'octroi d'un droit de cité par un Conseil communal. Alors tout ce qu'on raconte sur la durée de la procédure… C'est vrai qu'elle est très longue au niveau administratif fédéral. Au niveau des communes, il y a toute latitude de pouvoir prendre des décisions rapides, de pouvoir entendre les requérants d'une manière où je crois certainement qu'ils sont heureux d'être entendus. Certains, c'est vrai, ont une appréhension à venir se présenter, et là, c'est la commission de naturalisation, c'est la délégation municipale qui doit les mettre en confiance. Mais lorsque c'est vécu et que ça a été bien vécu, je vous assure que les requérants qui sont admis à une bourgeoisie en sont très fiers. Ne changeons pas ce système. Ce système, c'est le système où la primauté de l'origine est celle d'une commune. Lorsque le droit de cité de cette commune est admis, vous êtes originaire de ce lieu et j'espère que tout le monde en est fier.

F Isabelle MORET

L'article qui nous est soumis pose la question de l'intégration des étrangers et pour moi, l'intégration des étrangers ne passe pas par le droit de vote aux étrangers, mais par une acquisition rapide, simple, peu coûteuse, de la nationalité suisse. Rapide, simple, peu coûteuse et non arbitraire. À cette fin, il faut garantir un droit à l'acquisition de la nationalité lorsque les conditions de temps et d'intégration sont remplies. Pour garantir ce droit, il faut prévoir une instance de recours. Alors on dira, ce n'est pas possible, c'est un acte politique! Mais si vous avez bien écouté Mme Wettstein, elle vous a rappelé que vous êtes simultanément citoyen suisse, ressortissant d'un Canton et originaire d'une commune. Elle vous a également dit que le législateur fédéral s'est contenté de réglementer la procédure d'autorisation au niveau fédéral et a posé certaines conditions matérielles générales, comme l'obligation de résidence de douze ans. La tâche de réglementer l'organisation et le déroulement de la procédure aux niveaux cantonal et communal incombe totalement au Canton. À mon avis, l'octroi de la nationalité ne doit pas être un acte politique. Je suis le professeur Aubert, qui expose que l'acte par lequel l'autorité communale octroie ou refuse le droit de cité est une décision. C'est une décision, même si elle est prise par un organe législatif, et contre cette décision, le requérant doit pouvoir disposer d'un recours, non seulement sur la forme mais aussi sur le fond, un recours pour arbitraire. Un recours pour arbitraire permet tout à fait de laisser un large pouvoir d'appréciation à l'autorité de première instance, de laisser un large pouvoir d'appréciation au législatif communal, tout en évitant les délits de sale gueule. Le législatif communal peut tout à fait juger de l'intégration d'une personne tout en étant soumis à un droit de recours pour arbitraire. On nous dit, mais Emmen n'existera pas chez nous. Mais les délits de sale gueule existent! Savez-vous par exemple que Monsieur le conseiller national Jacques Neirink a dû s'y reprendre à trois fois avant d'obtenir la nationalité suisse? Heureusement qu'il est têtu! Actuellement, un tel candidat n'a d'autre choix que de faire comme M. Neirink, changer de commune et retenter sa chance, déménager, changer ses enfants d'école, etc. — tout ça pour un délit de sale gueule. Je vous demande de balayer le délit de sale gueule et de voter l'article 3.25 tel que présenté par la commission. [brouhaha]

F Daniel BRELAZ

Je crois quand même qu'il faut qu'on vous dise en pratique comment se fait, non pas une cérémonie, mais ce qu'on appelle un examen de naturalisation. Alors moi, j'ai l'avantage de les faire passer, c'est-à-dire quatre fois par an, une demi-journée environ — pas trois — vu le nombre, ça peut aller jusqu'à six s'il y a beaucoup de demandes. Je peux vous dire qu'on doit appliquer, bien sûr, la loi cantonale et que la loi cantonale, de nos jours, pose un certain nombre de principes précis. Comme municipal qui respecte son serment et qui applique les lois, je me sens tenu, bien sûr, de l'appliquer dans toutes ses conséquences. Cela signifie que lorsqu'un candidat arrive, à part les salutations de politesse, je lui signale que, suivant la loi, je serai obligé de parler avec lui de son intégration et de sa demande de naturalisation, également d'un peu d'histoire, de géographie et d'instruction civique – c'est-à-dire de droits politiques. Théoriquement, parce que c'est comme ça que ça se passe, il faut mesurer à chaque question au moins qu'il y ait quelques lueurs. Alors supposons qu'il y ait quelqu'un qui soit intégralement nul en histoire et que vous suiviez le formulaire et que vous deviez donc mettre «insatisfaisant» si vous êtes correct, vous savez que par ce motif vous le renvoyez devant la commission du Grand Conseil qui est d'une autre lourdeur dans ses jugements, ce qui signifie que soit, à force de chercher, vous arrivez quand même à trouver deux ou trois réponses pour pouvoir mettre «satisfaisant» tout juste, «à la raclette», comme on dit dans le Canton de Vaud dans les examens ou dans les votes à l'appel nominal [rires], soit vous dites à la personne, «et bien ça ne va pas, ce n'est pas suffisant» et en l'occurrence la municipalité de Lausanne a l'habitude d'envoyer ces gens auprès de Madame la constituante Jeanne-Marie Perrin qui a une longue pratique et qui les forme jusqu'à ce qu'ils soient capables de passer l'examen. [rires] Alors c'est ça, la préservation du droit des autorités politiques. Quant à l'intégration à laquelle fait allusion M. Haldy, on fait le maximum possible à partir des rapports de police, en demandant si la personne est par hasard membre d'un club sportif, ce qui aide à s'assurer que… mais si d'aventure elle ne l'est pas, ce n'est pas forcément de sa faute, donc on ne peut pas en juger pour autant qu'elle ne soit pas intégrée, et puis on doit faire une appréciation d'une subjectivité aussi totale que possible, dont on déduit en général que s'il n'y a pas de raison contre la personne, puisqu'en principe le doute profite à l'accusé, cette personne est donc bien intégrée, pour peu qu'elle ne parle pas un sabir absolument incompréhensible par celui qui l'écoute. Voilà, ça c'est la réalité du pays, maintenant avec tous vos préjugés dans un sens ou dans l'autre, votez, mais sachez pour quoi vous votez.

F Philippe NORDMANN

Beaucoup de choses ont été dites, de sorte que je pourrai être très bref. Je me rallie entièrement à l'appréciation faite par Mme Isabelle Moret, également à ce qui vient d'être dit par M. Brélaz. En revanche, je ne peux pas laisser passer ce qu'a dit Monsieur le nouveau constituant Burnet, Il a dit que le juge ne pouvait pas corriger une décision d'un organe législatif cantonal ou communal, mais c'est une erreur profonde! Nous avons de nombreux cas où le Tribunal fédéral a annulé une loi cantonale votée par le Grand Conseil. Nous avons également de nombreux cas où une initiative populaire — populaire, je dis bien — cantonale a été annulée par le Tribunal fédéral parce qu'elle a été déclarée inconstitutionnelle ou ne respectant pas l'unité de la matière ou que sais-je encore. Donc les autorités législatives ne sont pas au-dessus de toute critique, par principe. Quand on entend dire de la part de M. Haldy que, au fond, il faut garder cette éminente prérogative politique des autorités communales, en réalité, s'agissant d'une décision frappant des individus, qui touche des individus et des familles dans leur coeur, comme l'a très bien rappelé M. Cohen-Dumani tout à l'heure, est-ce que c'est vraiment de la politique qu'on fait là? M. Brélaz a rappelé la pratique, que je ne connais pas, et j'ose espérer que partout, dans tout ce Canton, on sera aussi humain et aussi favorable que M. Brélaz l'a dit, c'est-à-dire qu'on essaie de ne pas défavoriser telle ou telle personne qui aurait de la peine à s'exprimer, qui n'aurait pas assez de notions historiques ou qui ne ferait pas partie d'un club de foot, mais enfin il peut y avoir des communes — surtout des petites communes — où les choses ne se passent pas de la même manière. Alors au fond, il faut véritablement ne pas faire une décision politique de ce qui est en réalité une décision individuelle. Un dernier mot: est-on sûr que, dans l'état actuel des choses, il y aurait un droit de recours pour arbitraire auprès d'un tribunal, en l'occurrence le Tribunal fédéral ou éventuellement — si nous décidons qu'il en sera ainsi — la Cour constitutionnelle vaudoise? Actuellement, je pense que le Tribunal fédéral n'entrerait pas en matière sur un recours, y compris dans la situation d'Emmen, parce que le Tribunal fédéral a dit, à propos d'une question de permis de séjour, que l'on ne peut pas invoquer l'arbitraire si on n'a pas un autre droit, à côté, à invoquer. C'est d'ailleurs — je vous donne rendez-vous dans quelques semaines à ce propos — pourquoi la commission 3 propose que, précisément, on puisse désormais invoquer l'arbitraire sans avoir un autre droit fondamental ou un droit subjectif à invoquer à côté. Il n'y a donc actuellement aucune protection contre l'arbitraire. Alors M. Haldy, quand on dit, faisons-en un droit politique, faisons-en un acte politique de naturaliser ou de ne pas naturaliser, nous disons, non, évitons précisément un risque d'arbitraire. Je vous remercie.

F Yves GOËL

C'est encore un praticien qui vient vous parler, présidant une commission de naturalisation, municipal de police venant présenter des sujets à la naturalisation. Ce n'est pas toujours en fait avec fierté que je pourrais décrire ce qui s'y est passé, ce qui s'y est dit, et ce n'est en tout cas pas un droit politique ou une compétence politique dont je revendique la justesse dans la pratique de tous les jours, car c'était souvent l'arbitraire. Ce qui se passe sur le terrain, c'est souvent le ridicule des politiques, il faut le dire, quand ce n'est pas la honte. Ça, c'est la pratique d'un petit chef-lieu de district dans les années 80. Je vous ferai part d'un gag, qui est assez drôle, mais qui montre les limites du jeu. C'est un jeune candidat étranger à la naturalisation. Au moment des questions, un des bons vieux Suisses — parce que c'est en fait, il faut le dire, un petit peu ça — lui pose la question rituelle: «Quel est le président de la Confédération, mon cher jeune homme?». Le jeune Proche-oriental n'avait pas beaucoup de connaissances, il sort «Furgler». C'est magnifique, c'était un grand politicien suisse, mais malheureusement pour lui, ce n'était pas le président. C'est le seul nom qu'il connaissait parce que c'est effectivement un politicien connu, mais c'était M. Léon Schlumpf qui était président cette année; dans la commission, tout le monde a acquiescé en disant, eh bien, il en sait des choses! [rires] C'est la vérité. Je vous avouerai humblement qu'il y avait un membre de la commission, étudiant en sciences politiques et moi qui nous sommes regardés avec un léger sourire de coin, mais voilà la réalité, une réalité un peu anecdotique, mais c'est ça. Je crois que le pouvoir politique n'a pas à revendiquer ceci. Je finirai, parce que je ne veux pas allonger, tout a été déjà dit, en disant que M. Charotton a vanté ce droit de cité, ce droit de choisir cette commune qui nous est si chère. Je vous dirai que je ne serais pas là si mon ancêtre, il y a 200 ans, qui était résident de Lausanne et avait ayant demandé la bourgeoisie; Lausanne la lui refusa, parce qu'il n'avait pas les moyens à l'époque d'être bourgeois de Lausanne, et c'est Prilly qui la lui a accordée, mais Prilly, il n'y a jamais habité. Il y a 200 ans.

F Yvette JAGGI

Merci, M. Goël. La parole est à M. Recordon. Dans l'intervalle se sont annoncés M. Burnet, M. Ostermann et Mme Jaeger. La liste des orateurs est définitivement close. [brouhaha]

F Luc RECORDON

Le pouvoir d'appréciation communal est un aspect qui prend une place importante dans ce débat. Dans l'amendement que Mme Weill-Lévy et moi-même avons eu l'honneur de vous présenter, cet élément n'est pas absent. Je voudrais attirer votre attention sur le fait que nous avons parfaitement conscience de ce que, pour nombre de gens qui se naturalisent et pour nombre d'entre nous, il ne s'agit pas de gommer la nécessité des racines. Il y a une certaine importance à pouvoir se rattacher à un lieu d'origine, d'origine choisie, qu'elle soit celle de notre famille depuis l'époque, début du deuxième millénaire, où les noms de famille sont connus et où les origines se déterminent, ou que ce soit un lieu de rattachement tardif, celui que l'on a choisi parce qu'on a demandé à en être et parce qu'on y a été accepté. La formulation que nous avons proposée le permet parfaitement. Il y a possibilité d'obtenir la bourgeoisie de la commune de son choix, à supposer qu'elle soit d'accord. Et elle a là, M. Haldy, un grand pouvoir d'appréciation à exercer pour dire oui ou pour dire non. Mais il ne faut pas, en même temps — surtout pas pour les personnes pour qui ce n'est pas là la question centrale et pour qui, selon ce que Mme Wettstein a dit, la question principale est l'acquisition de la nationalité suisse, éventuellement de la nationalité cantonale — que le droit de cité communal soit un obstacle dirimant. Si, dans la majorité des cas, M. Charotton a raison de dire que ça se passe bien, il y a quand même nombre de cas où ça ne se passe pas très bien, d'autres constituants l'ont rappelé avec pertinence. Surtout, il y a cette image des «Schweizermacher» qui nous colle aux basques et qui retient les gens. Il y a tout l'effet de prévention générale qui est malheureusement causé par la réputation de cette difficulté à devenir suisse au niveau de la commune, cette réputation – souvent infondée d'ailleurs — d'esprit tatillon mais qui, dans certains cas précis — et Emmen n'a rien fait pour arranger les choses — tend à dissuader le grand nombre de demander la naturalisation. C'est dommageable pour notre pays et pas seulement pour les intéressés individuellement. C'est pourquoi nous avons introduit, à la charge de la commune qui a le privilège d'être le chef-lieu, l'obligation d'accepter les personnes qui ne souhaitent pas demander la naturalisation dans une commune de choix. Dans ce cas-là, le chef-lieu devra automatiquement accepter, à titre résiduel, d'accorder la bourgeoisie à ces personnes, puisqu'il faut une bourgeoisie communale dans le système suisse. En ce qui concerne le droit de recours, dès lors que nous nous orientons manifestement vers un système avec un droit subjectif à la naturalisation, il ne paraît pas pensable qu'il n'y ait pas d'instance de recours. Cela dit, même si on prévoit que la loi règle la procédure, elle devra régler l'instance de recours, c'est vrai, et elle pourra évidemment décider quel est le pouvoir d'examen qui est conféré à l'autorité de recours. Je voudrais simplement dire qu'il me paraît, à l'inverse de M. Nordmann, que le droit sera accordé de se pourvoir devant le Tribunal fédéral si nous avons défini un droit subjectif. Si le Tribunal fédéral, selon toute probabilité et surtout sous l'angle de la nouvelle Constitution fédérale, a le droit de revoir ces décisions, il serait regrettable — pour les gens qui estiment que le Canton de Vaud doit être autonome — que la voie de recours soit directement le Tribunal fédéral sans qu'il n'y ait préalablement une autorité cantonale. Ce serait une manière de brader le pouvoir cantonal devant le pouvoir fédéral. Enfin, de manière générale, je voudrais attirer votre attention sur ce qu'a été notre pays au fil du temps par rapport à l'immigration et l'émigration. Nous avons été, au siècle passé, un pays pauvre et un pays d'émigration. Souvenez-vous de Johann Sutter, du nombre de Suisses qui partaient à l'étranger, pas seulement en Californie ou dans le Far West, mais aussi dans d'autres pays. Nous avons été, tout le 20 e siècle, extrêmement mal à l'aise avec notre rapport à l'immigration et l'émigration; tous ces votes sont extrêmement pénibles et douloureux; nous les avons tous, je crois, mal vécus, et encore tout dernièrement. Nous sommes dans une situation intermédiaire; nous sommes devenus un pays riche, nous sommes devenus un pays d'immigration. Tâchons d'être sereinement, au 21 e siècle, un pays d'immigration. Sachons non seulement accepter à la retirette que ceux qui viennent habiter chez nous deviennent des citoyens de chez nous, tâchons de faire en sorte que, dans toute la mesure du possible, ils se sentent attirés et accueillis au point de vue de la nationalité déjà. De ce point de vue-là, je ne pourrais d'ailleurs que souscrire au sous-amendement de Mme Wettstein concernant l'amendement que j'ai présenté avec Mme Weill-Lévy.

F Olivier BURNET

Le petit dernier constituant a été pris à partie tout à l'heure, il aimerait donc réagir sur deux points. Tout d'abord pour s'adresser à Me Nordmann et lui dire: « mon cher confrère, je sais ce que c'est qu'un recours de droit public, j'en ai aussi gagné, figurez-vous! » Donc, soit j'ai été mal compris, soit je me suis mal exprimé mais il me semblait que non, soit vous avez volontairement déformé mes propos. Je crois que j'ai été assez clair en disant que je me ralliais à ce que disait M. Haldy et en expliquant que des recours de droit public étaient de toute façon toujours possibles au Tribunal fédéral. Par conséquent, je ne déniais pas cette voie et je sais que cette possibilité existe.. Enfin, je ne veux pas polémiquer là-dessus, j'étais un peu étonné quand même de la remarque que j'ai entendue tout à l'heure. Et puis, deuxième remarque que je voulais faire, j'ai cru aussi comprendre dans vos propos qu'il y avait une certaine défiance — pour justifier votre point de vue — face aux petites communes. Cela a aussi été dit par quelqu'un d’autre tout à l'heure. Je ne sais pas si les petites communes sont décidément moins bonnes que les autres. J'aimerais quand même signaler que Emmen est une grosse commune de plus d’une dizaine de milliers d'habitants!

F Roland OSTERMANN

Je ne vous appellerai pas «Maîtres», mais simplement «Citoyens», pour une fois. M. Brélaz a dit que nous n'avions qu'à comprendre ce que nous votions, puis à voter. Je viens avec humilité devant vous poser une question qui mer permettra de savoir que voter. Mme Moret a dit soutenir la proposition de la commission pour éviter «le délit de sale gueule». Je lis cet alinéa 2 qu'elle appuie: «( ) dès lors que l'autorisation fédérale de naturalisation est accordée sur préavis communal et cantonal». Ma question est la suivante: que devra contenir ce préavis communal et cantonal et qui l'établira, selon la commission qui en fait la proposition? Je me demande si, au travers de ces préavis, on ne fait pas rentrer par la porte ce qu'on a jeté par la fenêtre, c'est-à-dire l'arbitraire et le préjugé.

F Yvette JAGGI

La question posée par M. Ostermann devrait recevoir réponse de la part d'un exégète du premier alinéa de la proposition de la commission. Je laisse l'exégète réfléchir à son intervention en écoutant Mme Jaeger.

F Odile JAEGER

Quelques mots juste… Moi, je voudrais appuyer l'intervention de M. Charotton et le bon sens des communes vaudoises. En fait, M. Brélaz a parlé justement de ce qui se passait au Conseil communal de Lausanne. Je peux aussi très bien connaître le sujet puisque je suis aussi conseillère communale à Lausanne. Je pourrais vous dire qu'à Lausanne, pratiquement, il est absolument très rare que la commission de naturalisation n'accorde pas ce droit, du moment qu'il y a un minimum d'intégration qui soit reconnu par cette commission. Et il est encore plus rare — je ne l'ai jamais vu depuis que je suis au Conseil communal, ça fait quand même plusieurs législatures — que le Conseil communal ne suive pas la commission de naturalisation. Je voudrais aussi vous dire une chose, c'est que la loi cantonale a changé. Elle a été simplifiée. Savez-vous qu'une fois que le Conseil communal a donné son préavis positif, ce préavis positif passe directement au Conseil d'État? La commission de naturalisation au plan cantonal n'existe que pour des cas litigieux, ce qui pourrait être en fait une sorte de recours, justement sur des cas qui n'ont pas pu obtenir l'accord de la commune. Au niveau des coûts, également, la nouvelle loi cantonale est très claire. Elle est pratiquement gratuite, à part les émoluments. Il y a quelques communes, encore, qui demandent certains droits, mais c'est très, très rare. Je crois que la plupart des communes vaudoises maintenant accordent la gratuité à cette naturalisation. Moi, il me semble que finalement, c'est quand même la commune qui doit avoir le dernier mot et qui peut apprécier vraiment l'intégration des nouveaux citoyens. Je vous demande de refuser les différents amendements.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Jaeger. Si je comprends bien, la question posée par M. Ostermann reçoit une réponse de M. Nordmann, enfin un essai de réponse.

F Philippe NORDMANN

Un essai de réponse. À vrai dire, on n'a pas pris beaucoup de temps pour s'interroger sur cette question de préavis, parce qu'on a simplement repris la pratique actuelle du préavis, mais il est vrai que si je prends l'article 14 de la loi fédérale, il dit ceci: «Avant l'octroi de l'autorisation, on « — donc Berne, ou le Canton, ou la commune — «s'assurera de l'aptitude du requérant à la naturalisation. On examinera en particulier si le requérant a) s'est intégré dans la communauté suisse; b) s'est accoutumé au mode de vie et aux usages suisses; c) se conforme à l'ordre juridique suisse; d) ne compromet pas la sûreté intérieure ou extérieure de la Suisse». L'avis est ainsi donné à Berne qui ne connaît pas, évidemment, le candidat. Par définition, Berne ne peut pas — ou ne peut plus, depuis qu'il n'y a plus de fiches — connaître tout le monde. Pour donner cet avis, le Canton et la commune font ce qu'on appelle entre guillemets «un préavis». C'est un préavis, alors maintenant il faut s'entendre sur les termes. Est-ce que c'est un préavis qui dit «nous proposons l'admission de ce candidat» ou bien «nous proposons de ne pas l'admettre, ce candidat» ou bien est-ce que c'est un préavis qui dit simplement «à notre avis, les conditions de l'article 14 sont remplies»? Ça devient une question de mots. Il existe dans les faits quand même un préavis. La question qu'on peut se poser, c'est de savoir si les conditions fédérales, en tant que telles, au fond, ne suffisent pas, et si c'est le cas — ce qui est mon avis personnel –, on peut se rallier à mon avis à l'amendement Weill-Lévy Recordon.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Nordmann. Je propose que nous passions maintenant à une série de votations concernant cet article 3.25. Avant de procéder aux explications de votation, je demande à tout le monde de prendre place dans les rangs, au gré des possibilités sinon de ses affinités politiques, afin que seuls les scrutateurs soient debout ou en dehors des rangs où sont assis les constituantes et constituants. Je vous propose, Mesdames et Messieurs les constituants, la procédure de vote suivante, si je puis requérir votre attention, en quatre parties. Un, nous prenons les amendements qui se rapportent à la proposition de la commission dans l'ordre où ils interviennent dans le projet de la commission, c'est-à-dire que nous commençons dans un bloc À par l'amendement du groupe Radical défendu par M. Burnet, qui se rapporte à l'alinéa 1 de la proposition de la commission, et au préalable, bien sûr, nous examinerons le sous-amendement Libéral défendu par M. Haldy à cet amendement Radical Burnet. Ensuite, bloc B, nous prenons l'amendement de M. Bühler qui revient à introduire un alinéa 2 nouveau dans le projet de la commission qui par ailleurs est repris tel quel. Bloc C, l'amendement du groupe Libéral, défendu par M. Haldy, suppression de l'alinéa 2 du projet de la commission. Une fois que nous aurons la version de la commission, éventuellement amendée par ces trois amendements, nous lui opposerons l'amendement Weill-Lévy Recordon qui est une autre conception de l'article, non sans avoir, bien entendu, épuré ce contre-projet à l'article de la commission, notamment en ayant examiné le sous-amendement Wettstein Martin. Cette procédure vous convient, semble-t-il, nous passons donc… M. Pillonel. Et M. Bühler.

F Cédric PILLONEL

Admettons que je veuille soutenir et l'amendement Weill-Lévy et l'amendement Bühler, comment est-ce que je le ferai selon votre conception du vote? Je vous propose donc de voter l'amendement Bühler en fin de procédure. De cette façon nous saurons quel article nous aurons choisi: soit celui de la commission modifié soit l'amendement Weill-Lévy Recordon. Après ce vote, nous pouvons décider si nous ajoutons un nouvel alinéa soit celui du citoyen Bühler.

F Yvette JAGGI

C'est un peu délicat, dans la mesure où M. Bühler, dans son amendement, a expressément prévu de prendre l'alinéa 1 existant dans le projet de la commission, celui qui commence par «Dans les limites…». M. Bühler décide du sort de sa propre proposition.

F Michel BUHLER

Excusez-moi, Madame la présidente, je vais exactement dans le sens du citoyen Pillonel. Mon amendement peut parfaitement être ajouté à l'article 2 dans l'amendement Weill-Lévy Recordon. Dans les deux possibilités, on peut introduire mon amendement — en 2 — soit dans la version de la commission, soit dans celle de Weill-Lévy, [brouhaha] c'est-à-dire c'est un ajout à l'article de la commission ou de l'amendement.

F Yvette JAGGI

Une relecture attentive de la teneur et des cas prévus par l'amendement Bühler permet effectivement de le joindre soit à la version de la commission, soit à la version de l'amendement Weill-Lévy. C'est dire que cet amendement Bühler sera voté à la fin, quelle que soit la conception de l'article, soit la commission éventuellement amendée, soit la version de l'amendement Weill-Lévy Recordon, d'accord? Juste avant le vote d'ensemble. Pour le départ, nous entreprenons cette série de votations en commençant par l'amendement du groupe Radical défendu par M. Burnet et en examinant tout d'abord le sous-amendement Libéral Haldy. Je rappelle que le sous-amendement Libéral prévoit «La loi règle la procédure et la durée de résidence exigée», la question des émoluments administratifs et de l'instance de recours étant en l'occurrence de côté. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, parmi vous qui soutenez le sous-amendement Libéral le manifestent en levant la main. Avis contraires? Majorité en défaveur de ce sous-amendement. Sous-amendement libéral rejeté.

F Yvette JAGGI

Nous nous prononçons maintenant sur l'amendement du groupe Radical qui prévoit la suppression de l'instance de recours. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent l'amendement Radical — suppression de l'instance de recours — le manifestent en levant la main. On compte. Avis contraires ? Mesdames et Messieurs les constituants, par 82 voix contre 57, vous avez rejeté l'amendement du groupe Radical présenté par M. Burnet. Amendement du Groupe radical rejeté par 82 voix contre 57.

F Yvette JAGGI

Nous passons maintenant à l'amendement du groupe Libéral défendu par M. Haldy, tendant à la suppression de l'alinéa 2 du projet d'article tel que déposé par la commission. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent l'amendement du groupe Libéral — donc biffer l'alinéa 2 de la commission — le manifestent en levant la main. Avis contraires, rejet de l'amendement Libéral? Mesdames et Messieurs les constituants, par 79 voix contre 64, vous avez également rejeté l'amendement du groupe Libéral présenté par M. Haldy. Amendement du Groupe libéral rejeté par 79 voix contre 64.

F Yvette JAGGI

Conformément à ce que nous avons convenu tout à l'heure, nous passons maintenant à l'examen de l'amendement Weill-Lévy Recordon, tout d'abord en examinant le sous-amendement Wettstein Martin tendant à supprimer les termes dans l'alinéa 1 «et ayant résidé trois ans dans le Canton au cours des dix dernières années». Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui parmi vous souhaitent adopter le sous-amendement Wettstein Martin, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 77 voix contre 62, vous avez rejeté le sous-amendement Wettstein Martin. Sous-amendement Wettstein Martin rejeté par 77 voix contre 62.

F Yvette JAGGI

Nous connaissons maintenant la teneur de l'article dans la version de l'amendement Weill-Lévy Recordon et nous pouvons nous prononcer sur cet amendement épuré. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs, qui approuvent l'amendement Weill-Lévy, le manifestent en levant la main. Celles et ceux maintenant qui parmi vous sont opposés à l'amendement Weill-Lévy — c'est-à-dire partisans du texte de la commission — le manifestent en levant la main. Mesdames et Messieurs les constituants, par 74 voix contre 70, vous avez donné votre préférence à la version de la commission en refusant le sous-amendement Weill-Lévy. Sous-amendement Weill-Légy refusé par 74 voix contre 70.

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, il reste maintenant à traiter l'amendement Bühler, amendé par son auteur lui-même, qui a remplacé le lieu de naissance «toute personne étrangère» non pas «née dans le Canton» comme sur la version dans le polycopié, mais «née en Suisse et résidant dans le Canton», c'est juste? Cet amendement est réputé compatible avec la proposition de la commission, donc il constituerait l'alinéa 2 et est maintenant soumis à votre vote. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent l'amendement Bühler, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 75 voix contre 66, vous avez rejeté l'amendement Bühler. Amendement Bühler rejeté par 75 voix contre 66.

F Yvette JAGGI

Je vous fais maintenant voter sur l'ensemble de cet article 3.25 qui se retrouve dans la version de la commission telle quelle. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui parmi vous approuvent l'article 3.25, «Droit de cité», dans la version finalement telle que proposée par la commission, le manifestent en levant la main. Oppositions? Abstentions? Un peu de silence, s'il vous plaît. Mesdames et Messieurs les constituants, par 103 voix contre 28 avec 15 abstentions, vous avez approuvé l'article 3.25, «Droit de cité». Article 3.25 — Droit de cité 1. Dans les limites du droit fédéral, toute personne étrangère résidant dans le Canton a le droit de déposer une demande de naturalisation. La loi règle la procédure, la durée de naturalisation. La loi règle la procédure, la durée de résidence exigée, les émoluments administratifs et prévoit une instance de recours. 2. Dès lors que l’autorisation fédérale de naturalisation est accordée, sur préavis communal et cantonal, les droits de cité cantonal et communal sont acquis.

F Yvette JAGGI

Mesdames, Messieurs, vous avez maintenant, après l'examen de deux articles, droit à une pause. Nous reprenons nos travaux — Mesdames et Messieurs, ne vous éloignez pas trop — à 15:55.

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Article 2.3.26 — Intégration des étrangers (Suite)

F Yvette JAGGI

Nous reprenons nos travaux avec l'examen de l'article 2.3.26, «Intégration des étrangers», article proposé par la commission commenté par le président de la commission 2.

F Gérard BUHLMANN

Volontiers. La commission 2 vous propose un article en deux alinéas, le premier traitant de l'accueil des étrangers que nous venons de faciliter et de leur intégration. La commission 2 a choisi une formulation qu'il faut lire attentivement si on veut la comparer avec celle de l'amendement Boillat, parce qu'elles sont en fait très proches, et je crois qu'il n'y a pas de différence réellement fondamentale entre l'une et l'autre. La commission 2, si on le lit réellement, dit quoi? Nous voulons favoriser leur intégration dans le respect réciproque 1) des identités et 2) des valeurs qui forment l'État de droit. Que dit l'amendement Boillat? Il dit que nous voulons favoriser leur intégration dans le respect des identités et «encouragent au partage des valeurs qui forment l'État de droit». On pourrait voir dans l'amendement Boillat plutôt une assimilation qu'une intégration, mais je dirais, je crois que réellement la différence est faible, à moins que je ne l'aie pas vue et que les gens avec qui j'en ai parlé ne l'aient pas vue, et je pense qu'on pourrait peut-être éviter d'y passer des heures. L'amendement Boillat, par contre, a un avantage clair. L'amendement Boillat précise ce que la commission mélange. Il dit que c'est l'État qui facilite l'accueil des étrangers — et l'État a une mission dans ce sens, si on ne parle que des requérants, on voit que le DIRE vient de sortir une brochure que vous avez certainement tous reçue, il y a bien sûr d'autres étrangers qu'on accueille dans d'autres cadres –, par contre c'est bien le Canton et les communes qui facilitent leur intégration. Donc, dans ce cadre-là, l'amendement Boillat apporte vraisemblablement un léger plus à l'article de la commission. Toujours pour rester au premier alinéa, le sous-amendement Radical équivaut en fait à garder la première partie de l'amendement Boillat — cette précision utile — et par contre à revenir pour le reste au texte de la commission, mais nous sommes encore ici, je crois, réellement dans des petites nuances. Je crois pouvoir dire, au nom des membres de la commission avec qui j'ai discuté, que nous nous rallierions volontiers à l'amendement Boillat et au sous-amendement Radical. J'en viens au deuxième alinéa. Je ne parle pas de l'amendement Bühler qui est de facto tombé puisque son amendement à l'article 3.25 a été rejeté. Nous disons que les procédures cantonales et de naturalisation sont rapides et gratuites. Il n'y a pas, à nos yeux, de controverse avec l'article 3.25 qui parle d'émoluments administratifs. Si vous lisez le commentaire de la commission 2, nous avions toujours admis qu'il pouvait y avoir des émoluments, par contre nous ne voulions plus qu'il y ait des taxes qui soient liées, par exemple, au revenu ou à la fortune du requérant. Je vous propose de voter l'amendement Boillat et le sous-amendement Radical qui sont une légère amélioration de l'article de la commission. Je vous en remercie.

F Jean-Pierre BOILLAT

J'ai enregistré avec satisfaction la proposition du président de la commission d'intégrer mon amendement. J'aimerais tout d'abord apporter une petite nuance. Contrairement à ce que M. Buhlmann disait, dans la deuxième partie de la rédaction, lorsque je parle de «respect réciproque des identités et encouragent au partage des valeurs qui font l'État de droit», loin de moi était l'idée de parler d'assimilation ou d'introduire la notion d'assimilation. Au contraire, lorsque je parle de partage, il s'agit bien de l'intégration comprise en tant que telle, à ne pas mélanger avec l'assimilation. Permettez-moi un petit parallèle. Lorsqu'on parle d'assimilation en matière de diététique, on parle des acides gras non saturés et on s'attend à ce qu'ils soient assimilés par le corps humain, c'est-à-dire qu'ils disparaissent complètement. Ce n'est absolument pas ce que nous recherchons, et ce n'est en tout cas pas ce que je recherche, moi, avec la population étrangère. La disparition des identités des ressortissants étrangers dans le cadre d'une société suisse vaudoise homogène, loin de moi cette idée. Par contre, j'insiste sur cette idée de «encouragent au partage des valeurs» parce que ça nous pousse aussi, nous, à nous remettre en question sur les valeurs que l'on considère comme éternelles, de tout temps, des valeurs vaudoises, des valeurs suisses, etc. Concrètement, ça vaut la peine de les confronter aux valeurs qui sont défendues par des personnes qui sont ressortissantes d'autres pays, d'autres continents, d'autres cultures, sans nécessairement — et là je mets bien en garde — devoir accepter toutes les valeurs représentées par ces personnes. Moi, je préférerais une société dans laquelle on soit capable de confronter nos valeurs européennes, suisses et vaudoises, à des valeurs, par exemple, de certaines ethnies africaines qui consistent à accepter l'infibulation des petites filles. Je ne suis pas d'accord de tolérer le respect de ces valeurs-là. Je suis pour confronter ces valeurs à nos valeurs à nous et à inciter les personnes qui viennent ici à remettre éventuellement en question des valeurs auxquelles elles sont attachées. Ça, c'était pour la formulation de l'article telle que proposée. Ensuite, la deuxième partie de mon amendement consiste à demander la séparation en deux articles, un article qui concerne l'intégration proprement dite et un article qui concerne la facilitation de la naturalisation. Je crois que ce sont deux choses fondamentalement différentes, même si cela concerne les mêmes populations. Comme je l'ai dit tout à l'heure, dans l'intégration, il y a un mouvement réciproque des résidents ici, et quand je dis «des résidents ici», je ne parle pas seulement des Suisses, mais je parle aussi des «établis depuis longtemps» à qui il faut demander d'ouvrir concrètement leur esprit à l'accueil des nouvelles communautés. Mais la procédure de naturalisation, on en a longuement discuté tout à l'heure, c'est d'abord une décision individuelle. Et c'est une décision individuelle, laquelle, lorsqu'elle est exprimée, n’est plus propriété de la personne qui l'a exprimée. Ce sont des instances qui vont décider — arbitrairement ou pas arbitrairement, on peut en discuter — si telle ou telle personne a droit à la naturalisation ou pas. Dans ce sens-là, ça me paraît fondamentalement erroné de mettre dans le même article, intitulé «Intégration des étrangers», des modalités d'intégration et l'accès à la naturalisation. J'ai entendu tout à l'heure dans le débat au moins deux personnes — mais je ne me rappelle plus qui c'était — qui disaient que, dans les commissions de naturalisation, pour décider si la personne a droit à la naturalisation, on regarde quelle est son intégration. Moi, je crois qu'il faut renverser le problème: aujourd’hui la personne étrangère qui demande sa naturalisation doit attendre et manifester pendant dix ans ou quinze ans ses facultés d'intégration. On tombe alors dans le domaine de l'assimilation et on dénature complètement tout le problème de l'intégration qui doit être un mouvement réciproque. C'est pour ça que je propose la séparation en deux articles. Une petite illustration: permettez-moi de vous faire un petit compte-rendu de ce que j'ai vécu cette semaine dans la ville de Vevey où j'habite, où je travaille à un projet d'intégration qui devrait être déposé auprès de la municipalité d'ici le printemps prochain. Vevey est une ville qui est une adepte du développement durable et qui participe au programme de l'Agenda 21. Il y a une édition de cette brochure qui s'appelle Info 01, qui est distribuée à tous les habitants du district, dans une édition tous ménages du journal la Presse, et à laquelle on m'avait demandé de faire une contribution concernant l'intégration. Effectivement, j'ai écrit un article sur l'intégration et cet article a été considérablement dénaturé par les auteurs de la revue en question. Alors que j'avais bien mis en garde et qu'on a eu beaucoup de discussions sur cette différence que je fais entre l'intégration et la naturalisation, eh bien un paragraphe à mon article a été rajouté, qui met en relief, en fait, tout l'effort qu'a fait la ville de Vevey pour accueillir des milliers et des milliers d'étrangers, pour le mettre en parallèle avec la demande de naturalisation de ces mêmes étrangers. Et on constate que de 1990 à 1999, le taux de demandes de naturalisation a augmenté de 540% et quelque. Mais après avoir augmenté de 540% et quelque. La demande de naturalisation n’est faite que par 0,9% de la population étrangère. Dans ce sens-là, ça me paraît une démonstration claire que, en tout cas de la part des communautés étrangères, la demande de naturalisation n'est pas un processus essentiel dans le domaine de l'intégration, ni même son aboutissement nécessaire. Par contre, l'autre demande essentielle apparaît très clairement lorsqu'on parle avec les communautés et qu'on leur dit: «Mais est-ce que vous vous considérez comme intégrés dans la société?» ou «qu'est-ce qu'il faudrait faire pour mieux vous intégrer dans la société?». Les réponses sont unanimes, de la part en tout cas des communautés qui sont installées depuis longtemps ici, c'est de dire «mais nous, on est parfaitement intégrés, on se considère comme parfaitement intégrés, on participe aux mêmes activités que les Suisses, il nous manque une chose: les droits politiques».

F Christelle LUISIER

Je serai brève puisque notre sous-amendement ne vise que quelques termes de l'amendement Boillat au premier alinéa. J'aimerais vous rendre attentifs au fait que la version que vous avez sur papier n'est pas la même que celle qui est projetée à l'écran, puisqu'il y a une petite erreur qui s'est glissée dans le papier que vous avez reçu hier. Notre sous-amendement ne vise que les termes «et encouragent au partage» et non pas les termes «Le Canton et les communes», que nous acceptons tout à fait dans l'amendement Boillat. Ceci étant précisé, le groupe Radical a été séduit par l'amendement Boillat pour deux raisons: premièrement parce qu'il a le mérite de distinguer «intégration» et «naturalisation». M. Boillat l'a expliqué, ce sont deux choses tout à fait différentes et nous acceptons tout à fait le fait de séparer ces deux articles. Deuxièmement, cet amendement précise les tâches des communes quant à l'intégration des étrangers, il ne s'agit pas seulement d'une tâche du Canton mais bien d'une tâche partagée entre Canton et communes. En revanche, les Radicaux préfèrent la version de la commission quant aux termes «intégration dans le respect réciproque des identités et des valeurs qui fondent l'État de droit». Pourquoi? Tout d'abord parce que cette formulation est plus claire, ou plus concise, mais là n'est pas l'argument principal. La formulation qui est prévue par M. Boillat se prête à plusieurs interprétations. M. Boillat en a donné son interprétation, mais dans le groupe Radical, nous craignons fortement que ces termes engendrent en fait une volonté d'assimilation, et c'est ce que disait d'ailleurs tout à l'heure le président de la commission 2. Au sein du groupe Radical, et je pense aussi au sein de cette Assemblée, nous sommes pour l'intégration et non pas pour l'assimilation. C'est pourquoi je vous invite à suivre notre sous-amendement et non pas à suivre l'amendement Boillat qui peut prêter à confusion sur ce point-là.

F Yvette JAGGI

Merci à Mme Luisier. Nous avons encore l'amendement de M. Bühler, qui tombe et à propos duquel vous ne voulez pas vous exprimer. La parole est à Mme Chapuis.

F Allegra CHAPUIS

J'aimerais attirer votre attention sur l'amendement Boillat. Contrairement à ce qu'a dit M. Boillat tout à l'heure, le partage des valeurs qui fonde l'État de droit, c'est notre État de droit. On ne va pas, nous, partager des valeurs de l'État de droit — en tout cas dans la Constitution — du Pakistan ou du Zaïre. Je crois que là, c'est extrêmement dangereux, cette formulation, et que le «respect réciproque des identités et des valeurs qui fondent l'État de droit» est amplement suffisant. En effet, le «partage des valeurs qui fondent l'État de droit», c'est quand même, d'une part irréalisable, parce qu'on demande à des gens de partager des valeurs qu'ils peuvent très bien ne pas appliquer à la maison, mais tout ce qu'on leur demande, c'est de les respecter, et non pas de les partager. Je vous demande donc de faire bien attention à cet amendement et au danger qu'il peut représenter.

F Cédric PILLONEL

J'interviens ici sur la demande de la commission consultative des jeunes, sur un point qui me tient à coeur également, ce qui me permet de plaider avec d'autant plus de conviction. Mon intervention se propose de soutenir la proposition de M. Boillat. Quels sont les arguments? En fait, c'est que cette proposition — outre la séparation entre «naturalisation» et «intégration» qui me semble acquise par la plupart — propose de considérer le partage plutôt que le respect. Aux yeux de la commission consultative et à mes yeux, le partage est une valeur bien plus forte. En effet, le respect mutuel peut simplement se pratiquer sans qu'il n'y ait aucune interaction entre les uns et les autres. On peut respecter son voisin, lui nous respecte, on peut très bien ne pas se connaître, mais on se respecte. Le partage est plus fort. Le partage implique un dialogue, le partage implique que l'on se connaisse, que l'on cherche à se connaître et à se comprendre. Au nom de la commission consultative des jeunes et en mon nom propre, je vous demande d'accepter sans conditions l'amendement Boillat. Je vous remercie.

F Gérard BUHLMANN

Une fois n'est pas coutume, j'aimerais revenir après les différentes interventions pour peut-être préciser la position de la commission 2, telle en tout cas que j'ai pu l'échanger avec mes différents collègues, et revenir sur l'amendement Boillat brièvement. Oui à deux articles, effectivement, dans le cadre de la commission nous avions admis que la naturalisation était un des moyens d'intégration des étrangers, mais c'est vrai que je pense que la naturalisation mérite un article pour lui-même, donc oui à deux articles séparés. Non — et je crois que la dernière intervenante l'a très bien dit — au partage des valeurs qui fondent l'État de droit. Oui au respect réciproque — nous entendons respecter ceux qui séjournent chez nous, nous entendons aussi qu'ils nous respectent — et le fait de se respecter n'empêche absolument pas le partage, j'en suis convaincu, ça en fait même partie. On peut très bien se respecter sans partage, mais l'un n'exclut en tout cas pas l'autre. Pour me résumer, pour être tout à fait clair, je vous encourage prioritairement à voter l'amendement Boillat et le sous-amendement Radical, les deux pour moi étant liés, ou alors, si vous ne le voulez pas, à garder le texte de la commission tel qu'il vous est proposé. Je vous en remercie.

F Denis BOUVIER

Je viens soutenir ici l'amendement de M. Boillat, c'est évident. Pour une raison aussi de compréhension du texte, il me semble que le « partage » dit bien les choses, alors que l'expression «le respect réciproque des valeurs qui fondent l'État de droit» n'a aucun sens. On favorise le respect réciproque, ça veut dire qu'on les coince quelque part, ces gens, que l’on force leur intégration, en leur disant « vous allez respecter maintenant les valeurs qui fondent l'État de droit! ». On peut les encourager à ce respect, mais on ne peut pas poser l'article comme ceci: «dans le respect réciproque des valeurs qui fondent l'État de droit», ce qui n'a aucun sens. Il faut les amener à respecter cet État de droit. Le mot «réciproque» ne convient donc absolument pas pour la deuxième partie de la phrase. De ce point de vue, l'amendement de M. Boillat lève le doute dans le bon sens.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Bouvier. D'autres interventions? Cela ne semble pas le cas. Nous pouvons donc passer au vote. Tout d'abord, nous prenons le sous-amendement du groupe Radical à l'amendement Boillat, puis nous opposerons cet amendement à l'article tel que proposé par la commission. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent le sous-amendement du groupe Radical, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Evidente majorité. Sous-amendement du groupe radical accepté à une évidente majorité.

F Yvette JAGGI

Nous opposons maintenant l'amendement Boillat, sous-amendé Radical, à la commission. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui préfèrent la version de l'amendement Boillat sous-amendé, le manifestent en levant la main. On compte. Avis contraires, version commission? Mesdames et Messieurs les constituants, par 106 voix contre 11, vous avez préféré la version Boillat, amendée bien sûr. Amendement Boillat sous-amendé préféré la version de la commission par 106 voix contre 11.

F Yvette JAGGI

Nous procédons maintenant au vote sur l'ensemble de l'article 2.3.26, «Intégration des étrangers», votation sur l'ensemble du texte qui apparaît. Le texte est tel que [deux mots inaudibles] l'article 2.3.26. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent cet article 2.3.26 dans la teneur en ce moment affichée, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Abstentions? Mesdames et Messieurs les constituants, par 130 voix contre 0 avec 3 abstentions, vous avez adopté l'article 2.3.26, «Intégration des étrangers».

Article 2.3.26 — Intégration des étrangers
(130 voix contre 0 avec 3 abstentions)
L’État facilite l’accueil des étrangers.
Le Canton et les communes favorisent leur intégration dans le respect réciproque des identités et des valeurs qui fondent l’État de droit.

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Article 2.3.26 bis — «Naturalisation»

F Yvette JAGGI

Nous passons maintenant au vote sur l'ensemble du 2.3.26 bis, «Naturalisation». Celles et ceux qui approuvent cet article nouveau, 2.3.26 bis, «Naturalisation», le manifestent en levant la main. Avis contraires? Abstentions? Merci. Mesdames et Messieurs les constituants, par 135 voix contre 0 avec 4 abstentions, vous avez adopté l'article 2.3.26 bis, «Naturalisation».

Article 2.3.26 bis Les procédures cantonale et communale de naturalisation sont rapides et gratuites.

F Yvette JAGGI

Cela fait, avant de passer à l'article suivant, une communication. Les constituantes et constituants membres de l'Appel se réuniront dans cette salle à l'issue de la séance tout à l'heure.

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Article 2.3.27 — Aide humanitaire et au développement

F Yvette JAGGI

Article 2.3. 27, «Aide humanitaire et au développement». Pour l'article tel que proposé par la commission, son président, M. Buhlmann, a la parole.

F Gérard BUHLMANN

Volontiers. Un article, là également, en deux alinéas. Le premier, pratique, qui dit que Canton et communes collaborent avec les pouvoirs publics, les organisations – qu'elles soient internationales ou non gouvernementales — à l'aide humanitaire et à la coopération au développement. Le Canton de Vaud peut vraisemblablement faire pas mal de choses dans ce domaine. Je crois qu'il le fait, d'ailleurs. Un deuxième alinéa qui, lui, est plus symbolique, vraisemblablement. Nous nous engageons pour le respect des droits de la personne humaine et pour une politique de paix. Ça peut être par des résolutions, ça peut être de différentes manières. Cet article n'est pas combattu en soi. On a une proposition d'amendement qui tend à en modifier quelque peu la portée, et dans cet amendement il y a deux choses: tout d'abord on introduit la notion d'entreprises concernées, ce qui en soi, je dirais, ne modifie pas le fond de l'article et on y introduit alors, logiquement, la promotion du commerce équitable puisque c'est les entreprises qui sont visées. C'est généreux, c'est bien en soi, la question qu'on peut se poser: est-ce que le Canton a là une large marge de manœuvre? Un Canton qui s'immisce dans le commerce pour soutenir certaines organisations qui sont bien connues, Max Havelaar pour n'en citer qu'une, l'idée n'en est pas venue à la commission, pour être tout à fait franc. Je suis d'avis que l'article 1, rédigé par la commission, permet très bien dans ces collaborations, précisément si le Canton en avait l'envie, de s'engager dans la promotion d'un commerce équitable. Je vous propose donc d'en rester à l'article de la commission, qui de manière très large formule l'action que peut avoir le gouvernement dans ce cadre. Je vous en remercie.

F Yvette JAGGI

Merci, M. Buhlmann. Pour la défense de l'amendement du groupe des Verts s'exprime, en l'absence de M. Zwahlen, M. Brélaz.

F Daniel BRELAZ

Il s'agit, dans l'optique de l'amendement du groupe des Verts, non pas de contredire ce que M. Buhlmann vient d'énoncer, mais d'éclairer avec des projecteurs un tout petit peu plus puissants deux axes qui nous paraissent mériter d'être pris en considération. Nous savons, bien sûr, quels sont les pouvoirs réels de la Confédération d'une part, et des cantons d'autre part, mais bien sûr également nous savons que pas mal d'entreprises vaudoises jouent un rôle assez moteur dans ce domaine. En ce sens, il nous paraît donc — première partie de l'amendement — qu'il est tout à fait légitime d'associer — pour essayer d'encore mieux satisfaire aux buts de l'article proposé par la commission — lesdites entreprises. D'autre part, il s'agit également ici — et de la même manière que la commission — d'essayer d'avoir réellement une aide humanitaire et au développement. Alors ça va mieux en disant les choses, même si on peut souhaiter qu'elles se fassent par chance, même quand elles ne sont pas dites. Vous dites, vous, que l'on s'engage pour le respect — donc la commission — des droits de la personne humaine et pour une politique de paix. Je peux vous répondre que, bien sûr que si on ne gardait que les deux premiers alinéas, ça n'empêcherait pas le Canton de le faire. Et bien nous, en ce qui nous concerne, nous sommes d'accord de maintenir, bien sûr, la proposition de la commission sur ce point, mais nous pensons — et c'est logique si on y associe les entreprises — qu'il doit également y avoir la notion de la promotion d'un commerce équitable. Commerce équitable — puisqu'il s'agit d'aide humanitaire et au développement et que le commerce équitable est, dans la meilleure des versions libérales, apprendre aux gens à pêcher plutôt que leur donner des poissons ou, à la limite, ne pas leur en donner du tout, sinon éventuellement ceux qui ont été nourris par les fameuses farines animales –, et bien, de réussir à créer, grâce à ce commerce équitable, effectivement l'aide humanitaire et au développement. Il n'y a donc aucune divergence de fond. Il nous paraît que si on a des notions qui sont malgré tout, tout en étant parfaitement méritoires, méritantes et soutenues par nous, comme le respect des droits de la personne humaine et la politique de paix… il y a au moins autant de raisons d'avoir la promotion d'un commerce équitable. Je vous encourage donc à voter l'amendement de M. Zwahlen que j'ai eu l'honneur de défendre ici.

F Bernard MARTIN

Des notions comme «responsabilité», «solidarité», «développement durable» sont souvent moquées, suivant la couleur politique arborée. «Commerce équitable» me semble être, comme les autres, une notion fondamentale, non forcément justifiable, mais constituante de tout accord ou contrat passé entre partenaires économiques ou sociaux, valable aussi bien à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. Le conflit latent que nous vivons entre une conception qui voudrait développer les tâches de l'État, les buts sociaux et puis une autre plutôt les droits, pourrait peut-être se résoudre si on entrait dans la notion de pacte ou d'alliance. Il me semble que le commerce équitable fait partie de la notion de pacte, donc d'un échange entre partenaires qui fait que chacun est gagnant. Certainement, c'est une notion encore un peu idéaliste, mais qui est la seule possible si on veut la survie de l'humanité.

F Yvette JAGGI

Merci, M. Martin. Apparemment pas d'autre intervention. Nous pouvons donc passer au vote. Je soumets d'abord à la votation l'amendement du groupe des Verts. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent cet amendement le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 71 voix contre 53, vous avez accepté l'amendement du groupe des Verts. Amendement du groupe des Verts accepté par 71 voix contre 53.

F Yvette JAGGI

Je fais voter maintenant sur l'ensemble de l'article, tel qu'il vient d'être amendé. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent l'article 2.3.27, «Aide humanitaire et au développement» dans la version amendée, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Abstentions? Mesdames et Messieurs les constituants, nous saluons l'arrivée de M. Zwahlen en lui annonçant en primeur le résultat du vote sur l'ensemble de l'article 2.3.27: par 108 OUI contre 24 NON avec 15 abstentions, vous avez approuvé cet article, dûment amendé. [brouhaha]

Article 2.3.27 — Aide humanitaire et au développement
(108 OUI contre 24 NON avec 15 abstentions)
1. Le Canton et les communes collaborent avec les autres pouvoirs publics, les organisations et les entreprises concernées, à l’aide humanitaire, à la coopération au développement et à la promotion d’un commerce équitable.
2. Ils s’engagent pour le respect des droits de la personne humaine et pour une politique de paix.

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Article 2.3.28 — Conseil de l’avenir

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, nous passons à l'examen de l'article 2.3.28, «Conseil de l'avenir», commentaires du président, M. Buhlmann.

F Gérard BUHLMANN

Après la maternité et le droit de cité, ce sera certainement le troisième sujet qui va nous occuper quelques minutes. «Conseil de l'avenir» a été à une très large majorité adopté par la commission 2 puisqu'il ne se trouvait que quatre personnes pour soutenir M. Conod. Machin inutile et coûteux ou organe nouveau stratégique ou indispensable? Quatrième pouvoir dangereux ou commission spécialisée à disposition des autorités existantes? Affaiblissement ou renforcement du Conseil d'État, voire du Grand Conseil? Organe alibi ou chambre de réflexion? L'investissement est-il justifié? Doit-il travailler pour les autorités ou selon sa planification propre? Ses rapports doivent-ils être publics ou à diffusion limitée? Quelle composition? Quelle importance? Autant de questions qui n'ont pas échappé à la commission 2 et qui vont nous occuper maintenant. J'aimerais aussi dire que, paradoxalement, les réflexions vont toucher deux autres organes que nous aurons à traiter dans le cadre de nos débats, c'est la Cour des comptes et le Conseil constitutionnel. La commission 2 a jugé utile, voire indispensable, l'institution d'un Conseil de l'avenir. Pourquoi? Ça n'est pas une motion de méfiance vis-à-vis du Conseil d'État mais, la situation actuelle le montre, il est difficile d'être tout à la fois aux affaires — absorbé par le «day-to-day business» comme on dit si bien chez nous — et en même temps avoir le temps de la réflexion stratégique. C'est d'ailleurs – dans le silence que je vous remercie de m'accorder — un peu la différence entre le Grand Conseil et la Constituante. Nous travaillons à notre rythme, tranquillement, gentiment, loin de toute préoccupation, alors que le Grand Conseil doit pédaler pour sortir des objets tel le budget, les comptes ou d'autres éléments. Peut-être le Conseil d'État a-t-il besoin d'un Conseil de l'avenir qui n'aura pas la contrainte et la pression du temps. Dans l'optique de la commission 2, le Conseil de l'avenir n'était très clairement pas un quatrième pouvoir, comme nous le propose notre collègue Gonthier et sur lequel je reviendrai. Nous ne voulons pas d'un quatrième pouvoir. Nous voulons, par contre, avoir un organe qui puisse analyser une évolution toujours plus rapide, permettre au Canton de relever des défis. S'il les relève bien, alors vraisemblablement l'investissement fait sera très largement rentabilisé et justifié. Ce n'est pas non plus à nos yeux un machin inutile. Pourquoi? Parce que nous voulons que ses rapports soient publics. Nous ne voulons pas d'un Conseil qui travaille pour lui, en autoclave. Nous voulons un Conseil qui communique ses prises de position. Et là, de deux choses l'une: ou ces prises de position seront pertinentes — il sera alors écouté et suivi — ou elles ne le seront pas — et très rapidement, il verra son budget coupé. Ce n'est donc pas pour nous un machin inutile. Ce n'est certainement pas quelque chose de dangereux non plus. J'en viens maintenant aux différents amendements déposés. Tout d'abord l'amendement Conod, je crois que j'ai largement expliqué pourquoi une majorité de la commission souhaitait l'instauration d'un Conseil de l'avenir et je n'y reviens pas. L'amendement Martin vise en fait à préciser en tête que l'État assume une mission de prospective. La question s'est une fois de plus posée: faut-il inscrire dans la Constitution un Conseil de l'avenir ou doit-il être simplement basé sur une disposition légale? L'idée n'est pas qu'il soit à disposition du Conseil d'État, mais qu'il ait son rôle et qu'il soit donc dans la Constitution. Nous voulons là clairement affirmer — c'est en tout cas M. Martin qui le dit — une mission prospective. Après, on précise que la loi instituant le Conseil de l'avenir — je crois que M. Martin — si je suis bien informé parce que ça a évolué dans le cours de la journée — reprend l'amendement Morel à son compte, disant que la loi règle sa composition et le mode de désignation de ses membres. C'est peut-être meilleur que la commission. Vous avez vu que Genève vient de revenir d'une version lourde de cinquante, soixante personnes, à une version plus réduite. Le fait que les membres représentent l'ensemble de la société civile avait peut-être le risque d'en arriver à un Conseil mammouth. Je pense que l'amendement Morel repris par notre collègue Martin corrige ceci. Les rapports sont publics et maintenus. L'amendement de notre collègue Nordmann propose de supprimer les deux derniers alinéas, notamment les rapports publics. Ce serait très, très dommage, personnellement. Le Conseil de l'avenir peut-il être commun à plusieurs cantons? Je dirais, idéalement, pourquoi pas? Est-ce que c'est pratiquement réalisable? Ça paraît plus difficile. Concernant l'amendement Gonthier, on peut imaginer que, comme tout organe, il étudie sérieusement — chacun qui travaille essaie de le faire sérieusement — et qu'il communique efficacement. Il faut bien sûr qu'il en aie les moyens, mais on ose espérer qu'un Conseil de sages saura étudier sérieusement et communiquer efficacement sans qu'il soit nécessaire de le mettre dans la Constitution. Je crois que nous perdons de plus en plus de vue que nous écrivons une Constitution, nous ne sommes pas en train d'élaborer des projets de loi. Je vous propose donc ici de rejeter fermement le premier amendement Gonthier. Je vous propose de faire de même, encore plus fermement, avec le deuxième. Parce que dans son deuxième amendement, une chose est claire, M. Gonthier travestit absolument la vision de la commission 2. M. Gonthier fait du Conseil de l'avenir un quatrième pouvoir, et ça, la commission 2 n'en veut absolument pas. Alors autant je dirais, supprimer tout l'article 2.3.28 que de garder l'amendement Gonthier, parce qu'alors il n'y a plus aucun reflet des travaux de la [Constituante] dans cet amendement. Je crois avoir traité l'essentiel. Je me réserve de revenir après les très nombreux intervenants qui se sont déjà annoncés.

F Yvette JAGGI

Merci, M. Buhlmann. À titre de quasiment co-rapporteur, Monsieur le président de la commission 5, M. Ostermann, donne ici le point de vue de sa commission.

F Roland OSTERMANN

Effectivement, j'interviens comme président de la commission 5 pour vous communiquer le résultat de nos travaux sur cette question. La commission 5 s'est longuement penchée sur la proposition d'instaurer un Conseil de l'avenir. Elle a entendu à ce sujet notre collègue Martin et, séduite en un premier temps, elle a rédigé et accepté un projet institutionnalisant un tel Conseil. Sa mission a été définie, son mode de désignation précisé. Bref, nous avons été conquis par les arguments que vous venez d'entendre de la part du président de la commission 2 et qui décrivent tout ce qu'une telle institution est censée apporter. Puis, avec le temps, la magie du verbe de notre collègue s'est éteinte, les traces résiduelles de son éloquence se sont estompées et les critiques ont pris le dessus. L'utilité de ce Conseil a été mise en doute, sa fonction même contestée. On a craint que cette institution n'accrédite l'idée que les organes actuels ne se préoccupent pas de l'avenir et qu'ainsi leur présence dans leur Constitution n'en soit affaiblie. Se projetant dans le futur, on a dénoncé le fait que ce Conseil serait ou bien inefficace ou bien phagocyté par la société ou un autre organisme, du fait même de son mode de désignation. Organe alibi, il devrait plutôt faire place à une commission du Grand Conseil. Ces arguments ont été persuasifs puisque la majorité s'est déplacée dans l'autre camp. C'est ainsi par 18 voix contre 3 qu’ont été battus en seconde lecture ceux qui croyaient encore à l'utilité d'un organe chargé de se livrer à l'analyse prospective qui, selon eux, ne peut être menée, faute de temps, par les organes en place. Leur affirmation qu'actuellement seule la Constituante, éphémère, réfléchit à l'avenir, n'a pas réussi à convaincre leurs autres collègues qu'il faudrait lui donner cette forme de prolongement. C'est donc à une écrasante majorité que la commission 5 vous propose de ne pas créer ce Conseil de l'avenir. J'ai ainsi dit tout ce que je devais dire, je vais maintenant vous dire ce que je pense. [rires] Et bien, je ne pense pas un mot de ce que j'ai dû dire. [rires, applaudissements]

F Yvette JAGGI

Voyez, Mesdames et Messieurs, les servitudes de la condition de président! Cela dit, je donne la parole successivement aux défenseurs des différentes propositions de changement. Tout d'abord, proposition de minorité défendue par M. Conod, tendant à la suppression de l'article.

F Philippe CONOD

Au nom des minoritaires et au nom du groupe Libéral, je vous propose la suppression de cette institution. L'idée est intéressante mais toutes les bonnes idées ne doivent pas nécessairement faire l'objet d'un chapitre dans notre Constitution. D'un concept peut-être novateur, on va faire une institution figée, avec les mêmes défauts que l'on reproche aujourd'hui à nos institutions. Conseil de spécialistes – donc de techniciens ou de technocrates — ou Conseil des anciens, de sages à l'africaine, cette institution devrait pallier en quelque sorte à l'absence de vision à long terme, tant du gouvernement que du Grand Conseil. J'y vois là une profonde méfiance, non seulement vis-à-vis des autorités instituées — gouvernement et parlement –, mais encore et surtout du peuple. Ce n'est pas en ajoutant une institution supplémentaire que le Canton fonctionnera nécessairement mieux. La commission 5 — et on l'a entendue brillamment tout à l'heure — a choisi la solution de réformer, même de révolutionner l'organe exécutif, plutôt que d'attendre d'une structure supplémentaire la solution à tout problème. Que dire du fonctionnement et de l'autorité de ce Conseil? L'avis du Conseil va-t-il s'imposer au pouvoir législatif, au gouvernement? Quelle crédibilité lui accorder si le peuple ne veut pas de son avis? Ce Conseil peut se tromper, il va certainement se tromper, mais alors il ne sera pas responsable de ses erreurs. Cette institution que l'on vous propose s'éloigne du respect du principe de la responsabilité démocratique. Le peuple est souverain. Il manifeste sa volonté par les députés qu'il élit et son humeur par le droit d'initiative ou de référendum. Finalement, la proposition qui convient au plus grand nombre est retenue, même si c'est à la majorité d'une voix. Tant le peuple, le législatif, que le gouvernement participent ainsi à la vie démocratique. Vouloir y ajouter un Conseil prospectif revient en quelque sorte à introduire le philosophe de la monarchie absolue, et cela au centre du débat. C'est oublier que nous ne sommes plus sous le gouvernement d'un despote éclairé des lumières du sage. C'est croire que seul ce Conseil serait à même d'orienter le Canton sur son avenir, c'est en réalité lui conférer une sorte de quatrième pouvoir. Vous prenez le Club de Rome, vous prenez le MIT, ce sont des institutions qui font plus ou moins autorité. Parfois elles se trompent, parfois elles ont raison, mais ce ne sont pas des pouvoirs constitués ou institués. C'est encore et surtout faire fi de la société civile qui sait parfaitement — notamment par la voix de ses associations — anticiper l'avenir. Ainsi, collège des spécialistes, ce Conseil risque de se transformer en aréopage de technocrates, tous convaincus de détenir la vérité. Collège de sages, ce Conseil n'est pas plus représentatif de la société civile que les multiples individus et organisations qui composent la société civile. Au surplus, qu'entend-on par «éthique sociale»? Cette notion est particulièrement floue et dépendra d'un choix politique. En définitive, si ce Conseil de l'avenir a des pouvoirs réels et reconnus, il fausse le jeu démocratique. La composition de ce Conseil résultera alors d'un choix qui sera purement politique, ce que les auteurs de la proposition voulaient justement éviter. Si ce Conseil n'a aucun pouvoir, alors c'est un alibi et un alibi n'a pas sa place dans notre Constitution. Aussi je vous remercie de bien vouloir ne pas donner suite à la proposition et suivre le rapport de minorité.

F Jean MARTIN

Ceux d'entre nous qui croient qu'il est pertinent et nécessaire aujourd'hui d'inscrire dans la Constitution un tel Conseil n'ont pas — ainsi que cela a été dit notamment par le président de la commission 2 tout à l'heure — la suffisance de penser à un quatrième pouvoir, à une sorte d'autorité paternelle tutélaire vis-à-vis du Conseil d'État, Conseil d'État et Grand Conseil par ailleurs dont nous ne négligeons ni l'engagement au service du pays, du Canton, ni les compétences de ceux qui les constituent. Mais nous croyons aujourd'hui essentiel, dans la conduite des affaires de la Cité, de profiter d'un autre regard et d'institutionnaliser en l'ancrant dans la Constitution une manière d'autre regard. Regard de personnalités crédibles, engagées à divers titres dans la vie publique, mais qui ne sont pas prises dans les processus politiques quotidiens — nécessaires, indispensables bien entendu –, avec leurs contraintes et leurs échéances que nous connaissons et dont on sait qu'ils peuvent avoir des effets pour le moins inhibants, parfois paralysants. À propos d'autre regard, d'une manière quelque peu différente de voir la res publica, la chose publique, permettez-moi de faire référence à nous, à la Constituante. Depuis un an et demi, ceci dit en toute humilité pour ce qui me concerne, il apparaît que nous avons fait de la politique un peu différemment, sur un mode généralement plus consensuel, moins agressif que les parlements en général, avec le propos d'éviter autant que faire se peut de rester trop coincé dans des contingences qui pourraient n'être qu'anecdotiques. L'anecdotique ne convient pas au travail d'une Constituante. Je n'ignore pas ici que, à propos de certaines des choses dites, proposées ou admises par cette Assemblée, on a lu dans les courriers des lecteurs de nos journaux des réactions vertueusement indignées de citoyens qui, eux, savent mieux ce qui est bon pour la collectivité cantonale et qui bien mieux que nous feraient notre travail. Il y a eu de forts commentaires quant au fait que c'est un vrai gaspillage de consacrer autant de deniers publics à nous payer de gros cachets journaliers si c'était pour aligner les sornettes que nous alignons. Heureusement, nous n'avons pas encore été empêchés (» impeached» au sens qu'on donne à ce mot de l'autre côté de l'Atlantique). Avec d'autres, je pense que nous faisons adéquatement notre travail en le faisant un peu différemment. Si je propose ces considérations à ce stade, c'est que le Conseil de l'avenir pourra apporter dans le futur une contribution utile et nécessaire dans le sens d'un autre regard. Il ne s'agit donc pas, en aucune manière, de nier les compétences du Conseil d'État, du Grand Conseil ou de la démocratie. Un mot à propos de démocratie: — là je n'engage que moi et pas le groupe des personnes qui sont en faveur de ce Conseil de l'avenir –, je crois qu'il faut se méfier de la sacralisation du processus démocratique. Les processus démocratiques ont mené à des dérapages, parfois à des dérapages désastreux. Nous souhaitons un organe de réflexion, consultatif, qui n'a pas de pouvoir formel — je reviendrai sur le fait qu'il peut avoir un pouvoir moral, un poids moral. La mise en place d'un organe de cette nature, avec un ancrage constitutionnel qui lui assure une légitimité et une crédibilité vis-à-vis de la collectivité, est nécessaire et peut être un complément complètement utile et dont le fonctionnement s'avérera harmonieux par rapport au cadre standard des institutions issues de Montesquieu et que nous connaissons depuis près de 200 ans. Le but est de former un groupe de personnes représentant différents registres d'activités et d'intérêts, des deux sexes et, dans la mesure du possible, de différents âges. Le premier impératif toutefois est que ces personnes aient une vision large et prospective de la société et un calibre de haut niveau, étant entendu que le calibre ne s'acquiert pas seulement sur les bancs de l'Université, mais dans des expériences quotidiennes de vie. Deux remarques à propos de développements dans le même sens actuellement dans notre pays, et qui bien sûr nous ont encouragés, nous qui pensons que le Canton de Vaud serait bien avisé, ferait même oeuvre de pionnier en inscrivant dans sa Constitution un Conseil de l'avenir. Ceux d'entre vous qui lisent un grand journal du bout du lac, le Temps, auront été intéressés, le 14 novembre, de lire une page entière sur un document de l'Association des intérêts du Jura, basée à Moutier, qui fête son 75 e anniversaire, et qui a fait un effort de réflexion approfondi sur les institutions et propose un quatrième pouvoir, l'anticipatif. Citation de ce texte — je reviens tout à l'heure à la notion de pouvoir: «La gestion de la Cité devient toutefois chaque jour plus complexe. L'avenir n'est plus simplement, s'il l'a jamais été, un prolongement du passé. L'environnement change en permanence et sans transition. Demain ne peut être imaginé comme un prolongement du présent. L'anticipation permet de se préparer au surgissement du problème. Il convient donc de lui donner une existence institutionnelle. Nous suggérons de créer un pouvoir anticipatif». Cela dit, une fois de plus, dans notre idée, il ne s'agit pas de parler d'un quatrième pouvoir, étant posé que le Conseil de l'avenir aurait un rôle consultatif, d'étude, de réflexion et de proposition; ce qui ne veut évidemment pas dire qu'il n'aurait pas un vrai poids dans la vie civique et sociale du Canton. Je fais référence aussi à ce qui a été dit par un préopinant sur le fait que le Conseil économique et social de Genève, instrument qui s'est avéré trop lourd avec soixante personnes, sera transformé dans les années qui viennent (selon une information de la grande presse de la semaine dernière) et qu'on pense à un Conseil avec un but et une mission de stratégie à long terme d'une quinzaine de personnes. C'est exactement ce à quoi ceux d'entre nous qui avons réfléchi à des propositions, que nous avons, que nous considérons comme sérieuses mais qui n'ont pas lieu d'être détaillées à ce stade, c'est exactement le genre de choses auquel nous pensons. J'en viens pour terminer à l'amendement que j'ai l'honneur de vous présenter au nom du groupe Radical. A vrai dire cet amendement n'apporte pas de modification fondamentale du tout à l'esprit de ce qu'a voulu la grande majorité de la commission 2. Nous commençons par une phrase qui est, nous semble-t-il, aussi de nature à calmer les craintes de ceux qui imaginent un quatrième pouvoir dangereux parce que République des sages, etc. Nous proposons de commencer par dire «L'État assume une mission de prospective. La loi institue un Conseil de l'avenir avec pour tâche d'évaluer…» et la suite de l'alinéa 1 tel que proposé par la commission 2. Comme alinéa 2, nous proposons de reprendre expressis verbis ce que notre collègue Nicolas Morel a présenté, et nous maintenons l'alinéa 3 à propos des rapports publics. Je termine en redisant que, si nous ne voulons pas d'un quatrième pouvoir formel, ce n'est pas l'idée les initiants du Conseil de l'avenir entendent que, par la qualité et la crédibilité de ses membres, le Conseil de l'avenir aura une réelle légitimité et un vrai poids informel — y compris au plan moral, y compris au plan éthique — vis-à-vis de la collectivité cantonale. C'est pour cela que l'ancrage constitutionnel de ce Conseil nous paraît indispensable. On ne saurait, à notre sens, devant les enjeux de l'avenir, se contenter d'une sorte de commission spécialisée. Je vous remercie de votre attention.

F Nicolas MOREL

Les Verts ont toujours été préoccupés par le futur et par l'évolution de notre planète et des conditions qui y règnent. Par conséquent, un organe qui nous permette de distinguer comment pourraient évoluer la société nous paraît être une très bonne chose dans la Constitution vaudoise. Nous ne pouvons évidemment que recommander son acceptation. J'aimerais, avant de venir sur quelques-uns des amendements proposés, vous donner quand même quelques justifications de cet organisme. Bien entendu, on peut le justifier par un certain nombre de scénarios possibles. Je ne vais pas vous citer des exemples de scénarios particuliers, mais on pourrait imaginer toute une série de possibilités, par exemple la pénurie énergétique et les mesures à prendre préventivement — parce qu'il y a des mesures préventives à prendre — la raréfaction des ressources en eau potable qui nous guette aussi, les risques d'épidémie liés à notre mode de vie, et là aussi voir comment on peut trouver des remèdes. Finalement, dans tous ces cas, une réflexion prospective est absolument indispensable. On ne peut pas se contenter de résoudre les problèmes au jour le jour. De façon générale, la prévention coûte toujours bien moins cher — que ce soit en termes économiques ou de qualité de vie — que la réparation lorsque le problème n'a pas été prévenu à temps. Sur le plan de l'investissement, finalement, le Conseil de l'avenir représente un investissement extrêmement rentable, car à un coût de fonctionnement très faible, puisque dans la conception que nous avons et que je partage avec M. Martin, aucun de ses membres ne serait salarié par l'État de Vaud à plein temps [brouhaha], il nous assure une sécurité précieuse pour la préservation de l'ensemble des activités du Canton. Je viens maintenant au problème des amendements. J'aimerais soutenir, en mon nom personnel en tout cas, l'amendement proposé par Jean Martin, qui me paraît être un bon compromis. Certes, il est un petit peu plus faible que l'article de la commission, mais il est tout de même un bon compromis, qui permet d'éviter ce risque, que pas mal de personnes parmi vous craignent, que le Conseil de l'avenir ne devienne un quatrième pouvoir. Dans mon esprit, il n'est pas question, comme les autres personnes l'ont déjà souligné, que le Conseil de l'avenir devienne un tel pouvoir. Je précise aussi qu'il s'agirait d'un organisme relativement léger. On a parlé de quinze à trente membres, d'autres personnes parlent de douze membres, de dix membres, peu importe, mais ce n'est pas un organisme pléthorique. Finalement, le poids du Conseil de l'avenir réside bien davantage dans la qualité de ses membres que dans leur nombre. Encore une chose sur le deuxième alinéa: je pense que finalement, avec la formulation proposée par Jean Martin, on peut également garder le deuxième alinéa tel que je l'ai proposé sous forme d'amendement, tel que vous le voyez au tableau, dans l'idée qu'on peut régler les détails de la nomination et de sa composition par une loi. J'aimerais enfin conclure sur le problème du troisième alinéa. Si le deuxième alinéa peut être considéré comme relativement mineur, du moins si l'amendement Jean Martin est accepté, par contre le troisième alinéa, dans mon esprit, est absolument fondamental. C'est un élément qu'il faut absolument conserver. L'idée, c'est qu'il s'agit d'associer la population dans son ensemble à la réflexion sur notre futur. Certaines personnes m'ont dit, oui, il y a un principe de transparence de l'administration cantonale ou de l'État qui a été accepté. Cependant, ce principe de transparence permet des exceptions possibles, notamment des intérêts publics ou privés prépondérants. Pour éviter que cette clause soit utilisée pour que le résultat ou les rapports du Conseil de l'avenir ne soient pas rendus publics, il faut absolument, de façon explicite, prévoir la publicité de ces rapports. Je souligne également qu'il s'agit de prévoir la publicité des rapports et non pas des séances dans leur intégralité. Ce qui nous intéresse, c'est le résultat de la réflexion du Conseil de l'avenir.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Morel. Je tiens à préciser ici que le bureau souhaite que nous terminions l'examen de cet article 2.3.28 ce soir. Nous avons encore quatre orateurs inscrits. Je fais appel ici à la fois à votre attention et, de la part des orateurs, à une certaine concision afin que, dans le temps que nous nous sommes fixé, nous puissions parvenir à élaborer ce que nous voulons comme Conseil pour l'avenir. M. Nordmann Philippe défend l'amendement de M. Nordmann Roger.

F Philippe NORDMANN

Je serai très rapide, pour respecter les ordres que nous venons de recevoir. Concernant cet amendement, il y a trois choses. Il y a d'abord la suppression du paragraphe qui dit que les membres représentent l'ensemble de la société civile. Cet amendement est commun avec M. Jean Martin qui propose également la suppression de cela, pour trois raisons: c'est les mots «représentent», «l'ensemble» et «civile» qui ne jouent pas. Alors il n'en reste plus grand-chose. «Représentent» : on ne veut précisément pas d'un Conseil représentatif, les craintes ont été exprimées à cet égard. Ça ne sera pas représentatif nécessairement, parce que sinon il faudrait quelque chose de beaucoup plus grand. «L'ensemble» évoque également cette idée de mammouth qui ne nous convient pas. La société «civile», on ne voit pas très bien ce que c'est — c'est vous, c'est moi, c'est tout le monde. Au fond, ce paragraphe ne rime donc pas à grand-chose. «Rapports publics», pour nous ça allait de soi, maintenant on vient nous expliquer qu'il faut éviter même des exceptions certains rapports pouvant ne pas être publics. C'est vraiment de la théorie, on imagine mal que, respectant le principe de la transparence, les rapports ne soient pas publics, mais enfin, ça ne nous gêne pas qu'on maintienne que les rapports soient publics. L'amendement lui-même — ce qu'il y a de nouveau, c'est que le Conseil de l'avenir peut être commun à plusieurs cantons. Là, il faut justement faire un peu de prospective au moment d'instaurer ce Conseil de l'avenir. On parle beaucoup de fusion Vaud-Genève, on parle de fusion peut-être plus large encore, mais n'allons pas si loin! Avant de fusionner, voyons peut-être si sur certains sujets on peut collaborer avec d'autres cantons voisins et amis — Genève, Fribourg, Neuchâtel, Berne, que sais-je encore? — pour avoir une réflexion commune sur l'avenir. Si nous ne mettons pas cette phrase et qu'un Conseil vaudois est instauré par la Constitution, et bien il faudrait à la limite faire revoter le peuple pour avoir un Conseil commun avec d'autres cantons. Alors voyons les choses déjà maintenant, voyons les choses dans la prospective, si je puis dire, et voyons déjà maintenant ce Conseil commun ou cette possibilité de Conseil commun.

F Yvette JAGGI

Merci à M. Nordmann. La parole est à M. Gonthier pour le développement de ses deux ajouts.

F Alain GONTHIER

Première chose, je voudrais préciser que, concernant mon premier amendement, il conviendrait d'en retirer les phrases argumentatives de détail qui n'ont vraiment rien à faire dans une Constitution, donc «lui permettant», etc. Ça a été remarqué, je crois que c'est une remarque tout à fait intelligente et lucide. J'ai deux amendements à défendre. Avec ce Conseil de l'avenir, qu'est-ce qu'on risque? Justement que certains l'approuvent en se disant «qu'est-ce qu'on risque? Rien». Et comme qui ne risque rien, n'a rien, au final, nous n'aurons rien. [rires] Je développe : le but de la proposition du Conseil de l'avenir est que l'avenir soit pris au sérieux, que les générations futures aient un avocat. Il ne faudrait pas qu'on décide de nommer un avocat et que, du même coup, on décide qu'il est muet. Il ne faudrait pas que ce Conseil soit un alibi, un oreiller de paresse permettant aux autorités politiques normalement constituées de dire, « l'avenir, il y a un Conseil pour ça », et de se replonger d'autant plus intensément dans la gestion quotidienne, à court terme et au jour le jour. Il ne faudrait pas que le Conseil de l'avenir soit un organisme confidentiel, réfléchissant en vase clos, sans moyens assurés pour faire appel à des experts, ni pour publier le fruit de ses réflexions. Si tel était le cas, il n'ajouterait effectivement pas grand-chose, comme l'a dit M. Conod, à l'action associative et citoyenne. C'était d'ailleurs ma première réaction, en commission 3, quand M. Martin nous a présenté sa proposition. Depuis, je me suis convaincu que ce Conseil pouvait avoir une utilité, pour peu qu'un certain nombre de conditions soient remplies, d'où mes deux propositions d'amendement. D'une part, assurer l'autonomie du Conseil de l'avenir. «Il établit lui-même son plan de travail» — c'est la même formulation que celle qui est proposée pour la Cour des comptes, c'est-à-dire qu'il peut se saisir d'un objet et qu'il n'est pas obligé que cet objet lui soit soumis par des citoyens ou par des instances politiques; «dispose d'un budget propre» pour éviter que le Conseil de l'avenir — qui peut avoir à s'opposer à une décision ou à une proposition des autorités — doive aller mendier à ces mêmes autorités le budget pour publier la décision qui critique ces autorités. Deuxième amendement: je propose de lui donner un poids institutionnel, qui ne permette pas aux autorités politiques de le traiter sous la jambe. La possibilité, la simple possibilité de voir le Conseil de l'avenir, en désespoir de cause et en application du principe de précaution, bloquer une décision et la porter devant le souverain, donnerait à ses avis un poids qui ne pourrait être en aucun cas négligé. Ce n'est pas pour autant un quatrième pouvoir, puisqu'en tant que tel, il ne décide rien. La seule chose qu'il ferait avec mon amendement, c'est décider qu'un objet est trop important pour ne pas être présenté au peuple. Je voudrais quand même rappeler aussi que l'intention de Jean Martin n'est pas si éloignée que ça, comme il l'a expliqué, puisqu'il couvre de louanges l'article qu'il a cité lui-même, qui s'intitule «L'anticipatif, un quatrième pouvoir».

F Daniel BOVET

Le Conseil de l'avenir est une de ces idées qui peut naître dans l'exaltation d'une bonne digestion. Il recueillera les suffrages de ceux qui ont quelque prétention à en faire partie, et cela pourrait être, je le crains, une petite majorité de notre Assemblée. Mais l'immense majorité de nos concitoyens, qui sentent qu'ils n'ont aucune chance d'accéder à cet honneur, verra dans cette conception une raison – une raison de plus, hélas! — de rejeter tout notre ouvrage. Certains s'en frottent déjà les mains. [applaudissements]

F Pierre LEHMANN

Je voudrais simplement apporter un soutien à l'idée du Conseil de l'avenir en faisant la remarque suivante. Tous les ennuis que nous avons aujourd'hui — et Dieu sait qu'ils sont grands, nous avons des difficultés dans un nombre considérable de domaines — proviennent en fait d'actions que nous avons menées nous-mêmes. Nous avons créé nous-mêmes les difficultés que nous essayons aujourd'hui de combattre et une des raisons majeures pour laquelle cela est arrivé, c'est que nous avons mis le court terme en priorité à toute autre considération. Nous avions les moyens d'anticiper tout un tas de problèmes. Par exemple, aujourd'hui on peut affirmer que l'immensité du trafic réduit l'interaction sociale à une compétition effrénée pour des mètres carrés de bitume. Quelque part, c'est quelque chose qui devait arriver, c'est quelque chose que nous avions les moyens de prévoir si nous avions pris la peine de nous asseoir et d'y réfléchir quelque peu avant que le trafic ne prenne les dimensions qu'il a pris aujourd'hui. Nous constatons qu'il continue d'augmenter et nous en prenons simplement acte et essayons de remédier à ces situations par des solutions de pis aller qui en général ne font qu'amplifier les problèmes qu'on est censé résoudre. Il y a d'autres cas, le cas par exemple du trafic. On sait depuis Arrhenius, c'est-à-dire avant la fin du 19 e siècle, que l'introduction de CO2 dans l'atmosphère augmente l'effet de serre et augmente l'énergie disponible dans l'atmosphère et amène des catastrophes que nous avons pu constater et qui vont aussi en augmentant. Quelque part, nous avons manqué à notre capacité d'intelligence humaine, simplement parce que nous avons voulu trop vite être riches. Souvenez-vous de la fable de La Fontaine. Dans ce contexte, il me paraît indispensable d'avoir quelqu'un — peu m'importe à la limite la manière dont ce groupe sera constitué — qui ait pour fonction d'essayer d'anticiper les problèmes que crée la politique que nous menons aujourd'hui. Je suis parfaitement d'accord avec ceux qui disent qu'il faut que ce Conseil de l'avenir n'ait aucun pouvoir, mais il faut qu'il puisse être entendu. Il faut que ce qu'il pense, les réflexions qu'il présente, soient mises à la disposition du public, que les autorités en prennent connaissance et, le cas échéant, prennent action sur les réflexions que fait le Conseil de l'avenir. Je crois que ce serait manquer une chance importante que de ne pas prévoir dans la Constitution actuelle un moyen que vous pouvez choisir à votre convenance, je ne prétends pas présenter la meilleure manière de choisir ceux qui constitueront le Conseil de l'avenir. Pour ce qui me concerne, j'aimerais les tirer au sort, tout comme à Athènes à l'époque on tirait les autorités au sort et ça marchait tout aussi bien. Je crois qu'il faut avoir quelque chose, il faut avoir un groupe de réflexion pour éviter de continuer à tituber dans le futur comme nous le faisons aujourd'hui.

F Bernard MARTIN

J'abonde dans le sens de M. Lehmann et du Dr Martin, mais pas dans la solution donnée. C'est toujours un peu la même chose, j'ai l'impression que nous avons des institutions publiques et privées au service de la pensée prospective: Université, groupes de réflexion, instituts d'éthique, clubs divers comme le Club de Rome. Il me semble qu'il faut les utiliser au lieu de créer un Conseil supplémentaire qui démobilisera les autres et qui n'aura pas, comme les autres, une indépendance morale, politique et financière. Il me semble que ce Conseil de l'avenir pourrait faire écran entre tous ceux qui essaient de réfléchir et le gouvernement, et que c'est de nouveau une manière d'ôter au gouvernement sa responsabilité. Je crois que si les politiciens ne réfléchissent pas à l'avenir, et bien qu'on les tire au sort ou pas, l'heure est grave. J'ai proposé un amendement tout à fait réducteur: «L'État assume une mission de prospective. Le gouvernement veille à son exécution». [brouhaha]

F Isabelle MORET

En tant que jeune députée, j'ai été frappée par la différence de fonctionnement entre le Grand Conseil et la Constituante. En effet, alors qu'au Grand Conseil les objets se succèdent à un rythme soutenu, au point qu'il m'arrive parfois de penser que tout le monde ne sait pas vraiment ce sur quoi il vote, à la Constituante nous avons eu la possibilité, pendant une année en commissions thématiques, d'approfondir, à huis clos et calmement, certains thèmes. C'est de ça que nous avons besoin, d'une bulle de calme, d'un «thinktank» comme disent les Américains, d'une usine à idées, d'un lieu de concertation axé sur la prospective à long terme. Certaines usines à idées existent déjà. À gauche, les syndicats, l'ASLOCA, etc.; à droite, la Fédération patronale, la CVI, la CVCI, etc. Mais toutes sont colorées et, vous serez d'accord avec moi, pas franchement objectives. [rires] Il n'existe pas une usine à idées plus neutre, inter-idées si je puis dire, à disposition non seulement du Conseil d'État, mais également du Grand Conseil. Ce Conseil, à mon avis, ne doit avoir aucun pouvoir si ce n'est le pouvoir suprême d'avoir le temps de réfléchir. M. Gonthier nous dit, si le Conseil n'a aucun pouvoir, il ne sert à rien, c'est un alibi. Faux! Faux, car les bonnes idées sont toujours reprises. Je vais vous donner un seul exemple rapide. Comme vous le verrez, la commission 5 de la Constituante s'est penchée sur le pouvoir législatif avec la conclusion suivante: il faut un parlement de milice, mais avec des moyens professionnels et, parmi ces moyens professionnels, la généralisation des commissions spécialisées. Or, en 1998, soit il y a deux ans, au début de la législature, le Grand Conseil avait refusé clairement d'entrer en matière sur la généralisation des commissions spécialisées. Et tout à coup, ce mercredi, une commission du Grand Conseil a, à l'unanimité, accepté un postulat portant sur la généralisation des commissions spécialisées. Il semblerait donc qu'en deux ans, le Grand Conseil évolue. En deux ans. Et bien j'ai l'immodestie de croire que les idées de membres de la commission 5 ont essaimé dans l'esprit de leurs collègues de parti. Cette idée a essaimé parce qu'elle était claire et avait été réfléchie dans une marmite inter-partis avec des gens plus proches: des députés, des anciens députés, des conseillers nationaux qui nous ont fait part de leurs idées et des constituants qui ont pu juger tout ceci avec un oeil beaucoup plus neutre. Cette idée a essaimé car les bonnes idées sont toujours reprises. Nous l'avons dit déjà à plusieurs reprises, notre Constitution sera soumise au peuple et elle peut — elle peut — échouer. Même si cela devait arriver, je peux vous promettre que vous n'auriez pas travaillé pendant trois ans pour rien. Car les bonnes idées qui sont nées ici seront, un jour ou l'autre, reprises par quelqu'un — un député, un journaliste, l'administration, le Conseil d'État, un Conseil municipal, qui sait? Les bonnes idées sont toujours reprises et le Conseil de l'avenir est une bonne idée. Je vous demande de soutenir l'amendement Jean Martin.

F Georges CHAROTTON

Je soutiens l'amendement présenté par Jean Martin. J'ai eu la chance de faire partie d'une commission dite de l'Avenir qui était une commission professionnelle à la SIA. Cette commission a permis, parce qu'elle était complètement indépendante, de pouvoir modifier des pensées qui étaient séculaires, qui étaient ancrées dans les idées, que personne ne voulait jamais changer. Il faut avoir la sagesse aujourd'hui d'admettre que pour gouverner, comme on le dit, il faut prévoir. Et on est confronté, que ce soit dans les législatifs comme dans les exécutifs — cantonaux et communaux — à une telle diversité de problèmes qu'il faudrait aborder, que c'est un surhomme, une surfemme qui peut se prononcer en connaissance de cause sur tous les sujets. Le Conseil de l'avenir est une méthode mise à disposition pour la réflexion de la prospective. Je vais vous dire quelque chose. On a cité tout à l'heure dans les droits de cité, au fond, les choses qui se passent dans d'autres pays, chez d'autres gens. Je crois qu'aujourd'hui c'est le moment de l'entendre: un sage assis voit plus loin qu'un jeune debout. [brouhaha]

F Pascal DESSAUGES

Le groupe Renouveau Centre (UDC) dans sa grande majorité est opposé à l'inscription dans la future Constitution d'un Conseil de l'avenir. Nous sommes opposés à l'institution d'un quatrième pouvoir, ce qui semble être la volonté claire des propositions du constituant Gonthier. Les arguments développés par Monsieur le constituant Jean Martin ne nous ont pas convaincus non plus, leur acceptation instituant clairement l'idée de ce Conseil, bien qu'avec des attributions moins contraignantes. Nous partons de l'idée qu'il existe dans ce Canton suffisamment de sages que l'on peut activer de cas en cas si besoin est, sans que ce principe ne soit obligatoirement inscrit dans la Constitution. De ce fait, le groupe Renouveau Centre soutiendra la proposition de minorité Conod visant à la suppression pure et simple de ce Conseil de l'avenir et je vous invite à ce stade à faire de même.

F Nicolas MOREL

J'essaierai d'être bref. J'aimerais intervenir sur deux des amendements. Le premier, l'amendement proposé par notre collègue Bernard Martin. Je le trouve personnellement beaucoup trop minimaliste. M. Martin, en fait, propose que finalement ce soit les autorités déjà instituées qui fassent de la prospective. Je crois que tout le monde sait ici que ça n'est le plus souvent pas possible. Les autorités instituées sont surchargées, font du travail au jour le jour, et il faut effectivement que ce soit un organisme séparé qui ait le temps — et je crois que ça a été dit suffisamment ici — de réfléchir calmement et de produire vraiment un travail utile. Bien entendu, c'est sans aucune mauvaise intention à l’égard des autorités. C'est clair qu'elles ne peuvent simplement pas arriver à remplir cette tâche de prospective de façon entièrement satisfaisante. Le deuxième amendement sur lequel j'ai quelques réticences, c'est le second amendement de M. Gonthier. Je pourrais soutenir le premier amendement, que je trouve tout à fait intéressant, par contre le second amendement me semble assez dangereux. Effectivement, le danger avec l'idée qu'on a d'un Conseil de l'avenir qui a une possibilité d'intervention politique… Ah? J'apprends qu'il le retire, donc je vais m'abstenir d'intervenir plus longuement. [applaudissements]

F Yvette JAGGI

Merci. J'ai été inattentive. Qu'est-ce qui est retiré? Le second amendement Gonthier est retiré. La liste des orateurs est close et nous sommes à cinq minutes de la fin de notre séance, selon le programme. Il y a, à partir de là, deux possibilités: ou nous nous donnons le temps, d'ici la prochaine séance, de réfléchir à l'avenir de ce Conseil [brouhaha] ou vous admettez de prolonger la séance du temps nécessaire pour faire les votations. Je vois que vous êtes disposés à faire quelques minutes supplémentaires pour terminer l'examen de cet article 2.3.28, «Conseil de l'avenir». Ça ira d'autant plus vite que vous serez plus silencieux, Mesdames et Messieurs. Je constate que nous sommes face à une série d'amendements à l'article proposé par la commission, face à une proposition de minorité qui demande la suppression pure et simple. Tout à fait naturellement, nous allons donc épurer l'article 2.3.28, puis in fine lui opposer la proposition de minorité Conod tendant à la suppression de cet article. Tout d'abord, nous nous prononçons sur l'amendement Jean Martin, modification de l'alinéa 1 et suppression des alinéas 2 et 3, enfin… La version est celle qui est sur votre écran et comme aujourd'hui le multimédia le veut, c'est celle qui l'emporte. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui adoptez l'amendement Jean Martin dans la version actuellement projetée, le manifestent en levant la main. Merci. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 70 voix contre 40, vous avez adopté l'amendement Martin qui comprend dans la formule que vous avez votée l'amendement Morel Nicolas, on est bien d'accord, sur lequel nous n'avons donc plus à nous prononcer. Amendement Martin accepté par 70 voix contre 40.

F Yvette JAGGI

Maintenant est soumis à votre attention l'amendement Nordmann, toujours se rapportant, bien sûr, à la version originale de la commission, qui biffe la dernière phrase — que d'ailleurs M. Martin n'avait pas reprise non plus — mais qui ajoute la notion d'intercantonalité. C'est donc sur cette question de l'appartenance éventuelle du Conseil de l'avenir à plusieurs cantons que nous nous prononçons maintenant. Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui sont favorables à cet amendement Nordmann et à cette intercantonalité, le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 68 voix contre 36, vous avez adopté l'ajout «Le Conseil de l'avenir peut être commun à plusieurs cantons». Amendement Nordmann adopté par 68 voix contre 36.

F Yvette JAGGI

Nous passons maintenant au vote sur l'amendement Gonthier subsistant. C'est un ajout qui comporte en tout et pour tout: «Il» — le Conseil de l'avenir — «établit lui-même son plan de travail, et dispose d'un budget propre». Celles et ceux, Mesdames et Messieurs les constituants, qui approuvent cette adjonction le manifestent en levant la main. Avis contraires? Mesdames et Messieurs les constituants, par 69 voix contre 25, vous avez refusé l'amendement Gonthier. Amendement Gonthier refusé par 69 voix contre 25.

F Yvette JAGGI

Notre secrétaire est en train de faire la synthèse des trois amendements que vous avez acceptés, à savoir Jean Martin et Nicolas Morel qui est subsumé dans Jean Martin, et Nordmann, qui donne la version issue de nos débats. Nous devons encore nous prononcer, effectivement, sur l'amendement Bernard Martin. Le texte proposé par M. Bernard Martin est opposé au texte issu de nos débats jusqu'ici. Puis celui qui l'emportera sera opposé à la proposition de la commission, puis la proposition de la commission à… Non, non. D'abord, Martin Bernard contre Martin Jean et suivants. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui préfèrent la version courte de M. Bernard Martin, le manifestent en levant la main. Celles et ceux qui préfèrent la version qui apparaît maintenant sur l'écran, issue de la proposition Martin Jean et suivants? Mesdames et Messieurs les constituants, par 65 voix contre 62, vous avez donné votre préférence à la version courte de l'amendement Bernard Martin. [brouhaha] Version courte de l’amendement Bernard Martin adopté par 65 voix contre 62.

F Yvette JAGGI

Attendez, ce n'est pas terminé, pas de triomphe prématuré! Cette version est maintenant opposée à celle de la commission et celle qui l'emporte sera opposée à «biffer le tout», minorité Conod. Celles et ceux parmi vous, Mesdames et Messieurs les constituants, qui préfèrent la version courte, jusqu'ici amendement Bernard Martin, le manifestent en levant la main. Merci. Avis contraires, c'est-à-dire version de la commission? Mesdames et Messieurs les constituants, par 69 voix contre 54, vous avez maintenu votre option, c'est-à-dire la version courte de l'amendement anciennement Martin Bernard. Maintenant cette version… Adoption de la version courte de l’amendement anciennement Martin Bernard confirmée par 69 voix contre 59.

F Yvette JAGGI

Alors, Mesdames et Messieurs les constituants, l'avenir se prépare à coups de théâtre et M. Conod retire sa proposition de minorité, suppression de l'article, mais il va un peu vite en besogne puisque, dans l'intervalle, M. Nicolas Morel demande l'appel nominal. [brouhaha]

F Nicolas MOREL

Effectivement, je pense que c'est un choix important que nous devons faire quant à l'avenir de notre Canton et je vous demande, pour ce vote, que vous puissiez vous déterminer par un appel nominal. Si nécessaire, on pourrait très bien reporter le vote à [brouhaha] la séance prochaine, mais de toute façon, je vous demande un appel nominal.

F Yvette JAGGI

Encore un peu de patience, la parole est à M. Gonthier.

F Alain GONTHIER

Considérant qu'il vaut mieux rien du tout qu'un faire-semblant et qu'un alibi, je reprends à mon compte la proposition Conod.

F Yvette JAGGI

Je crains qu'il nous soit difficile d'arriver au bout. Je reprends les choses dans l'ordre et je demande s'il y a dans l'Assemblée vingt personnes qui approuvent l'idée d'une votation à l'appel nominal. Scrutateurs, s'il vous plaît! Silence, s'il vous plaît! Par 23 voix, vous avez décidé un vote à l'appel nominal. S'il vous plaît, deux secondes! Cette votation à l'appel nominal aura lieu la prochaine fois, bien. [brouhaha] Mesdames et Messieurs les constituants, puisque vous vous êtes voté un crédit temporel supplémentaire, nous passons aux votations à l'appel nominal. Mesdames et Messieurs les constituants, votent oui ceux qui préfèrent la version courte, anciennement Bernard Martin. Votent non ceux qui préfèrent la version de la commission. [brouhaha] Une votation nominale reprend la dernière qui a eu lieu avant que la demande d'une votation à l'appel nominal a lieu, c'est donc bien celle à la suite de laquelle… Alors même si les scrutateurs n'ont pas à compter une votation à l'appel nominal, même si certains d'entre vous partiront après avoir dit oui ou non ou s'être abstenus, pour la dignité des débats, je vous prie de reprendre place, non pas dans les escaliers, mais quelque part dans les rangs. Et je vous signale qu'à l'issue de la votation finale, il y a encore la votation sur l'ensemble de l'article.

Conseil de l'avenir

Appel nominal

Oui égale version courte, qui va être affichée, et non égale projet de la commission.

C'est clair?

F Francine CRETTAZ

Ont voté oui:

Mmes et MM. Amstein Claudine, Athanasiadès Jean, Bavaud Adrien, Berney Michel, Bielman Anne, Blanc Eric, Blanc Marcel, Bory Marc-André, Bory-Weber Dominique, Bovet Daniel, Bovet Fred-Henri, Bovy Samuel, Braissant Rénald François, Bron Jacques-Henri, Buffat Michel Louis, Bühlmann Willy, Burnet Olivier, Colelough Philippe, Conod Philippe, Cornu Claire-Lise, Cornu Pierre-Alain, Cossy Samuel-Henri, Cuendet Maria-Chrystina, de Haller Jean-Claude, de Luze Charles-Henri, Dépraz Alex, Desmeules Michel, Dessauges Pascal, Dufour Etienne, Fague Sébastien, Favre-Chabloz Raymonde, Freymond-Bouquet Monique, Garelli Stéphane, Girod-Baumgartner Christine, Glauser Alice, Gonvers Alice, Grin Nicole, Gross Nicole, Guignard Françoise, Haldy Jacques, Henchoz Pierre, Jaeger Odile, Jordan Andreane, Jufer Nicole, Kaeser Danièle, Kulling Jean-Pierre, Labouchère Catherine, Lyon Anne-Catherine, Mages Roland, Maillefer Denis-Olivier, Marion Gilbert, Martin Bernard, Oguey Annie, Ormond Anne, Pellaton Berthold, Perdrix René, Pernet Jacques, Pittet François, Pradervand Jean-Claude, Reymond Antoine, Rodel Marilyne, Ruey-Ray Elisabeth, Schwab Claude, Vincent Martial, Voutaz-Berney Eveline, Wehrli Laurent (67).

Ont voté non:

Mmes et MM. Aubert Josiane, Baehler Bech Anne, Benjamin Samy, Boillat Jean-Pierre, Bolinger Anne-Marie, Bouvier Denis, Bovon-Dumoulin Martine, Brélaz Daniel, Buhlmann Gérard, Burnier-Pelet Thérèse, Burri Marcel, Carnevale Eliane, Charotton Georges, Chatelain André, Cohen-Dumani Marcel, Crisinel François, Cruchon Raoul, Delay Elisabeth, Desarzens Laurent, De souza-Kohlbrenner Regula, Dufour Denyse, Farron Pierre, Galeazzi Pierre, Goël Yves, Gonthier Alain, Gorgé Marcel, Goy-Seydoux Louis, Haefliger Sylviane, Hermanjat Pierre, Humair Louis, Jemelin Mireille, Jomini Viviane, Keshavjee Shafique, Léchaire Jean-Michel, Lehmann Pierre, Le Roy Jean, Linder Sandra, Martin Jean, Martin Laurence, Martin Marie-Hélène, Morel Nicolas, Moret Isabelle, Nicod François, Nordmann Philippe, Ostermann Roland, Perrin Jeanne-Marie, Pillonel Cédric, Rapaz Olivier, Recordon Olivier, Renaud Dominique, Richard Claire, Roulet Catherine, Salamin Michel Lauréane, Schneiter Robert, Vallotton Jacques Christian, Volluz Françoise, Weill-Lévy Anne, Winteregg Michel, Zwahlen Jacques (59).

Se sont abstenus:

Mmes et MM. Chapuis Allegra, Luisier Christelle, Martin Marie-Antoinette, Saugy-Anhorn Nathalie (4).

F Yvette JAGGI

Mesdames et Messieurs les constituants, par un score extrêmement analogue à celui de tout à l'heure, par 67 Voix contre 59, vous avez préféré la version courte à la version de la commission.

Version courte adoptée à l’appel nominal par 67 voix contre 59

F Yvette JAGGI

M. Conod, que faites-vous de votre…? M. Conod retire son amendement – «biffer» —que tout à l'heure M. Gonthier voulait reprendre, que M. Gonthier a repris. Nous votons donc maintenant sur la version courte contre «suppression». En fait c'est le vote sur l'ensemble de l'article, ça revient strictement au même. Celles et ceux… Je propose que le franglais soit reporté à après la votation et que pour le temps de cette votation nous affichions son objet. [rires] Mesdames et Messieurs les constituants, vote sur l'ensemble. Celles et ceux qui parmi vous approuvent l'article 2.3.28 qui s'intitule encore «Conseil de l'avenir» [rires] le manifestent en levant la main. Silence, s'il vous plaît! Avis contraires, c'est-à-dire «biffer»? Mesdames et Messieurs les constituants, encore quelques secondes d'attention, d'abord pour prendre connaissance du dernier vote d'aujourd'hui. Par 63 NON contre 45 OUI, vous avez biffé l'article 2.3.28.

Article 2.3.28 —Conseil de l’avenir
(Par 63 NON contre 45 OUI)
Suppression de l’article 2.3.28

Mesdames et Messieurs les constituants, je puis lever la séance, en vous donnant rendez-vous la prochaine fois le 15 décembre au Grand Conseil. Merci.

Fin de la séance à 18 heures. 

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Enregistrement et transcirption Intercongress Genève


Mise en page Dominique Renaud


A vu  bu001201.htm   27.10.2000 Révision : 27 janvier 2003

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